Bonjour à tous,

Chapitre flashback concernant l'année 1098 TA.

Je suis profondément désolée pour ce retard de deux semaines dans la publication de ce chapitre.

Vous êtes-vous déjà maudite d'avoir enlevé votre clé USB de votre ordi sans la déconnecter avant et en ayant le fichier de votre chapitre ouvert et non enregistré...? Oui? Non? Et bien moi OUI! Résultat, fichier avec des erreurs et impossible à rouvrir. Arrrrgggghhhh. Du coup, obligé de tout récrire. Quelle poisse!

Pour me faire pardonner je vous publie un très long chapitre (en fait deux chapitre en un), qui j'espère sera moins chiant à lire que mes précédents.

L'action et les dialogues comme dans la première partie de ma fic sont de retour.

Comme convenu, dans ce chapitre, un nouveau personnage fait son apparition. Il sera un ami précieux pour Azruphel. Beaucoup m'ont proposé Sauron mais personne n'a devine qui était le nouveau venu.

Bonne lecture.


Merci à Julindy, aliena wyvern et PaulinaDragona pour leur review.

Réponse à PaulinaDragona :

Et oui c'est une bonne question ça : pourquoi n'a-t-elle pas épousé un elfe? Peut être parce que aucun elfe n'a voulu d'elle (la pauvre...), Non, plus sérieusement, tu verras que dans la suite de mon histoire j'explique qu'elle ne supporte pas les Elfes mais qu'elle est presque forcée de vivre avec eux.

Avec Gandalf? 0.0 Euh... non plus...

Le nouvel arrivant, Sauron? Mais pourquoi tout le monde veut que ce soit Sauron...? Non désolée, mais Sauron est toujours en TdM. Le nouveau est un Elfe. Je te laisse découvrir qui dans ce chapitre.

Biz


Année 1098 du Troisième Age

Les tensions entre les royaumes divisés du Nord donnaient beaucoup de tracas à Amarthêl. Elle œuvrait sans relâche pour apaiser les discordes. L'avenir du Nord n'était pas radieux. Elle l'avait bien vu dans ses visions. Son but était de favoriser une cohésion entre l'Arthedain, le Rhudaur et le Cardolan, pour contrer la future menace d'Angmar.

L'époque n'était pas des plus réjouissantes, car son ancien pays, le Gondor, devait également lutter contre les Haradrim et elle voyageait régulièrement de l'Est vers l'Ouest.

En cette année 1098 du Troisième Age, Amarthêl était aux côtés de Mallor, troisième Roi d'Arthedain, lorsqu'elle eut une vision scélérate. Elle n'aimait pas la sensation qui entourait ce genre de vision. La plupart du temps elle recherchait d'elle-même les réponses dans l'avenir, ou bien ses rêves étaient prémonitoires. Mais lorsqu'une vision s'imposait à elle comme cela, l'événement était imminent, et nécessitait son intervention.

Ce fut donc sans plaisir qu'elle quitta l'Arthedain pour la côte septentrionale du Lindon.

Un mois et plus d'un millier de kilomètres plus tard, elle arriva à destination.

Sa mission était routinière car durant le dernier siècle, elle avait effectué la même chose cinq fois de suite. Mais cette fois elle se demandait pourquoi Ossë avait choisi de faire échouer le nouveau venu aussi loin des ports principaux du Lindon. Les Istari étaient pourtant tous arrivés à Forlond. Cela la rendit encore plus renfrognée, car elle perdait du temps qui pouvait être utilisé de meilleure façon si elle était restée à Fornost.

Le timing fut parfait. Sitôt elle passa les dernières dunes de sable que le nouveau venu mit pied sur la terre ferme. Elle n'avait pas recherché à pousser sa connaissance du voyageur et elle fut surprise de son apparence. Contrairement aux Maiar, celui-ci était un Elfe. La vision qu'il dégageait était presque irréelle. L'Elfe avait une longue chevelure blonde qui dansait derrière lui au gré des rafales de vent. Ses habits d'un blanc éclatant rehaussés par le clinquant de son armure dorée, ainsi que l'aura lumineuse qui l'auréolait, rendaient son image encore plus miraculeuse et féerique.

La région était totalement déserte et ce fut tout naturellement qu'il avança vers elle, étant donné qu'il n'y avait qu'elle et que dans sa main elle tenait les rênes d'une seconde monture libre. Plus il s'approchait et plus elle était impressionnée par sa démarche et sa carrure. Les Elfes du Troisième Age avaient perdu en taille comparés à leurs parents, et celui-ci égalait Círdan, qui était un de ceux qui ouvrirent les yeux à Cuiviénen. Cet Elfe avait tout d'une force de la nature, d'un guerrier intemporel que rien n'effraie.

« Pourquoi est-il ici ? Un Elfe quittant Valinor, cela ne s'était pas vu depuis des temps anciens, très lointains. Alors pourquoi… ? » se questionna-t-elle tout en le regardant marcher vers elle.

Le nouveau venu allait ouvrir la bouche pour parler, mais passé ce moment d'étonnement Amarthêl reprit son air hargneux et coupa court à son discours en lui lançant les guides du cheval.

- Nous avons beaucoup de route, alors pas de temps à perdre, grogna-t-elle sans un bonjour.

