Salut à tous ! :)

Quelques mots sur cette fiction : Les étoiles filantes sont les larmes du ciel. Du moins c'est ce que disent toutes les histoires. Alors comment expliquer que l'une d'elle ait rendu le sourire à une petite fille ? L'espoir que lui apporta cette rencontre changea radicalement son destin et celui de toute une nation. – Clexa –

Les personnages de la série The 100 ne m'appartiennent pas, tout comme les musiques que je peux utiliser dans l'histoire.

Je remercie tout particulièrement MaraCapucin d'avoir accepté d'être ma bêta et de relire mes nombreuses fictions pour que la lecture vous soit plus agréable, mine de rien c'est beaucoup de travail.

Je vous souhaite une bonne lecture et je vous retrouve en bas ! :)


Étoile filante

Chapitre n°20 - Compte jusqu'à cinq

I lost my smile

When I lost your eyes

When I lost your light

I was in dark

You've threw away

All my hope

All my dream

Louis Delort - Tonight

Anya ⸙

Alors que la nuit tombe, mes doigts noircissent le contour de mes yeux de peinture de guerre. Je laisse ma peau disparaître derrière des gestes répété un trop grand nombre de fois. Puis, j'essuie mes mains avant de plonger mon index et mon majeur au milieu de la substance au pigment d'un bleu aussi foncé que les grands lacs des vallées qui m'ont vues naître. Je l'applique ensuite de façon rectiligne sur toute la longueur de mon front en fermant doucement les paupières.

J'inspire profondément, éloigne ma main de mon visage et observe le reflet que m'offre une flaque d'eau devant laquelle je me suis accroupi. Je tremble légèrement alors je ferme mes deux poing avec une très grande force. Depuis que j'ai arrêté de me battre pour me venger, il y a toujours un moment avant les combats où les souvenirs me ramènent aux véritables tueries que j'ai pu provoquer.

J'ai tué tellement de personnes et lorsque j'étais à l'origine de ces carnages, je n'avais aucun regret. C'était plus fort que moi, j'irai même jusqu'à dire que c'était une question de survie. Si je n'avais pas arraché si violemment toutes ses vies, j'aurais été dans l'incapacité d'avancer. Je serai restée prisonnière du véritable cauchemar que j'ai vécu le jour du massacre de mon peuple.

J'inspire profondément avant de récupérer le dernier coloris afin de compléter la fresque de guerre qui prend vie sur mon visage. Je laisse mon pouce s'imprégner bien plus longtemps de cette couleur si importante pour mon peuple. J'expire et lorsque je me sens prête, j'applique trois points parfaitement symétriques sous chacun de mes yeux. Le dorée se reflète d'une étrange façon au milieu de cette eau dans laquelle brille déjà la lune.

Je range chacun des réceptacles qui contient les peintures dans mes poches. Je joue doucement avec, les faisant passer entre mes doigts, tout en observant un moment mon visage et me souvenant avec nostalgie des nombreuses fois où ma mère m'a appris à appliquer ce maquillage de la bonne façon. Je souris en repensant au jour où j'y suis enfin parvenue seule. Je suis si profondément ancré dans le passé que je ne remarque pas la présence d'une personne à mes côtés jusqu'à percevoir sa voix :

-Tu as peur ?

Je tourne lentement la tête vers Raven qui, comme moi un peu plus tôt, fixe le reflet de la flaque d'eau. Il est évident que ma réponse est négative. En fait, comme bien souvent avant de prendre les armes, je ressens un calme d'une intensité si grande que je me souviens des raisons qui m'ont poussé à demander à Lexa de m'éloigner le plus souvent possible des champs de bataille. Evidemment, je ne peux pas donner ce genre de réponse.

Pas à elle.

Je l'observe avec un peu plus d'attention. Il est évident que de son côté, elle est terrifiée. Pourtant, j'ai la certitude que si je choisis de lui dire la vérité, elle me cachera son état. Je ne souhaite pas qu'elle me mente, pas même par fierté.

-Un peu.

-C'est bien, elle acquiesce très légèrement. Si tu as peur, même un peu, tu seras prudente.

-Je n'ai pas besoin de la peur pour l'être, j'assure. J'ai des responsabilités et je ne compte pas les abandonner en mourant bêtement.

-Ne parle pas de mourir dans un moment pareil, me sermonne-t-elle en croisant mon regard. Je t'interdis même de revenir avec une égratignure !

-Tu n'as pas besoin de t'inquiéter Raevan. Je suis une très grande guerrière.

-C'est Ra-ven, comme un rat, pas Rae-ven comme une raie. Rat-ven, je fronce les sourcils devant son insistance subite sur la prononciation de son prénom. C'est stupide, elle soupire en se frottant nerveusement le front, je n'aurais jamais dû te dire ça maintenant. Je suis seulement inquiète, elle attrape ses long cheveux pour les attacher au-dessus de sa tête de façon lâche, et quand je le suis, je dis n'importe quoi.

-Je serai prudente.

C'est une promesse.

Je continue de la détailler alors qu'elle semble enfin reprendre le contrôle de ses émotions. Je connais ses réticences à tuer et pourtant, elle est là avec nous aujourd'hui. Je dois lui accorder une chose : elle fait preuve de bien plus de courage que je ne l'en aurais cru capable. Je ne dis pas qu'elle est lâche, loin de là. Seulement, je commence lentement à comprendre ce qui l'effraie à ce point en ce qui concerne la mort en général. Que Raven puisse se faire violence ainsi pour nous prêter assistance me fait en quelque sorte l'admirer.

-J'ai remarqué que ton maquillage était différent de celui des autres, reprend-elle après un moment.

-Chaque clan à ses propres peintures de guerre. Il peut exister des nuances entre les villages mais les couleurs doivent rester les mêmes, c'est de cette manière que nous nous reconnaissons sur le champ de bataille.

