Dixième chapitre, ça se fête !

Je suis profondément désolé de n'avoir pas eu le temps de répondre aux reviews en août, j'ai eu un mois assez chargé (et j'ai été assez fatigué...) T^T
Je reprends les cours demain, mais j'ai pris un peu d'avance dans la rédaction de "Dites-le avec des fleurs", donc ça devrait aller - en revanche, ma "Geste du Licorne-Garou" est en hiatus pour le moment, je dois travailler sur le synopsis avant de reprendre la rédaction du deuxième arc !

J'espère tout de même pouvoir publier un chapitre par semaine, jusqu'à compléter cette histoire - enfin, on arrive à la fin, vous vous en doutez. Sur ce, je vous laisse, et bonne lecture !

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Dites-le avec des fleurs, partie 10

Il faisait froid. Milo ne savait pas vraiment où il se trouvait. Il lui semblait parfois qu'il marchait, puis il réalisait être en train de flotter. Ses pas retentissaient avec des bruits clairs, comme des talons sur du verre. Un écho étrange l'environnait, un bourdonnement ou au contraire un vide bruyant qui lui emplissait les oreilles et lui faisait perdre toute notion de l'espace. Et au milieu de toutes ces sensations ambiguës, il faisait froid. Un froid qui s'intensifiait peu à peu, l'enveloppant, le griffant comme des serres, se plantant dans sa chair et le tirant... ailleurs. Le volume du bourdonnement augmentait, se modifiait. D'un ron-ron confus, il se changeait en bribes de paroles, bruits de chaussures sur le sol. Lentement, Milo ouvrit les yeux.

Et les referma aussitôt. La lumière l'éblouissait, ses yeux lui faisaient mal, comme englués. Sa gorge le brûlait, il avait terriblement soif. Il esquissa un mouvement pour se frotter les paupières, se protéger des néons crus, insoutenables. Aussitôt, le bruissement se concentra autour de lui. Un essaim de mouches pressées. Il était réveillé. Enfin ! Amenez un peu d'eau. Est-ce que tout va bien ? Tu nous entends ? Milo, arrête de paniquer, tout va bien. On a eu peur, tu dors depuis longtemps... Calme-toi, calme-toi, tu vas finir par blesser quelqu'un ! Rétracte cet ongle, Milo, sérieusement. Tout va bien, tout va bien...

- Où... lança-t-il.

Il s'interrompit. Sa gorge le brûlait. Il avait du mal à parler. Et il avait toujours froid. Il sentait le poids de couvertures sur lui, mais rien n'y faisait. Doucement, doucement... Bois un peu d'eau... On continuait de s'activer autour de lui.

- Où... réessaya-t-il.

Il ne parviendrait pas à faire de phrase.

- Camus, articula-t-il soigneusement.

On comprendrait, n'est-ce pas ? Ce qu'il voulait dire. Il voulait savoir... Ses souvenirs étaient flous, mais il se rappelait d'Hermès. De son sourire chaleureux. Sournois, en fait. C'était un dieu tellement changeant. Quelque chose avait explosé. Les bouquets... Et Camus. Il avait froid. Comme en Sibérie, mais en pire. Comme dans le temple du Verseau quand son Camus était en rogne, mais en pire. C'était un froid très particulier. Une véritable signature. Autour de lui, on s'agitait en silence. Ses yeux ne le collaient plus. Il se sentait maintenant avant tout vaseux.

- Tu es très fatigué, Milo, tu as dormi longtemps. Tu devrais te reposer. Ne t'inquiète de rien.

Il connaissait cette voix. Un Or, certainement ; pas Camus. Il secoua la tête.

- Où est... Camus ? répéta-t-il avec effort.

Il était là, quand tout avait explosé. Milo était encore un peu confus, il ne se souvenait que de la violence de l'explosion, mais il avait l'absolue certitude que Camus était là à ce moment. À côté de lui. Tout près. Finalement, Hermès avait dû mal calculer la puissance de ses explosifs. Milo s'en était sorti. Et Camus était tout près de lui, il devait aller bien, n'est-ce pas ?

- Ne t'inquiète de rien, Milo, répéta la voix.

