Chapitre 3

Le paysage défilait derrière la fenêtre du train comme la bobine d'un film muet. Paysage incarcéré et mouvant, baigné par la pluie. La grisaille dans le ciel, dans le sol et sur les murs. La grisaille qui ruisselle comme les gouttes de pluie. L'automne laissait peu à peu place à l'hiver et, dans les arbres, il n'y avait déjà plus une feuille.

Tomie regardait l'horizon se distendre avec la vitesse croissante du train. Ses chaussures étaient encore humides de pluie, elle avait froid aux pieds. Un parapluie gouttait sur son bagage, et le grésillement des néons rythmaient sa contemplation monotone du trajet qui la séparait de Yokahama.

Ça faisait quatre ans qu'elle n'y avait plus mis les pieds. Qu'elle était partie. Qu'elle avait fui.

Le bord de la mer lui apparut, gris comme la pluie. Les plages qu'elle avait longtemps parcourues dans l'insouciance de sa jeunesse, les cheveux au vent et les jambes légères. C'était très loin maintenant. Maintenant, l'eau lui semblait morne, presque visqueuse, le sable froid et le ciel sale.

D'un geste de la main, Tomie chassa les souvenirs, ceux qui tentaient d'inonder sa tête un peu trop pleine, et porta les yeux au loin, là où Yokohama lui apparaissait avec une arrogance qui frôlait le défi.

Yokahama était une ville debout. C'est ce qu'elle avait pensé la première fois qu'elle l'avait vue. La nuit, Yokohama était un mirage de sons et de couleurs qui semblait émerger des eaux comme un rêve, mais le jour, c'était une forteresse à faire tomber, un amas de pics érigés vers le ciel et qui avaient quelque chose de monstrueux. Ses yeux se plissèrent lorsqu'ils rencontrèrent les grattes-ciel noirs où siégeait la mafia. La première fois qu'elle était venue – c'était il y a dix ans – des mots comme « progrès », « futuriste », « épuré » lui avaient traversé l'esprit. Aujourd'hui, quand elle les regardait, elle voyait un phallus en érection. C'était arrogant. C'était laid. Laid à en vomir.

Ses yeux s'étaient fermés, et ses doigts resserrés autour du manche de sa canne lorsque le train ralentit et stoppa tout à fait. Elle fut la dernière à sortir, parce qu'elle savait qu'il l'attendrait sur le quai.

Ango était vêtu de son costume impeccable de petit fonctionnaire bien sage, protégé de la pluie par un imperméable qui lui tombait jusqu'aux genoux. Derrière ses lunettes qui reflétaient la voute de la gare, on voyait à peine ses yeux. Il lui tendit un parapluie et prit son bagage sans un mot.

– Tous les détails sont ici », dit-il lorsqu'il furent installés dans leur taxi, en lui tendant un dossier d'une cinquantaine de pages et protégé par une pochette noire qui portait la mention « CONFIDENTIEL ».

– Je pensais que Santouka voudrait me voir.

– Il sait que tu n'en as pas envie.

– Quel homme intelligent !

– Il m'a demandé de ne pas te contrarier.

– Et que fera son brave toutou pour respecter ses ordres ?

– Je sais que tu n'aimes pas attendre.

– Tu as bonne mémoire.

– C'est plutôt toi qui m'a fait prendre de sales habitudes…

– Tu perds encore trop de temps en préalables. Les gens comme toi ne savent pas aller à l'essentiel.

– Ce qui est un peu trop ton cas.

– Mes méthodes n'ont encore jamais pu rivaliser avec personne.

– Sauf une…

Sa respiration se fit plus douloureuse tandis que les rues de Yokahama défilaient sous ses yeux avec une familiarité troublante. Sans qu'elle le veuille, son cerveau en quête de repères s'était mis à reconnaître ce dont elle avait fait pendant sept ans son seul univers. Ce renfoncement. La rue sans issue là, le passage à niveau ici, celui qui bloquait à chaque fois la circulation pendant dix minutes. Tel trottoir, telle échoppe. Ce salon de thé dont elle avait aimé les chocolats, cette boutique de chaussures dont elle avait si souvent contemplé la vitrine. Ici le passé, ici les regrets, là ce présent qu'elle cherchait à oublier. Le sien.