-Donc, son regard s'arrête sur plusieurs visages, tu n'es pas une Triku.

-Je ne suis pas une Triku, je confirme. Ils m'ont accueilli, protégé et nourri pour ceci et bien plus encore, je leur serai éternellement redevable. Je les considère comme étant les miens mais je ne suis pas un Triku.

-Noir, vert et rouge, énumère Raven en contemplant un des guerrier de mon village d'adoption. Blanc et bleu, poursuit-elle en arrêtant son regard sur un homme d'Azgeda. Jaune, violet et orange, continue-t-elle en fixant une jeune femme du clan Sankru. Je n'ai vu de dorée sur personne d'autre, conclut-elle en arrêtant son regard sur moi.

-Le doré n'appartient qu'à la Gilt Valley. C'est quelque chose que tout le monde respecte. Aucun Heda n'a même jamais essayé de se l'approprier. C'est, je baisse les yeux, attristé par mes prochains mots, à nous.

-Et les dessins, ils signifient quelque chose en particulier ?

-C'est propre à chaque clan.

-Je vois. Merci d'avoir pris le temps de me répondre.

J'acquiesce doucement. J'aurais aimé lui dire que j'en aurais fait de même avec n'importe qui mais c'est faux. Je suis bien plus extensive avec Raven que je ne l'ai jamais été avec personne. Je ne me souviens même pas avoir été aussi avide de mots avec lui. Alors que pourtant, durant un long moment, il était la personne la plus importante au monde pour moi.

J'aurai tué pour lui. Encore plus révélateur, je serai mort sans la moindre hésitation si mon dernier souffle avait eu une chance de le sauver.

Je me demande si…

-Anya, je croise de nouveau le regard de Raven, tient, elle tend son poing serré vers moi, je l'ai fait pour toi, poursuit-elle une fois que sa main stagne au-dessus de la mienne. C'est un médaillon avec le signe de l'infini, m'explique-t-elle en le déposant dans ma paume. J'ai remarqué que vous étiez nombreux à aborder ce signe sur votre peau. Je sais que tu vas être prudente mais, elle baisse les yeux, j'espère aussi qu'il te protègera.

J'écarquille les yeux en découvrant le collier. Comme tout ce que Raven conçoit, c'est minutieux et surtout magnifique. La chaîne est blanche avec des reflets argentés, sûrement du fer. Le médaillon est tout aussi travaillé que celui qu'elle porte à son propre cou. Les arrondis frôle la perfection mais cette fois, je suis certaine que ce n'est pas le même composant, peut-être du bronze. Au milieu de celui-ci, se trouve un filin, d'une finesse à peine croyable d'un jaune qui tire légèrement vers l'orangé, certainement du cuivre.

Raven a certainement dû passer énormément de temps sur cette confection. Je peine à croire qu'elle ait pu le faire pour moi. Pourtant, c'est bien ce qu'elle a insinué en me le donnant. Elle a même ajouté qu'elle espérait que le collier puisse me protéger. Cet objet est donc bien plus important qu'il n'y paraît. Je souris et je ne cherche même pas à le cacher. Je me tourne vers elle pour la remercier mais je remarque avec horreur qu'elle s'est déjà relevée et qu'elle est sur le point de s'éloigner.

-Attends, je saisis rapidement et avec beaucoup de force, trop peut-être son poignet. Attends, je souffle en me remettant sur pieds. Pour ce talisman, je place le collier entre nous deux, aucun mot ne me semble adéquat pour te remercier de la bonne façon.

-Ce n'est pas grand chose, tente-t-elle d'éluder alors que je relâche la pression sur son bras.

-Je ne suis pas d'accord. Et si un talisman que tu as fabriqué doit me protéger alors, je fais quelque pas de plus, entrant dans son espace personnelle, je veux en faire de même.

-Ce n'est pas la peine, elle secoue doucement ses mains entre nous. De toute façon, je vais rester loin du conflit.

-Qu'importe la distance que tu mettras entre la bataille et toi. Combien de temps les Maunons mettront-ils à comprendre que tu es celle qui a rendu leur brouillard inopérant. J'aimerai ne pas te quitter des yeux, j'avoue en récupérant le plus petit flacon de peinture dans ma poche.

-Je vais faire ce que j'ai à faire et après, je vais courir le plus vite et le plus loin possible d'ici. Personne ne saura jamais quelles implications j'ai eu dans cette bataille.

-Les Maunons sont bien des choses, je commence en ouvrant doucement le réceptacle que je viens de placer dans ma main droite, stupide n'en fait pas partie, j'assure en croisant son regard. Les longues lignes sont appliquées sous l'œil gauche pour la protection, la première, j'applique mon index juste sous ses cils et le laisse glisser jusqu'à la commissure de ses lèvres, assure la sécurité de ton corps, j'explique en détaillant l'or se refléter sur sa peau. La seconde, j'en ignore la raison, mais alors que j'effectue le même geste un peu plus loin sur sa pommette, mon cœur bondit bien trop rapidement dans ma poitrine, te garantit un blindage pour ton esprit. Et la troisième, un léger tremblement marque mon hésitation, pourtant je poursuis mon geste en appliquant pour la dernière fois un trait parfait sur sa joue, est comme une promesse, celle de retrouver un foyer quand les combats cessent. Voilà, je ne parviens pas à quitter ses yeux, j'ai fini, je referme le pot contenant la peinture dorée et la replace dans ma poche, c'est mon talisman pour toi.

Je ne m'attendais pas à être complètement déboussolée par le fait de voir ma couleur sur la peau de Raven. J'aime qu'elle puisse être perçue par tout à chacun comme une personne que j'ai mit volontairement sous ma garde. Je n'ai pas agi sous un ordre de Lexa. Pour la première fois depuis que mes yeux se sont posés sur cette fille… femme, j'ai réellement choisie de lui donner ma protection.

Et je l'assume entièrement.