Le Scorpion l'identifia enfin. Aiolos. Est-ce qu'il était là, lui, au moment de l'explosion ? Il n'était plus très sûr. Mais Camus, si.

- Camus, insista-t-il.

Il se sentait brusquement fatigué. Les choses s'éloignaient, tournaient.

- Dors, lui asséna Aiolos juste avant qu'il ne sombre à nouveau dans un sommeil sans rêves.

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Saga hésitait devant la porte close de la chambre du Capricorne. Shura était à l'intérieur, petite boule tranchante de désespoir violent entrecoupé de passages à vide vertigineux. Il regretta à nouveau d'avoir accepté de se charger de cette visite. Il ne voyait pas vraiment en quoi il pourrait aider son cadet. À sa place, Aiolos aurait su. Il serait entré discrètement, présence apaisante sans être dérangeante, sans être envahissante. Il aurait trouvé les mots ou les silences dont avait besoin Shura. Malheureusement, le Sagittaire avait poursuivi sa route vers l'infirmerie, laissant Saga se débrouiller.

Le Gémeau soupira. S'il poireautait ainsi pendant vingt minutes avant de s'en aller, ce ne serait pas lui qui en pâtirait. À part un sentiment de gêne, d'échec, il n'en souffrirait pas. En revanche, le Capricorne resterait seul avec sa détresse. Pire, Shura avait certainement détecté sa présence il resterait donc seul, en sachant qu'une personne s'était arrêtée devant chez lui avant de renoncer à le voir. Saga grimaça. Il imaginait sans trop de peine le sentiment d'abandon qui pourrait alors submerger son cadet. Il n'avait donc pas le choix : il ne savait peut-être pas comment s'y prendre, il ne servirait peut-être à rien, mais il devait y aller. Personne d'autre n'était là, après tout. Il frappa à la porte :

- Shura ? appela-t-il.

L'absence de réponse ne l'étonna pas.

- Je rentre, annonça-t-il d'un ton aussi résolu que possible.

Mieux valait avoir l'air assuré. Laisser transparaître son stress n'aiderait personne au contraire. Il poussa la porte, entra et referma délicatement derrière lui. Il lui semblait qu'un gros claquement du battant serait grossier. La chambre était comme le reste du temple : silencieuse, sombre, endeuillée. Quelques inhabituelles particules de poussière traînaient, dénonçant le mal-être du propriétaire des lieux. Shura était allongé sur son matelas, lui tournant le dos. Le lit était immense, suffisant pour deux personnes. Voire trois.

- Shura, souffla Saga.

Un appel auquel le Capricorne ne répondit pas. Le Gémeau resta devant le seuil, immobile, les bras ballants. Une fois de plus, le doute le saisissait il ne voyait pas quoi faire. Ne savait même pas si sa présence ici aurait le moindre effet positif. Peut-être le Capricorne avait-il surtout besoin de solitude ? Shion pouvait bien ordonner que quelqu'un aille le voir, il n'était pas omniscient, il avait très bien pu se tromper.

- Shura, je… Comment te sens-tu ?

La question était bête, bateau.

- Je suis venu…

… à la place d'Aiolos ? envoyé par Shion ? Non. Il ne pouvait pas dire ça. Présenter sa visite comme une mission était la dernière chose à faire. Ce ne serait pas très respectueux.

- … voir comment tu allais, termina-t-il. J'étais inquiet pour toi.
- Ça ne va pas bien.

La voix du Capricorne était rauque.

- Mais ça, tu dois t'en douter.

Saga hocha la tête.

- Je suis désolé.

Shura se raidit :

- De quoi ? Tu n'es pas responsable.
- Je ne sais pas. J'étais là, j'aurais dû…
- Tu as sauvé Aiolia.

Le Capricorne se retourna vers lui. Ses yeux étaient rougis, irrités - mais secs.

- Tu ne peux pas sauver tout le monde, Saga, affirma-t-il. Mû m'a un peu parlé. Ils étaient loin de vous, au milieu de plein de bouquets… Personne n'aurait rien pu faire.
- Je m'en veux tout de même.