Et sans l'attendre, elle fit avancer sa propre monture en direction de Mithlond. Elle savait que son accueil n'était pas des plus chaleureux, mais elle n'était pas d'humeur. Et puis ce n'était pas son rôle, elle ne pouvait pas tout faire non plus. Comme c'était un Elfe, sa mission consistait à l'amener devant Círdan, c'est tout.

Le voyage se passa en silence, rythmé par les allures des chevaux. Amarthêl garda son capuchon tout du long, comme elle le faisait lorsqu'elle était en mission. Plusieurs fois le nouveau venu chercha à faire la conversation et malgré son langage soutenu et ses manières parfaites en terme de politesse, il ne reçut en réponse à ses questions que :

« Je ne suis que votre guide. Le Seigneur Círdan vous répondra »

Ponctué par les moments de pause obligatoires pour ménager les montures, le trajet dura une dizaine de jours en longeant la partie Nord des Montagnes Bleues. Arrivés à Mithlond, Amarthêl conduisit l'Elfe blond dans la grande salle d'audience et aussitôt s'éclipsa dans l'ombre des colonnes laissant seul l'invité.

Tous ses voyages ainsi que le stress psychique l'avaient épuisée. Malgré son envie de retourner au plus vite à Fornost, Amarthêl s'autorisa quelques jours de repos bien mérités. Il fallait qu'elle soit au mieux de sa forme pour faire le voyage de retour. De plus, l'hiver approchait et la route deviendrait plus dangereuse.

Les eaux saumâtres du large estuaire du fleuve Lhûn n'étaient pas aussi agréables que les embruns de la mer, mais la proximité de l'eau avait toujours eu un effet apaisant sur Amarthêl. D'ailleurs après deux journées entières passées à dormir pour récupérer de ses nuits blanches et de sa fatigue, elle n'hésita pas à aller nager dans l'estuaire. C'était une pratique que les Elfes ne comprenaient pas et elle avait son petit coin secret, à l'abri des regards. La sensation de l'eau sur son corps était des plus agréables et revitalisante, et la tiédeur de l'eau qui s'était réchauffée durant tout l'été contrastait avec le fond de l'air frais. A ce moment-là elle était bien et son moral de nouveau au beau fixe. Mais sur le chemin du retour vers ses appartements, elle fut interpelée par un serviteur de Círdan. Le Seigneur du Lindon l'avait convoqué.

Amarthêl retrouva l'Elfe barbu au chantier naval. Círdan avait voué son existence à la fabrication de navire depuis le jour où le premier oracle de l'époque bénie des Années des Arbres, lui annonça que le Maia Ossë attendait de lui qu'il construise des navires pour que les Elfes qui le voudront, puissent voyager de cette façon jusqu'à Aman. Vêtue d'une robe elfique aux tons clairs – comme elle avait l'habitude de l'être lorsqu'elle vivait au Lindon, en dehors de ses missions – et les cheveux encore humides, elle entama la discussion avec Círdan.

Sa bonne humeur n'avait pas duré très longtemps et la demande du charpentier vint assombrir son état d'esprit. Elle avait d'autres projets et devoir faire un détour par Fondcombe avant de retourner à Fornost ne l'enchantait guère. Mais Círdan avait su trouver les mots et devant lui elle se contenait, alors elle accepta de servir encore une fois de guide à l'Elfe nouvellement arrivé. Elle ne connaissait rien de lui et ne s'en portait pas plus mal.

Rageuse, elle retourna dans ses appartements et revêtit ses vêtements de voyage. Depuis quelque temps, elle avait des excès de colère qui ne lui ressemblaient pas. Elle boucla sa ceinture nerveusement et soupira fortement. Alors pour essayer de se calmer, elle alla sur le balcon de sa chambre et prit plusieurs grandes inspirations d'air frais en gardant les yeux clos. C'était sa façon à elle de se relaxer quand elle sentait que la pression montait.

Lorsqu'elle se sentit mieux, elle rouvrit les yeux et contempla le ciel bleu parsemé de nuages. Malgré la saison, le climat était toujours tempéré dans cette région. Le soleil déclinait vers l'horizon, ce qui indiquait aux serviteurs du palais de Círdan, le besoin d'allumer les torches et chandeliers pour la nuit. Elle observa leur ballet du haut de son balcon. Ils n'avaient rien à voir avec ces petites fourmis qui semblaient toujours courir, affairées à une tâche. Non, les Elfes étaient beaucoup plus modérés et cela se ressentait aussi dans leur mouvement. Elle avait toujours été surprise de voir à quel point les Elfes pouvaient être calmes, pondérés et retenus quel que soit la situation.

De ce moment de quiétude elle fut sortie par un éclat éblouissant. Au début elle cligna juste des yeux par réflexe, mais étant donné que ça ne passait, elle commença à être agacée. Elle bougea la tête, se décala sur le côté mais cela ne changea rien. Amarthêl chercha alors la source de ce désagrément.

Il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour la trouver.

