Dix-neuf ans plus tard…

Poc… Poc… Poc…

Les claquements secs de plus en plus proche d'une canne se répercutaient distinctement et à intervalles réguliers derrière la porte de la salle de classe vide, seulement occupée par la directrice Minerva McGonagal silencieusement assise derrière le bureau professoral. Elle lisait. Elle ne s'interrompit que lorsque les bruits de canne s'arrêtèrent et que quelqu'un frappa trois coups fermes.

« Oui, entrez ! » cria-t-elle pour être sûre d'être entendue.

Son visiteur s'exécuta : la porte pivota pour laisser place à une silhouette… familière, mais tout de même bien différente de l'adolescent qu'elle avait connu une vingtaine d'années plus tôt.

Poc… Poc… Poc… Poc…

Ses pas étaient silencieux, il faisait attention lorsqu'il posait ses pieds sur le sol seul le bruit de la canne étrange sur laquelle il s'appuyait imperceptiblement le trahissait.

Il traversa ainsi toute la salle, passant à travers les rangées de tables et de chaises abandonnées malgré lui, il embrassa d'un regard la pièce qui éveillait en lui des sentiments nostalgiques, mais cela ne dura qu'un instant. En quelques pas – paisibles, lents et posés – il fut devant le bureau du professeur McGonagal et braquait son regard bleu délavé droit dans le sien.

Nikita Lebedev avait effectivement bien changé depuis toutes ces années, la vieille femme le vit tout de suite : ses cheveux s'étaient éclaircis, parsemés de mèches grisonnantes, virant sur une teinte poivre et sel qui remplaçait le brun foncé de sa jeunesse ; ses traits étaient plus fermes, plus mûrs, mais demeuraient émaciés, avec ses joues encore davantage creusées, ses pommettes plus marquées, sa mâchoire affinée quoique plus nettement dessinée ; quelques rides de fatigue, des cernes profondes et un teint presque grisâtre indiquaient son état de santé fragile. En ce qui concernait sa tenue, il était vêtu avec une étonnante élégance sobre à laquelle la directrice ne s'était pas attendue : simple chemise grise surmontée d'un veston un peu baroque de couleur beige dans lequel était rentrée une lavallière violette – le tout enveloppé dans une large cape noire ornée de fourrure argentée au col.

Son attention fut cependant attirée par la canne qu'il tenait dans sa main gauche et sur laquelle il s'était légèrement appuyé, maintenant qu'il ne marchait plus : de loin, c'était une simple branche épaisse, probablement pas sculptée, présentant de nombreuses fissures et rugosités – pas l'outil le plus pratique pour s'aider à se déplacer. De plus près, en revanche, la sorcière remarqua de fins rameaux de plante grimpante qui prenaient naissance dans certaines aspérités et s'enroulaient autour de toute la branche : par endroits, ces tiges aboutissaient à de petites feuilles, qu'elle reconnut comme appartenant à du chèvrefeuille. En outre, en s'y attardant davantage, elle se rendit compte que la branche n'était en réalité probablement pas totalement morte : à travers quelques trous dans le bois, elle pouvait voir filtrer une pâle lueur surnaturelle – sans doute la source qui alimentait aussi les racines du chèvrefeuille. Lorsque Nikita s'arrêta, les feuilles furent parcourues d'un léger frémissement et certaines bougèrent un peu. Les doutes de la directrice sur la nature magique de la canne furent confirmés lorsqu'elle s'aperçut de la disposition de la main gauche de son visiteur : ses doigts et les rameaux du chèvrefeuille étaient étroitement entremêlés – il aurait été impossible qu'il la pose sans les déchirer, et encore plus impossible qu'il s'en empare de la sorte.

Rien que cet objet avait suffi à éveiller la curiosité de Minerva McGonagal.

Elle finit par hocher poliment la tête en guise de bienvenue et faire signe à son invité de s'asseoir. Il s'exécuta elle constata que sa théorie sur la canne était juste : au moment où il s'en sépara pour la poser à côté de lui, les lianes enroulées autour de ses doigts relâchèrent prise puis serpentèrent discrètement le long de la branche comme pour se lover plus confortablement. Il n'y accorda pas même un regard, sans doute habitué à cette sensation.