Une part de moi souhaiterait qu'elle ne puisse jamais se détacher de ce signe d'appartenance que je viens de lui accorder. Je lui ai attribué quelque chose que je n'ai jamais daigné ne serait-ce que à penser donner à qui que ce soit d'autre : une part de mon passé.

Et je ne ressens aucune nostalgie. Il n'y a pas de douleur qui menace de m'arracher la poitrine.

Simplement une sorte de satisfaction à l'idée que maintenant une part de Raven va m'appartenir et ce à tout jamais.

-Tu, son regard tombe sur ma main encore maculée de peinture, tu as utilisé du doré ?

Comment aurait-il pu en être autrement ? Si j'avais choisi une autre couleur, la signification n'aurait pas du tout été la même. Non. Je souris. J'ai définitivement fait le bon choix. Je crois même que je ne pourrais pas me lasser de la voir aborder cette couleur si spéciale à mes yeux, à ceux de mon peuple.

-Je ne devrais peut-être pas, elle tire la manche de son haut et l'approche de son visage.

-Je te l'interdis, je dis un peu abruptement en l'arrêtant avant qu'elle ne puisse effacer les traits dorés de son visage. Je te l'interdis, je réitère plus doucement en la suppliant du regard. Ne fini pas ton geste.

-Je, Raven baisse les yeux en même temps que son bras, d'accord.

-Bien.

Je me sens infiniment soulagée. Je choisie de ne pas réfléchir outre-mesure à l'implication de ce sentiment. Je profite simplement de cette sensation agréable.

-Et, je reprends, s'il te plaît Ra-ven, je prends le temps de découper son prénom comme il faut, retire ces chaussures, je les pointe du doigts, elles sont beaucoup trop voyantes pour aujourd'hui.

-Même pas en rêve !

Je ne peux pas m'empêcher de sourire. Je suis bien incapable de comprendre sa réponse. Je sens malgré tout qu'il s'agit d'un refus catégorique. Je le sais qu'elle tient à ses chaussures et même si cette dévotion pour quelque chose d'aussi banal me semble incompréhensible, je le respect, du mieux que je le peux.

-Arrête de sourire, ça veut dire jamais !

-J'ai cru comprendre, oui.

-Parts du principe que mes chaussures et moi sommes indissociables. Comment pourrais-je partir aussi vite et loin que possible sans elles ?

-Elles restent tout de même trop voyantes. J'ai essayé, je hoche les épaules.

-Ne le fais plus, c'est pas le pied ! Personne n'a jamais demandé à Hermès d'enlever ses chaussures ailées et elles étaient bien plus voyantes que les miennes ! Si tu recommences, je te mets un pied dans la tombe. N'essaye même pas de travailler d'arrache pied pour retirer mon précieux ou je ferais de toi un colosse aux pieds d'argile !

Je détourne le regard en sentant un grand sourire étirer mes lèvres. Si je n'avais pas un tel contrôle j'aurais sans aucun doute éclaté de rire. J'ai à peine compris un mot sur deux. Mais comme le "pied" est revenu dans sa réponse pas moins de quatre fois. Je suppose qu'elle l'a fait exprès.

-Général, en percevant mon titre, je reprends tout mon sérieux, nous venons d'apercevoir le signal.

Je m'approche au plus près du bord de la falaise que nous avons gravi en début d'après-midi. Nous sommes venus par groupe de trois personnes afin d'éviter d'être repéré par l'ennemi. Nous avons atteint le nombre de vingt guerriers rapidement. J'empoigne mon épée alors que la nuit est illuminée d'un rouge incandescent, des fusées lumineuses si je me souviens bien du terme qui les désigne. Je peine à croire que la science de Raven soit capable de rendre la nuit encore plus claire qu'une pleine lune.

A partir de maintenant, il faut respecter un silence absolu. Si les Maunons nous repère, les choses pourraient très mal tourner. Je fais signe aux guerriers qui m'ont accompagné afin qu'ils se mettent en place. Je n'en ai pas forcément besoin mais je jete un rapide regard à Raven. Elle s'affaires déjà sur le "clavier", ses doigts bougent à une vitesse incroyable. Je dois me faire violence et la quitter des yeux. Je fixe alors la porte qui pourrait comme lors de notre précédente visite dans cette grotte faire apparaître un de nos ennemis.

Chacun de mes sens est en alerte. J'ai rarement été aussi attentive au moindre petit détail. J'ai même pensé non pas à une mais à trois solutions de replis. Évidemment, je ne serai pas celle qui en aurait besoin mais j'ai pris mes précautions pour Raven.

Un bruit aigu qui pourrait ressembler à un sifflement attire mon attention. Je me permet d'observer la seule représentante des Skaikru dans cette grotte. Elle est perchée sur un grand socle ovale qui, si je me souviens bien, elle a appelé "cuve". J'ai du mal à comprendre comment elle a pu se hisser aussi haut, les paroies sont lisse, humide et même trop chaude pour garder un quelconque contact. Elle a essayé de m'expliquer que tant qu'elle portait son étrange tenue, qui recouvre chaque parcelle de son corps et son casque qu'elle peut relever à sa constance, elle ne craignait rien.

Je préfère tout de même la prudence. Je me demande combien de temps il me faudrait pour la rejoindre si elle devait tomber. Est-ce que j'arriverai à temps ? Il y a peu de chance. Elle se blesserait certainement. De façon purement instinctive, je fais un pas vers elle.

La regarder travailler a quelque chose de fascinant, ça tient presque du sacré. Jamais je n'aurai pensé un jour être à ce point attirée par la science. Et encore moins qu'en l'observant, je ne serais pas complètement effrayé. Raven a rendu quelque chose de cauchemardesque simplement merveilleux.