Négligemment appuyé contre un arbre du parc en contre bas de son balcon, le fameux Elfe blond semblait la narguer en l'éblouissant avec le reflet d'un dernier rayon de soleil contre le métal de la coupe de vin qu'il tenait en main. Aussitôt elle se raidit car il pouvait la voir sans son capuchon et cela la dérangeait. Mais elle resta sur le balcon à le défier du regard. Sur le visage presque inexpressif du nouveau, elle réussit à déceler un petit rictus moqueur. En plus de l'agacer par le fait de lui donner du travail, il semblait vouloir l'empêcher de savourer son petit moment de tranquillité. Alors qu'elle fut sur le point de cesser ce jeu de regard, il lui fit un geste qui lui indiquait de descendre le rejoindre. Elle n'en avait pas vraiment envie, mais comme elle avait prévu de partir le lendemain matin tôt, elle se dit que c'était l'occasion pour eux d'avoir une discussion sur le prochain voyage.

Mais avant de le retrouver, elle prit soin de prendre son manteau et de se couvrir la tête, malgré le fait qu'il l'ait aperçu l'instant d'avant. Hors de question qu'il en voie plus, c'était un principe pour elle. Il y avait les missions d'un côté et sa vie privée de l'autre.

Amarthêl le rejoignit dans le parc. L'Elfe laissa sa coupe vide à un serviteur et comme à leur première rencontre, il s'apprêta à lui parler mais elle passa devant lui sans s'arrêter, le hélant de la suivre. Elle ne vit pas sa mince mimique déconcertée. Ils allèrent jusqu'aux écuries en silence.

- Si vous souhaitez aller à la Vallée d'Imladris, je vous y conduirai, lui dit-elle en s'arrêtant face à une stalle où un cheval mangeait paisiblement son foin.

- C'est effectivement ce que je souhaite, mais dans votre voix je sens que vous êtes contrariée de devoir m'y conduire, lui répondit-il d'un ton neutre.

- Oui cela me contrarie, vous avez raison. D'autres affaires me réclament au Nord et la saison est mal choisie pour voyager, reprit-elle autoritairement.

Le silence s'installa et seul le bruit du mâchonnement des chevaux se faisait entendre.

- Veuillez m'excuser, finit-elle par dire tout bas. J'ai tendance à m'emporter facilement ces derniers temps.

- Ce n'est rien. Nous avons tous le droit d'avoir des moments de doute et d'incertitude qui nous rendent peu à même à nous soucier des autres, expliqua-t-il toujours très calmement.

- Merci pour votre compréhension, mais vous n'avez pas à devoir subir mon comportement grossier, dit-elle en se retournant vers lui et en s'inclinant légèrement. Je vais tâcher de reprendre mon rôle de guide plus sérieusement et vous conduire les meilleurs conditions jusqu'à votre destination.

L'Elfe s'inclina également pour lui faire comprendre qu'il appréciait son geste. C'était la première fois qu'ils avaient une discussion aussi longue et une certaine tension s'effaça en même temps. Satisfaits l'un comme l'autre, elle continua de marcher vers le fond des écuries.

- Nous allons devoir partir dès demain et ne pas perdre plus de temps. L'hiver arrive à grands pas et plus nous attendrons plus le voyage sera périlleux, lui expliqua-t-elle en continuant de marcher. Nous allons également devoir prendre de nouveaux chevaux. Ceux que nous avions, méritent un repos prolongé.

Elle lui présenta sa future monture et continua de lui expliquer le déroulement du trajet entre le Lindon et Fondcombe. Il l'écouta religieusement, bien trop enchanté qu'enfin elle lui adresse la parole. Il avait été surpris de voir que quelqu'un l'avait attendu sur la plage lors de son arrivée. Mais ce qui l'avait le plus étonnée, fut le fait que ce soit une femme. Il n'avait rencontré que deux elleth aussi indépendantes que celle qui lui servait de guide. Il y avait eu la sœur de son ancien Roi, Aredhel, et une jeune Elfe au destin bien singulier. Il ne l'avait jamais côtoyé mais il se souviendrait toujours de son arrivée à Gondolin, la cité cachée. Aucun étranger n'avait réussi à entrer dans la cité avant elle. Mais le Roi de Gondolin, Turgon l'avait déjà rencontré dans le passé et elle ne subit pas la peine qui était prévu pour ceux qui connaissaient l'emplacement de la cité, à savoir la mort ou le séjour éternel à Gondolin. La particularité de cette personne était de pouvoir voir les événements futurs et de prévenir ceux qui en étaient concernés. Le Premier Age avait été une période très sombre et violente. Les Valar avaient accordé ce don à l'un d'entre eux pour les aider à surmonter les épreuves contre Melkor. Et depuis il ignorait si des Elfes dotaient de ce savoir étaient encore en Terre du Milieu. Círdan n'avait rien voulu lui dire au sujet de sa guide, mais il se doutait bien qu'elle était différente. Il le sentait. Depuis sa sortie des cavernes de Mandos, il avait une vision plus nette des choses qui l'entouraient et il en était de même pour les personnes. Son intuition lui disait très clairement que sous ce capuchon se cachait quelqu'un de bien plus important qu'il n'y paraissait.

- Si vous n'avez pas de question, je vais vous laissez, acheva-t-elle. Retrouvons nous avant l'aube ici-même. Nous prendrons un navire pour rejoindre l'autre rive du golf, puis nous entamerons notre voyage.

- Cela me convient parfaitement, lui répondit-il courtoisement.

- Bien ! Dans ce cas, je vous souhaite une agréable soirée.

