Merci pour vos reviews ! Désolée si cela n'est pas assez clair (honte à moi) : les paragraphes en italique indiquent un flashback.
oOo
La porte explose au moment précis ou je croque à pleines dents dans le fruit.
« Non de Dieu … Rodney ! »
Sheppard se jette sur moi, je tiens toujours le fruit dans la main et il l'envoie valdinguer à l'autre bout de la pièce d'un geste violent, je sens une douleur dans mon poignet. Il a du le casser …
Je fixe l'homme en face de moi, incapable de prononcer le moindre mot … il ne peut pas être en vie ? C'est Kolya qui devait entrer pas … pas Sheppard, pas son fantôme …
« Bon sang Rodney, je ne suis pas un fantôme, reprenez vos esprits ! »
J'ai du parler tout haut.
Je m'affaisse soudain et il me suit dans ma chute. Nous sommes tous les deux par terre, silencieux. Au loin, on peut entendre des coups de feu …
Soudain, Sheppard sort quelque chose de sa veste, il la porte à sa bouche, recrache quelque chose puis me poignarde dans le bras avec … Je ne dis rien, je ne pousse même pas un cri, j'ouvre juste la bouche, en grand, j'essaye de respirer. Je dois ressembler à ces malheureux poissons que l'on sort de l'eau …
J'entends vaguement Sheppard donner des ordres, appeler le jumper à la rescousse … ma respiration est de plus en plus difficile …
J'avais raison, ce fruit ressemblait à une orange, sa peau était veloutée comme celle d'une pêche mais j'ai un sixième sens pour débusquer les agrumes malgré leur déguisement, même intergalactique. Déguisement intergalactique … j'aimerais sourire à cette image mais ma gorge se resserre et je me concentre sur un seul objectif : faire entrer de l'oxygène dans mes poumons.
Sheppard me tiens toujours dans ses bras et nous sommes toujours par terre, ma tête est posée sur son épaule … je vois mon bras. En sang. Une longue estafilade rouge causée par l'Epipen (1), une estafilade presque parallèle à la cicatrice laissée par le couteau du Génii un an auparavant …
Je suis fasciné par cette traînée rouge, par la marque blanche … Elles sont si similaires et si différentes, l'une infligée pour me faire souffrir, l'autre pour me sauver.
Et là, juste avant de perdre connaissance, une pensée terrible me traverse l'esprit : et si je m'étais trompé, et si je venais de commettre la plus terrible des trahisons. Si j'avais trahis mes amis ...
oOo
Je me réveille doucement. Lumière blanche qui agresse mes yeux, migraine à hurler, gorge sèche. Joie du choc anaphylactique.
Je tourne la tête.
Sheppard est là.
Vivant.
J'ouvre la bouche pour poser la question qui me brûle les lèvres : comment ? Mais rien ne sort, juste un gargouillis incompréhensible.
Sheppard se lève sans un bruit, récupère une paille et un verre d'eau. Il m'aide à me relever un peu et porte la paille à ma bouche, je bois goulûment. Le verre est vide, j'ai encore soif. Je ne dis rien mais il comprend, rempli à nouveau le verre et me tend à la paille. Je bois … puis il se met à parler.
« Il nous a fallu un peu plus de temps que prévu pour reprendre le contrôle de la situation … »
Ah.
« … les soldats geniis nous ont dit ce que Kolya voulait … qui il voulait … »
Oh.
« … juste après nous avoir capturés, Lorne et moi … »
Capturés ?
« … ils n'ont pas compris ce qui leur tombait dessus … Ronon peut être fichtrement impressionnant … »
Oui.
« Rodney ? »
Je baisse les yeux et me concentre soudain sur un petit accro dans ma couverture. Je sais quelle question il veut me poser … je sais et cela me fait peur.
Sheppard pousse un soupir, se passe la main dans les cheveux et se lève. Il est si énervé qu'il fait presque tomber le tabouret sur lequel il est assis. Il me fixe, je replonge les yeux sur la couverture. Quel lâche je fais … incapable d'affronter les conséquences de ses actes, toujours à fuir, comme avec le Projet Arcturus, comme toujours …
Il se rassoit.
Le silence pèse entre nous. Il pèse depuis Doranda.
« J'ai commis une terrible erreur … »
Je relève la tête, les sourcils froncés. Mais de quoi parle t-il ?
« Rodney, je … c'est ma faute si vous avez pensé que … que c'était la seule solution … »
Je secoue la tête. Non. Nonnonnonnonnon, c'est ma faute, ma faute, c'est moi qui … le moniteur cardiaque auquel je suis relié s'affole.
« Rodney, si je ne vous avais pas dit toutes ces conneries … » il se passe à nouveau la main dans les cheveux, il fait souvent ça lorsqu'il est énervé. « Je crois que j'étais en colère, contre moi-même en fait … je savais que ce projet était une erreur, mais je voulais y croire … s'il y avait quelqu'un en qui je n'avais plus confiance, je crois bien que c'était moi, c'est contre moi que j'étais en colère, pas vous, et cette colère a bien failli vous coûter la vie … »
Il me fixe, ses yeux sont froids et sévères, et soudain il se penche en avant et me saisit les avant bras. Fort. Je pousse un petit cri. Il me secoue.
« Ne recommencez jamais ça McKay ! Jamais vous m'entendez ! Même si aucun d'entre nous n'est là pour vous secourir, comment pouvez vous croire que les autres, Elisabeth, Carson … vous abandonneraient. Votre devoir est de rester en vie, vous m'entendez, Rodney, en vie, jusqu'au bout, de ne pas capituler, jamais ! Promettez moi que vous ne ferez plus jamais ça … »
Il me prend dans ses bras.
Je ferme les yeux. Je sens les larmes monter. Je plisse les paupières à m'en faire mal mais les larmes gagnent le combat et elles se mettent à couler sur mes joues.
« Rodney ? Promis … »
Je m'entends murmurer.
« Promis … »
Il me serre contre lui et je me demande comment j'ai pu douter, comment j'ai pu confondre. Le Docteur McKay a commis une bêtise mais Rodney a été pardonné. Et c'est ce qui compte, n'est-ce pas ?
Plus jamais je ne trahirais mes amis. Jamais.
Finis !
Titre : « la Terre est bleue comme une orange … » Paul Eluard, in L'amour la poésie. Ce fruit frais et sucré auquel notre Roro est mortellement allergique, mais vous aviez sans doute deviné !
(1) Epipen : seringue prédosée d'épinéphrine (remède miracle au choc anaphylactique, enfin, si injecté suffisamment tôt).
