S'il s'était déjà illustré en exécutant quelques Illusions adroites en cours – souvent pour compenser ses lacunes (bien qu'il ne le fît jamais en potions, sachant pertinemment qu'il serait dangereux de ne pas laisser le professeur Rogue surveiller de près ses désastres) – Nikita cachait encore quelques tours étonnants dans son sac, comme cela ressortit au grand jour durant un cours de Défense Contre les Forces du Mal, présidé par le professeur Lupin. Ce dernier, constamment miteux, l'air mal en point malgré son enthousiasme et son énergie en classe, avait décidé de consacrer une séance entière à la défense en cas de confrontation avec un sorcier. Pour le moment, ils avaient principalement abordé les créatures, telles les Épouvantards ou les Chaporouges ; c'était la première fois qu'ils allaient s'intéresser aux duels magiques.

Les élèves eurent d'abord à se répartir par binômes, dont l'un des membres détenait le rôle de l'attaquant tandis que l'autre devait tenter de se défendre. Par pur hasard, Nikita se retrouva face à Melwys Stingers, la meilleure élève de la classe, qui se contenta de lui adresser un sourire un peu condescendant.

« Les sortilèges de protection demandent souvent bien plus de concentration et de maitrise de soi que les sorts d'attaque, expliquait le professeur Lupin. Ce pour trois raisons simples, quelqu'un peut-il me dire lesquelles ? »

Nikita leva la main, confiant.

« Oui, Lebedev ?

« Cela n'exige pas une grande puissance magique mais demande une importante capacité d'anticipation, une bonne réactivité et beaucoup de sang-froid, pour éviter de paniquer pendant qu'on lance le sort, répondit le Russe.

« Exact, cinq points pour Serpentard. Comme vous le voyez, la magie défensive fait surtout appel à des qualités humaines, non à de grandes réserves de magie. C'est principalement via une connaissance aiguisée de soi-même qu'on accède à une bonne aptitude à se défendre. Cet exercice vous demandera donc de travailler votre capacité d'introspection, ce que vous pourrez faire par la suite même en dehors des heures de cours pour progresser. Bien, avez-vous des questions ? Non ? Eh bien, allez-y, je vous surveille. »

Les élèves, excités par la perspective d'agresser impunément leurs camarades (la moitié d'entre eux étaient des Serpentards, que voulez-vous ?), se mirent joyeusement au travail : tandis que l'un lançait une attaque, l'autre devait se concentrer et puiser suffisamment d'énergie pour déployer un bouclier de protection basique grâce à Protego, la formule qu'avait écrite le professeur Lupin au tableau.

« Tes illusions ne serviront à rien, ici », se moqua Melwys en pointant sa baguette sur son binôme stoïque.

Le fait que son camarade de classe trichait parfois en essayant de duper ses professeurs avait commencé à lui taper sur les nerfs, elle qui adorait marquer sa supériorité écrasante dans tous les domaines.

Pour le moment, il avait l'air de se concentrer : les jambes légèrement écartées, les yeux fermés, ses mains jointes tenant sa baguette devant son visage. Quel idiot… il s'attendait sans doute à ce qu'elle n'attaque que lorsqu'il serait prêt… Avec délectation, elle se prépara mentalement à lui infliger un sortilège particulièrement humiliant… Crache-Limaces, oui, voilà qui serait parfait…

« Des limaces ? Beurk ! Hmm, décevant, je m'attendais à mieux venant de toi. »

Sous le choc, elle recula d'un pas, les yeux écarquillés. Nikita avait rouvert les yeux et lui souriait aimablement.

« Tu devrais réessayer, lui dit-il.

« Co…comment… ?

« Simple coup de bluff, content de voir que j'étais tombé juste. En même temps, ce n'est pas très prudent de ta part de l'enseigner aux élèves de première et deuxième année, on sait tous que c'est ton sort préféré. »

Melwys rougit de colère.