Elle tourna les talons pour quitter les écuries, quand l'Elfe blond l'interpella juste avant qu'elle ne passe la porte.

- Je n'ai pas le plaisir de connaitre le nom de mon guide. Serait-il trop demandé que de vous le réclamer ? implora-t-il.

Elle se retourna de profil, un sourire enfin visible sur ses lèvres.

- Amarthêl est le nom que le Seigneur Círdan m'a donné. Vous pouvez m'appeler ainsi.

- Vous m'envoyez ravir, reprit-il en inclinant la tête, une main sur le cœur. Je me nomme Glorfindel.

- Enchantée, répondit-elle.

Puis elle passa la porte et disparut dans la nuit qui avait fini par tomber.

§

Le lendemain ils se retrouvèrent comme convenu. Amarthêl avait préparé les rations de voyage et les chevaux avant que Glorfindel ne la rejoigne. Parés pour affronter le froid de l'hiver naissant et les menaces de la route, ils traversèrent l'embouchure du fleuve et après un dernier regard vers la mer, ils prirent la direction de l'Est.

La première étape de leur périple vers Imladris était de traverser les Collines des Tours pour rejoindre la partie plus plane de la Grande Route de l'Est. De là, ils purent avancer grand train, profitant de la clémence du climat et du chaleureux accueil des habitants de l'Arthedain.

Durant le voyage, Amarthêl et Glorfindel échangèrent histoires et anecdotes. Elle lui raconta les mille dernières années d'histoire de la Terre du Milieu, mais resta vague sur son passé personnel. Glorfindel lui narra ses faits d'armes et les exploits des grands guerriers du Premier Age. Elle avait été troublée d'apprendre que cet Elfe avait déjà vécu une première vie. Elle savait que les Elfes avaient ce destin particulier de pouvoir ressusciter, mais jamais aucun d'entre-eux n'était revenu en Terre du Milieu.

L'arrivée des Istari et de ce Glorfindel aux exceptionnelles capacités aux combats, Amarthêl ne doutait plus de son pressentiment sur le funeste avenir du Royaume du Nord. Sinon pourquoi les Valar auraient choisi de les faire venir en Terre du Milieu.

Elle était assise près du feu de camp à chercher des réponses dans ses visions quand Glorfindel revint de son tour de surveillance des alentours. La jeune femme gardait constamment son capuchon sur sa tête mais elle ne le portait plus aussi bas et son visage était visible entièrement. L'Elfe constata qu'un masque d'inquiétude était réapparut sur le visage de sa guide, tel qu'il avait vu lors de leur premier trajet.

- Vous semblez soucieuse, mon amie, déclara Glorfindel.

- Je… je pensais juste à quelques affaires qui réclament mon attention, expliqua-t-elle sans entrer dans les détails. C'est pour cela que je repartirai aussitôt après vous avoir conduit à Fondcombe.

- Je comprends, dit-il en s'asseyant lui aussi au près du feu. Vous ne m'avez jamais parlé de vos activités, et je suppose que vous avez de bonnes raisons pour ne pas m'en faire part. Cela me chagrine de vous voir aussi troublée et si je peux vous apporter une aide quelle qu'elle soit, n'hésitez pas à me demander. Je vous suis redevable pour le temps que vous m'accordez à me guider sur ces terres qui me sont inconnues.

- Je tâcherai de m'en souvenir, répondit-elle avec un sourire presque forcé.

Les jours passèrent aussi rapidement que les kilomètres. La traversée de la partie Sud de l'Arthedain fut aisée. Mais lorsqu'ils traversèrent le Bois de Chet, les premières neiges arrivèrent. Ils virent halte dans le village d'Archet. Une dernière nuit au chaud et à l'abri avant d'entamer la dernière moitié du voyage.

- Nous allons entamer la partie la plus risquée, annonça Amarthêl à Glorfindel pendant leur dîner dans l'auberge du village.

- La zone frontalière entre les trois royaumes rivaux, c'est bien cela ?

- Oui, confirma-t-elle après avoir avalé sa bouchée de pain. Depuis le partage de l'Arnor, la possession de la tour de guet du Mont Venteux est disputée. Amon Sûl appartient à l'Arthedain mais le Roi du Cardolan convoite le Palantir qui se trouve dans la tour de garde.

Amarthêl reprit un morceau de viande puis, tout en mâchant, elle jeta un coup d'œil à leurs voisins de table pour vérifier qu'ils n'écoutaient pas leur conversation.

- Mais la menace la plus sérieuse vient du Rhudaur, reprit-elle en parlant plus bas. Je pressens de mauvaises choses de cette contrée. Contrairement à l'Arthedain et au Cardolan, le Rhudaur est pauvre. Ses terres sont désolées et stériles. Faire de mauvaises alliances tenterait n'importe quel Roi dans cette position.

Glorfindel acquiesça. Ils profitèrent de leur repas chaud, puis rejoignirent leur chambre respective. Ils n'auront pas l'occasion de retrouver un lit moelleux avant de nombreux jours.

Le lendemain, après avoir refait leur réserve de vivre, ils reprirent la route. La neige n'était pas encore très épaisse, mais de jour en jour ils se reprochaient des Monts Brumeux et du couloir venteux qui courait sur leur versant Est. Au vu de la météo et des possibles encombres sur leur chemin, Amarthêl prévoyait le double de temps qu'il leur avait été nécessaire pour faire la première moitié.