Je la vois prendre des appuies étrange avant qu'elle ne se laisse glisser un peu trop rapidement vers le bas. Je me précipite mais je ne suis pas arrivée à parcourir la moitié de la distance qui nous sépare qu'elle s'arrête juste avant le sol. Je fronce les sourcils. Je ne comprends pas comment elle est parvenue à éviter la chute. Je reviens me placer quand elle bondit pour rejoindre le sol. J'observe rapidement les guerriers qui comme moi l'entourent. Je remarque sans mal que je ne suis pas la seule à avoir accouru pour la rattraper. Il faut dire qu'une grande partie de notre plan dépend entièrement d'elle.

Elle reprend diverses manipulations auxquelles je ne comprends pas grand chose. Elle travaille vite du moins c'est la sensation que j'ai. D'autant plus quand je la vois retirer son casque qu'elle dépose avec précaution au sol. Elle retourne près du clavier, appuie sur un seul bouton et la structure qu'elle vient de quitter s'illumine de partout. Cette manifestation est suivie d'un grognement sourd des plus inquiétant mais comme Raven ne réagit pas, je suppose que c'est normal. De la fumée blanche s'échappe du réceptacle certain guerriers cherche à se rapprocher mais ils sont arrêtés par la brune qui leur demande de garder leur distance.

Très peu de temps après, elle lève son pouce pour m'indiquer qu'elle a fini. J'acquiesce doucement alors qu'elle reprend son travail sur le clavier et j'attrape la radio qu'elle m'a confiée. Je commence à me familiariser avec son utilisation.

-Heda, je prononce en appuyant sur le bouton, Rae… Ra-ven a désactivé le brouillard, tu peux traverser le périmètre des Maunons sans crainte.

-Nous y allons, sois prudente Anya.

Ces mots ont à peine le temps de se faire entendre au milieu des grésillements que je perçois le son de la corne qui intime l'ordre d'avancer vers la bataille. Je fais un léger signe de tête aux hommes avec moi et nous encerclons la porte afin de protéger cet endroit. Raven nous a expliqué qu'il y avait un risque qu'ils puissent "rebooster" le système et redonner vie au brouillard. Il est donc évident que nous ne laisserons passer personne. La vie d'Heda et de toute notre armée en dépend.

-Parle-moi Ra-ven, je demande assez fort pour qu'elle m'entende.

Elle ne me répond pas. Tout ce que je perçois, ce sont des tapotements et des clics. Je ne m'impatiente pas. A force de garder mes yeux presque toujours rivés sur elle, j'ai appris à être patiente. J'ai fini par comprendre que certaines manipulations prennent plus de temps. Je le sais. Alors pourquoi j'ai cette envie quasi incontrôlable de me retourner afin de m'assurer moi-même qu'elle se porte bien.

J'ai remarqué ces derniers jours que j'avais beaucoup de mal à m'éloigner d'elle. Et quand je le suis, je cherche inévitablement un moyen de garder un contact visuel. Mon cœur bat plus vite et ce rythme effréné n'a rien à voir avec la possibilité que la porte en face de moi puisse s'ouvrir mais avec celui que je ne puisse pas la regarder à mon aise.

J'ai envie de me retourner. Ce désir devient de plus en plus présent. Ne pas lui céder me demande beaucoup, je suis obligée de resserrer mes doigts autour de la poigne de mon arme plus que de raison afin de garder le contrôle. Ma concentration s'effrite comme jamais auparavant. Une seule idée me tient en place, savoir que je pourrais être le dernier rempart entre le danger et Raven.

-Ils viennent de repérer l'armée, annonce-t-elle.

Un murmure presque sourd naît dans nos rangs. Certain prit, d'autres promettent une mort violente et douloureuse. Les chuchotements sont pareil a un essaim d'abeilles, la menace est subtile mais bien réelle. Je suis la seule à garder le silence. Je reste concentré sur mes sens. Tout doucement je ferme mes paupières, le noir qu'apporte mon geste est accompagné de souvenirs qui se succèdent rapidement.

Mon père. Les entraînements. La forge. La lourdeur de ma première armure. La douleur de mon premier bras cassé. Les enchaînements répétés de technique propre à mon peuple. La sensation de fierté qui m'a envahi lorsque j'ai eu le droit de tenir ma première épée. La torture de mes muscles alors que sous la pluie, je courais depuis les premiers rayons du soleil et que la lune était déjà à son plus haut point dans le ciel. La sensation du blé qui court sous nos doigts quand on passe près de lui juste avant qu'il soit coupé. La grandeurs des lacs, leurs bleu foncé et les ricochets qui s'y perdent chaque jour. Un rire. Son rire. Le feu. Les cris. Le sang. La mort. Sa mort.

-Ils essayent d'activer le brouillard.

La voix de Raven me ramène à l'instant présent. Je laisse mes cils se relever lentement. Je suis prête. Qu'importe ce qui franchira cette porte, son nombre ou ses armes. Je ne laisserai rien passer. Rien. Je ne suis pas prête à perdre une seule autre personne à qui je tiens. Pas une seule. C'est dire à quel point cette situation m'est insupportable. Lexa est loin de moi, il pourrait lui arriver malheur sans que je ne sois à ses côtés. Quant à Raven… je secoue doucement la tête.

Pourquoi je pense à elle maintenant ? Cette fille… femme n'est pas importante.

Je serre encore plus mon poing sur mon arme. C'est un mensonge. Si je ne tenais pas à elle, je parviendrais à la quitter des yeux sans que l'exercice me paraissait insurmontable. Je ne garderais pas précieusement cet origami dans ma poche. Je ne serais pas à ce point déterminé à la protéger, même contre Indra récemment. Et surtout… surtout, je n'aurai en aucun cas apposé les couleurs de mon clan, de ma famille, sur son visage.

-Ils n'y parviennent pas, je perçois parfaitement le soulagement habiter ces mots. Okay, ils cherchent d'où vient le problème. Je vais les mener sur une mauvaise piste, je perçois le bruit de ses doigts parcourir le "clavier". L'armée n'est plus très loin de la porte principale de la montagne. Anya, un frisson me parcourt l'échine alors que mon prénom franchit ses lèvres, préviens Heda qu'ils s'arment pour les attendre. J'isole les natifs et les cent. Je… et merde !

