"watashi wa eien ni anata to issho ni itai desu"

"Je veux être avec toi pour toujours"

2


Sumire tourna les talons, me laissant seul avec cet imbécile d'Akane. Qui plus est sans savoir quoi lui dire... il m'observait avec cet air crétin. Bien entendu, il n'avait pas compris l'allusion que sa copine avait fait. Quelle andouille !

- Hé vire de là ! T'es lourd à la fin ! »

Il s'exécuta en grommelant, sans me poser plus de problème, soit, il avait fait semblant de ne pas comprendre ce que Sumire lui avait dit et par conséquent vira son postérieur de mon bas ventre sans demander son reste, soit... J'en sais rien, il ne m'avait jamais donné pour habitude de m'obéir aussi facilement !

- Moi, au moins je suis pas un pauvre anorexique ! »

Décidément ses répliques ne changeraient jamais ! Tiens, pourquoi je me souviens de cette soirée, c'est bizarre que ça me revienne maintenant, la fois où l'on avait raccompagné Yoshikawa jusque chez elle, après s'être amusés comme des gosses...

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C'était y'a un peu plus d'un an. Je me souviens qu'il faisait frais, la nuit était bien avancée mais la lune ronde illuminait le ciel nous permettant de couper par les ruelles mal éclairées. Je caillais, malgré le fait qu'on s'était déchaussé et qu'on avait remonté nos jambières, on était dans un état pitoyable, et vu que j'avais prêté mon blouson à la copine d'Akane, il était aussi mouillé qu'elle !

- Dis Hito... tu voudrais pas m'héberger pour la nuit ? Si je rentre ce soir, la vieille va me faire la peau... »

Je l'avais regardé sans rien dire, en fait, quoique je puisse en dire, il m'était difficile de lui refuser quoi que ce soit, alors, je ne fus pas étonné d'accepter sans qu'il ne s'apesantisse sur le fait que j'aurais sa mort sur la conscience si je ne daignais pas lui ouvrir ma porte.

- Et puis tu sais, je sais pas trop à qui demander ça. Yamazaki doit être avec sa copine et puis Harumoto habite avec Tohru, alors... »
- Et comme je suis célibataire, et que je n'héberge personne t'en conclus que je vais accepter hein ? »

Le voir se démener pour une demande aussi simple me faisait sourire, mais je ne pouvais m'empêcher de jouer mon rôle de gars froid et coincé. Je m'étais déjà bien compromis ce soir en empêchant le pirate unijambiste et le kraken de noyer une pauvre fille. Sérieux, où avait-il été pêché ce poulpe ?

- C'est pas ce que je voulais dire... On vient juste de se réconcilier, on va pas se bouffer le nez ce soir quand même, ça serait idiot, surtout après que mon illustre personne t'es fait piailler comme une jeune fille en détresse. »
- C'est bon Tachibana, tu v'nir chez mi. Et je voudrais bien te voir avec un poulpe jeté en pleine face, c'est tout gélatineux ! Au faites... »
- Merci... »

C'était un merci presque inaudible, mais il m'avait fait chaud au cœur. Je ne pourrais même pas expliquer pourquoi. Akane n'est pas un adepte du merci, je le sais depuis un moment. Il ne le dit pas avec des mots, il est plus du genre à garder pour lui ses émotions, malgré le fait qu'il soit bien plus expansif que moi.

- Tu voulais dire ? »
- Ha oui... Yoshikawa et toi... vous... ? »

Son sourcil gauche tressautait nerveusement, mais le regard de chat qui me toisa tout à coup, me mit mal à l'aise, avais-je dit une connerie ? Il me semblait pourtant qu'ils s'étaient rapprochés ses derniers temps. Et leur petit tête-à-tête pour la Saint-Valentin n'avait fait que me pousser vers cette constatation. Ça se voyait qu'elle l'aimait, fallait s'appeler Akane Tachibana pour ne pas comprendre une telle évidence !