« Faut bien qu'ils puissent se défendre !

« Mais je ne remets pas en question tes bonnes intentions, s'amusa Nikita. Cependant, on perd du temps, là… »

Calmant son courroux, consciente que c'était là toute la stratégie de déstabilisation de cet enfoiré de prestidigitateur, la préfète souffla un coup et pointa à nouveau sa baguette sur lui. Oh, il allait souffrir, ça oui ! Ha ! Il fermait encore ses yeux, cet imbécile ! Mais il ne l'aurait pas deux fois : pour pratiquer la Legilimencie, il fallait être un sorcier très doué et très puissant, ce qui n'était certainement pas son cas, il n'y avait qu'à voir son niveau en potions ! La première fois, ce n'était rien qu'un coup de chance…

Qu'allait-elle bien pouvoir faire ? Ah, ça y était, elle avait trouvé…

« Langue de corne ? Intéressant ! »

Tombant des nues, Melwys abaissa une seconde fois sa baguette, lèvres pincées.

« J'ai visé juste ? s'enthousiasma Nikita.

« Comment… ?

« Comment ? Rien de plus simple : la première fois, tu voulais me lancer un sort du niveau d'un première année pour m'humilier sans doute, sauf que j'ai par hasard réussi à le deviner. J'ai donc déduit que le second sortilège serait d'une toute autre nature… quelque chose qui m'empêcherait de me défendre ou de te déstabiliser sans forcément m'humilier – inconsciemment, j'étais devenu pour toi un adversaire plus respectable puisque j'avais réussi à te bluffer – et qui soit suffisamment rare pour que ce ne soit pas évident. Un sort, donc, que tu connais sans doute mais n'as jamais utilisé devant moi. Il y en a une multitude qui remplissent ces critères bien sûr, mais assez peu sont évoqués dans les manuels officiels de première à quatrième année – je les ai feuilletés avant de venir à Poudlard, pour me faire une idée. Et puis, j'ai pensé que de ton point de vue Langue de Corne avait le mérite d'être brillamment élégant… comme toi ! »

Son sourire s'élargit brusquement lorsqu'il la complimenta, tandis que son expression à elle se rembrunit : cet enfoiré se foutait de sa gueule, en plus ! Certes, elle sentait en son for intérieur qu'elle devrait éviter de s'énerver… mais elle n'y tint plus ! Rageusement, elle leva son bras puis l'abaissa avec force en criant un maléfice, et fut aveuglé pendant une seconde par la puissance de la déflagration.

Entre-temps, quatre ou cinq Poufsouffles alentours s'étaient arrêtés pour les observer avec fascination ; le professeur Lupin, qui arpentait la salle en prodiguant des conseils, regardait aussi la scène sans rien dire, sourcils froncés.

Au moment où Melwys hurlait son sort, il s'approcha d'un bond, inquiet pour la sécurité de l'élève qui faisait face à la jeune fille déchainée : à son plus grand étonnement, il vit que l'air autour de Nikita ondula violemment lors de l'impact du rayon lumineux, puis toute l'image se morcela et se brisa, laissant place à un espace vide.

Profitant de son leurre, l'illusionniste s'était déplacé sur le côté, le long du mur, sans que personne ne le remarque. À présent, Nikita se tenait juste à côté de Melwys. Elle ne s'en rendit compte que trop tard : il pointait nonchalamment sa baguette sur elle.

« пусть ! »

La sorcière lâcha sa baguette de surprise et recula, les jambes tremblantes, en poussant un cri aigu. Le Russe ramassa l'objet magique et le fit tourner dans ses doigts, songeur, avant de le lui tendre charitablement.

« Bravo Lebedev, très impressionnant, applaudit le professeur Lupin, sourcils haussés. Dix points pour Serpentard ! Cependant, il est dommage que vous n'ayez pas utilisé le Charme du Bouclier, comme demandé…

« Merci professeur, mais je suis certain que Melwys se débrouillera bien mieux que moi pour ce qui est de la défense, répondit modestement le concerné. Tenez, Impedimen…

« PROTEGO ! » beugla la préfète sous l'impulsion de l'adrénaline.

