Fic écrite dans le cadre du Secret Santa du discord "FIC GOT".
Notre Cabane au Canada :
Par la cheminée d'un charmant chalet en bois, dans les Montagnes Rocheuses, au cœur de l'hiver canadien, par une température de moins quarante degrés, une fumée s'éleva. Quelqu'un était en train de refaire du feu par cette belle matinée ensoleillée qui faisait briller les quelques mètres de neige s'accumulant dans les bois, y compris sur la route, coupant toute tentative de se rendre en ville, ou de fuir ce paysage croquignolesque. Croquignolesque mais éloigné de tout, perdu au milieu de nulle part, et un peu inquiétant…
La seule chose pour laquelle s'était inquiété Jaime en se réveillant, c'est qu'on se les pelait dans ce chalet quand le feu était éteint. Il enfila une robe de chambre et descendit dans le salon rallumer le feu. Il ne fut satisfait que quand les flammes se tordirent sur de belles bûches, emplissant l'habitat d'une douce chaleur. Son frère et sa sœur n'allaient pas tarder à se réveiller, et ils n'auraient pas froid en quittant le lit commun.
Il se servit un lait de poule, avec seulement un filet de rhum au fond, et s'assied dans le canapé en cuir recouvert de plaids aux motifs à carreaux chaleureux. Il attendit en contemplant la neige tombant par la fenêtre, vit un chevreuil passer, écouta le feu crépiter dans le silence, et regarda les cadeaux sous le sapin en se demandant ce qu'il allait avoir.
Tyrion Cersei et lui s'étaient promis de ne se faire que des cadeaux de principe. Pas de folies. La folie avait été de prendre des vacances amplement méritées loin de tout, seulement tous les trois.
Sa sœur arriva la première dans le salon. Elle portait un pyjama en pilou-pilou avec une élégance surnaturelle, ses boucles blondes toutes emmêlées de leurs ébats de la veille. Jaime la trouva comme à son habitude sublime, dans la lumière du matin. Elle lui sourit en s'étirant, puis se servit aussi un verre de lait de poule, avec un copieux niveau de rhum. Elle vint se lover près de lui, et il entoura ses épaules de son bras, lui déposant un baiser sur le front.
-Bien dormi mon amour ?
-Mieux que jamais.
Il n'eurent pas le loisir d'échanger plus avant car Tyrion avait suivi sa sœur, et arriva, drapé dans sa robe de chambre, se servit un lait de poule avec encore plus de rhum que Cersei, et s'assit près d'elle. Elle déposa ses pieds nus sur ses genoux, et il les recouvrit d'un plaid.
-Pressés d'ouvrir vos cadeaux ? demanda le nain.
Alors que son frère et sa sœur allaient répondre, un brouhaha sans nom se fit entendre dans la cheminée, comme si on avait jeté quelque chose de lourd et volumineux dedans, puis un cri de douleur parfaitement humain se fit entendre, et enfin, le Père Noël… La mère Noël… En fait, non : une personne lambda, pas du tout habillée en rouge, tomba dans le feu et en sortit en hurlant, répandant des braises et des bouts de bois enflammés sur le tapis moelleux du salon. Aussitôt Jaime se leva pour étouffer le début de risque d'incendie avec une couverture, tandis que Tyrion et Cersei regardaient interloqués la personne qui était descendue par la cheminée.
-Je ne m'imaginais pas le Père Noël comme ça… murmura Tyrion en finissant son lait de poule.
-Je ne suis pas le Père Noël, abruti ! s'exclama la personne, de type féminin et énervé.
-Tu ne parle pas à mon petit frère comme ça ! s'exclama Cersei en sautant sur ses pieds et en saisissant le tisonnier, le pointant sur la femme.
-Est-ce qu'on est tout de suite obligés de tomber dans la violence ? demanda l'inconnue en soupirant.
-Mais je vous connais, non ? demanda Jaime, un plaid un peu brûlé à la main.
-Pas du tout ! Non non !
-Votre tête me dit quelque chose…
-J'ai un visage très très commun…
-Amie de Jaime où pas, d'où venez-vous, bon sang ? demanda Tyrion. Nous sommes venus nous enterrer ici pour avoir la paix !
-Ouais bah pas si vous faites vos laits de poule au rhum.
-Pardon ?
-Vous n'avez jamais essayé de les faire au Cognac ?
-C'est à dire que… traditionnellement, ça se fait avec du rhum, ou du whisky….
-Et bien c'est pour ça que je suis là ! s'exclama la femme en sortant une bouteille de cognac de première catégorie. Vous allez me faire le plaisir de vous bourrer la gueule avec quelque chose de correct !
-C'est du rhum à cent dollars la bouteille, répliqua Cersei, je trouve qu'il est plus que correct.
-M'en fous. Passez-moi la bouteille.
Cersei, toujours tisonnier à la main, passa la bouteille de rhum à l'inconnue qui la déboucha, et se mit en devoir de la boire… en plusieurs minutes… mais cul sec. Elle la laissa tomber sur le tapis où elle atterrit sans se briser, puis, elle vacilla, se dirigea vers Tyrion et lui remit la bouteille de cognac, et tituba vers la porte d'entrée.
-Il fait très froid dehors… Vous n'êtes pas équipée… Vous allez mourir si vous sortez ! la prévint Jaime en courant la rattraper.
-M'en fous !
La porte claqua sur le froid abyssal et les trois Lannister frissonnèrent en voyant l'inconnue s'enfoncer dans la neige en T-shirt et pantalon classique, bravant le froid sans sembler rien sentir. Puis, ils oublièrent l'incident et se refirent trois laits de poule, cette fois-ci au très bon cognac de Charente.