« Bonjour, monsieur Lebedev, commença la directrice, esquissant un sourire tout en ressassant quelques souvenirs. Cela fait bien longtemps…

« En effet, professeur – enfin, devrais-je plutôt dire, madame la directrice. C'est… bien regrettable qu'on ne se soit pas vus plus tôt…

« Les choses sont allées si vite, que voulez-vous. Et puis… il y a eu la guerre… »

À cette remarque, les deux frissonnèrent – pas pour les mêmes raisons. Le professeur McGonagal crut presque voir de la culpabilité passer dans les yeux de son interlocuteur et en comprit la raison : les amis qu'il s'était faits en Angleterre avaient souffert, mais il n'avait pas participé au conflit. Malgré elle, la vénérable sorcière ressentit l'envie soudaine de le lui reprocher – envie qu'elle réfréna aussitôt. Comme tout le monde, elle avait été traumatisée par la guerre, la perte des proches… la participation d'un allié de plus n'y aurait rien changé. N'empêche, songea-t-elle tout de même, que c'était à cause de ce genre de personnes inactives, n'osant pas s'impliquer, que des salauds et des criminels parvenaient au pouvoir.

Elle fut interrompue dans ses réflexions par l'intervention de Nikita, qui regardait sans ciller la pièce autour de lui :

« Étrange… pourquoi n'est-on pas dans votre bureau ? »

Un peu prise au dépourvu, l'ancienne enseignante le regarda sans savoir quoi répondre.

Il la dévisagea attentivement, sourcils faiblement froncés : c'était ce même regard perçant, auquel rien ne semblait pouvoir échapper, ce regard qui lui rappela aussitôt…

« Dumbledore, dit le Russe – ce qui la fit sursauter. Vous n'osez pas aller dans votre bureau à cause de lui… n'est-ce pas ? Malgré tout ce temps, inconsciemment, vous considérez toujours le bureau du directeur comme étant le sien… »

Elle grimaça légèrement.

« Peu importe l'endroit où nous nous trouvons, monsieur Lebedev…

« Oh, vous savez, vous pourriez presque m'appeler « collègue » Lebedev ! lança-t-il joyeusement. J'ai passé une... non, deux années à enseigner…

« Ah oui, vraiment ? s'étonna la directrice. Quelle matière, je vous prie ?

« Legilimancie, Occlumancie, tout le fatras… Dans le supérieur, naturellement.

« Hum… Je vois.

« J'ai aussi donné quelques cours particuliers à des membres du Gouvernement magique russe… mais peu importe en réalité, je ne sais même pas pourquoi je vous en parle ! »

Il émit un petit rire un peu gêné, tandis que le professeur McGonagal esquissait à peine un rictus. Même dans le monde sorcier, il y avait toujours eu un brin de rivalité entre enseignants au collège/lycée et professeurs du supérieur : les premiers se sentaient dévalorisés tandis que les seconds se montraient hautains sans s'en rendre compte.

« Vous êtes venu me voir avec une demande très spécifique, reprit la directrice d'un ton un peu cassant, mais tout en demeurant assez évasif sur la véritable… nature de cette demande. Je ne puis cacher ma curiosité. Bien que cela me fasse également très plaisir de vous revoir, j'aimerais que vous m'éclaircissiez sur ce point…

« Oh, j'y venais, j'y venais, madame la directrice ! l'assura l'homme en esquissant un mouvement pour modérer son impatience.

« Bien. Alors, qu'en est-il ? »

Lebedev sembla prendre une profonde inspiration avant de se lancer. Pour une deuxième fois depuis le début de leur entrevue, McGonagal remarqua avec un pincement de pitié au cœur son aspect maladif, particulièrement visible en cet instant : un souffle un peu trop rapide et sifflant pour quelqu'un d'assis sur une chaise, une intonation de voix fatiguée, surtout en fins de phrases, les cernes qui ressortaient lorsqu'il détournait son regard hypnotique, ses joues un peu trop creuses même pour sa corpulence menue et les deux seules taches de couleur sur ses pommettes saillantes, entourées du grisâtre pâle du reste de son visage. En certains points, il lui rappelait le regretté professeur Lupin ; mais elle pressentait qu'en l'occurrence, Nikita n'était très certainement pas un loup-garou.

