Le jour où j'ai épousé l'homme de ma vie, ou ... si j'avais su, chrais pas venue...

Ma mère me l'avait dit : "ce gars est un marginal, il ne t'apportera que des ennuis", mais moi, j'ai toujours eu un coeur d'artichaut, et, quand je l'ai vu la première fois, enfin la première fois en vrai, dans un bar, les cheveux en bataille, comme toujours, avec ses petites lunettes qui lui donnent l'air d'un rat de bibliothèque coiffé au pétard à mèche, j'me suis dit : "j'le veuxxxxxxxxx!". Mais, à certains moments, comme en ce mardi matin, alors que je suis en train d'essayer d'expliquer à mes CP que non, décidément non, on ne peut pas mettre du jus d'orange dans le bocal de Jojo, le nouveau poisson rouge de la classe, parce que l'autre n'avait déjà pas supporté le coca, et que non, le fait qu'il n'y ait pas de bulles ça ne changera rien , un oiseau blanc comme neige déboule dans la salle de classe par la fenêtre entre-ouverte, renversant au passage toutes les scultptures en nouilles et en pinces à linge qui m'ont gracieusement eté offertes par mes nains édentés, se plante devant moi et me fait ses petits besoins dessus, excédé qu'après avoir pris le paquet qu'il apportait je ne lui ai pas donné de friandise...

Là, évidemment, tous mes élèves s'exclament : "Ohh bah maîtresse, elle a du caca d'oiseau partout!", et c'est dans ces grands moments de solitude, croyez-moi que je me dis finalement, "j'le voulais passssssss". Le "le" en question faisant référence, bien entendu, à mon cher et tendre, à qui j'avais pourtant maintes fois expliqué que, dans notre monde, on s'envoyait plutôt des textos, et pas des hiboux... Tout ça pour trouver, griffonné à la va-vite sur un bout de carton de papier toilette : "Mon petit hypogriffe en sucre, elles sont où mes chaussettes Mickey?"

Ravalant un "tu vas voir ta gueule ce soir", je pars aux toilettes me nettoyer le visage, histoire de retrouver un peu de dignité ...

Bien évidemment, notre histoire d'amour ne se résume pas seulement à des épisodes de chiures d'oiseaux sur la tronche... non non, croyez-moi, quand on vit avec un homme tel que le mien, on serait prêt à tout pour mettre un terme à tout cela quitte à un jour, essayer de s'étrangler soi-même avec le cordon du sac à poubelle...

Mais ce soir, j'ai décidé, une foi de plus de ravaler mes insultes et de lui pardonner : après tout, au début on s'aimait, enfin... je crois... et puis, maintenant il y avait les enfants, il fallait essayer de faire bonne figure devant eux, et de leur donner une bonne image de leurs parents...

Evidemment, ces bonnes résolutions sont dures à tenir, lorsque je débarque après avoir eté cherché les petits à la garderie, et me retrouve face à la porte d'entrée qui me dit que mon mot de passe est incorrect : "le quidditch est un sport kitch" je répète encore une fois. "Mot de passe incorrect", me répond la machine.

"Mamannnnn, j'ai envie de faire pipiiiii"

"Moi aussi mamannnnn"

"Euh... une minute les enfants... qu'est-ce que votre crétin de père a encore fabriqué avec les mots de passe... euhhhhhh... MacGonagall a une gueule de trou de balle (j'ai jamais dit que mon bien-aimé était un intellectuel, hein). "Mot de passe incorrect" grrrr ... "ahhh! oui euh... un dragon... un dragon sachant se droguer euh non un dragon sachant draguer une mandragore doit savoir draguer sans... Hagrid!" "Mot de passe incorrect, je vous rappelle que vous avez le droit à encore un essai avant que la maison ne s'auto-détruise..." "Putain de merde! Harry Potter!" "Mot de passe correct, bienvenue à la maison Mme Potter".

Complètement abasourdie, atterrée à l'idée que si j'avais voulu trouver un homme plus bête à épouser, j'aurai jamais réussi, je rentre et trouve mon andouille d'époux affalé sur le canapé, des bouteilles de bières au beurre jonchant le sol, en train de regarder un match de Quidditch avec son pote Ron ( ben oui, on est abonnés à TSPS , la Télé des Sorciers par Satellite). Les enfants se précipitent aux toilettes, moi vers l'objet de ma haine bestiale.

"Harry, nan mais t'es bête ou tu le fais exprès?"

