Chapitre Dixième

Le Chevalier du Dragon

Ce jour là Atem était parti avec sa garde en visite auprès d'un des vassaux de son père. J'avais donc décidé – et rien ne s'était opposé à ce choix – de ne pas le suivre et de reporter mon attention sur mes recherches à propos du Chevalier du Dragon. Recherches qui j'avais légèrement (voire beaucoup) négligées ces derniers temps.

Je partais donc d'un pas vif vers le Grand Palais du Dragon. Mais, une fois de plus, celui-ci était complètement vide. Je m'arrêtais devant la statue d'or et d'ivoire. Elle semblait luire d'une aura bienveillante et triste à la fois. Cela ne m'aurait pas réellement surpris de voir des larmes couler le long de ses joues. Cette statue avait toutefois un effet apaisant que je ne pus qu'apprécier.

Mes pensées vagabondèrent, mélangeant tout ce que j'avais appris depuis mon arrivée dans ce pays. La mort d'Iranya, l'arrivée d'Astarté, la ressemblance entre la fausse apparence de Joesis et de Joey, Mayada le sosie de Maï, Stellane qui semblait si mystérieuse, les sentiments d'Atem pour elle, la curieuse relation entre le Pharaon et la Princesse, l'apparition soudaine et aléatoire des objets du Millénium ou encore la mystérieuse Chevalier du Dragon. Tant d'interrogations sans réponse. J'avais l'impression que plus je cherchais des explications, plus les questions se faisaient nombreuses.

Je fus coupé dans mes pensées par l'entrée de quelqu'un dans la pièce.

-Princesse Astarté ! m'exclamai-je pour moi-même, surpris de sa présence.

Elle sourit.

-Encore toi ? Je ne m'attendais pas à te voir ici. Tu n'es pas avec le Prince ?

Je restais sans voix. Comme si mon cerveau refusait d'assimiler les informations qui lui arrivaient.

-Vous êtes le Chevalier du Dragon, dis-je, mettant des mots sur ma pensées.

-En effet.

Elle m'avait répondu avec le calme qui la caractérisait et dont je ne l'avais jamais vu se défaire. J'avais toujours eu l'impression que les évènements gisaient sur elle sans jamais avoir du réel impact.

-Mais enfin, m'exclamai-je énervé par son comportement, pourquoi ne pas l'avoir dit ? Toute l'Egypte attend le retour du Chevalier entre ces murs !

-Je crois que tu ne te rends pas compte. Pour eux, j'ai tué la Princesse durant le Duel…

-Mais non, ça ne s'est pas passé comme ça, j'étais là, je l'ai bien vu !

-Si tu étais là, tu dois te souvenir qu'il y avait un dôme autour de nous et que par conséquent…

-… personne n'a vu ce qui s'était passé.

-Parfaitement. A leurs yeux, je suis donc coupable de la mort d'Iranya. Il n'y a que toi – qui ne peut pas le répéter – et moi qui avons vu la scène. Comment, dans ces conditions, me disculper ?

-Alors personne ne sait qui tu es.

-Le Pharaon le sait. Après le combat, nous nous sommes parlé et je lui ai raconté plus ou moins en détails ce qui s'était passé. J'ai fait passé ça pour un accident et me suis platement excusée. J'ai mis ma vie entre ses mains pour réparer mon forfait. Il aurait pu la prendre ce jour là, mais il a préféré obtenir de moi la promesse qu'un an plus tard je serais fiancée au Prince Atem. Je suis la seule héritière du royaume de Irshary – pour le plus grand malheur de mon père – donc grâce à ce mariage Egypte et Irshary ne ferons bientôt qu'un. Le Pharaon est quelqu'un d'avisé, et moi j'y ai vu mon intérêt. Non seulement je vais devenir la Reine du royaume le plus puissant du monde, mais ainsi il sera en mon pouvoir de retrouver le responsable de la mort d'Iranya… et le dénommé Seto pour qui j'ai un message.

Vous ne l'avez pas trouvé ?

Non, hélas, il semblerait qu'il est disparu juste après la mort de la princesse si bien que je n'ai pas pu lui délivrer l'ultime message d'Iranya.

Vous devriez tout dire à Atem ! m'exclamai-je. Il pourrait vous aider.

Elle secoua la tête tristement.

Je n'aurais jamais le courage de lui annoncer ça en face. Il n'a déjà pas une grande affection pour moi, mais s'il savait que je suis la femme a qui il voue une haine éternelle, imagine ce qui se passerait. Le Pharaon m'a pardonné de lui avoir prit sa fille, mais le Prince ne me pardonnera pas de lui avoir prit sa sœur. Et je le comprends. D'autant plus que je n'ai même pas été capable de réalisé ses dernières volontés. C'est pitoyable ! Je suis ici depuis des mois et malgré toutes mes recherches, je n'ai rien découvert ! Absolument rien !

Je peux vous aider, moi !

Elle sourit.

J'accepterai cette aide avec plaisir, mais c'est trop risqué. Je t'ai déjà dit que tes actes ne doivent pas influer sur le cours des choses ici, sans quoi tu risques de changer ton futur. Toutefois, je doute que cette petite discussion puisse changer gr chose, du moment que tu ne me révèle rien de crucial…

Princesse…

Elle leva la main pour m'arrêter.

Je t'en pris, appelle moi Astarté, pas besoin d'être protocolaire lorsqu'on est invisible, tu ne crois pas ?

Alors appelez moi…

Non, me coupa-t-elle, ne me dit pas ton nom, il vaut mieux que je l'ignore au cas ou nous nous rencontrions dans ton futur.

Je doutais que ce soit le cas mais je me disais qu'elle n'avait peut-être pas tort. Après tout, si Atem était dans mon espace-temps, pourquoi pas elle ?

Je t'appellerais Haïbel si tu veux bien.

Haïbel ?

Oui, c'est une contraction du mot ''Haï'' qui dans la langue de mes ancêtres signifie ami et du mot ''Abeloch'' qui dans cette même langue veut dire ombres.

Un ami des ombres ? Ca illustre bien la situation, ris-je. Appelez moi ainsi !

Elle sourit. Je la regardai, heureux de voir pour la première fois, son visage exprimer un sentiment qui semblait véritable. C'est alors qu'une question me brûla les lèvres.

Vous n'êtes pas triste ici, loin de votre pays, avec Atem qui… hum… comment dire ?... vous délaisse légèrement ?

Joli pléonasme. Non, je ne suis pas triste. De plus je fais mon devoir. Tu dois savoir que mon père n'est pas ce que l'on pourrait appelé un bon roi. C'est même un roi malveillant. Cette alliance avec l'Egypte est une chance pour mon peuple, tous leurs espoirs sont tournés vers moi, et je tiens à être digne de cette confiance. En outre, mon père n'a jamais été très délicat avec moi… hum… Enfin, c'est un plaisir de connaître le Pharaon, c'est un roi calme et avisé qui ne tranchera pas la tête de son épouse sous prétexte qu'elle lui a donné une fille et non un fils. Bref, c'est un souverain formidable. Et je suis convaincue qu'Atem en deviendra un à son tour lorsque son heure sera venue.

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Fin du Chapitre Dixième

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Chapitre suivant : ''Le Secret de Stellane'' : La lumière est enfin faites sur la jolie Stellane… et la vérité ne plait pas guère à Atem !