« Me revoilà… » murmura-t-elle doucement, en ravalant ses larmes. « Je suis rentrée. »


« Une dernière chose ! »

Ça c'était produit juste avant qu'ils ne partent pour l'institut psychiatrique. Dazai et Atsushi étaient déjà sortis et seul Kunnikida se trouvait alors dans le bureau de Taneda Santouka, qui le rattrapa avec une précipitation et une maladresse inhabituelles pour un homme de son grade.

– J'ai fait mander quelqu'un pour vous épauler dans votre enquête.

– Pourquoi ne pas nous l'avoir dit plus tôt ? » demanda l'agent en se tournant franchement vers son supérieur.

– Je viens d'avoir confirmation de sa venue. C'est qu'elle nous vient de Tokyo…

– Elle ?

– C'est l'un de nos meilleurs agents… enfin… c'était.

– Comment ça ?

Kunikida ne put s'empêcher de relever les quelques gouttes de sueur qui perlaient sur le front du ministre.

– Elle a été relevée de ses fonctions pendant quelques temps… pour raisons médicales… mais croyez-moi, c'est une aubaine pour vous de l'avoir.

– Et si elle n'est plus aussi efficace qu'avant ? Vous ne pensez pas qu'à nous trois nous serons suffisants pour résoudre l'affaire ?

– C'est l'un de mes hommes qui a disparu. Le ministère se doit de s'impliquer.

– Certes.

– Je suis sûr qu'elle ne vous décevra pas.

– Espérons-le.


L'idée qu'une femme puisse les aider lui était étrange. Non pas que Kunikida pense, comme encore beaucoup d'hommes de sa génération, que la place des femmes était dans une cuisine, ou auprès de ses enfants – bien qu'au fond, il le pensait quand même, parce que tout idéaliste et mathématicien qu'il était, il aimait bien les petites cases – Yosano, Kyouka, Naomi, Haruno n'avaient plus eu besoin de lui prouver les qualités et la force d'une gente féminine qu'il avait longtemps sous-estimée, si ce n'est méprisée. Mais une femme enquêtrice, qui plus est l'une des meilleures, dans un milieu aussi sordide qu'un asile, et pour une affaire qui ressemblait à un grand puzzle dont lui-même ne parvenait pas à assembler les pièces, lui semblait presque une blague. Alors, lorsqu'il rencontra pour la première fois le regard de Tomie Yamazaki et vit sa silhouette branlante s'avancer dans la cellule, la blague se transforma soudain en une farce nauséabonde. Ce qu'il avait sous les yeux n'était pas une femme, mais une marionnette désarticulée, un fantôme de chair et d'os qui n'avait plus rien dans le regard, si ce n'est une ombre qu'il n'osait déchiffrer.

– Département des affaires criminelles liées aux supers pouvoirs. Je suis ici sur demande du ministre ». Sa voix était rauque comme celle d'une vieille femme, et ce n'est que lorsqu'elle passa devant lui qu'il se rendit compte qu'il ne lui avait même pas tendu ma main.

– K… Kunikida Doppo », marmonna-t-il. « Et voici mes collègues, Nakajima Atsushi et Dazai Osamu. Nous sommes membres de l'Agence des détectives armés. »

Tout en le laissant terminer, elle lui lança un regard lourd de désintérêt, et se mit à parcourir la pièce comme si elle était la seule à s'y trouver, sans prêter attention à leurs yeux rivés sur elle.


Tomie Yamazaki était une femme encore jeune, mais avec la gravité d'une vieille dame. Tout dans ses gestes, dans ses expressions, semblait empreint de fatigue et d'amertume. En trois secondes, Atsushi comprit qu'il ne la verrait sans doute jamais sourire, et la raison à cela se trouvait dans les lourdes claudications qui paralysait chacun de ses pas. Tomie Yamazaki marchait. Elle marchait droite comme un piquet, d'un pas qu'elle voulait affirmé, mais néanmoins trainant. Parce que sans l'aide de sa canne, elle pouvait sans doute à peine tenir debout. Tomie Yamazaki ne devait pas avoir vingt cinq ans, et pourtant, elle ne pouvait sans doute ni courir, ni sauter. Juste marcher de ce pas trainant, lourd et douloureux qui l'avait précédée dans le couloir. Depuis combien de temps ses doigts tremblaient-ils autour du manche de sa canne ? Depuis quand ses beaux cheveux bruns étaient-ils parsemés de mèches grises, son sourire estompé, et ses paupières alourdies par la tristesse ? Atsushi sentit ses poings se serrer à mesure que le constat s'imposait. Tomie Yamazaki était une femme déjà fanée là ou d'autres étaient en plein épanouissement. Son visage, avait sans doute été beau avant d'être creusé par la misère, la maladie peut-être, avant que la douleur ne lui fasse perdre ses couleurs pour lui donner ce teint cireux de morte en sursis. Et sa silhouette. Est-ce qu'elle avait un jour eu la volupté des filles de son âge ?