L'onde de choc du sort projeta son adversaire à deux mètres plus loin, où il atterrit douloureusement sur ses fesses.

« Anticipation, réactivité, sang-froid, grimaça-t-il d'un ton narquois tandis que deux Poufsouffles l'aidaient à se relever en lui demandant s'il allait bien. Pas de doute, elle mériterait au moins un Optimal…

« Merci pour votre suggestion Lebedev, mais je pense pouvoir me débrouiller pour noter mes élèves, répliqua le professeur Lupin. Dix points pour Serpentard pour ce joli Protego. »

Melwys Stingers lui adressa un regard dédaigneux, mine de dire « je me fiche royalement de ta récompense, je connais ma valeur et celle-ci est inestimable », mais qui demeura dans les limites admises de la politesse.

« Bien, je propose que vous reformiez des groupes, annonça le professeur. Il est toujours intéressant de s'être entrainé face à des adversaires diversifiés, cela vous rendra plus adaptables aux situations nouvelles. Je demande cette fois-ci à ce que vous ne vous restreigniez qu'à des maléfices basiques, type Expelliarmus… je pensais que cette règle était implicite dans mes premières consignes mais à ce que j'ai pu constater, ça n'a pas été le cas. Bien, allez-y. »

L'heure suivante se poursuivit sans anicroches grâce à la contrainte imposée par le professeur. À peu près le quart des élèves parvenait à présent à générer le Charme du Bouclier à temps, tandis que les autres se faisaient toujours désarmer. Nikita, qui se retrouva dans le rôle de l'attaquant face à John, un Poufsouffle, ne parvenait qu'à peu près une fois sur deux à prendre par surprise son adversaire. De toutes évidences, il passa le reste du temps à s'ennuyer ferme et ne tenta plus rien de nouveau ou de déroutant.

Vers la fin du cours, tandis qu'il examinait les binômes exténués pour la plupart, le professeur Lupin arriva silencieusement derrière Nikita et lui glissa à voix basse :

« Pourriez-vous rester quelques instants après la fin du cours, je vous prie ? »

Lorsque l'heure eut sonné, le Russe laissa partir ses camarades et s'adossa contre le mur le plus proche pour récupérer un peu. La séance avait été physiquement épuisante et intellectuellement décevante. Il n'aimait pas s'entrainer de manière répétitive.

« Venez dans mon bureau, Lebedev », l'appela Lupin tandis qu'il rangeait ses affaires dans son sac usé.

Nikita l'y suivit. Le bureau était petit mais confortablement meublé, avec une grande armoire poussiéreuse sur le côté où étaient entreposés les accessoires destinés aux séances de cours, quelques tabourets et deux sièges moelleux. Remus Lupin s'assit en face de Nikita, une large table recouverte de piles de documents divers plus ou moins ordonnées les séparant.

« Voulez-vous du thé ? demanda le professeur.

« Non merci, professeur », répliqua poliment Nikita.

Cela fit imperceptiblement sourire l'adulte.

« Vous n'avez pas encore contracté les petites habitudes anglaises, n'est-ce pas ?

« Oh non, ce n'est pas ça… c'est juste que le thé me rappelle les potions, professeur », expliqua naïvement le Russe.

Le professeur Lupin eut une moue amusée.

« Ah oui, j'ai ouï dire que vous nourrissiez une certaine aversion inexplicable pour cette matière.