Au début, ils rencontrèrent des patrouilles du Cardolan et de l'Arthedain. Ils se firent arrêter à chaque fois, mais la présence de Glorfindel confirma leur explication sur le but de leur voyage. Les soldats n'eurent rien à redire sur le fait que ces cavaliers, à l'allure elfique, se rendaient à Fondcombe. Amarthêl prenait soin de regarder régulièrement dans ses visions pour s'assurer du bon déroulement de leur périple.

La région était désertée depuis que les confrontations entre les trois royaumes sévissaient. Les deux compères durent trouvaient des bivouacs protégés chaque nuit. Glorfindel supportait facilement les conditions climatiques. Amarthêl un peu moins, mais elle ne se plaignait jamais. Elle avait l'habitude de vivre à la dure. L'Elfe était tout de même prévenant à son égard. Mais dans son esprit, sa guide était une elleth. Il ne connaissait pas sa véritable nature et elle avait bien omit de lui dire la vérité. Durant ses missions, elle était couramment considérée comme une Elfe. Il fallait dire qu'une humaine de son âge était inconcevable pour le commun des mortels. C'était une des raisons pour laquelle elle gardait son capuchon rabattu. Elle n'aimait pas devoir s'expliquer.

Le matin du trente-deuxième jour, Amarthêl fut réveillée par un rêve prémonitoire. Sa vision ne la réjouit guère. Comme elle le redoutait, la traversée du Rhudaur allait se révéler houleuse, mais elle se garda d'en parler à Glorfindel.

Son manteau en peaux retournées avait durci durant la nuit et ses températures négatives. Elle étira difficilement ses jambes endolories puis se rapprocha des dernières braises présentes. Glorfindel, frais comme un gardon, s'occupait déjà de préparer les chevaux.

Il était midi au soleil, lorsqu'ils arrivèrent au Dernier Pont. Unique passage possible pour traverser la rivière Mitheithel. Outre ce détail, c'était également un poste frontière entre le Cardolan et le Rhudaur. Une garnison entière de l'armée cardolanaise était présente sur la rive Ouest de la rivière. Les voyageurs furent une nouvelle fois stoppés. La tension était palpable. Amarthêl et Glorfindel apprirent que la nuit même, des soldats du Rhudaur avaient tentés de passer le pont pour avancer dans les terres ennemies. Ils y avaient eu des pertes des deux côtés. Un gradé leur déconseilla vivement de passer la frontière.

- Les hommes du Rhudaur ne feront pas de distinction. Pour eux, toutes personnes étrangères est un ennemi. Je vous conseille vivement de passer par l'Eregion, leur renseigna le gradé.

- Nous vous remercions pour vos précieux conseils, mais nous allons continuer notre chemin, lui répondit aimablement Glorfindel.

- C'est vous qui voyez, si vous avez envie de risquer votre vie, acheva le soldat.

La voie sur le pont leur fut ouverte. De l'autre côté du cours d'eau, aucun signe de vie. Sur le pont, le bruit des sabots des chevaux était étouffé par la couche de neige. Par endroit, ils purent voir les traces des combats de la nuit. La blancheur de la neige était régulièrement tâchée de sang. A l'affut et alertes, Glorfindel et Amarthêl scrutaient les alentours. Le vent leur cinglait le visage et rendait pénible la progression des chevaux.

Durant deux bonnes heures, ils ne virent pas âmes qui vivent.

Ce fut au moment où le vent cessa qu'Amarthêl eut une impression de déjà vu. Une épaisse rangée d'arbres et buissons faisait barrière aux rafales. Droit devant eux un étroit chemin qui conduisait à travers un bosquet. Le même que dans son rêve. La même petite fermette délabrée sur la droite. La même sensation d'être épié. Tout se déroulait de la même façon. Elle ne pouvait continuer de se taire.

Et alors qu'elle ouvrit la bouche pour prévenir Glorfindel qui chevauchait devant elle, il était trop tard. Une flèche siffla dans l'air et vint se figer dans le flanc de son cheval. La monture d'Amarthêl se cabra puis tomba inerte sur le sol. La jeune femme cria sous le choc, sa jambe coincée sous le poids de son cheval.

Glorfindel réagit immédiatement. Il fit demi-tour, mais de part et d'autre du chemin sortirent des soldats qui vinrent l'attaquer. Il lui fut aisé de se débarrasser de ses trois assaillants. D'autres arrivèrent à la charge, alors l'Elfe sauta de son cheval pour se battre. Les ennemis l'empêchaient de porter secours à sa guide. Il jetait régulièrement un coup d'œil sur elle. Elle avait réussi à sortir son épée de son fourreau et tentait de tenir à distance les hommes qui l'agresser. Tant bien que mal, elle s'extirpa de son étau et tout en clopinant, elle combattit.

Les hommes du Rhudaur devaient être une bonne quinzaine. En temps normal, contre seulement deux adversaires pris par surprise, ces soldats auraient rapidement vaincu. Mais c'était sans compter sur l'exceptionnelle bravoure de Glorfindel. A lui seul, il tua les trois quart des ennemis. Amarthêl vint péniblement à bout de son quatrième homme.

