Chapitre 7 : Conflits


Samedi soir - Chez Taïga :

Taïga était dans son canapé et n'avait pas décoléré. La fin de journée avec Kise s'était terminée plus tôt que prévu à cause de lui. Depuis sa rencontre avec Daiki, il n'avait pas desserré les dents et le blond lui avait fait remarquer. Il était transparent, il était juste tout bonnement incapable de cacher ses émotions.

Flash back

"Il se passe un truc entre toi et Aomine ?"

Taïga l'avait regardé, surpris de sa question, et l'autre avait repris rapidement, un air sérieux sur le visage.

"Désolé, je n'aime pas me mêler de ce qui ne me regarde pas mais ... ça semblait tendu entre vous, là. La dernière fois déjà, sur le terrain ...Enfin, je ne veux pas jouer les entremetteurs, mais, je ne veux pas me retrouver entre vous si il y'a un truc."

Il avait soupiré et n'avait même pas su quoi lui répondre sur le moment. Il ne savait même pas à quoi ils jouaient tous les deux. Leur relation était tellement étrange...

"C'est compliqué Kise... Je ne sais pas quoi te répondre. Lui et moi c'est ... Particulier. Je pense qu'on sera toujours en conflit, quoiqu'il arrive."

Kise s'était mis devant lui et l'avait observé silencieusement, longuement, puis lui avait souri.

"Je pense que vous êtes les mêmes tous les deux et ... On voit clairement qu'il se passe un truc entre vous, mais comme tu dis, c'est ... pas vraiment compréhensible. Je suis un peu jaloux je crois ..."

Il en avait ri un peu, lui affirmant qu'il n'y avait vraiment pas de quoi.

"Tu te trompes. Je connais Aomine et … Pour être honnête, je ne l'ai jamais vu agir comme ça avec quelqu'un. Je veux dire, là, ce qui vient de se passer... Te retenir comme ça … J'ai eu l'impression que… Comment dire…"

"Ecoutes Kise, sérieux, tu te prends la tête …"

"Il était jaloux, Kagami."

Il était resté sur le cul en entendant les paroles du blond. Il n'y croyait pas une seule seconde. Ok, ils n'avaient rien défini entre eux, ils en avaient parlé à l'arrache, mais de là à être jaloux ? On parlait de Daiki, pas d'une nana amourachée. Et puis il était en bonne compagnie tout à l'heure, ça prouvait bien qu'il n'attendait rien de lui non ? Il se doutait bien que cette nana n'était pas juste à son bras pour la forme. La panthère aimait les femmes. Point. Même s'il ressentait le besoin d'être avec lui, et que sans se le cacher, Daiki lui plaisait - il était loin d'être moche - ils n'avaient pas envisagé de se mettre en couple avec lui.

"C'est pour ça que je te le demande. Est ce qu'il y'a un truc entre vous ?" Réitéra Kise.

Taïga l'avait regardé longuement et il avait capitulé.

"J'en sais rien. Vraiment..."

Il n'aurait pas pu lui en dire plus. Il ne pouvait pas tout lui raconter comme ça, même si Kise avait l'air de s'en douter en cet instant. Après tout, il n'était pas le seul dans cette histoire et il ne voulait pas mettre la panthère dans l'embarras. Le blond avait juste hoché la tête, stoppant la journée. Vu son état, c'était préférable de s'en tenir là.

"Kagami, sache une chose. Je ne suis pas du genre à laisser tomber. Tu me plais vraiment."

Et il l'avait laissé en plan sur ces mots.

Ouais, la journée avait été vraiment sympathique avec Kise. Il avait profité de chaque moment, et il y avait pris du plaisir. Il n'y avait pas eu de prise de tête, même à la fin. Kise ne lui en voulait pas, il lui laissait le temps de faire le point sur la situation. Mais quelle situation ? C'était bien la question qui le taraudait en ce moment. Il avait dépassé tout les stades inimaginables avec le brun. Il n'aurait jamais pensé qu'il prendrait autant de place en si peu de temps, allant même jusqu'à s'immiscer dans son date de la journée.

Mais il l'avait mis en rogne tout à l'heure. L'entendre dire avec autant de désinvolture qu'il n'était qu'un mec avec qui il jouait au basket. Juste un mec qu'il appelait par son nom...

Ouais, il était en colère.

Sérieusement, comment Daiki pouvait passer de tout à rien. De noir à blanc. Il ne savait pas faire ça, lui. Est ce qu'il avait eu honte ? Honte de se montrer proche de lui face aux autres ? Face à Kise ? Qu'est-ce que ça pouvait faire s'ils s'appelaient par leurs prénoms ? Ça concernait qui au juste ? Il devait jouer double jeu ? Un coup ils étaient proches, un coup non ?

Qu'il aille se faire voir !

Lui, il était entier.

Un bruit attira son attention et il fit taire ses pensées pour se concentrer sur la source du cliquetis. Le bruit venait de la porte d'entrée. Il haussa un sourcil et mit ses sens en alerte. Un froissement semblait provenir de la porte. Il se leva et alla l'ouvrir pour vérifier.


Samedi soir - Parc devant chez Daiki :

Putain de journée de merde ! Elle avait mal commencée de toute façon ! Déjà ce matin, il n'avait eu aucune envie de sortir de son lit, comme si ce dernier ne voulait pas le laisser affronter les heures à venir. Il avait reçu un message d'un ancien plan cul et il avait accepté de l'accompagner en ville, n'ayant rien à faire de mieux de toute façon. S'il avait su, il serait resté chez lui. Il n'aurait jamais pensé voir ça, et encore moins ressentir ça.

