7) Nocturne

Le major Sheppard faisait l'amour. Ses lèvres parcouraient sensuellement la peau douce sous la sienne en même temps qu'il effectuait des mouvements de va-et-vient de plus en plus rapides au fur et à mesure qu'il sentait la venue imminente de l'orgasme. Puis il se tendit brusquement, arqua les reins et éjacula dans un cri rauque.

Il ouvrit les yeux et prit immédiatement contact avec la réalité.

Nom de Dieu de nom de Dieu, que venait-il de lui arriver ? Il s'assit sur le lit en sueur et profondément troublé.

Il venait de rêver qu'il baisait McKay.

Il porta la main à son sexe poisseux. McKay. Un homme. Et il y avait pris du plaisir. Suffisamment en tout cas pour avoir joui et éjaculé dans son sommeil.

« J'ai rêvé que je baisais avec McKay ». Sa propre voix le fit sursauter. Sans s'en rendre compte il avait parlé tout haut.

-Bon, voyons ça. Ok ? J'ai rêvé que je le baisais mais cela ne veut absolument rien dire. Il employait délibérément le terme « Baiser ». Il ne voulait pas penser « Faire l'amour » parce que cela impliquait encore autre chose. Il repensa brusquement à sa conversation avec le docteur Weir. Mais oui, voilà, c'était ça ! Qu'avait-elle voulu insinuer ? Que lui, John Sheppard avait un penchant pour le scientifique ? C'était grotesque. Mais en tout cas cela l'avait suffisamment troublé pour qu'il en fasse un rêve érotique. Il était fatigué aussi. Donc vulnérable. Voilà tout. Il était sous tension. Lui aussi avait dû faire face à la colère de ses hommes après les événements de PLN991. Personne n'avait compris comment on n'en était arrivé là. Même si les militaires n'étaient pas des enfants de chœur et en avaient vu d'autres, un sentiment de révolte et d'impuissance était né face à cet ennemi si particulier qu'étaient les wraith. La mort de Jenkins et la disparition du lieutenant avaient bouleversé ses hommes. Et lui aussi.

Il se rassura : McKay était son ami. Il tenait à lui et c'était normal. Et s'il avait fondu un plomb sur PLN991, c'était dû à une pulsion de colère et de rage face à la lâcheté de Kavannaugh qui avait mis en péril son meilleur ami.

Rien d'autre.

Malgré tout le malaise subsistait. Il jeta un coup d'œil à sa montre. Bientôt ce serait l'aube, ce n'était même plus la peine d'essayer de se rendormir. De toute façon, il doutait d'y arriver et puis les rêves, ça suffisait pour cette nuit !

Il prit la direction de la salle de bain et se glissa sous la douche.

oooooooooo

Rodney McKay, plongé dans un demi sommeil sentit confusément une présence près de son lit et ouvrit lentement les yeux. L'infirmerie était silencieuse, troublée seulement par le bip-bip du moniteur cardiaque. Quelqu'un venait de se pencher sur lui. Il reconnu aussitôt les yeux vert noisettes. Un regard interrogateur. Il fronça les sourcils. Que lui demandait le major ? Il ne comprenait pas. Puis la silhouette disparut subitement. Le scientifique se dit qu'il était en train de rêver et replongea dans le sommeil.

Oooooooooo

Le major Sheppard observa le cœur serré les derniers préparatifs pour les obsèques qui auraient lieu dans quelques heures, en fin de matinée.

Le sergent Jenkins aurait droit aux honneurs militaires bien sur. Et le lieutenant pris dans le rayon du dart aussi. Il devait être considéré comme mort. Il aurait été inutile et cruel d'entretenir l'espoir auprès de ses amis en niant la réalité.

Idem pour les scientifiques disparus. Personne ne se voilerait la face.

La cérémonie rassemblerait tout le monde. Civils ou militaires, tous étaient concernés par le drame. Elisabeth, prononcerait un discours et rappellerait à tous qui étaient ces hommes et ces femmes décédés, elle dirait quelques mots sur leurs vies, leurs qualités. Ce qu'elle aurait pu glaner en interrogeant les amis les plus proches et en consultant les dossiers.

Puis quand tout serait terminé, ils seraient incinérés.

Et chacun vaquerait de nouveau à ses occupations, le cœur un peu plus lourd, c'est tout.

Il n'y aurait pas de cérémonie religieuse. La religion ne semblait pas avoir sa place dans la cité. Les allusions à un quelconque culte étaient rares. Chacun gardait ses croyances pour soi et c'était bien ainsi.

-John ?

Le major se retourna. Le docteur Weir était là, les yeux encore ensommeillés.

-Vous êtes bien matinale Elisabeth.

-Je n'arrivais pas à dormir alors je suis venue voir si les préparatifs de la cérémonie se déroulaient bien.

Ses yeux firent le tour de la salle claire et spacieuse qui serait tout à l'heure noire de monde.

-Vous êtes sûre que ça va aller Elisabeth ? Si vous avez besoin de quoi que ce soit, je…

-Ca va aller, John. Et vous ? Comment vous sentez-vous ?

-Ca va. Ecoutez, Elisabeth, pour hier je voulais vous dire que je regrette de vous avoir parlé comme je l'ai fait et…

-Ce n'est rien, John, nous étions sur les nerfs tous les deux. Je m'excuse moi-même de vous avoir tenu des propos désobligeants. Mais je n'irais pas jusqu'à vous dire que je comprends votre attitude envers le docteur Kavannaugh.

-Je sais Elisabeth et je vous remercie de votre franchise.

-Alors amis de nouveau ?

-Absolument.

Elisabeth sourit :

-Alors si nous allions discuter devant une tasse de café avant d'aller rendre visite à Rodney ?

-Avec plaisir Elisabeth !