Je me tourne vivement alors que je venais de saisir la radio afin de garder l'armée à distance. Je fixe Raven qui se précipite d'un écran à un autre à toute vitesse. Je suppose qu'elle se déplace avec stratégie et ordre mais à mes yeux cette agitation n'a aucun sens. Elle poursuit dans son propre dialecte. Son inquiétude ne m'échappe pas. Je me fais violence pour alerter Heda sur les armes. J'ai à peine fini de lui parler qu'une alarme au bruit assourdissant se fait entendre, notre environnement se teinte de rouge avant de tomber dans la pénombre total, l'intermittence entre cette lumière étrange et le noir se poursuit à un rytme régulier.

L'agitation de Raven commence à m'inquiéter et je ne suis pas la seule à l'être. Plusieurs guerriers me demandent en Tri si tout se passe bien. Ignorant la réponse, je ne dis rien. Mais je m'apprête à donner l'ordre à un autre que moi de prendre le commandement afin de m'assurer que la situation n'échappe pas à une des filles du ciel. Je fais un pas, un seul vers elle au moment où elle disparaît sous un bloc de métal. Je me précipite sans donner de directive lorsque je l'atteins inquiète et prête à user de mon arme, la lumière blanche revient.

La brune ressort de cette étrange chose que j'ai cru qui l'avait avalée en lâchant un grand soupir. Je remarque que son visage est maculé d'une substance noir qui pourrait faire penser au sang d'Heda. Je garde cette remarque pour moi, Raven serait forcément déranger par cette comparaison. Elle lâche quelque chose de lourd sur le bureau, le bruit me fait sursauter. Je remarque que c'est cette chose qu'elle a plus arraché que démonté qui suinte du liquide couleur nuit. Une véritable flaque se crée aux pieds de la mécanicienne, elle grogne de nouveau dans cette langue que je ne comprends pas en essuyant ses mains tout aussi assombri sur l'arrière de ses cuisses.

-Tout va bien ?

-Su hacker esta loco ! (Leur hacker est fou !)

-Raven, je dépose mon arme de façon stratégique avant de saisir fermement ses épaules, ce qui l'oblige à quitter ses écrans des yeux pour me regarder, est-ce que tout va bien ?

-Es más difícil de lo esperado. Tienen un maldito terrorista suicida en el otro lado ! El es un bicho raro ! (C'est plus difficile que ce que je pensais. Ils ont un putain de kamikaze de l'autre côté ! C'est un cinglé !)

-Raven, j'insiste en resserrant légèrement ma prise sur ses épaules.

Ses yeux se plongent corps et âme dans les miens. Il n'y a pas de doute, elle a été complètement chamboulée par ce qui vient de se passer. Je ne comprends pas ce qui a pu la mettre dans cet état. La dernière fois que je l'ai vu aussi effrayé, la vie d'un homme ou plutôt d'un monstre était en péril. Son implication dans ce combat est peut-être bien plus importante que ce que je pensais.

-J'ai confiance en toi, je souffle pour qu'elle soit la seule à l'entendre. N'abandonne pas maintenant, ne nous abandonne pas, sois forte. Les oiseaux sont forcément effrayés avant de quitter leur nid rudz rook mais s'ils ne sautent pas dans le vide, ils ne pourront jamais voler. Ils ont un cœur robuste et insubmersible, j'assure sans la quitter des yeux, comme toi, j'ajoute. Compte jusqu'à cinq et reprends-toi.

Je suis tellement prise dans le moment que je ne remarque pas tout de suite l'implication de mes paroles. C'est lorsque je perçois la voix tremblante de Raven énoncer lentement le chiffre que je comprends.

J'ai utilisé ses mots.

Compte jusqu'à cinq et reprends-toi… c'est ce qu'il disait toujours quand il voyait que je n'étais plus qu'à un battement de cils de tout détruire sur mon passage. La violence a toujours été en moi. Elle était comme une tempête indomptable et destructrice. Pourtant il était capable de la réduire à néant, juste avec ses mots.

Quand j'ai perdu sa voix, il était évident que je bascule, que je devienne une tueuse.

-Cinq… c'est bon, c'est à peine un murmure mais ça me suffit pour m'ancrer de nouveau dans l'instant présent, j'ai fini. Merci, ses iris sont noyées de larmes. J'avais peur, soulagée, je relâche la pression sur ses épaules, mais la peur est passée maintenant.

-Bien.

Je la détaille encore un moment. Je remarque rapidement qu'elle dit la vérité. La peur est passée. Raven Reyes est véritablement plus courageuse qu'elle ne laisse entrevoir. Je suppose que tous les guerriers présents ont pensé qu'elle allait s'effondrer et peut-être que je m'en suis convaincu aussi. Mais elle a repris le contrôle. Cette capacité à reprendre l'ascendant sur son esprit et à ne pas basculer dans des tourments invisibles mais bien réels attire l'admiration et le respect. Mon respect.

-Merci, répète-t-elle.

-Ce n'est rien, je détourne les yeux et récupère mon arme. Parle-moi rudz rook, contente toi de me parler en toute circonstance et nous serons quitte.

-Je me suis complètement reprise, assure-t-elle en se repositionnant devant ses écrans. Tu peux me faire confiance.

Je sais. Cette réponse n'est pas énoncée parce qu'elle pourrait faire plus de mal que de bien. Pourtant, je n'ai aucun doute. Mais j'ai avant tout conscience que nous ne sommes pas seules. Il faut que je trouve un moyen plus subtil de lui faire comprendre que je n'ai aucun doute sur ses capacités et que j'ai la conviction qu'elle sera entièrement capable de nous rapprocher de la victoire.