« Je voulais vous demander, commença-t-il, un poste d'enseignant à Poudlard.

« En effet, c'est ce que vous aviez annoncé dans votre lettre…

« Oui… Seulement, je voulais parler des détails seul à seul avec vous. C'est… c'est un peu délicat à expliquer.

« J'ai tout mon temps, monsieur Lebedev. Quelle est votre demande exacte ?

« Eh bien… c'est-à-dire que… J'ai beaucoup réfléchi aux différences que j'ai pu observer entre Durmstrang et Poudlard, ces derniers temps, et je me suis aperçu que Poudlard proposait moins de matières optionnelles dans le domaine de la magie – oh, certes, il y a l'Étude des Moldus et la Divination qui n'existent pas à Durmstrang, mais c'est à peu près tout. Les sorciers britanniques m'ont toujours paru exagérément frileux lorsqu'il était question de certaines… formes de magie : tout ce qui touche aux arts de l'esprit – alors qu'il serait selon moi essentiel d'apprendre aux enfants à se défendre face à ceux qui voudraient les manipuler – ainsi que la magie des forces vitales, que tout le monde ici considère à tort comme étant foncièrement maléfique.

« Vous voulez dire… la magie noire ?

« Oui, et c'est pour cela que je suis venu demander un poste : prenez-moi un an en tant qu'enseignant externe, j'organiserai de petits stages d'initiation pour les élèves volontaires de tous les cycles… Je leur apprendrai d'abord les bases théoriques : souvent, les sorciers qui s'intéressent à la magie que vous appelez « noire » pensent d'emblée qu'elle ne sert qu'à donner la mort ou à torturer. Je tiens à leur montrer les innombrables applications qui n'ont rien à voir avec ces sinistres objectifs…

« En somme, vous me demandez de vous prendre en tant que professeur de Magie Noire ? » le coupa sèchement la directrice.

Il lui adressa un regard un peu confus et acquiesça.

« Vous rendez-vous compte, monsieur Lebedev, reprit le professeur McGonagal, que la dernière demande de ce type à un directeur de Poudlard date d'il y a plus de soixante ans ?

« Ah oui, vraiment ? Et on l'a refusée ? »

McGonagal lui lança un mauvais regard.

« L'auteur de cette demande n'était nul autre que Tom Jedusor, alias Lord Voldemort.

« Oh… La raison de vos réticences me paraît soudain plus limpide… »

Il y eut un instant de blanc. Enfin, Nikita, n'y tenant plus, reprit la parole d'une voix douce :

« Écoutez, madame la directrice… je ne suis pas V…Voldemort. Je ne fais pas cela pour me constituer une armée de mages noirs… accordez-moi seulement quelques mois, de toutes manières je n'aurai pas beaucoup plus de temps. Offrez donc la possibilité aux élèves curieux ou à ceux dont le cœur est rempli de rancune : je peux leur montrer une autre alternative, les détourner de l'utilisation maléfique de la magie noire en leur faisant comprendre l'importance qu'a la vie dans cette discipline… »

Son ton était presque suppliant à présent. Le professeur McGonagal, jusque-là impassible, se pencha en avant pour l'examiner de plus près.

« Qu'avez-vous, Nikita ? demanda-t-elle en baissant la voix. Vous n'êtes pas un enseignant par nature, j'ai toujours penséque vous vous épanouiriez dans la recherche… »

Il agita la main en secouant la tête avec un demi-sourire crispé aux lèvres.

« J'ai consacré de nombreuses années à la recherche et je pourrai toujours continuer à le faire en parallèle de mon métier de professeur, ce n'est pas un problème. Mais j'ai ressenti le besoin de… me retirer, de me rendre utile… d'autres, plus doués que moi, reprendront très vite le flambeau, je veux les aider à ouvrir leurs esprits… »

Il avait l'air à la fois triste et un peu nerveux. D'un geste inconscient, il passa les doigts sur sa canne : McGonagal ne sut jamais si c'était une simple illusion, mais elle eut la nette impression que le vert des feuilles se ternit l'espace d'une seconde.