L'Elfe acheva son dernier adversaire et se retourna vers la guide. Il fut soulagé de voir qu'elle aussi s'était débarrassée de ses assaillants. Il commença à marcher vers elle pour s'assurer de son état, lorsqu'il vit une flèche passer de part en part de son capuchon. Il tomba des nues. Un archer était toujours caché dans les buissons et avait attendu patiemment le moment opportun pour tirer. Glorfindel fondit sur lui en un éclair. L'homme n'offrit que de maigres résistances.

Après l'avoir sommairement achevé, Glorfindel retourna prestement vers Amarthêl. Il la trouva allongée sur le sol, du sang imbibant la neige autour de sa tête. Elle se tortillait tout en se maintenant la gorge. Il appliqua automatiquement ses mains sur la plaie sanglante de son cou. La flèche avait traversé la moitié droite de sa gorge et visiblement la jugulaire était atteinte. Mais elle semblait pouvoir respirer normalement, donc la trachée était saine. Néanmoins, elle souffrait terriblement et remuait nerveusement ses jambes.

- Amarthêl m'entendez-vous ?

Il n'eut pas de réponse mais elle s'agrippa à son bras. Il prit cela pour une confirmation.

- Ça va allait. Je suis avec vous, la rassura-t-il. Enlevez votre main pour que je puisse avoir un meilleur accès.

Mais elle ne le fit pas. Il dut la forcer et bloquer ses bras pour éviter qu'elle ne touche à sa plaie. Glorfindel avait l'expérience des combats et des blessures, et il savait qu'un Elfe se remettrait facilement de ce genre de lésions. Il ne s'inquiéta pas outre mesure.

D'une main il maintint la pression sur la gorge de la guide, qui désormais gémissait. De l'autre et aidé de ses dents il arracha un bout de sa cape pour s'en servir de garrot. Lorsque le bandage fut prêt, il souleva la tête d'Amarthêl pour faire passer le tissu derrière sa nuque.

Là, quelle ne fut pas sa surprise !

Glorfindel resta bloqué sur les oreilles de sa guide. Une humaine… Elle n'était donc pas une elleth. Comment avait-il fait pour ne pas s'en rendre compte ? Il avait fait preuve d'un flagrant manque d'observation.

Obnubilé par sa découverte, il ne remarqua pas le regard peiné et exténué de la jeune femme. Nombreuses furent les fois où elle vit cette expression d'incrédulité sur le visage d'autres Elfes. A chaque fois, elle s'était sentie inférieure et dédaignée. C'était exactement le cas en ce moment malgré la souffrance d'avoir la gorge transpercée. Elle avait froid, du moins plus froid que ces derniers jours. Elle se vidait de son sang, ses membres s'engourdissaient et un voile sombre vint progressivement devant ses yeux.

« Je vais mourir… encore une fois » pensa-t-elle en fermant les yeux et en cessant de lutter contre son destin.

Glorfindel sortit de son égarement lorsqu'il la sentit devenir amorphe. Il reprit aussitôt sa tâche et acheva de nouer le bandage, autour de son cou, suffisamment fort mais pas trop, pour ne pas lui couper la respiration.

A nouveau, il essaya de lui parler mais cette fois il était certain qu'elle était tombée dans l'inconscience. Il l'observa. Elle était pâle. Il savait les Hommes faibles et facilement mourants. Mais il refusa de la laisser ainsi, sans rien tenter, même si cela se révélait vain.

Glorfindel la prit dans ses bras forts et parti en direction de la fermette abandonnée. L'endroit n'était pas des plus accueillants mais il ne se montra pas exigent. Dans un coin de la chaumière encore protégé par un pan de toiture, il installa Amarthêl. Le bandage de fortune était déjà imprégné de sang et ses lèvres n'avaient plus de couleur, mais elle respirait toujours. Il lui remit son capuchon et au passage il comprit pourquoi elle le gardait constamment sur sa tête.

Il s'attela ensuite à faire un feu. Trouver du bois sec n'était pas chose facile en cette saison mais le bosquet lui offrit le nécessaire. Une fois la flambée allumée et alimentée en combustible, Glorfindel alla à la recherche de son cheval après s'être assuré de l'état d'Amarthêl.

L'Elfe revint avant la tombée de la nuit, leur dernière monture étant à présent retrouvée. Il avait également pris soin de récupérer le paquetage sur le cadavre de l'autre cheval. Malgré la proximité du feu, la peau d'Amarthêl était toujours glacée. Glorfindel fit chauffer de la neige pour la faire fondre. Lorsque l'eau fut frémissante, il ajouta quelques feuilles de plantes pour en faire une infusion. Le but étant de réchauffer l'humaine par tous les moyens, il s'installa à côté d'elle, également près des flammes. Délicatement, il la releva et vint la mettre contre son buste de façon à lui faire profiter de sa propre chaleur corporelle. Elle ne réagit à aucun moment et était toujours aussi indolente. Il essaya de lui faire boire un peu de liquide chaud sans grand succès. Puis il resta dans cette position pour passer la nuit.