Le jeune homme se rendit compte qu'il l'observait sans cligner des yeux depuis un temps qu'il n'aurait su définir, avant de déglutir et d'inspirer longuement.

– Pardon », murmura-t-il. « J'ai besoin de prendre l'air. »

– Bien sûr », bredouilla Dozen.

Une poupée cassée. Voilà ce qu'était le mystérieux agent venu du ministère, et dont Kunikida leur avait parlé dans la voiture. Une poupée cassée dans un théâtre de marionnettes à l'abandon.


Le malaise. Il n'y avait pas que lui qui l'avait ressenti, et Kunikida s'en aperçut lorsqu'Atsushi sortit, les mains tremblantes et les larmes aux yeux. Yamazaki ne semblait pas y avoir prêté attention, et errait toujours entre les quatre murs de la cellule, les yeux levés vers le plafond sans jamais fixer un point en particulier. Lui n'osait pas dire un mot. Ni lui, ni personne. Et chacun restait enfermé dans son silence avec une retenue qui frôlait l'absurdité.

Agacé, il finit par concerter Dazai du regard avant de se rendre compte avec un savant mélange de perplexité et d'agacement que son crétin de partenaire s'était éclipsé.

– Aux toilettes… », se sentit obligé de préciser Dozen.

Des murs blancs, sanitaires blancs, en grosse faïence trop rapidement épongée. Ça sentait fort la merde sous le désinfectant. Le miroir émaillé lui renvoyait son image, mais il avait peur de se regarder. Il n'avait jamais aimé ça. Un peu d'eau sur les tempes pour faire du bien, reprendre ses esprit, reprendre le contrôle. C'était mieux comme ça. Faire comme si de rien n'était.

Faire comme si de rien n'était.

Faire comme si de rien n'était.

Faire… comme…

Faire… comme… si…

La douleur lui vrilla le crâne, et avant qu'il ne s'en rende compte, il était déjà par terre. Sur ce carrelage qu'il n'aurait voulu toucher pour rien au monde. Au milieu du pays des fous.

Qu'est-ce qu'elle fait là ?

C'est la seule pensée qu'il parvint à formuler tandis que la colère lui brûlait le torse et les paumes.

Qu'est-ce qu'elle fait là ?

Et c'est la colère qui lui permit de se remettre debout, de se laver les mains, et de se regarder dans le miroir. La colère rouge et brulante, comme ce jour-là, dans ce regard qu'il n'avait plus eu depuis la disparition de son seul ami.

La dernière fois que j'ai vu tes yeux, c'était dans un charnier.

Un monde de flammes.

La dernière fois que j'ai vu ton visage, c'était déjà celui d'une morte.

Mais on ne revient pas d'entre les morts et ça, il le savait. Il le savait mieux que personne. Alors Dazai fit la seule chose qui lui semblait encore raisonnable, bien que fort déplaisante, alluma son portable, et fouilla son répertoire.

Ça sonna deux fois avant que la voix du traitre ne parvienne à ses oreilles.

– J'imagine que tu as des questions… » murmura Ango.


L'interrogatoire du personnel avait débuté depuis seulement cinq minutes lorsque Dazai et Atsushi revinrent. Lui n'avait rien eu à faire, elle s'était occupée de tout.

– Qu'est-ce que ça donne ? » demanda discrètement Dazai, néanmoins avec son panache habituel.

– Hallucinant… » confessa Kunikida. « Santouka ne nous avait pas menti. »

– Que s'est-il passé ?

