Chapitre quatre : La vérité
Comment tout cela avait commencé ? L'épisode du diable. Chez sa grand-mère. Yoh se remémora l'histoire. Il devait aller chez sa grand-mère pour qu'on lui présente sa future femme. Mais elle l'avait reçu avec froideur, lui parlant peu. Puis Yoh avait cherché à comprendre la raison de ce repliement sur elle-même. Cette fille était victime d'un pouvoir qu'elle ne contrôlait pas. Il avait voulu l'aider. Sans même savoir pourquoi. Il n'avait pas cherché l'honneur ou la reconnaissance de cette petite blonde, mais seulement, il voulait la voir heureuse. Ses yeux semblait empreint d'une infinie détresse. Il ne les avait croisé que furtivement, presque comme si elle avait eu peur de lui. Mais le garçon avait perçu cette détresse. Et il voulait la retirer des yeux de cette jeune fille. La seule chose qu'il voulait vraiment, c'était la voir sourire. Ne plus jamais voir les larmes couler sur les joues de celle qu'il aimait. C'était tout. Rien d'autre, à part rester près d'elle aussi longtemps que cela lui serait permis. Il refusait de voir son visage se tordre de douleur, il ne voulait pas que ses yeux se noient dans la détresse. Il voulait la voir briller, rayonner. Il voulait la voir heureuse. La jeune fille vivait avec sa grand-mère, mais replié sur elle-même, comme si elle avait peur de blesser les autres et d'être blessée à son tour. Il avait coupé les ponts avec la réalité. Il serait le premier à les rétablir. La première ficelle, la première corde la rattachant à cette réalité qu'elle voulait fuir, c'est lui qui la lancerait. Ce n'était pas possible autrement que comme ça. Sans savoir comment, il s'était retrouvé embarqué dans une histoire qui avait failli lui coûter la vie. Il y avait perdu un ami. Mais il avait gagné la sérénité. Le plaisir. Pour lui, voir la joie, le bonheur briller dans les yeux de la jolie itako suffisait à ensoleiller sa journée. Il l'aimait. Sans aucun doute.
Anna étira son dos devenu douloureux. Le doute l'étreignait toujours, mais elle commençait à y voir plus clair. Si elle avait cru aimer Hao, c'était tout simplement parce qu'il était une face caché de Yoh, une figure qu'elle ne connaissait, et qui prenait les trait de son jumeau. Et elle voulait connaître cette partie, comme toute les autres. Yoh était celui qu'elle aimait, pas l'ombre d'une incertitude. Le mur qu'elle avait construit autrefois pour la protéger des agressions du monde extérieur était si haut, si sombre, qu'elle avait cru y rester enfermée pour toujours, ne voyant plus le haut de ce qu'elle avait bâti. Il était si épais, qu'elle avait cru y mourir étouffée. Et rien ne pouvait la sortir de cette prison. Rien sauf lui. Il avait frappé le mur, l'appelant de toutes ses forces, frappant le mur pour le briser, malgré son épaisseur. Avait attendu, tout essayer pour la sauver. Mais elle était la seule en mesure de se sauver. Et elle n'en avait pas envie. Elle voulait en finir. Vite. Mais les coups avaient redoublé, refusant d'abandonner. Pourquoi ce garçon faisait il un tel boucan ? Il ne la connaissait pas et elle n'avait pas envie qu'il la connaisse. Pourquoi ne comprenait il même pas ça ? Puis une fissure était apparue dans le mur. Une phrase, un geste, avait suffit à ébranler la construction qu'elle croyait indestructible. Des mots. Pas de force brute, pas de violence. Mais de la compassion. Pure, et pas intéressée. Il voulait l'aider. Simplement. Sans savoir ce qu'il risquait. Et pour la première fois de sa vie, Anna avait senti des larmes couler sur ses joues. Pour la première fois, elle avait laissé les barrières tomber. Elle voulait que ce garçon l'aide. Elle l'aimait déjà, sans le connaître, juste pour ce trait de caractère. Il était gentil.