Glorfindel avait beaucoup de respect pour sa guide. Il s'en voulait de ne pas avoir été plus attentif. Si seulement il avait su qu'elle était si fragile, il n'aurait pas insisté pour venir si tôt à Fondcombe ou aurait choisi un autre accompagnateur. Pourtant il avait été sûr de voir en Amarthêl une personne hors du commun. Il avait eu un sentiment de déception lorsqu'il vit qu'elle était humaine, mais au fond de lui quelque chose lui disait qu'elle n'était peut-être pas ce qu'elle semblait.

Il s'endormit à son tour après avoir étendu sa cape autour de leurs deux corps.

§

L'aube était naissante et le soleil ne perçait pas encore l'horizon lorsqu'Amarthêl ouvrit péniblement les yeux. Elle ne savait pas où elle se trouvait. Tout ce qu'elle voyait était un tissu beige qui la recouvrait. Elle était encore faible et ne tenta pas de bouger. D'ailleurs pourquoi le ferait-elle ? Elle était tellement bien, comme dans un cocon. Un souffle chaud et régulier venait lui réchauffer la nuque et une profonde respiration la berçait doucement. Bien trop embrumée, elle resta bien sagement immobile et s'assoupit à nouveau.

Amarthêl se réveilla brusquement lorsqu'un étau de chair la serra un peu plus. La pression n'était pas très forte mais bien présente. C'est alors qu'elle comprit qu'elle était dans les bras de Glorfindel. Son esprit s'alluma aussitôt et elle voulut s'échapper de cette étreinte. Mais l'Elfe ne semblait être du même avis et resserra encore plus ses bras autour d'elle. Elle s'immobilisa complétement de peur d'être écrasée par les puissants bras de l'Elfe. Elle savait que lorsque ces Etres dormaient profondément, il était très difficile de les réveiller et ils pouvaient avoir des réactions imprévisibles. La jeune femme essaya tout de même de tourner la tête pour le regarder, mais sa blessure l'en empêcha.

Les premiers rayons du soleil firent leur apparition. Elle ne pouvait les voir mais leur lumière diffusait à travers le tissu crème de la cape de l'Elfe, dont elle était entièrement recouverte. A la quantité de luminosité elle pouvait affirmer que les épais nuages des derniers jours s'étaient dissipés. La suite du voyage sera sans doute plus facile.

Elle patienta tranquillement que Glorfindel se réveille. L'Elfe avait très souvent fait les tours de garde pendant leur voyage. Une sorte de galanterie. Elle ignorait depuis combien de temps elle était inconsciente, mais une chose était sûre, c'était que son cœur ne s'était pas arrêté. Lorsque cela arrivait, elle avait une sensation de béatitude caractéristique, et en ce moment ce n'était pas le cas. Non, elle se sentait juste mal-en-point et sans énergie. Néanmoins la chaleur et la proximité avec l'ellon étaient particulièrement agréables. Amarthêl n'avait pas souvent de contact physique avec d'autre personne. Sa peur de perdre encore un ami ou un être cher, lui avait passé l'envie de se rapprocher de quiconque, hormis quelques exceptions pour des nuits sans lendemain avec des Hommes du Gondor, sa patrie d'origine. De plus, elle vivait la plus part du temps chez les peuples elfiques et leur rigueur ne permettait pas de rapprochements physiques même amicaux. Il n'y avait guère qu'Amroth qui la serrait parfois dans ses bras lorsqu'elle lui rendait visite. D'ailleurs le fait de penser à lui, lui donna envie de faire un détour par le Lórinand. Quitte à perdre du temps, autant en perdre en y prenant plaisir. Ses séjours dans la forêt de Lórien étaient toujours synonymes de quiétude et de paix, et c'était tout à fait ce dont elle avait besoin en ce moment.

Amarthêl soupira profondément et retomba dans les limbes de son sommeil.

Ce fut une sensation d'air vif et froid sur son visage qui vint la réveiller. Son cocon protecteur avait disparu. Un rapide coup d'œil autour d'elle pour repérer son environnement et elle tenta de se lever. C'est à peine si elle put se tenir assise qu'elle retomba sur le sol, prise des vertiges. Elle avait perdu beaucoup de sang et de ce fait, si elle changeait de position, son corps lui faisait bien sentir sa faiblesse.

Elle n'eut d'autre choix que de patienter. Des braises encore fumantes indiquaient la présence d'un feu. Elle fixa paresseusement les volutes de fumée qui s'en échappaient et de ce fait elle ne remarqua Glorfindel qui était revenu de l'extérieur. Ce fut la main chaude de l'Elfe sur son front qui la sortit de sa rêverie. Elle sursauta vivement et dans un réflexe voulu tourner la tête. La douleur de sa blessure au cou l'en empêcha.

- Ce n'est que moi. Vous n'avez rien à craindre, dit Glorfindel de sa voix toujours aussi douce.

- Je ne vous ai pas entendu arriver, répondit-elle faiblement.

L'Elfe se mit dans son champ de vision et s'accroupit près d'elle.

- J'ai eu peur de vous perdre, mon amie.

Amarthêl put lire dans ses yeux la sincérité de ses paroles.

- Je… Depuis combien de temps suis-je assoupi ?

- J'ai cru que vous ne passerez pas la nuit.

Elle ne répondit pas, mais passa sa main sur son cou endolori.

- Permettez que je change votre bandage, demanda-t-il en lui tendant une main amicale.

- Vous m'avez soigné ?

- Je ne pouvais vous laisser ainsi.