- C'est pas parce que l'autre folle dit n'importe quoi, qu'il faut la croire ! On se connaît depuis tout petit ! Elle est là quand j'ai pas besoin d'elle et j'essaye de lui rendre la pareille. Crois-moi, c'est plus ma petite sœur que ma copine. Je lui ai signifié que ça n'irait pas plus loin, au moins maintenant c'est clair. Alors te mets pas à t'imaginer n'importe quoi, pitié ! »
- Ha... d'accord. Vous allez bien ensemble, pourtant. »

L'on fit le chemin dans un quasi silence, ce n'est que lorsque qu'on fut en vue de mon appartement qu'il soupira. Je sortais mes clés lorsqu'un "C'est pas tes affaires!" me frappa les oreilles, il m'est passé devant et avant que je ne lui signifie de pas foutre de l'eau partout, il commençait à se déshabiller. Un sourire fier glissa sur mes lèvres et je fis comme mon invité, avant de me diriger vers la salle de bain et en sortir deux serviettes éponges.

- Je te la donne si tu veux, tu la mattes pas mal la petite Sumire... de toute façon c'est juste la sœur que j'ai jamais eu... »
- Vraiment ? »
- T'es pas un salop, je sais que tu lui ferais pas d'mal et entre toi et moi, t'as plus de chance d'empocher le gros lot qu'Harumoto ! »
- Comment ça ? Elle t'as dit quelque chose sur moi ? »
- Réveille-toi, toutes les filles du lycée fantasmes sur toi ! Je sais pas ce qu'elle pense de toi, mais Sumire me parle sans cesse de toi. Je crois qu'à part l'école, mon paternel et les futilités de rigueur, t'es notre sujet de conversation préféré. »

Je n'aurais jamais parié là dessus. Je n'ai rien contre Sumire, mais j'ai beaucoup de mal à la supporter. Pas qu'elle soit totalement cruche ou pire, nympho comme la moitié des filles de ma classe, mais j'ai pas grand chose à lui dire. Je me vois mal sortir avec, même pour faire plaisir à Tachibana ! Je préférais couper court à cette discussion, ne voulant pas en savoir plus. Je me souviens avoir eu envie de lui demander de quoi ils parlaient tous les deux, mais ça ne me concernait pas vraiment. Une fois sec, je nous ai trouvé des habits chauds et c'est en me dirigeant vers la cuisine que je repris enfin la parole.

- Ramen ou Soupe Miso ? »
- Ramen... vu que t'as pas de Udon... mauvais hôte ! »

Les Udon, il n'avait que ce mot là à la bouche... Ça ne m'avait pas formalisé, ce n'était pas comme si il ne m'avait pas déjà sorti cette boutade. On avait mangé en silence, ce n'était pas la première fois qu'on se retrouvait seuls chez moi, mais avec Tachibana je n'ai jamais ressenti l'obligation d'en dire plus que besoin.
On se comprenait, et on se comprendrait toujours en échangeant un simple regard, comme sur le terrain... On avait passé un bon début de nuit, je me souviens qu'il voulut regarder l'une de ses séries avant de se coucher et qu'il avait chanté atrocement faux le générique en essayant de me faire participer à ce piètre karaoké.

- Dis-moi tu l'aimes ? »
- Qui ? »
- Yoshikawa ! »
- Non du tout... C'est pas mon genre de fille. »

L'épisode venait tout juste de se terminer et il rebondissait déjà là-dessus, sérieusement, je me demandais ce que Sumire avait pu lui dire sur moi, pour qu'il ré-attaque de la sorte. Ou bien croyait-il que j'avais essayé de la lui piquer. C'était pas le premier à penser à ce genre de choses et certainement pas le dernier, mais, j'étais loin d'essayer de voler les petites copines des autres. Alors, je me demandais ce qui pouvait lui laisser croire cela. C'était vrai que je l'observais assez souvent, mais... cette fille... ouai, la copine de Tachibana, elle est gentille, mais... je n'arrivais pas à l'aimer, pourquoi ? J'en savais fichtrement rien !

- Elle ressemblerait à quoi alors ? »
- Je ne me suis jamais posé la question ! Et toi, à quoi elle ressemble la future madame Tachibana ? »
- Elle est pas née celle la ! Et puis, entre toi et moi, j'préfère le basket aux femmes, c'est moins difficile à comprendre ! »

Tachibana était soit un crétin fini, soit, il s'était défilé devant la question ! En même temps je le comprenais. A notre age, pas mal de mecs essayaient de se caser, mais nous, on était des solitaires, les envies de couples et toutes cette mascarade ne nous intéressait pas. On avait assez de problèmes comme ça, pour penser à se fiche en couple. On avait rencontré le basket, qui nous avait sauvé d'une vie de racailles et on cheminait sûrement vers autre chose. Akane a été mon premier réel ami. Lui comme moi, on en a eu un autre avant, celui qui est parti avec notre confiance et nous a fait tombé de haut. On se soigne mutuellement et si on arrêtait de se chercher des poux, je sais qu'on pourrait être comme des frères.