– Elle n'a rien dit sur la cellule. Elle a juste demandé à Dozen de rassembler le personnel et les patients internés dans la même zone qu'Akechi. Ça a mis dix minutes, en cinq elle a réussi à tout comprendre.

– C'est-à-dire ?

– L'un des membres du personnels violait régulièrement l'une des internées. C'était celui qui était chargé de surveiller le couloir où se trouvait la cellule d'Akechi. Il était en plein… acte quand le patient a disparu.

– Il a avoué ?

– Ouais.

– Et comment ?

– Elle a visé juste. Je ne sais pas comment. Elle l'a simplement regardé et lui a demandé si madame Satô s'était beaucoup débattue ce soir-là. La femme a fondu en larmes et le type a tout avoué.

– Je vois…

On entendait encore les sanglots étouffés de la malheureuse tandis que tous les regards restaient braqués sur l'accusé.

– Apparemment l'un des infirmiers n'avait pas non plus fait à Akechi sa piqure du soir.

– Une piqure ?

– Une drogue légère, pour dormir.

– Et cette fois, elle s'y est prise comment ?

– Elle lui a demandé combien il faisait payer la dose. Trois coupures se trouvaient encore dans sa poche.

– Il les vendait…

– Exact.

– Tous pourris jusqu'à la moelle !

– Sacré coup pour notre cher docteur…

Dozen se tenait en effet au fond de la salle, recroquevillé et les yeux baissés de honte. Yamazaki quant à elle se promenait entre les différents membres du personnel, sans un mot, presque sans bruit, comme un fantôme. Kunikida réalisa que sans les bruits de sa canne et la posture dérangeante de son corps qui attirait nécessairement l'œil, on ne se rendrait probablement même pas compte de sa présence.

– Tu lui as parlé des feuilles ? » demanda Dazai, visiblement moins captivé par la jeune femme qu'Atsushi et lui-même.

– Je n'en ai pas eu besoin. Elle m'a demandé de les garder pour l'instant.

– Passe-les moi.

– Quoi ?

Il ne riait pas, et son visage trahissait même une sorte d'empressement.

– Dépêche-toi.

– Qu'est-ce que ça change ?

– Passe je te dis.

Quelque chose dans le ton qu'il employait, l'urgence qui se dégageait de ses gestes lui dit qu'il n'avait pas le choix, et Kunikida lui tendit maladroitement les feuilles. Sans les regarder, Dazai les saisit et les cacha sous son manteau avant de balayer la salle des yeux et de mettre les mains dans ses poches, comme si de rien n'était.

– On va boire un verre maintenant ?


La pluie frappait le sol dans un chaos sonore, et l'obscurité de la nuit s'était déjà déployée sur Yokohama lorsqu'ils quittèrent l'institution.

– Alors ? » marmonna Atsushi. « Qu'est-ce qu'on fait demain ? On revient ? »

– Dazai et moi nous reviendrons dans la matinée. Toi j'aimerais que tu ailles dans les archives de la police et que tu lises ce que disent les archives sur la mort de la femme d'Akechi. Tu peux prendre Kyouka avec toi.

– Vous pensez que je serai à la hauteur ?

– C'est un travail enfantin…

– Et ensuite ?

– Il faut remonter à la source du mal » répondit Yamazaki à la place de Kunikida, attirant tous leurs regards sur elle. « Nous devons savoir pour quelles raisons il s'est fait interné ici. »

– Je… je suis d'accord » acquiesça l'ancien professeur. « Je peux vous poser une question ? »

– Allez-y.

– Vous le connaissiez avant son internement ?

– Un peu. Disons que j'ai eu l'occasion de le côtoyer.

– Et qu'est-ce que vous pouvez nous en dire ?

– Kogoro Akechi était un homme brillant, d'une intelligence rare. Il voyait l'évidence là où les autres ne voyaient que le néant. Il était capable d'un cheminement de pensée dont je ne maitrise moi-même que la surface. C'était un visionnaire, un génie, mais je peux affirmer que jamais, au grand jamais, il n'a été fou.

Ses yeux se fichèrent dans ceux de Kunikida, et il remarqua qu'ils étaient gris comme la pluie.

– Quelqu'un ou quelque chose s'en est pris à lui et lui a fait perdre la raison, j'en suis certaine.