Le Gémeau esquissa un sourire triste :

- Quand je pense que j'étais venu pour te soutenir, faire en sorte que tu te sentes mieux… et c'est toi qui me rassures.
- Franchement, je préfère ça. Je n'aime pas me morfondre sur mon sort, toute distraction est la bienvenue.

Shura grimaça :

- Désolé, « distraction » n'est peut-être pas le meilleur choix de mot pour parler de ta culpabilité…
- Ne t'en fais pas, le rassura Saga. Je comprends ce que tu veux dire.

Silence, pendant lequel le Capricorne s'installa en tailleur sur son lit, invitant Saga à s'asseoir à côté de lui.

- C'est vrai qu'Athéna a disparu ? demanda soudainement Shura.
- Oui. Personne ne sait où elle est.
- Tu en penses quoi, toi ?

Saga réfléchit. Il avait l'impression d'être revenu des années en arrière, lorsqu'il était encore l'Aîné, le Grand, celui vers qui se tournaient les plus jeunes en cas de doute, de peur. Son influence avait été sans limites, on lui avait fait tellement confiance…

- Je veux croire qu'elle n'a pas complètement abandonné le Sanctuaire, répondit-il enfin. Je veux croire qu'elle n'est pas le genre de déesse à baisser les bras et se couper du monde en cas de contrariété ou de difficulté. Je veux croire qu'elle trouvera une solution.

Shura fronça les sourcils :

- Une solution… à la mort ?
- Et bien… sourit Saga. Je suis mort et revenu à la vie suffisamment de fois pour savoir que tout est possible.
- Alors… je vais peut-être les retrouver ?

L'espoir désespéré qui transparaissait dans la voix du Capricorne brisa le cœur du Gémeau. Il passa un bras réconfortant autour des épaules de son cadet :

- Je ne peux rien promettre, Shura, chuchota-t-il. Je suis désolé, j'aimerais le pouvoir, mais tout cela me… nous dépasse.

Le Capricorne lui agrippa le bras, retenant ses larmes :

- Quand nous sommes revenus, c'était comme un rêve. Tous les jours, toutes les nuits, je me disais que ça ne pouvait pas durer. Que c'était trop de chance pour des gens comme nous, après tout ce que nous avions fait. Malgré les excuses, les justifications… Ils me disaient que j'avais tort, que j'étais trop pessimiste, mais maintenant…
- Ce n'était pas « trop de chance », Shura. Tout à l'heure, Aiolos m'a dit quelque chose d'intéressant. Il m'a dit que tout le monde méritait mieux.
- Il est trop gentil, marmonna le Capricorne.
- C'est ce que je lui ai dit, rit Saga. Mais, trop gentil ou pas, il a raison. La résurrection, une vie de paix… Ce n'était pas « trop de chance ». C'était ce qu'on méritait, après tout ce qui nous est tombé dessus.
- Mais maintenant, on a perdu tout ça.

Le Gémeau soupira et serra plus fort contre lui Shura. Malheureusement, il n'avait rien à répondre à son cadet, à part un espoir ténu, improbable : celui qu'Athéna trouve une baguette magique pour régler instantanément la situation et ramener tout le monde à la vie - et aussi conclure une paix éternelle au sein du panthéon grec, si possible. Un vrai deus ex machina - à moins qu'il ne faille dire dea ex machina ?

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Pendant ce temps, à l'infirmerie, Aiolos finissait un mauvais café. Après avoir laissé Saga, il était passé chez Aiolia et avait eu la satisfaction de constater que son petit frère se portait relativement bien vu les circonstances. Il avait donc poursuivi son chemin jusqu'à l'infirmerie. Celle-ci accueillait actuellement trois patients : Seiya et Jabu, qui avaient reçu quelques blessures au moment de l'explosion, avant que Shion ne les téléporte, et Milo, qui souffrait de son bref séjour dans le cercueil de glace érigé par Camus. La réputation du Verseau n'était pas volée : sa glace résistait vraiment à tout… et avait sauvé la vie du Scorpion. Athéna avait achevé de lui venir en aide en le réchauffant de son cosmos, juste avant de disparaître. Bref, si on mettait de côté la perte de son amant et ses quelques jours de coma, Milo était un petit veinard.