« En interdisant catégoriquement cette discipline, vous occultez toute une branche de la magie, ajouta-t-il d'un ton grave.

« Non, Lebedev, campa fermement la directrice sur ses positions. Pas de magie noire à Poudlard. Je veux bien vous croire quand vous affirmez que tous ses usages ne sont pas maléfiques, mais il serait tout de même bien trop risqué de l'enseigner aux élèves…

« Mais enfin, vous ne comprenez paaa…aargh ! »

Lorsque, irrité, il avait voulu rétorquer, se soulevant à demi de sa chaise, quelque chose dans son organisme avait dû se rompre ou lâcher, car il agrippa soudain son torse en gémissant.

Inquiète et un peu effrayée, McGonagal eut d'abord un temps de latence puis se leva d'un bond, contourna son bureau et se pencha vers lui. Sa « crise » dura quelques secondes ; lorsqu'il reprit le contrôle, essoufflé, il adressa un regard en biais à l'enseignante et resserra davantage les pans de sa cape contre lui, comme s'il avait froid ou voulait se protéger face à l'expression intriguée de son interlocutrice.

Voyant qu'il allait mieux, le professeur lui proposa d'apporter un verre d'eau – qu'il refusa poliment – avant de se rassoir dans son siège dans le bureau, face à lui.

À présent, tous deux savaient qu'il n'allait plus pouvoir éviter le sujet.

« Nikita, s'enquit le professeur McGonagal d'une voix un peu tremblante, qu'est-ce qui vous arrive ? Vous débarquez en Angleterre après presque vingt ans d'absence, vous demandez un emploi que vous savez pertinemment ne pas réussir à obtenir malgré le fait que vous ayez déjà un métier stable et bien rémunéré… et pour couronner le tout, vous avez l'air gravement malade. Au risque de me montrer indiscrète ou manquant de tact, j'estime sincèrement que votre place est chez vous avec vos proches ou dans un hôpital, pas seul à des milliers de kilomètres de votre pays… Je ne vous dis pas ça en tant que directrice de Poudlard, mais en tant que votre ancienne enseignante qui s'inquiète pour vous. »

Nikita, parcouru d'un léger frisson incontrôlable, esquissa tout de même un sourire charismatique sur son visage impartial avant de répondre d'une voix posée, quoiqu'un peu rauque :

« Je comprends votre inquiétude au sujet de la magie noire… ce que j'ai voulu dire tout à l'heure, c'est que la formation que je proposerais aux élèves permettrait justement d'éviter des dérives disons… criminelles. La magie noire est principalement utilisée à mauvais escient car les mages noirs pensent qu'elle ne sert qu'à cela. C'est précisément en interdisant sa pratique sous toutes ses formes qu'on encourage le mieux ceux qui la découvrent en autodidactes de ne s'intéresser qu'à sa partie la plus superficielle – l'art de donner la mort ou de faire souffrir – sans qu'ils n'apprennent toutes ses subtilités les plus ésotériques…

« Nikita, je vous ai connu plus habile à dévier une conversation… »

Il grimaça, impatient et un peu irrité.

« Que voulez-vous que je vous dise ? lança-t-il froidement. Oui, je suis malade. Cela ne concerne que moi. Maintenant, si on pouvait revenir au…

« Pour un aussi bon Occlumens, vous mentez mal. Je vois dans vos yeux que ce n'est pas le cas – que cette maladie et votre soudain départ en Grande-Bretagne sont liés… »

Le Russe émit un ricanement glacial – vite interrompu par une quinte de toux parce qu'il manquait de souffle. Soudain, il désigna d'un geste vif sa canne – cet étrange bâton manifestement bouillonnant de magie.

« Vous voyez ça ? dit-il d'un air faussement enjoué.

« Oui. Une canne surprenante : comment se fait-il que le chèvrefeuille survive alors qu'il est déraciné ? »

Nikita arbora un sourire victorieux et volontairement énigmatique.