-Nous sommes dans le noir, complètement aveugle. Tu es la seule à pouvoir voir le danger, à comprendre d'où il provient et quelles peuvent être ses implications. Tu es nos yeux. Tu détiens nos vies, prends-en soin.

-Génial, elle souffle sur la longueur, voilà que je me retrouve à être Haniwa, elle inspire et elle semble de nouveau en pleine possession de ses capacités, ce n'est pas du tout stressant. Je gère. Et puis, les chances pour que ça se termine en guerre flippante sur la glace et en amour impossible sont quasi nulles. Tout va bien. Je gère.

Il y a peut-être encore quelques lacunes. Mais je ne m'inquiète plus vraiment de son habitude d'animer des conversations toute seule. J'irai jusqu'à dire que c'est devenu ma nouvelle normalité. Je pense que je serais bien plus inquiète si elle ne disait plus rien. Et puis j'aime l'écouter même si la plupart du temps, je n'y comprends pas grand chose.

Je retourne me positionner au milieu des autres guerriers. Ils m'interrogent sur la situation et je les rassure. Ce n'est pas difficile, j'ai une confiance absolue en Raven. Je suppose que ce constat devrait m'effrayer au moins un peu. Pourtant, j'ai rarement été aussi calme. Je suis en paix et en accord envers mes sentiments.

Raven Reyes parvient à contrebalancer ses nombreuse faiblesses en une force des plus extraordinaire. Elle a cette capacité à reprendre le dessus en tout temps qui me fait douter du fait qu'elle ait pu s'effondrer une seule fois dans sa vie. Et pourtant, je sais que c'est arrivé. Clarke me l'a dit.

-Okay, entendre de nouveau ses doigts se précipiter d'une touche à l'autre sur le clavier est rassurant, reprenons depuis le début. Tu as voulu jouer Sanguijuela, je vais jouer. Je suis là et tu ne pourras rien faire pour réactiver les armes que j'ai mises hors jeu. Anya, ils sont nombreux devant la porte qui les séparent de l'armée, ils s'équipent pour sortir, je transmets ces informations en même temps. Ils essayent d'ouvrir la porte qui les séparent des cent. Ils ne semblent pas se méfier des natifs enfermés, je vais pouvoir faire entrer Indra et ceux qui se trouvent dans les grottes. J'ai trouvé un moyen d'ouvrir la porte mais il va falloir être rapide, je sens son regard sur moi alors je me tourne pour l'observer, pas plus de deux minutes Anya sinon, ils vont tous mourir.

-Laissons-les tous s'étouffer dans leur propre sang, répond en Tri un homme d'Azgeda.

-Je ne sais pas ce que signifie deux minutes, je réponds à contre cœur.

-Général, s'indigne plusieurs personnes autour de moi. Jus drein jus daun !

-Octavia et Bellamy sauront, m'assure-t-elle. Pas plus de deux minutes, répète-t-elle angoissée, c'est important. Une fois entrés, ils seront dans un sas, euh… une toute petite pièce close. Il ne faut pas qu'ils essayent d'ouvrir la porte. Ils doivent attendre que je l'ouvre.

J'acquiesce avant de retransmettre ses instructions. Elle ne perd pas de temps avant de recommencer à nous informer de tout ce qui se passe. Bientôt, la porte principale s'ouvre laissant entendre les premiers coups de feu, la corne de guerre et les premiers cris. A peu près au même moment, Indra accompagnée d'une dizaine d'hommes ainsi que de Bellamy et sa sœur pénètrent dans la montagne. Quand Raven nous communique cette information, nous ne résistons pas. Nous quittons nos postes pour voir de nos yeux l'impossible se réaliser. Nous vivons un moment historique.

Ce jour marquera à jamais celui de la fin du peuple de la montagne. Du moins, je l'espère. En tout cas, nous n'avons jamais été aussi proches.

-Il y a un détachement d'homme qui est sorti par une autre porte, Raven les pointe sur les écrans, elle a vraiment les yeux partout, ils vont sûrement attaquer sur le flanc gauche. Préviens Heda pour qu'ils ne se fassent pas surprendre.

Je le fais tout en observant un à un les écrans. C'est difficile à analyser. J'ai du mal à m'y retrouver mais je repère tout de même six points où les Maunons sont réunies. A l'extérieur pour les combats en deux endroits. Celui que la Skaikru vient de nous signaler et l'épicentre du combat. Puis, je repère un endroit sombre rempli d'encore plus d'écrans qu'ici. Il y a aussi une très grande salle où semblent être réunis les plus faibles, ce sont les seuls non-armés. Raven avait raison, il y a des enfants. Ces derniers ne doivent pas payer pour les erreurs de leurs aînés. Il y a aussi un groupe qui avance dans les couloirs en rang serré. Ils sont encore plus armés que ceux à l'extérieur. J'ai la certitude qu'ils nous cherchent et plus précisément Raven. Ils sont plus nombreux que nous. Ils représentent la menace principale à mes yeux mais c'est en analysant le dernier groupe, composé de cinq hommes et d'une femme que je comprends toute l'urgence de la situation du peuple du ciel.

-Raven…

-... je vais bien, élude-t-elle rapidement pour m'empêcher d'en dire plus.

Je ne la crois pas. Il est impossible qu'elle puisse dire la vérité. Les Maunons sont parvenues à entrer dans la salle qui réunissait tous les prisonniers des cent. Ces derniers sont assis, complètement effrayés face aux armes pointés sur eux. Au milieu de la pièce se trouve un lit étrange dans lequel un garçon qui n'a pas plus de treize étés est attaché au niveau de ses chevilles, de ses poignets et une dernière lanière est plaquée sur son torse. Une femme aux cheveux noir, habillé en blanc et entrain de le découper vivant. Je le vois hurler. Il tente de se débattre mais rapidement, il finit par ne plus bouger du tout.