Un petit veinard qui s'était réveillé, complètement perdu, paniqué, vaguement agressif et réclamant Camus. Il avait fallu le rendormir. Plus tard, il faudrait trouver un moyen de lui annoncer… Aiolos soupira intérieurement et relégua ce problème dans un coin de son esprit. Pour l'instant, Milo dormait paisiblement quand il se réveillerait, on pourrait éluder ses questions encore un peu, jusqu'à ce qu'il soit plus solide. Pour l'heure, le Sagittaire considérait qu'il était face à un problème plus urgent. Devant lui, Shun buvait son thé d'un air absent.

Le gamin avait passé l'essentiel de son temps à l'infirmerie, cherchant frénétiquement de quoi s'occuper. Ramener des verres d'eau à droite et à gauche, passer un coup de balai, changer les draps, les pansements, vérifier la température et la tension, s'assurer que personne ne manquait de rien… C'était à peine s'il prenait des pauses. Une dévotion… admirable à son travail. Aiolos aurait préféré le voir dans un fauteuil, enroulé dans un plaid devant un téléfilm nul et entouré d'attentions.

- Shun, lança-t-il doucement.

Le bronze se tourna vers lui, l'œil un peu vide :

- Hmm ?
- Tu es sûr que tout va bien ?

Il ne faisait que reprendre la conversation engagée avant le réveil de Milo. Il avait essayé de convaincre Shun de prendre du repos, mais le Scorpion avait gâché cet effort.

- Oui, rétorqua Andromède, sur la défensive.
- Vraiment ?

Shun le fixa quelques secondes, puis soupira :

- Je sais où tu veux en venir, Aiolos. Et : ça va. Je tiens le coup. Ça me fait du bien d'être ici. Je m'occupe.
- Je vois ça, sourit le Sagittaire. Tu t'occupes même un peu trop. Tu es épuisé, tu devrais aller t'allonger.

Le bronze secoua la tête :

- Je me connais. Si je m'arrête, je vais juste tomber dans une spirale de tristesse… et j'ai peur de ne pas pouvoir en ressortir.
- Tu n'es pas seul, Shun. Tu n'auras pas à en ressortir seul… si tu y tombes.

Aiolos esquissa un sourire rassurant :

- Tu es plus fort que tu ne le crois. C'est normal d'être triste, même désespéré. Tu as perdu ton frère.

Andromède se mordit violemment la lèvre. Il avait essayé de repousser ce fait loin de lui, dans un recoin obscur de sa psyché - et voilà qu'Aiolos le ramenait sur le devant de la scène. Ikki était mort, ainsi que d'autres. Athéna avait disparu. Hyoga déprimait, comment lui en vouloir ? Camus était parti aussi. Et lui… essayait de s'occuper.

- Je préfère ne pas y penser.
- Je comprends. Mais ce n'est pas une solution, Shun. Surtout si « ne pas y penser » implique de t'épuiser à la tâche. Tu devrais te reposer. Prendre soin de toi. Pas t'oublier comme ça.
- Il faut bien quelqu'un ici pour…
- Je prends le relais, interrompit Aiolos. Mû et Aldébaran viendront me seconder aussi, je pense. Et il y a encore plein d'autres gens que nous pouvons réquisitionner. Il me semble que vous avez une espèce de colocation, entre bronzes ?

Shun hocha la tête sans enthousiasme :

- Actuellement il n'y a plus que Hyoga et Shiryu. Jabu et Seiya sont ici, Ikki est…

Il avala sa salive.

- … et les autres sont en voyage. Ils ne devraient pas tarder à revenir, vu les événements des derniers jours.
- D'accord. Et bien, et si tu rentrais ? Shiryu est quelqu'un d'attentionné - et Hyoga aussi.
- Hyoga ne va pas très bien.
- Oui, comme toi. Je pense que tous les deux, vous savez mieux que quiconque ce que l'autre ressent. Rentre, Shun. Rentre, reste auprès de tes amis, repose-toi. Reviens ici demain pour voir Jabu et Seiya si tu veux, mais là, maintenant, rentre.

Andromède secoua la tête :

- Et Milo ?
- Je m'occupe de Milo. Je saurais gérer.