« Elle n'est pas si inexplicable que cela, professeur, argua Nikita. Je n'arrive simplement pas à… à comprendre son intérêt, parce que personne n'explique jamais pourquoi les potions fonctionnent. Je veux dire… on nous demande simplement de mélanger des bouts de racines gluantes et des parties desséchées de cadavres d'animaux en respectant scrupuleusement les règles : qui peut trouver cela exaltant ? Et puis, comment les potions ont été inventées, à quoi ont pensé leurs concepteurs en mélangeant les différents ingrédients, l'ont-ils fait complètement au hasard ou connaissent-ils les réactions qui se produisent entre les éléments mélangés… et dans ce cas, pourquoi ne pas nous les enseigner directement au lieu de perdre notre temps avec des formules à apprendre par cœur ? »

Lupin se gratta la tête, pensif, examinant attentivement son élève. Lorsque ce dernier eut fini de débiter ce qu'il avait sur le cœur, le professeur ouvrit la bouche et parla d'une voix douce :

« Je vois. En réalité, c'est la nécessité d'obéir tout en étant partiellement plongé dans l'ignorance qui vous rebute, pas les potions en soi. Sur ce point, je ne puis qu'être d'accord avec vous : les méthodes d'enseignement officielles ne sont pas les plus adaptées pour tous… Certains esprits craignent la discipline et s'y opposent instinctivement : c'est sans doute votre cas. »

Nikita demeura impassible, ses yeux pâles rivés sur le professeur mais le regard quelque peu vague, flottant. Quelques instants s'écoulèrent tandis que les deux sorciers étaient plongés dans un silence songeur. Le professeur Lupin reprit la parole après cette courte pause :

« Vous vous demandez sans doute pourquoi je vous ai fait venir.

« En effet, professeur.

« Je dois dire que j'ai été très surpris par votre performance de tout à l'heure. Comme vous l'avez si bien dit, l'art de se défendre nécessite de l'anticipation, de la réactivité et du sang-froid : il me semble que vous êtes très rodé en ce qui concerne la première de ces compétences… »

Nikita eut un grand sourire franc.

« Merci, professeur.

« À vous regarder de loin, on pourrait même penser que vous optimisez cette qualité humaine naturelle avec de la magie occulte…

« Je n'ai jamais vraiment cru aux qualités humaines, professeur.

« Comme je m'en doutais… Vos capacités en terme de magie psychologique sont très précieuses. J'imagine qu'il va de soi que vous n'en abusez pas, en dehors des situations où leur plein déploiement s'impose...

« Naturellement, professeur… pour qui me prenez-vous ?

« Vous aviez l'air suffisamment remonté vis-à-vis de mademoiselle Stingers pour que je m'inquiète de la possibilité d'éventuelles… représailles de votre part ?

« Melwys m'avait annoncé d'emblée que mes sorts d'illusion ne me seraient d'aucun secours face à elle, professeur. J'ai simplement voulu lui démontrer le contraire – et y suis assez bien parvenu, je pense.

« Je vois… un objectif tout à fait pédagogique, en somme.

« Exactement, professeur. Professeur… puis-je vous poser une question personnelle ? »

Le professeur Lupin pivota légèrement la tête et se cala davantage dans son siège. Bien qu'il le cachât assez habilement, il redoutait quelque chose.

« Si vous souhaitez Lebedev, mais je ne m'engage pas à y répondre. »

Le regard bleu délavé sembla vouloir transpercer de part en part le professeur, qui déglutit malgré lui. Il allait certainement devoir mentir… et ça ne lui plaisait pas. Pas tant le principe en soi de mentir, mais plutôt le fait qu'il se doutait que son interlocuteur le saurait instantanément. En son for intérieur, il se fustigea d'avoir souhaité avoir cette conversation.

« Êtes-vous malade, professeur ? »

L'intéressé haussa les sourcils, étonné.

« Euh… non, enfin si… en quelque sorte… »

Nikita le dévisageait, les yeux froncés, avec insistance, curiosité et même… espoir ?

« Pourquoi cette étrange requête ? demanda Lupin d'une petite voix, une goutte de sueur perlant sur le front.

« Pour… pour rien. Désolé, professeur, une pensée m'avait traversé l'esprit. »

Rien dans son visage ne pouvait trahir s'il… s'il savait.