"Ma ptite moldue d'amour, t'es déjà rentrée ... justement..." (pas le temps de finir)

"Justement, justement t'étais en train de te dire que pour une fois dans ta vie tu allais te comporter autrement que comme un gamin prébubère de quinze ans, c'est ça? Ca t'es pas venu à l'esprit de venir m'ouvrir la porte plutôt que de me laisser me démmerder avec ces mots de passe à la con, au risque de faire sauter la maison, et toi avec?"

"Ben je savais que t'allais y arriver..." (se voulant flatteur)

"Nan mais, je fais comment moi pour rentrer si tu changes le mot de passe sans me le dire plusieurs fois par jour? pis ça sert à quoi d'abord?"

"Mais enfin... si... (là il chuchote), si.. si celui dont on ne doit pas prononcer le nom nous trouvait, tu te rends pas compte !" me répond-il, en me regardant, choqué.

Moi, tout en chuchotant : "Parce que tu crois vraiment que si Voldemort venait ici, il s'embêtrait à essayer de trouver le mot de passe pour rentrer? Lui qui est, comme tu me l'as tant de fois répété le sorcier le plus maléfique du monde des sorciers? (là tout en hurlant), surtout quand le mot de passe c'est ton nom, TRIPLE BUSE! Ah ça, pour être original, c'est original !"

"Calme toi Gaëlle, enfin, tu vas faire peur aux enfants", me dit Ron.

"Ah toi, le rouquin aux yeux globuleux, tu te tais, tu arrêtes de te moucher dans mon plaid en patchwork et tu retournes dans ton terrier de suite!", je hurle, en montant de 20 décibels.

Regard indigné pour toute réponse, suivi d'un "ploups", Ron ayant disparu par magie.

"Toi... TOIIIIIIIII!", je beugle, fixant Harry d'un regard haineux.

"Ecoute..."

"J'ai pas finiiiiiiiii! Tu parleras quand je te le dirai! J'en ai marre de ton obsession pour Voldemort! Il y en a dont leur vie conjugale est gâchée par leur belle-mère, moi j'me suis dit quand on s'est rencontré, c'est déjà un bon début, j'aurais pas de problème de ce genre, vu que j'en ai paaaaasssss" (volume sonore toujours très important, je suis devenue totale hystérique).

"T'as pas le droit de parler de maman... nan t'as pas le droit!"

"Oh ça va hein! Et pis me fais pas le coup des yeux larmoyants, ça marche plus! Moi, j'ai pas de belle-doche, mais ma vie est gâchée par une espèce de psychopathe dégénéré dont on n'a pas le droit de prononcer le nom et que j'ai même jamais vu! Le soir, c'est toujours la même chose, il faut que je regarde dans tous les placards pour vérifier si il n'y a pas une paire d'yeux rouges brillants qui se cache! Même tes gosses sont moins froussards que toi! Et puis, ça c'est pareil, ça sert à quoi qu'on soit sur liste rouge? Tu crois vraiment que Voldemort va appeler avant de venir prendre l'apéro? Et je te parle même pas du code-pin sur le frigo, ou des sorts de protection sur les tiroirs à chaussettes ..."

Entre temps, il a éclaté en sanglots, et est parti en courant dans notre chambre, mais m'a quand même balancé avant de claquer la porte : " T''as de la chance que ma povre môman, soit morte, elle serait outrée de voir comment tu m'traites, ça oui, j'en suis sûr!"

"Elle serait encore de ce monde, elle oserait même pas avouer qu'elle est ta mère, tellement niveau imbécillité t'atteints des sommets, mauviette!"

"Méchante!"

"Va chierrrrrrrrrrr!"

Là, prise d'un excès de rage incontrôlable, je brûle toutes les photos de notre mariage ... je ne supporte plus de me voir, dans ma robe Versace, sourire comme une imbécile à côté de lui, et gesticuler, montrant de mon mieux le gros caillou qui brille à mon doigt... (ben oui les photos on les a faites faire par un photographe sorcier, les photos sont animées chez eux). J'étais totalement inconsciente, et à deux années lumières de m'imaginer que mon mariage allait se terminer en cauchemar.

Sur le coup, je me sens soulagée, mais quand je les re-regarde, je réalise qu'en fait, les photos sont toujours intactes, sauf que maintenant sur les photos en plus de sourire comme une idiote, j'ai les cheveux cramés comme si j'avais mis les doigts dans une prise électrique...

Après ça il a fallu que je me ressaisisse, les enfants étant enfin sortis de la salle de bain, demandant si j'avais tué leur papa... Gardant pour moi le "pas encore, ça va venir" qui me brûlait la langue, j'essayais de les rassurer : il y avait des moments où les papas et les mamans de disputaient, mais ça allait s'arranger (enfin on espérait) parce qu'on s'aimait (blablablabla) et surtout on les aimait très fort, eux (enfin celui de nous deux sui se rappelait leurs prénoms, en tout cas).