- Baka ! Comparer les femmes au basket... ça n'a rien à voir ! Aller, au lit ! »

Je me souviens qu'il avait haussé les épaules nonchalamment et qu'il avait obéi, sans plus de préambule. Il s'était affalé sur le lit et je m'étais allongé à ses côtés. Je me souviens de la tête qu'avais fait ma mère lorsque je lui avait dit que j'aurais besoin d'un futon à deux places. Je crois qu'elle pense que j'utilise mon indépendance pour faire des trucs avec les filles. Personne, personne ne s'est allongé là à part lui, d'ailleurs, la seule odeur qu'on peut trouver sur le second oreiller lui appartient. Je me souviens que ce soir là, je n'avais pas pu fermé l'œil de la nuit, trop obnubilé par un tas de pensées entêtantes. Ce soir là, il avait eu le sommeil agité, quelque fois je me prenais des coups, car il lui arrivait de se battre dans ses rêves, mais ce soir là, c'est autre chose qui vint le visiter. Il sanglotait et c'est lorsqu'il appela son père d'une voix meurtrie que je décidais de le secouer pour le réveiller.

- Me laisse pas seul... pars pas, papa... Gaku, pitié. Hito, non... me laissez pas ! »

Il me fallut tout mes réflexes pour empêcher la collision de nos deux crânes lorsqu'il se redressa d'un coup sec. Ses yeux embués de larmes glissèrent vers moi. Je me souviens que cette image m'avait paralysé, sauté à la gorge et m'avait empêché d'aligner deux pensées cohérentes, l'espèce d'un instant.

- Ça va ? »

Il mit un temps fou à comprendre où il se trouvait et ce qui s'était passé, aussi je l'éclairais en lui murmurant que ce n'était qu'un rêve. Je me souviens m'être senti impuissant face aux larmes qui redoublaient, aussi prenant mon courage à deux mains, je l'avais approché de mon torse et l'avait serré entre mes bras. C'est la seule fois de ma vie, que j'ai vu Akane pleurer de cette façon et je m'en souviendrais toujours. Il semblait si paumé, si fragile. Lui comme moi, on s'est forgé une carapace, mais ça ne reflète pas ce que l'on est vraiment. Akane est un enfant, ce soir là, dans mes bras, il était un petit garçon apeuré qui était effrayé à l'idée d'être à nouveau délaissé. J'ai laissé ses larmes se faire absorber par mon T-shirt tandis que je le berçais en parcourant de ma main sa chevelure brune. Quels mots auraient valu être prononcés en cette circonstance... Aucun...

Je me souviens que son corps s'était tout à coup tendu et que je m'en étais pris une sans que j'ai eu le temps de comprendre ce qui m'arrivait, il me criait tout à coup qu'il n'était pas un gosse. J'aurais réagi identiquement. Pour nous, pleurer était comme interdit... Montrer ses faiblesses n'était pas permis on devait être fort, on devait dominer et ne jamais l'être, on devait être les meilleurs... Mais des fois on se sentait si seuls et si désemparés... On n'était pas des durs... Juste des ados en manque d'amour.

- S'cuse-moi Hiiragi. »
- Pas la peine... Vieux réflexe ! Tu sais Tachibana, t'as le droit de me montrer tes faiblesses, tout le monde en a, même moi... T'as le droit de craquer, de pleurer, de rire et d'être en colère... Celui qui ne passe pas par toutes ses émotions, ne peut être considéré comme humain. »

Je me souviens qu'il m'avait envoyé un sourire triste et qu'il s'était laissé tomber entre mes bras, comme si il n'avait attendu que cette remarque pour se le permettre enfin consciemment. Je l'ai serré contre moi, comme j'aurais voulu que mon père le fasse et j'ai soudainement senti ses bras faire de même contre mes reins. On est resté dans les bras l'un de l'autre à tout se dire. Il m'a conté son père, il m'a parlé de Gaku, il a partagé ses craintes et j'ai fais de même. On était les mêmes, à égalité, face à face et ça faisait tellement de bien.
Si Tachibana explosait comme une cocotte sous pression, moi je m'enfermais un peu plus encore dans ma coquille et notre rencontre avait fait naître nombre d'accrocs, mais là, dans le velours de cette nuit de février, on savait qu'on venait de passer un cap décisif. A bout de force, mentale et physique, on s'est endormi dans les bras l'un de l'autre après avoir versé les même larmes de détresse.