Le professeur Lupin se souvint alors d'un événement qui l'avait déconcerté, deux semaines plus tôt. Il se pencha un peu en avant et pivota son visage dans un angle différent.

« Et vous, Lebedev… Je crois me rappeler de mon premier cours avec votre classe, celui avec l'Épouvantard. Lorsque le tour est venu à vous, l'Épouvantard a pris une forme… disons… inhabituelle. Une vieille dame maigre aux cheveux blancs, vêtue en blanc, si je me souviens bien – je ne l'ai aperçue qu'une fraction de seconde, vous vous êtes montré particulièrement vif pour la transformer en ballon de baudruche géant.

« Effectivement, professeur. Mais si vous voulez bien m'excuser, je préférerais ne pas m'étendre davantage sur ce sujet, ce n'est pas une histoire très intéressante…

« Très bien, Lebedev. Je respecte votre choix.

« Merci professeur. Ce sera tout ?

« Oui Lebedev, vous pouvez aller manger. Bon appétit ! »

OooO

« Auriez-vous par hasard des problèmes de lecture, monsieur Lebedev ? tonna sèchement une voix aussi chaleureuse qu'une barre de fer congelée à -273,15°C. D'ici, je peux aisément lire : « couper délicatement en quatre la feuille de Dictame puis la déposer au fond du chaudron AVANT d'ajouter la bile de renard mélangée à six gouttes d'extrait de Mandragore ». Vos voisins ont tant bien que mal procédé ainsi et obtenu des résultats… seulement médiocres. Vous, en revanche, vous avez mis la bile de renard d'abord, balancé l'équivalent de cinquante feuilles de Dictame non coupées par-dessus et carrément oublié l'extrait de Mandragore. Par ailleurs, il me semble que… oui, ce que vous avez mis n'était pas de la bile de renard, vous vous êtes encore trompé de flacon. Votre incompétence est si phénoménale qu'elle frôle parfois une forme particulière de génie : avec quelques gouttes de ce que vous venez de faire là, vous pourriez aisément empoisonner la moitié de la faune résidant dans la Forêt Interdite. Voire les deux tiers. »

Sous les ricanements soigneusement étouffés de ses voisins, Nikita fixa d'un air penaud le contenu de son chaudron qui moussait et émettait une odeur désagréable, au lieu d'être de couleur rouge et de sentir le citron.

« Pour ce refus continuel et évident de suivre des consignes claires, je me vois au regret de devoir retirer dix points à Serpentard, continua le professeur Rogue d'un ton impassible. Vous vous rendez sans doute bien compte, monsieur Lebedev, que cette situation ne peut plus durer ?

« En effet, professeur. Mais si je puis me permettre, professeur, j'ai toujours eu de grosses lacunes en potions et…

« À ce niveau-là, ce ne sont plus des lacunes, Lebedev : c'est un handicap. »

Severus Rogue soupira.

« Puisque les règlements de cet établissement exigent que les élèves quittent leurs cours vivants et en un seul morceau, je me vois dans l'obligation de vous incorporer à un groupe qui pourrait vous surveiller – pour votre propre sécurité. Ça, ou vous virer définitivement de mes cours… mais je préfère ne pas avoir à recourir à de telles extrémités. Messieurs Weasley ! Au lieu de ricaner bêtement avec votre ami Jordan, venez donc plutôt aider votre camarade à préparer sa potion… enfin, ne le laissez surtout pas y toucher, si vous désirez survivre à ce cours. Bien, je le confie à vos bons soins. »

Les jumeaux adressèrent un regard désolé à Lee, contraints de se séparer de lui et de le laisser tout seul, n'ayant d'autre alternative que d'obéir à leur tyrannique instituteur. Tandis que Rogue s'éloignait de la table de Nikita, Fred et George allèrent se placer de part et d'autre de leur camarade de Serpentard. Ce dernier examinait attentivement le flacon qu'il avait pris pour de la bile de renard, les sourcils froncés.