Aiolos faillit ajouter qu'il valait mieux qu'il ne soit pas là quand il faudrait expliquer au Scorpion ce qui s'était passé, mais s'abstint au dernier moment. Souligner sa faiblesse psychologique était le meilleur moyen de braquer Shun.

- Tu es sûr ? abdiqua finalement Andromède.
- Certain.

Le bronze hocha la tête, termina son thé, grimaça :

- Il est froid.
- Il l'était déjà tout à l'heure, commenta Aiolos.
- Je suis vraiment fatigué.

Sa lèvre inférieure trembla légèrement. Il ferma les yeux, serra ses paupières. Ce n'était pas le moment de fondre en larmes. Le Sagittaire lui tapota maladroitement l'épaule en un geste réconfortant. Les vannes s'ouvrirent.

- Son armure, hoqueta-t-il. Son armure, elle est revenue… dans sa chambre, tu sais… C'est comme si elle attendait. Un tas de ferraille stupide et auto-régénérant. Je n'aurais jamais cru que… Je pensais que c'était fini ! Que c'était enfin fini… Je suis tellement fatigué de tout ça !
- Shun…

On frappa à la porte ouverte de la petite salle de pause. Shiryu. Le Sagittaire le salua d'un signe de tête. Il avait bien fait de lui envoyer un SMS. Aiolos se leva, attrapa leurs tasses, les posa dans l'évier. Pendant ce temps, le Dragon s'approcha de Shun, l'attirant dans une étreinte réconfortante. Andromède quitta sa chaise en trébuchant, appuyé sur Shiryu.

- Son manteau ? demanda le Dragon.
- Ici, sourit Aiolos en lui tendant.
- Merci.
- Merci à toi, d'être là pour eux. Repose-toi bien, ajouta-t-il à l'adresse de Shun.
- C'est normal, marmonna Shiryu. Ils en feraient autant pour moi.

Aiolos hocha la tête et les regarda quitter l'infirmerie, soulagé.

- Il est parti ? lança une voix depuis un des lits.

Seiya, qui n'était pas trop mal en point. Vraiment indestructible, ce garçon.

- Oui, répondit le Sagittaire.
- Enfin ! Il m'inquiétait, soupira Pégase. Il essayait de donner l'impression que tout allait bien, mais c'était terrible à voir.
- Je suis d'accord. J'aurais dû venir plus tôt, regretta Aiolos.
- Bah ! Tu étais avec le Pope, c'est ça ?
- Oui.

Seiya le regarda avec une grimace :

- Et il ne va pas bien, hein ?
- C'est le moins qu'on puisse dire…
- Aïe… Enfin bref, tout ça pour dire que tu ne pouvais pas être partout. Et puis, Shun n'a rien fait de mal. Au contraire. C'est juste qu'il n'était pas raisonnable.

Aiolos acquiesça :

- Ce serait bien qu'il puisse revenir donner un coup de main ici.
- Oui, faudra juste éviter de l'y laisser seul. Sinon, pour changer de sujet : quand est-ce que je peux sortir ?

Le Sagittaire lui lança un regard sévère :

- Pas maintenant.
- Même pas pour aller voir Jabu ?
- Jabu dort.
- Et il dort de l'autre côté du rideau, pas avec moi ! Je veux juste le voir. Promis, je ne vais pas le déranger.

Le plus âgé soupira :

- Sérieusement, tu dois rester encore un peu au lit, Seiya. Ce n'est pas le moment de faire des cabrioles. En revanche…

Les yeux de Pégase s'illuminèrent.

- … je peux ouvrir le rideau. Comme ça, tu pourras vérifier qu'il va bien.
- Parfait ! Moi, ça me va. Tant que je ne reste pas là bêtement entre deux rideaux et un mur blancs, à compter les fissures du plafond…
- Il y en a combien ? s'enquit Aiolos en ouvrant doucement le rideau.

Seiya leva les yeux au ciel :

- Quarante-trois. Quarante-neuf en comptant les microfissures un peu nulles que je n'ai repérées qu'après de longues minutes d'observation, et que j'ai peut-être confondues avec des cadavres d'insectes, des moustiques par exemple. Au passage, si j'en vois un, je balance les Météores de Pégase.
- Abstiens-toi, par pitié ! Appelle-moi plutôt. J'ai une tapette et une prise anti-moustique, si les moustiquaires aux fenêtres ne suffisent pas.