J"ai réussi à les consoler de mon mieux, en fait j'ai réussi assez facilement, en leur disant qu'ils auraient droit à un gros gâteau au chocolat s'ils arrêtaient de pleurer ... bizarrement ça a marché, devinez à qui ils ressemblent le plus?

Un peu plus tard dans la soirée, alors que l'ennemi était toujours barricadé, j'ai reçu un coup de fil d'Hermione. Ce lâche lui avait envoyé un hibou de détresse. Il était, me disait-elle, anéanti, m'aimait à la folie et disait que nos disputes étaient fondées sur un problème de compréhension mutuelle inter-éthnique : je ne comprenais pas l'importance des dangers de leur monde (faisant référence au grand méchant sans corps aux zieux rouges, je suppose), et lui ne s'était peut-être pas très bien adapté aux coutumes des moldus (grrr), (cf l'épisode puant du matin) ... Sur ce, comme à son habitude, elle m'a conseillé des livres pour trouver une solution à notre "petit problème" : avais-je lu Désordres sentimentaux et déboires conjugaux volume 1 : le coup du hibou qui vous chie dessus? Désordres sentimentaux et déboires conjugaux volume 2 : le grand méchant aux zieux rouges et le mot de passe incorrect ? Lui promettant que j'y jetterai un coup d'oeil (blablablabla), je raccrochai et partais me coucher dans la chambre d'ami avec une tablette de chocolat.

Un peu plus tard, alors que je sommeillais, j'ai entendu gratter à la porte ... hésitant entre deux options : 1) murmurer comme à ma grande habitude "pas ce soir, j'ai mal à la tête", 2) faire la sourde oreille, et prétendre le lendemain matin, que je croyais que le grattement, c'était des souris , je me suis finalement dit, étant d'humeur un tantinet lubrique (le chocolat ça a tendance à me détendre à mort, et c'est marrant, celui-là encore plus que d'habitude ... ) "pourquoi pas, autant profiter de la situation, je suis pas obligée de lui pardonner après pour autant, niark, niark, niark..." Alors, Harry est entré dans la chambre, m'a fait ses yeux de velours (enfin autant qu'on peut le faire quand on a pleuré comme une madeleine et qu'on a le regard d'un lapin atteint de myxomatose), m'a murmuré des mots d'amour à sa façon "j'arrive pas à ouvrir ta chemise de nuit", "la vache, elle est super grande ta culotte!" (no comment, merci...) et puis, j'vous passe les détails, hein ...

Toujours est-il que pile au moment où ça commençait à devenir intéressant, il me demande l'heure! Moi, complètement dans un autre monde : "Ouiiiiiiiiiii, oui oui ouiiiiiiiiiii". "Il est quelle heure?"il me redemande. "MMM euh? 22h mais ça fait que 10 min Harry, alors euh...'

"C'est pas vraiiiiiiiiiiiii?"

Moi : "Ben si, et pis si tu faisais un petit effort, tu battrais ton record là..."

"Nan mais, y à la rediffusion de la coupe du monde de Quidditch sur la 29 là! Chui désolé, on continuera plus tard!", il me sort, en courant vers le salon, le pantalon dans le bas des pattes.

"Harry Potter, tu reviens ici tout de suite finir ce que tu as commencé" je crie, au bord de la crise de nerf, mais malheureusement, mon cri se perdra dans la noirceur de la nuit, Harry étant déjà affalé sur le canapé...

Humiliée, indignée et frustrée, je me rhabille, dégoûtée, et finis, à un moment donné par m'endormir.

Le lendemain matin, pas besoin de le préciser, qu'au petit-déjeuner, j'étais d'humeur morose et légèrement agressive.

"Chérie, t'aurais pas mangé ma tablette de chocolat, par hasard?"

" De quel droit tu oses m'appeler chérie toi? Poussière de l'humanité, va ! Et pis d'abord, si j'veux, j'peux manger du chocolat! Et pis me dis pas que je vais grossir hein, chui pas grosse d'abord, non môssieur j'ai des rondeurs localisées c'est pas pareil ! Et pis d'abord, je t'emmerde, et pis voilà!"

"Euh, c'est pas ce que je voulais dire, mais euh... c'était du chocolat aphrodisiaque expérimental..."

"Ah ouais? Aphrodisiaque?" (je commençais à comprendre ma soudaine envie de proximité avec cette chose, la veille). Puis, réfléchissant : "Dis donc, pourquoi t'as dit expérimental?"