« Alors le Mage Noir, on a oublié ses lunettes ? le taquina George à voix basse.

« Ou sont-ce les émanations hallucinogènes s'élevant de ton chaudron qui ont fini par attaquer le cerveau ? s'inquiéta faussement Fred.

« Je pencherais plutôt pour la seconde hypothèse, répondit Nikita.

« Diable, c'est vrai que ça pue ! constata George en reniflant la potion ratée.

« Presque autant que du fromage français, précisa Fred.

« On va devoir recommencer tout ça, c'est irrécupérable… Tergeo !

« Attends George… on n'aurait pas dû en conserver un échantillon ? Pour nos projets…

« Quoi, de ça ? Tu veux empoisonner notre clientèle ? »

Le Russe leur jeta un regard surpris tandis qu'ils pinçaient les lèvres, conscients d'en avoir trop dit.

« Votre clientèle ? fit Nikita. Ainsi… vous vous destinez à vendre vos expériences à des gens !

« Je n'aime pas trop le terme d'« expérience »… George, t'en penses quoi ?

« Moi non plus, Fred. Je préfère parler de « produits de haute gamme ».

« Des produits en cours de développement, pour l'instant.

« Naturellement.

« Dès que vous aurez fini de discuter, vous pourrez peut-être daigner vous mettre au travail, il ne vous reste qu'une heure et demi, résonna la voix du professeur Rogue de l'autre extrémité de la salle de classe. J'enlève dix points à Gryffondor. »

Fred et George lui adressèrent un regard haineux, mais Rogue n'était même pas tourné dans leur direction, trop occupé à terroriser Milena McCormick, une fille de Gryffondor très émotive qui était actuellement au bord des larmes tout en remuant le contenu de son chaudron avec l'énergie du désespoir. Mais l'avertissement les dissuada de tenter de se rebeller et ils se détournèrent avec morosité et amertume pour commencer à préparer la potion de Soin des Ongles Incarnés.

Au bout de quelques minutes, Fred dut stopper la main de Nikita, qui s'apprêtait à jeter quelque chose dans le chaudron.

« Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-il.

« Ça ? Euh… des raisins secs, je crois…

« Hein ? C'est pas sur la liste des ingrédients, ça !

« Non, mais je m'étais dit que ça donnerait du goût. La bile de renard, c'est sûrement dégoutant à boire.

« Mais … ! s'énerva Fred. Mais tu fais complètement n'importe quoi, en fait ! C'est pour ça que tu foires systématiquement ! »

Nikita eut l'air sincèrement étonné.

« Ah bon ? Je sais pas, je suis toujours mon intuition… Dans les autres matières, ça marche ! »

Fred se frotta l'arête du nez, soudain très las. Entre-temps, George était parvenu à retrouver le bocal dans lequel Nikita avait pris les prétendus « raisins secs ».

« Ce sont des rates de souris, informa-t-il les deux autres. Heureusement que tu l'as arrêté à temps…

« Pourquoi ?

« Ça aurait formé un gaz extrêmement toxique, expliqua Fred. On vient d'échapper à la mort de justesse. On devrait fêter ça.

« C'est aussi mon avis ! renchérit George. En vertu de la fête que nous inaugurons à cet instant, nous te donnons l'ordre de ne plus toucher à rien et de nous regarder faire, Nikita Lebedev !

« J'approuve entièrement la décision de mon frère !

« Maintenant, assieds-toi là…voilà… et laisse-nous nous occuper de tout.

« Tu verras, grâce à nous tu vas écoper du tout premier Optimal de toute ta vie en potions ! »

Malheureusement, les prédictions des Weasley s'avérèrent inexactes car ils récoltèrent un médiocre « Acceptable » en dépit de leurs efforts. Cependant, c'était déjà bien meilleur que les habituels « Troll » de Nikita, qui était aux anges.