Mais c'est loin d'être le pire. Parce que j'ai vu des choses bien plus horribles au cours de ma vie. D'une certaine façon, j'ai pu être bien plus cruelle que cette femme. Il y a pourtant quelque chose qui me rend profondément mal à l'aise et qui me pousse à vouloir intervenir. Au pied du lit se trouvent sept autres cadavres. Elle a choisi les plus jeunes pour commencer son massacre.

Indra a éteint sa radio afin d'avancer dans la montagne sans prendre le risque d'être repéré. Je sais que je ne peux pas communiquer avec elle mais j'en ressens le besoin. Il faut qu'elle trouve un moyen de les aider.

Subitement, j'ai une révélation. Et si… non, impossible. Pourtant… non !

J'observe le profil de Raven. Elle n'aurait pas… elle ne l'aurait pas fait, n'est-ce pas ?

-Raven, je prononce prudemment, ses yeux ne quittent pas les écrans mais je sais qu'elle m'écoute alors je poursuis, pourquoi avoir fait ça ?

-Je ne comprends pas ta question.

-Tu…

-Attends, elle m'arrête en dressant un index entre nous. Je te tiens Sanguijuela, depuis que je la connais, je ne l'ai jamais vu taper sur les touches noire composé de lettres et de chiffres que je suis incapable de comprendre aussi vite. Tiens, prends-toi ça, elle appuie sur une touche et un des écrans devient tout vert, remplie de ligne composé de un et de zéro qui défilent rapidement avant de former un corbeau qui disparaît presque aussitôt, arde en el infierno ! He ganado Sanguijuela ! (Va en enfer ! J'ai gagné Sanguijuela )

-Qu'est-ce qui vient de se passer ?

-Je viens d'envoyer une ligne de code à Sanguijuela dont il n'est pas près de se débarrasser, elle rit. C'était éreintant mais je l'ai eu !

-Qui ?

-Quelqu'un comme moi, elle se pointe, mais du côté des méchants. Il essayait de reprendre le contrôle, je l'en ai empêché et, son doigt se dirige vers les images où se trouve la salle remplie d'écrans, les hommes présents semblent paniquer, j'ai pris le contrôle de toute la montagne, elle aborde un grand sourire. Ils sont finis ! Je peux faire tout ce que je veux, juste en un clic. Oh, elle se redresse subitement, Indra vient d'arriver au point où elle devait rallumer sa radio. Donne moi la tienne, je vais la diriger jusqu'aux natifs.

-Pourquoi, je répète sans faire un geste vers elle.

-Pourquoi quoi, demande-t-elle avec beaucoup d'innocence.

-Pourquoi tu as envoyé Indra vers les nôtres alors que les tiens sont en danger ?

-Je ne comprends pas ta question, répond-elle calmement. Mais je vais tenter de te donner une réponse. Il n'y a plus de "notre" ou de "votre".

-Tu as conscience qu'ils se font tuer ? Tu…

-Les cents n'auraient pas pu aider Indra et le peu de guerriers qu'elle a pu emmener avec elle. J'ai fait le choix le plus logique. Je ne dis pas que c'était une décision facile mais une fois libérés, les natifs seront l'armée de l'intérieur que Clarke a imaginé alors que les cent… ils ne savent pas se battre Anya. Ils doivent… encore endurer la souffrance, juste un peu plus longtemps.

J'en reste bouche bée. Je n'aurais pas pu imaginer à un seul instant que la douce Raven qui m'a supplié tant de fois pour ne pas tuer parviendrait à prendre cette décision. Je tente un regard vers les autres guerriers, ils sont tout aussi impressionnés que moi. Cette décision difficile vient d'accorder une confiance inattendue à cette fille… femme tombée des étoiles.

Il est certain qu'aucun d'eux ne la verra de la même manière après ce choix. Elle vient d'exposer cette force qui la définit mais que jusqu'alors elle se démenait à cacher. Les attitudes changent vite, la méfiance se transforme en quelque chose de tout aussi dangereux : de la convoitise.

Tous les clans sont représentés. C'était une décision d'Heda que j'ai immédiatement validé. Evidemment, je ne m'attendais pas à ce changement radical. Ils s'imaginent déjà tous pouvoir ramener Raven Reyes à leur chef de clan respectif et utiliser sa science pour leur propre bien.

Alors mon propre regard change lui aussi. Si un seul d'entre ose, ne serait-ce que toucher un de ses cheveux : je les tue. J'assumerai les conséquences plus tard. J'accepterai même de mourir de la main d'Heda si c'est nécessaire. Tant qu'aucun d'entre eux ne pense pouvoir se l'approprier, je suis prête à subir n'importe quel châtiment.

Un bruit particulièrement aigu, m'oblige à plaquer ma main libre sur mon oreille en grimaçant. Qu'est-ce que c'est ? Un grognement m'échappe. C'est particulièrement désagréable. Je me force à me reprendre afin de mieux analyser la situation. Je me tourne vers la porte que nous devions surveiller, au moment même où elle s'ouvre lentement.

J'écarquille les yeux en voyant une de leurs armes à feu s'introduire dans la pièce. Je ne prends pas le temps de réfléchir, je saisis Raven par les épaules et la plaque au sol au moment même une slave de balles fondent sur son ancienne position. Les écrans volent en éclat, quelques bouts de verre se figent dans mon cou et mes bras, seuls partie de mon corps non protégés par des vêtements.

Le calme revient. Les hommes de la montagne sont certainement entrain de recharger leurs armes. Je croise le regard de Raven. Je découvre une entaille sur le front mais je pense qu'elle n'a aucune autre blessure. En revanche, elle est complètement paniquée. Je le vois parfaitement dans ses yeux.

Je me redresse très lentement afin de voir qui est encore en vie. Je repère trois des nôtres près à en découdre, clairement pas assez. Cinq sont grièvement blessés mais s'empêchent de hurler pour ne pas être repérer, ils ne seront d'aucune utilité. Les autres sont morts. Je prends la main de Raven et la force à se redresser. Elle ferme immédiatement les paupières, les traits de son visage sont marqués par la douleur alors qu'elle passe sa main gauche dans ses cheveux. J'aurais dû mieux protéger sa tête.