Seiya se composa une moue boudeuse :

- Rabat-joie.
- Je cherche surtout à préserver ce bâtiment, on risque d'en avoir besoin.
- Déprimante perspective.
- N'est-ce pas ?

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Son père se tenait seul dans la petite salle d'audience. Il n'avait pas changé. Il ne changeait pas, de toute façon. Athéna se précipita à ses pieds, embrassant ses genoux, touchant son menton. Une attitude de supplication des plus traditionnelles.

- Père, je vous prie de m'entendre…

Zeus soupira :

- Bien sûr, ma fille, bien sûr. Je sais ce qui t'amène. J'ai vu Hermès, un peu plus tôt.

Athéna se recula légèrement, méfiante :

- Que vous a-t-il dit ?
- Qu'il avait réparé une offense commise envers lui par toi.
- Lorsque j'ai refusé que les dieux jumeaux soient ramenés à la vie ?

Le souverain de l'Olympe acquiesça :

- Une demande audacieuse, qui n'a pas plu à grand monde. Bénis le manque d'attention d'Hermès à ce genre de chose. Il était trop plongé dans son deuil pour prêter oreille à nos négociations.

Athéna hocha la tête, puis lança :

- Je ne m'oppose plus à leur retour.
- Au retour des dieux jumeaux ?
- Oui. Il est juste qu'ils puissent revenir. Après tout, Hadès et moi avons fait la paix. Ma demande n'était pas audacieuse, elle était cruelle.
- C'est bien, approuva Zeus. Je suis heureux de te voir revenir sur tes errements, ma fille.

La déesse sourit anxieusement. Son père pencha la tête sur le côté, l'air interrogateur :

- Y avait-il autre chose, ma fille ?
- Oui. Hermès, pour réparer son offense, a pris la vie de certains de mes Chevaliers. Père, si j'efface l'offense, pourquoi devraient-ils encore en payer le prix ?
- Tu souhaites les ramener à la vie. Une fois de plus.

Athéna resta silencieuse.

- Je n'aime pas ce genre de choses, grommela Zeus. Cela vient contredire l'ordre naturel. Ne peux-tu pas accepter leur sort ?

La déesse secoua la tête :

- Je leur avais promis une nouvelle vie paisible. Je ne peux pas les trahir ainsi.

Zeus la fixa quelques instants, puis déclara :

- Je réfléchirai à cette demande.

Puis il tourna son regard vers le fond de la salle.

- Hermès ! appela-t-il.
- Père, très chère sœur, salua le dieu qui semblait sortir du mur.
- Les dieux jumeaux seront ramenés à la vie dès demain. Iris est déjà partie contacter Hadès, et je suis persuadé que mon frère ne jouera pas les fines bouches.
- Merci, lâcha le dieu, la voix tremblante de joie et de soulagement mêlés.

Il tourna son regard vers Athéna, et répéta :

- Merci, de me le ramener. Et quel dommage que nous ayons dû en arriver là.

Son regret, bien que léger, semblait sincère. La déesse serra le poing, mais inclina poliment son buste vers son frère pour le saluer avant qu'il ne quitte la pièce. Elle se tourna à nouveau vers son père :

- Je vous en prie…
- Je te l'ai dit : j'y réfléchirai. Reviens me voir dans quelques temps.

Zeus se leva, majestueux, et disparut dans un éclair. L'audience était levée, qu'elle le veuille ou pas. Athéna ferma brièvement les yeux pour s'apaiser. Elle n'était pas particulièrement étonnée par cette conclusion - après tout, son père n'avait jamais caché son désamour de la résurrection, et elle avait déjà bien tiré sur la corde en réclamant le retour de tout son Sanctuaire. Malgré cela, elle se sentait frustrée, désespérée.

- Il ne s'agit que de cinq petites âmes… murmura-t-elle avec colère avant de disparaître à son tour, regagnant son palais, résignée à prolonger son séjour sur l'Olympe.