"Hummmm, c'est-à-dire que c'est Fred et George qui viennent de l'inventer, alors tu vois, comment dire, ça peut avoir des effets secondaires ..."

"Harry Potter, tournes pas autour du pot steuplééé!"

"Ok, t'as un nez de cochon", il me répond, du tac au tac.

"Quoiiiiiiiiii?", je hurle.

"T'as un nez de cochon", me répète-t-il, la voix légèrement tremblotante cette fois-ci.

Je cours vers le miroir le plus proche et contemple avec consternation le groin tout rose qui a remplacé mon petit nez ordinaire. Et là, là, j'me suis dit, c'est pas possible, ça peut plus continuer comme ça. J'aurais dû agir bien avant, avant l'installation des mots de passe, des codes-pins à la noix, avant que notre vie ne tourne au cauchemar ... alors je l'ai fait... j'ai pris mes gamins par la main, et j'ai foutu le camp...

"Gaëlle, où tu vas? sois pas vexée, t'as toujours dit que t'aimais bien le rose!"

Je le fusille du regard. "Je me tire, j'en peux plus!"

"Mais tu peux pas faire çaaaaaaaa!"

"Ben si". Et paf, je claque la porte. Je suis à peine arrivée au trottoir d'en face que je fais demi-tour, réalisant que je suis en chemise de nuit, que j'ai pas un sous sur moi, ni les clés de la kangoo. Je rerentre.

"Ma chérieeeeee tu es enfin revenue... je commençais à m'inquiéter!"

"Figure-toi que tu as raison, je peux pas partir."

"Bien sûr que non, tout va s'arranger, tu vas voir!"

"Non, je peux pas partir, mais c'est toi qui te casses!"

"Quoi? M'enfin ?"

"Tu te casses de suite, je te dis ! Là, j'ai balancé tous ses chaudrons, balais et autres conneries sur le trottoir, et, mon Dieu, qu'est- ce que ça m'a fait du bien!

Quelques mois plus tard, on avait divorcé, même s'il a fallu que je menace Harry plusieurs fois d'envoyer un sms à Voldemort pour lui dire où il habitait s'il ne signait pas les papiers du divorce ... (quelle tâche, comme si j'avais son numéro de portable...)

Lui, d'après ce que me racontent les enfants, ne va pas bien du tout. Il a trouvé un boulot quand même, comme dame pipi à Paris (ben oui ils font pas de discrimination sexuelle pour ce genre de boulot apparemment, je trouve ça bien moi, je suis pour l'égalité des sexes), et passe son temps à se morfondre.

Moi, je me sens beaucoup plus légère qu'avant maintenant que je suis célibataire, enfin façon de parler, car j'ai rencontré quelqu'un! C'est le grand bonheur, il est brun et a un vrai corps d'athlète. Bon, maman a toujours un mauvais pressentiment, elle me dit qu'on ne peut pas faire confiance à un type qui met ses slips par-dessus son pantalon, mais moi j'ai un bon feeling, je le sens, S, c'est l'homme de ma vie !

D'ailleurs, c'est ce dont je suis en train d'essayer de la convaincre au téléphone, quand j'entends un grand "schboinnngg" contre la fenêtre de ma chambre, suivi d'un grand "boummm".

"Qu'est-ce que c'était ma chérie? "

Je sais pas maman, je vais voir, c'est peut-être un oiseau qui s'est cogné dans la vitre. Bouge pas, je reviens.", et je pose le combiné sur la table.

Et là, je vois mon homme, avec son bel habit rouge, bleu et jaune, affalé derrière la vitre, se frottant la tête vigoureusement, l'air complètement ahuri...

"Putain de merde, Supermannnnnn! Je t'ai dit combien de fois de passer par la porte d'entrée, comme tout le monde? Est-ce que je viens en volant moi hein? Oui, je sais je sais pas voler, mais c'est pas parce que Môssieur a des pouvoirs extraordinaires qu'il doit se la péter, hein! et pis j'te signale que si c'était mon cas, j'aurai l'intelligence de pas essayer de rentrer en volant par une fenêtre qui est fermée! Tu devais pas être là le jour de la distribution des neurones toi !"

"Ouais, bah en tout cas, ça fait super mal, et puis..."

"Tais-toiiiiiiiiiiiii! Tu parleras quand je te le diraii! J'ai pas finiiiiii! Je venais de faire les vitres, moi , elles vont être dégueulasses maintenant, tu sais combien de temps ça prend les vitres à faire?"

Je beugle tellement fort que j'entends pas ma mère soupirer, dans le combiné resté sur la table "Et voilà, qu'est-ce que j'avais dit? C'est reparti..."

The End