Mais je ne peux pas m'en inquiéter plus longtemps. Je perçois le bruit reconnaissable des chargeurs enclenchés. Les Maunons sont de nouveau près à faire feu. En restant accroupi et sans lâcher la main de Raven, je nous fait passer derrière la cuve. J'observe les alentours. Nous sommes beaucoup trop loin de la falaise. Aucun de mes plans de replis ne sont applicables depuis ma position. J'ai été trop imprudente. S'il arrive quelque chose à l'amie de Clarke, je pense que je ne pourrais pas me le pardonner. Je grogne en Tri quand un des hommes qui vient de massacrer la moitié de ceux présent dans cette grotte prend la parole :

-Rendez-vous immédiatement et il n'y aura plus de morts.

Une slave de coups de feu fait sursauter Raven à la fin de ses revendications. Le rire de cet homme me fait frissonner. J'inspire profondément. Je dois reprendre le contrôle de la situation. Il y a forcément un moyen de nous en sortir. J'ai simplement besoin de réfléchir.

-Vous ne voulez pas vous rendre, poursuit-il alors qui se déplace de ce pas lourd qui caractérise ce peuple, très bien, il rit de nouveau et je cherche mon arme et réalise seulement que je l'ai perdu, certainement au moment de sauver Raven, j'ai une contre proposition, je retire ma veste que je plis délicatement et dépose près de la brune qui agite sa tête de droite à gauche, certainement pour m'intimider de rester à ses côtés, livrer nous le corbeau et nous vous laissons tous partir. Voyez-vous nous n'avons plus besoin de votre sang, sans un bruit, je dégaine les deux couteau emprisonnés jusqu'ici dans ma ceinture, vous nous avez été très utile jusque-là, mais ceux tombés du ciel sont différent, il rit encore, je vais trouver un moyen de lui faire regretter, je vais lacérer son visage jusqu'à ce qu'il soit incapable de se reconnaitre. Le corbeau est l'un d'eux, n'est-ce pas ? Nous allons le découper, lui prendre son essence, le vide de sa vitalité pour nous l'octroyer et enfin nous allons retrouver ce droit qui nous a si durement été arraché : celui de fouler la terre et de respirer à pleins poumons !

Je perçois sans mal un de mes hommes se déplacer, ses pas sont discrets et son avancée rapide. Il n'en reste pas moins un imbécile. Il n'atteint pas la moitié de la distance qui le séparait de l'orateur qu'il se fait abattre par une dizaine de balles dans le corps. Je ne le vois pas s'effondrer mais le bruit sourd de son corps qui rejoint le sol me fait frissonner.

-Ils n'ont plus besoin des combinaisons, chuchote Raven, la greffe de moelle osseuse doit fonctionner, c'est répugnant.

-Alors, reprend l'homme que je me promet de tuer très lentement, qu'allez-vous choisir vos vies insignifiantes, ou celle de ce corbeau ?

-Je devrais peut-être…

-... hors de question !

C'est à peine un murmure. Je ne peux pas me permettre d'hausser la voix mais je n'ai aucun doute sur l'intensité de mon regard. Si elle ose ne serait-ce que suggérer de se sacrifier pour protéger nos vies, je vais lui faire regretter. Elle est trop importante pour se livrer aussi bêtement. D'autant plus maintenant que j'ai vu ce que ces monstres font subir à son peuple. Je refuse même de l'imaginer se faire découper par cette femme.

-Anya écoute-moi, je peux…

-... j'ai dit non !

-Tu pourrais au moins faire semblant de m'écouter. Et si c'était une bonne idée ?

-Toute idée qui suggérait que tu t'éloignes de moi est mauvaise. Ne bouge pas et laisse-moi te protéger rudz rook.

Une étrange musique résonne autour de nous. Je cherche d'où elle provient mais elle s'arrête avant que je n'ai l'occasion de le repérer. Un coup d'oeil vers Raven me fait lever les yeux vers un bloc noir en hauteur dont une voix sort comme de la radio :

-Bonjour à tous et à toutes, citoyens de Blue Ridge, natifs de la Terre et membres des cent. Je suis Cage Wallas et je parle au nom de mon père Dante, notre Président. Il faut cesser immédiatement les hostilités. Je propose donc aux natifs de partir tant qu'il est encore temps, nous allons vous rendre chacun des membres de votre peuple, en échange vous nous laisser disposer à notre guise de la vie des cent. C'est un accord plus qu'avantageux pour vous, nos vieux ennemis. Livrez-nous tous les membres des cent encore entre vos mains, maintenant où je vous anéantis. Acceptez avant qu'il ne soit trop tard, avant que nous éliminions un Heda de plus ou pire, que nous perdions patience et décidions de détruire votre bien le plus précieux : Polis.


Voilà pour le nouveau chapitre de cette fiction. Et c'est la guerre ! Du moins, les hostilités ont enfin commencé avec les Maunons ! J'espère que vous avez apprécié le moment Ranya avant que ça ne s'accélère. Anya se rend de plus en plus compte de l'importance de Raven Reyes pour elle. Cette dernière a su d'ailleurs faire les bons choix pour protéger le plus grand nombre. Mais maintenant le duo est dans la panade… et, les natifs se retrouvent face à un choix dont j'en suis certaine vous espérer le dénouement très différent de la série. Alors à votre avis vont-ils se protéger jusqu'au bout ou la trahison que vous redoutez depuis le début de cette fiction va-t-elle se produire ?

Je suis évidemment ouverte à toutes les critiques, qu'elles soient positives ou négatives, à condition que le commentaire soit constructif.

En espérant vous retrouver pour le prochain chapitre !

GeekGirlG