-C'est vrai que c'est meilleur, concéda Tyrion.
-J'aime bien aussi. C'est plus relevé, plus corsé, remarqua Cersei.
Jaime fit tourner son lait de poule dans son verre et haussa les épaules : pour lui, rhum ou cognac, tout se valait.
-Qui nous a dit d'essayer avec du cognac, déjà ?
-Je ne me rappelle plus… murmura Cersei, ses magnifique émeraudes fixant les morceaux du tapis brûlé en essayant de se rappeler quelque chose qui lui échappait.
-Probablement un collaborateur français… dit Tyrion, en faisant pourtant la moue car ça ne lui revenait pas plus qu'à sa sœur.
-Et si on ouvrait nos cadeaux ?
-Avant le petit déjeuner ?
-Il me semble qu'on est déjà plus ou moins en train de petit-déjeuner…
-Pas faux…
Les trois blonds se rendirent au pied du sapin, et Jaime et Tyrion déballèrent leurs cadeaux. Cersei leur avait tricoté de ses mains deux immondes pulls de Noël qu'il s'empressèrent d'enfiler, l'un avec une sorte de renne très mal fait, pour Tyrion, et l'autre un sapin penché avec des boules pas très rondes, pour Jaime. Ils s'esclaffèrent en se faisant des compliments sur leurs tenues respectives et en remerciant leur sœur. Les cadeaux qu'ils s'étaient fait entre eux n'étaient pas aussi charmants mais Jaime grimaça au crochet de pirate en plastique ce qui fit pouffer son frère et sa sœur. Cersei était assise sur ses jambes repliées sous elle, souriant, mais d'un air tendu et crispé.
-Je sais qu'on s'était dit pas de gros cadeaux, mais… vous ne m'offrez rien ?
Pendant ce temps, l'auteure errait dans la forêt canadienne. Ce petit chalet était vraiment situé au milieu de nulle part, et les trois mètres de neige recouvrant la route n'aidaient pas à se repérer. Les Montagnes Rocheuse la dominaient de toute leur hauteur irréelle, et le blanc manteau de la neige recouvrait presque tout ce qui se trouvait dans son champ de vision. Il faisait moins quarante, elle venait de se descendre une bouteille de rhum quasi entière, elle était en T-shirt et pantalon : elle était foutue. Qu'est-ce qui lui avait pris d'aller voir les Lannister pour leur vendre du cognac ? Pourquoi ne les avait-elle pas laisser boire du lait de poule au rhum ? Quelle était son horrible obsession pour le lait de poule, et pourquoi n'avait-elle pas acheté de quoi en faire alors que… Noël n'était pas si loin ? Pourquoi avait-elle accepté de participer au Secret Santa du discord ? Pourquoi le sort s'acharnait sur elle de cette manière ? Pourquoi brisait-elle toujours le quatrième mur au risque de se faire battre, menacer, tuer, violer, brûler, étrangler, ou simplement insulter ? Pourquoi elle ne pouvait tout simplement pas boire "le meilleur chocolat chaud du monde" (elle en doutait fortement, celui-ci se trouvait à Moscou au café Pouchkine) avec Almayen ? Ou bien s'entendre avec ses personnages préférés ? Ou juste réussir à écrire sur eux sans se mettre dans des états d'ébriété terrible et de mort imminente. Elle cligna des yeux : la neige était devenue noire. Tout était devenu noir. Elle ne se sentit pas tomber.
Laissons l'auteure mourir d'hypothermie dans la neige, et revenons au chalet où Cersei regardait ses frères d'un œil accusateur et perplexe.
-Tu nous as nous, comme cadeaux ! s'exclama Tyrion en écartant les bras, tandis que Jaime roula sur la moquette pour essayer de voler un baiser à leur sœur qui l'évita avec un regard réprobateur et un sourcil haussé.
Elle soupira. Ce n'était pas dans leurs habitudes. Ils trouvaient toujours le moyen de lui faire plaisir d'une façon ou d'une autre… Peut-être que le temps avait réussi à gâcher la magie qui les liait ?
Mais elle retrouva le sourire quand elle vit Jaime et Tyrion se lancer des œillades, puis éclater de rire de concert.
-Vous me faites marcher ! les houspilla-t-elle. Bien sûr que vous avez un cadeau pour moi !
-Ô, douce sœur, il aurait eu du mal à tenir sous le sapin…
-A ce point ? Où est-il ?
-Suis-nous !
Les garçons entrainèrent Cersei jusque dans la cave du chalet. Ils passèrent les bouteilles de vin, et ouvrirent une deuxième porte. Derrière celle-ci, se tenait un spectacle pour le moins… incongru.
Enchainée au mur, se tenait une forme humaine. Jaime tourna le commutateur, et Cersei découvrit une jeune femme aux cheveux auburn sales, un bandeau noir noué sur les yeux, un baillon sur la bouche. Elle s'agita en les entendant, tournant sa tête vers eux et essayant de parler. Cersei la reconnut immédiatement malgré le bâillon et le bandeau : c'était Margaery Tyrell…
-Elle est toute à toi… déclara Tyrion avec sérieux.
-Et bien sûr si tu as besoin de nous, nous sommes tout à toi également…
Cersei avisa des instruments très attirants disposés sur un petit charriot.
-Vous avez fait ça pour moi… Voilà pourquoi cette idée de chalet perdu au Canada loué sous des faux noms ? Mais comment…
-Le comment n'est pas important. Par contre… tu te doutes bien qu'elle ne doit pas ressortir de cette forêt…
À ces mots, Margaery se mit à hurler de désespoir, ses espoirs de sauvetage brisés. Cersei sourit à pleines dents.
-Oh… faites-moi confiance… elle ne sortira pas…