Quelqu'un ou quelque chose, d'accord, mais quoi ?

Atsushi avait beau tourné le problème dans tous les sens, il n'y voyait pas l'ombre d'une piste, pas même un micro indice. Ils nageaient dans une purée de poids sans rien pour les éclairer, si ce n'est l'intelligence de leur nouvelle collègue.

– Vous lui faites confiance ? », marmonna Dazai, le regard rivé sur les gouttes de pluie qui ruisselaient contre les vitres de leur taxi.

Tomie Yamazaki était partie, de son côté, dans une voiture noire aux vitres teintées qui s'était confondue dans la nuit comme un rêve. Elle leur avait simplement donné rendez-vous au centre-ville en début d'après-midi, sous-entendant ainsi qu'elle ne les accompagnerait ni au dispensaire, ni aux archives.

– Elle travaille bien », dit simplement Kunikida. « Et elle semble bien connaître Akechi, du moins ce qu'il était avant de sombrer dans la folie, ce qui est important. »

– C'est sans doute pour cela qu'ils l'ont choisie », compléta Atsushi. « Mais tout de même… elle n'a pas l'air dans son assiette ».

– En effet. Santouka m'a dit qu'elle avait été démise un certain temps de ses fonctions pour raisons médicales. Je comprends mieux maintenant.

– Vous pensez que c'est le fruit d'un accident ?

– Ou pire. Et toi Dazai, qui sait toujours tout, qu'est-ce que tu en penses ?

– Rien de particulier.

Leur agent le plus excentrique semblait plus calme que d'habitude, plus préoccupé aussi, et Atsushi réalisa que sans son sourire de clown et ses yeux blagueurs, il semblait aussi maussade que la jeune femme.

– Moi je la trouve parfaite pour ton projet de suicide en amoureux.

– Kunikida-san !

– Quoi ? C'est vrai !

– Ce n'est pas mon type de femmes.

– Ah ? Tu ne disais pas que toutes les femmes te conviendraient tant qu'elles accepteraient de se suicider avec toi ?

– Qui te dit qu'elle le ferait ?

– Je ne sais pas. Sa tête de déterrée peut-être ?

Passée la blague, le rictus moqueur de Kunikida s'estompa et ses traits s'affaissèrent.

– Tout de même… finir dans cet état, à cet âge.

– J'éviterai la pitié à ta place » souffla Dazai en braquant son regard sur lui.

– Quoi d'autre ?

– La méfiance.


– J'imagine que tu as des questions », murmura la voix à l'autre bout du fil.

– Depuis quand tu le savais ?

– Quoi ?

– Qu'elle avait survécu.

Il entendit un long soupire avant qu'Ango ne parle de nouveau.

– Depuis le début.

Lui se sentait… écœuré.

– C'est toi qui l'a amenée sur cette affaire ?

– Non… non. Moi je voulais qu'elle reste à l'abris. Qu'elle s'éloigne définitivement de tout ça. Mais Santouka-san a insisté.

– Pourquoi ?

– Parce que Kogoro Akechi était son mentor.

– Son quoi ?

– Tu l'ignorais ?

– Je m'en doutais.

Cette façon d'analyser la situation, de déjouer les pensées et de débusquer les indices. Pourquoi l'évidence ne l'avait-elle alors pas frappé ?

– Piètre élève.

– Elle s'est beaucoup améliorée.

– Qu'est-ce qu'elle compte faire ?

– Je l'ignore.

– Tu mens.

– Pas cette fois Dazai. J'ignore ce que Tomie a dans la tête. Ça fait des années que nous ne nous parlons plus.

– Tu comptes me faire pleurer ?

– Simplement te faire réaliser qu'elle est autant une étrangère pour toi que pour moi. Néanmoins… oui…

– Oui quoi ?

– Il y a de grandes chances qu'elle cherche à se venger.

Ça, il l'avait compris à l'instant même où elle avait posé les yeux sur lui.

– Je ne m'y opposerai pas » dit-il lentement. « Sauf si elle commet l'erreur de toucher à un cheveu de mes camarades. »

– Et si tu touches à un seul des siens, je te pulvérise.

– Si seulement j'avais pu la crever ce jour-là…


Review ? :3