La jeune femme attrapa mollement la main de l'Elfe. Progressivement et en douceur, il l'aida à se mettre assise. Les vertiges reprirent de plus belle, mais il la maintint dans cette position le temps qu'elle s'habitue. Glorfindel se plaça à sa droite et sembla attendre. Elle le regarda.

- Puis-je ? questionna-t-il en parlant de son capuchon.

- Faites donc, répondit-t-elle presque honteusement. De toute façon, vous savez déjà.

Elle avait bien vu son regard dubitatif lorsqu'il remarqua qu'elle n'était pas une de sa race. Délicatement il lui ôta son capuchon et dégagea ses longs cheveux pour avoir accès à son cou.

- Vous n'avez pas à avoir honte de ce que vous êtes, dit-il tout en dénouant le bandage.

- C'est plutôt l'impression de décevoir, de ne pas être à la hauteur des espérances des personnes qui découvrent qui je suis vraiment. Trop de fois j'ai ressenti cela et même encore maintenant j'ai le sentiment d'être une erreur.

Un silence s'installa pendant quelques instants qui pesèrent lourdement dans le cœur d'Amarthêl.

- Je ne crois pas que vous êtes une erreur. Au contraire, je vois en vous une personne bien plus forte que n'importe qui, Hommes et Elfes confondus, argumenta Glorfindel.

Elle gémit légèrement lorsque Glorfindel enleva le dernier tour de tissu qui était collé aux plaies. Le sang avait séché et rendait l'ensemble cartonneux. L'Elfe s'attela à nettoyer tout ce sang sec avant de mettre un nouveau bandage.

- Pourtant je suis une erreur, reprit-elle.

- Être une femme vivant parmi les Elfes est pour vous une erreur ?

- Non je ne parle pas de ce détail, soupira-t-elle.

Elle lui devait la vérité, et comme il allait vivre à Fondcombe, elle allait le revoir souvent. Il découvrirait son secret tôt ou tard.

- Je sais que vous n'êtes pas ce que vous laissez paraitre, dit-il en lui coupant sa réflexion. Il est vrai que je vous ai pris pour une elleth, continua-t-il sur un ton amusé. J'aurais pu dire que vous étiez relativement jeune vu comment vous êtes sentimentalement démonstrative et faiblement résistante.

Elle le regarda avec une mine circonspecte. Il émit un petit rire.

- Du moins pour une elleth, car pour une fille d'Homme je trouve que vous êtes particulièrement robuste. Mais je trouvais cela étrange qu'une si jeune Elfe puisse se promener seule et servir de guide. De mon temps, on protégeait fermement nos enfants. C'est pourquoi vous m'avez intrigué et que j'ai insisté auprès du Seigneur Círdan pour bénéficier une nouvelle fois de vos services.

Glorfindel continua de nettoyer le cou de la jeune femme pendant qu'il lui parlait, mais il devait la maintenir car elle essayait de se soustraire de ses mains. Elle souffrait du traitement qu'il lui infligeait.

- Simple curiosité, ajouta Amarthêl en serrant les dents. Quel âge m'avez-vous donné ?

- Dans les deux cent ans, pas beaucoup plus, annonça-t-il tout en lui lâchant le cou.

Glorfindel lança dans les dernières braises fumantes, les linges souillés de sang qui se consumèrent sans flamme.

- Deux cent ans, entendit-il dire dans un murmure.

Il observa la guide. Elle avait les yeux dans le vague, l'air attristé.

- Ai-je dis quelque chose qu'il ne fallait pas, s'enquiert-il.

- Non ! Non, bien sûr que non, garantit-elle. C'est juste que j'étais en train de me souvenir de ma vie lorsque j'avais cet âge.

- Je vous demande pardon ? dit Glorfindel qui pensait que la jeune femme se moquait de lui.

- A cette époque, je commençais à me douter que quelque chose n'était pas normal chez moi. Certains Hommes sont dotés d'une longue vie grâce au sang d'Elros. Mais ils vieillissent tout de même, alors que moi, j'ai toujours la fraicheur de mes vingt-neuf ans.

Elle regarda droit dans les yeux l'Elfe qui doutait sérieusement de son récit.

- Glorfindel, je n'ai aucune raison de vous mentir. Je suis bien de la race des Hommes et telle que vous me voyez, j'ai plus de 1100 ans.

- Comment une telle chose est possible ?

- La réponse est des plus simples : je ne peux mourir tant que la mission que Mandos m'a confiée n'est pas achevée.

L'Elfe écarquilla des yeux. La vérité l'éclairait enfin.

- Seriez-vous la prophétesse de cet Age ?

Elle lui répondit d'un signe de la tête.

- Mais j'ignorais que des Hommes pouvaient tenir ce rôle.

- Je suis la première dans ce cas. Il est vrai que mes prédécesseurs furent tous des Premiers Nés, mais durant les trois derniers Ages vous étiez la race prédominante. Désormais, l'heure est venue aux Hommes de régner sur la Terre du Milieu et les Valar m'ont choisi pour être leur oracle.

Glorfindel ne put que respectueusement s'incliner devant Amarthêl.

Tout coulait de source désormais et il put enfin mettre un nom sur sa véritable nature. Une fille des Hommes dotée du plus précieux cadeau des Valar.


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