« C'est un objet de ma conception, expliqua-t-il. La branche de noyer – la canne, comme vous l'appelez – est la source : j'ai condensé tout l'arbre vivant en cette seule branche, et je l'ai modifié pour qu'il puisse absorber la magie brute dans l'air et non plus dans le sol ; le chèvrefeuille y puise toute son énergie, uniquement sous forme de magie vitale. Tout le circuit écosystémique habituel a été réduit à des transferts de magie pure. Voilà ce qu'est la magie noire : la modification de la vie. Ni plus, ni moins. »

Et, sans ajouter autre chose, il tendit la canne au professeur McGonagal. Celle-ci, surmontant la réaction de recul instinctive à l'évocation de la magie noire, saisit prudemment l'objet et l'examina. La branche était moins lourde qu'elle n'en avait l'air ; lorsque ses doigts les frôlèrent, les rameaux de chèvrefeuille tremblèrent perceptiblement et certaines lianes se dressèrent en se tortillant, comme effrayées par ce contact inconnu. Pourtant, très vite, elles se remirent en place : la vieille dame n'agissait pas de manière agressive et leur sembla d'emblée plutôt amicale.

Effectivement, les paroles de Nikita se confirmèrent : l'intérieur de la branche – de l'arbre, en réalité – luisait d'une éblouissante lumière blanche, tirant sur le vert. Le professeur ressentit les pulsations magiques puissantes qui s'en dégageaient : un flux majoritaire partait vers les lianes de chèvrefeuille qui s'en abreuvait comme un parasite, le reste semblait se dissiper librement dans l'air.

Au bout de quelques dizaines de secondes, Nikita tendit la main pour récupérer son bien : délicatement, elle le lui rendit. Le chèvrefeuille, rassuré, alla immédiatement s'enrouler autour de son poignet et ne défit son étau que lorsqu'il posa ànouveau la canne près de lui, contre sa chaise.

« Vous voyez bien, sourit-il. Cette magie n'a rien de dangereux si on ne s'en sert pas pour qu'elle le soit. Elle est juste… neutre. »

Et il croisa les jambes, dans l'attente de la réponse.

La directrice mit quelques secondes avant de se prononcer prudemment :

« Bon, d'accord… Vous marquez un point en disant que la plupart des sorciers qui ont mal tourné n'ont pas appris la magie noire en classe, mais seuls ou au contact de criminels. Je vais devoir prendre un peu de temps avant de vous donner ma décision finale, il faut d'abord que j'en discute avec le Conseil d'Administration et le ministère de la Magie… mais si ce que vous dites est vrai, s'il est réellement possible de s'adonner à la magie noire sans avoir à sacrifier son âme au diable, alors… je veux bien vous accorder une période d'essai.

« Merci, merci beaucoup madame la directrice !...

« Naturellement, vous serez étroitement surveillé durant vos cours, pour s'assurer que vous ne les employez pas à mauvais escient…

« Bien sûr, cela est parfaitement compréhensible et ne me pose aucun problème !

« Tant mieux. Je vous contacterai dès que j'aurai du nouveau.

« Très bien ! J'ai pris une chambre au Chaudron Baveur, à Londres…

« Oui, je sais où c'est. Merci. »

Ils se levèrent tous les deux – Nikita ayant au préalable repris sa canne. La directrice songea avec une pointe d'amusement cynique que de loin, il apparaissait bien plus âgé qu'elle, alors qu'il n'avait que trente-quatre ans.

« Ce fut un plaisir de vous revoir, monsieur Lebedev, dit-elle en lui serrant chaleureusement la main lorsqu'elle l'eut raccompagné jusqu'à la porte.

« De même. Espérons que ce ne soit pas la dernière ! rit Nikita, une lueur étrange et imprécise dans son regard – comme s'il s'amusait d'une référence que lui seul pouvait comprendre.

« À bientôt, je l'espère » lui souhaita la directrice juste avant qu'il ne tourne les talons et s'en aille de sa lente démarche laborieuse.

Il se contenta de sourire d'un air confiant.