Lorsque je me réveillais quelques heures plus tard, un espèce de courant d'air chaud et étranger frappait mon dos, je mis quelques instants à comprendre, qu'il s'agissait du souffle d'Akane. Un sentiment mitigé m'avait frappé à cet instant, l'une de ses jambes s'était hissée sur mes hanches, m'empêchant de fuir. Je me souviens avoir réussi à tourner mon regard vers son visage... A chaque fois que je le regarde, il me flotte cette impression de déjà vu. Comme si je le connaissais depuis toujours, comme si on avait toujours été ensemble, comme si... je me regardais dans une glace. Et malgré moi, je me mis à parler tout haut.

- C'est vrai qu'on se ressemble, toi et moi. On a tous les deux ce fichu caractère de merde, on vit presque les mêmes galères. On frappe toujours avant de poser les bonnes questions. Akane... finalement on ne peut être nous-même que l'un en face de l'autre... parce qu'on se comprendra toujours. Qui d'autre que moi peut comprendre ce qui se passe dans cette tête... de poulpe. Ensemble pour toujours, Akane, promets-le. »

Ensemble... Ce fameux jour qui nous a lié, je m'en souviens comme hier... « Hiiragi, jusqu'à quand tu as l'intention de rester là-haut, t'es trop haut pour que je puisse te faire une passe. Dépêches-toi de ramener ton cul ici ! » C'est notre point de départ, peut-être pas le plus idéal mais c'est le nôtre. Nos vies s'y sont scellées, et y ont basculé. T'avais raison Tachibana... Il y a une chose bien plus importante que le basket et c'est l'amitié ! C'est une des rares chose qu'il ne m'aura jamais appris.

- Tachibana ? Réveille-toi... Si tu veux fêter un jour tes dix sept ans, je te conseille de bouger ton cul, sinon Minefuji pourrait bien te le botter ! »
- Pas encore... je suis bien là... trop bien... »

Je me souviens que ses lèvres ont brossé les miennes lorsqu'il m'a répondu. Je me souviens que sa voix était chaude et rauque et qu'elle m'avait transi de stupeur. Il avait entrouvert les yeux avant de se retourner dans les couvertures en grognant et j'avais mis bien deux minutes à me remettre de ce qui venait de m'arriver. Je me suis senti basculer en arrière, attrapé par une poigne qui m'avais pris au dépourvu et Akane Tachibana m'a mis ko pour le coup. Mes doigts ont machinalement effleuré ma joue... étais-ce un rêve ou ses lèvres avaient imprimé sur ma peau un baiser ? Hein ? Akane venait vraiment de m'embrasser ? Je me souviens qu'un sourire nerveux étirait mes zygomatiques qui n'avaient jamais été aussi crispés de leur courte vie.

- Trop con quand j'm'y mets ! »
- Hiiragi... Je voulais te... enfin... Merci »

Cette nuit là quelque chose avait définitivement changé, il paraissait différent à mes yeux... je ne savais pourquoi, mais moi aussi je me sentais bien. J'ai fait du thé et du riz pour l'affamé de service et j'ai pris une douche, résolu à le laisser dormir encore un peu. Quand je suis revenu Akane avait déjà avalé son petit déjeuné... ce qui ne me surprit qu'à moitié.

- Au fait, la face de poulpe c'est toi ! »

Il rayonnait de joie et je n'avais pas fait attention aux paroles qu'il m'avait envoyé, pour le coup car j'étais trop subjugué par l'irréalité de ce début de journée. L'entraînement avait été pénible, tout autant que les piques que nous lançait Minefuji... elle a de ses remarques, des fois j'aimerais lui envoyer un ballon en pleine tête. « Oh Tachibana tu dors ou quoi ! ... Hiiragi plus vite qu'est-ce que tu fais ! ... Oh les zouaves qu'est-ce que vous avez foutu cette nuit ! ... Encore une passe de ratée ! C'est pas digne de vous ça ! ... Oh les jeunes mariés on se bouge le cul ! ... Ouai, on me la fait pas à moi deux beaux mecs qui sèchent les cours, le même jour et aux mêmes heures, et qu'ont une tête de déterré en plein milieu de l'après-midi... Bon sérieux faites ça quand vous voulez, mais pas avant le tournoi, ok ? » Elle n'aurait pas été capable de nous mettre ko tout les deux, je pense qu'on lui serait tombé dessus. On avait pas besoin de ce genre de publicité, pas plus que du regard pesant de nos coéquipiers.
Mais ensemble, on peut surmonter tout. Le plus important c'est que l'on reste ensemble, toujours...

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- Ensemble... »
- Hiiragi t'as écouté ce que je viens de te dire ! Ou t'imagines des trucs bizarres ? C'est quoi se délire ? Ensemble ? Ensemble de quoi ? D'ailleurs qui t'as dit que je voulais rester avec crétin pareil pour toujours ? »

Comment ? De temps en temps je me laisse absorber par mes souvenirs, oubliant ce qui se passe, mais cette nuit est importante pour moi, car depuis celle-ci, nous ne nous sommes plus jamais remis sur la gueule. Alors soit, on continue de se chamailler, mais il n'y a pas d'amitié possible, si on arrondit tous les angles. Mais jamais, oh grand jamais nous n'en sommes revenus au poings. Ça aurait été jeter à terre tout ce qu'on est et tout ce dont on a besoin. Cette nuit là, on s'est trouvé, lui et moi et c'est tout ce qui m'importe.

- Désolé... Et puis qu'est-ce que je pourrais imaginer de bizarre avec un abruti comme toi ! »
- Tin, tu mérites un drop kick ! T'es trop naze, je me casse ! »
- Attends ! Qu'est-ce que t'as ? »
- A chaque fois que je veux t'en parler, tu m'écoutes pas ! Ça sert à rien ! Il nous reste quoi, hein ? Même pas quatre mois et le lycée, Kouzu, tout ça... tout ça sera bientôt fini ! Et toi tu ne m'écoutes même pas ! FAIT CHIER ! »

Qu'a-t-il ? Il lui arrive de piquer des crises pour rien ces derniers temps. Je sais que la fin du lycée nous met tous plus ou moins à cran, l'équipe s'est soudée. On a perdu notre capitaine l'année dernière, et ça n'a pas été facile. Cette année c'est tout le noyau dur qui disparaîtra et avec lui nos délires. Mais même si on se dispatche, même si on finit aux quatre coins du monde, personne ne pourra nous voler la complicité qu'on a eu un jour. Kouzu restera notre nid et c'est ici qu'on se retrouve lorsqu'on se croit perdu et ça le restera pour toujours...

- Au fait ta blessure ça tiendra le coup ? »
- Ouai c'est bon t'inquiète pas ! »
- T'as intérêt abruti... Sinon... »

Ça me revient en flash de temps en temps... Il pleuvait, ce soir là, c'était un soir de juillet. Les vacances, la plage et les feux d'artifices, rituels de l'année. Après avoir passé l'après-midi avec Sumire, on se dirige vers le terrain de basket, on fait quelque passe, essayant en vain d'améliorer les feintes d'Akane. Un groupe de yankee nous entoure, on ignore ce qu'ils veulent au début, mais c'est le genre de mecs qui veulent juste de la baston, sans aucune raison... Alors, on se bat car on ne laissera jamais personne nous marcher sur les pieds. Ils sont plusieurs, mais ça ne nous empêche pas de riposter. Si ce n'est qu'un mec se la joue déloyale et qu'il a essayé de planter un couteau dans le dos de Tachibana. Je me souviens que mon corps a bougé tout seul, je n'ai pas réfléchi, j'ai foncé dans le tas. Je suis affalé par terre lorsque je reprends conscience, une main m'agrippe, j'entends Tachibana hurler mon prénom et la dernière chose que je vois c'est deux mecs qui l'emmènent un peu plus loin.
C'est Yamazaki qui a trouvé Tachibana quelques heures plus tard, à ce qui paraît, il m'avait porté jusque devant sa boutique, d'ailleurs dans l'état où il était, je ne sais pas où il a pu puiser cette énergie. À l'hôpital on m'a dit de ne pas forcer pendant quatre mois. C'était guéri. Je fais un mouvement d'épaule pour le rassurer.

- Tachibana au fait, tu voulais dire quoi ? »

Il se retourna, semblant bouder.

- Harumoto doit nous attendre dans la cour viens. »
- Akane... excuse-moi... »
- Moustachu le dernier au gymnase est un abrutit ! »