Il avait entendu son nom et était tombé nez à nez avec Kise. Ça, passe encore, mais voir Taïga juste derrière ce dernier, ça, c'était autre chose. Les voir ensemble, le sourire aux lèvres, ça l'avait refroidi. Il ne savait pas pourquoi mais la colère était montée en lui. Depuis quand se fréquentaient-ils tous les deux ? Depuis quand ils avaient l'air si proche ? Depuis quand passaient-ils des week-ends ensembles ? Il avait été désagréable, il le savait, mais il n'avait pas pu s'en empêcher. Voir Taïga si proche d'un jour de la GM l'avait pris par surprise et pas dans le bon sens.

Il n'avait pas pu retenir un regard mauvais, il avait pris ça comme une trahison alors qu'au fond, il savait que l'autre ne faisait rien de mal. Il pensait juste être le seul à avoir touché Taïga dans ces sentiments et là, il s'était retrouvé face à eux deux, sans y être préparé, alors qu'il aurait dû le savoir. Il avait été là quand Kise avait fait des avances à Taïga. Il avait bien vu le regard doré porté sur le numéro dix et il connaissait le mannequin. Il le savait charmant quand il le voulait, et là, il voulait Kagami.

Il avait senti le sang bouillir dans ses veines, il avait eu envie de s'enfuir avec Taïga, lui montrer que c'était avec lui qu'il aurait dû passer sa journée. Ça l'avait tellement bouleversé qu'il avait utilisé le nom du rouge. Et quand Hinata avait réclamé des présentations, il n'avait pas pu s'empêcher d'être vicieux et malveillant. Il avait volontairement mis de la distance entre eux et Kagami lui avait bien rendu au moment opportun.

Quand Kise avait clairement annoncé la couleur de leur tête à tête, son corps avait réagi tout seul. Sa main avait retenue Taïga sans même qu'il n'y ai pensé. Il avait agi contre sa volonté. Il n'avait pas pu s'empêcher de lui demander des comptes. Il devait savoir si c'était une blague ou non. Et sa réponse ... Il l'avait encaissée avec difficulté mais il l'avait bien cherché après tout.

Mettre de la distance entre eux, c'était compliqué, surtout depuis leur nuit ensemble. Il se maudissait de le rejeter de la sorte, mais il n'arrivait pas à faire autrement. Taïga le terrifiait au fond. Il était devenu obsessionnel. A tel point qu'il n'y avait pas un jour où il ne pensait pas à lui. En y réfléchissant bien, ça faisait un moment déjà, qu'il le regardait. Pas comme ça, mais il avait toujours été là, quelque part dans ses pensées. Sans même qu'il ne porte attention à ses idées, il était là. Quand il pensait à Tetsu, il voyait Taïga. Quand il mangeait un burger, il pensait à Taïga et sa montagne de sandwichs. Quand il pensait basket, il pensait inconditionnellement à Taïga. Quand il ... ouais, ok, Taïga était toujours là.

Mais depuis ce fameux soir, il était complètement là. Il avait tout bonnement élu domicile dans sa tête sans y avoir été invité. Il l'avait aidé à surmonter sa hantise du sport, à retrouver son jeu d'avant. Il lui avait même porté une oreille attentive l'autre soir, et plus encore. Et depuis ... ouais, il était dans la merde. Entre eux ça avait toujours été conflictuel, mais là, c'était autre chose. Il n'avait pas eu l'envie de le charrier. Il avait eu envie de lui faire mal, autant qu'il en avait ressentis en cet instant. Lui faire comprendre qu'il n'aimait pas le voir avec Kise. La question, c'était pourquoi ?

Il avait eu du mal au début quand le rouge avait pris sa place auprès de Tetsu, il avait été jaloux, il le reconnaissait. Mais il savait aussi que la scène de cet après-midi, c'était encore autre chose. Jamais son corps avait refusé de l'écouter comme ça, sauf dans la zone, mais là, ce n'était clairement pas le cas. Alors quoi ? Ça commençait sérieusement à le gonfler de réfléchir autant et ce n'était pas dans ses habitudes. Il voulait juste être avec lui. Juste lui. Que lui.

Il se claqua les joues et réprima un frisson.

Il était encore sur ce putain de banc devant chez lui. Sa mère avait encore disjoncté et elle ne l'avait pas ratée cette fois. Il fallait dire qu'il était dans la lune depuis cet après-midi. Il avait été tellement énervé qu'il avait renvoyé Hinata chez elle sans même tirer son coup, et en plus, il n'en avait pas envie tant que ça. Il ne se comprenait plus. Qu'est ce qui ne tournait pas rond chez lui au juste ?

Il se redressa et le tintement des clefs dans sa poche attirèrent son œil. Il les prit en main et joua avec, machinalement. Puis son regard s'arrêta sur une clef en particulier. Sa clef. Celle de Taïga. Il était comme un con dehors, et il caillait. Est ce qu'il devait l'utiliser ?


Samedi soir - Chez Taïga :

La porte s'ouvrit sur Daiki, clef en main et tout penaud. Taïga le regarda de haut, croyant à une blague. Le regard bleu se leva sur lui, étonné que la porte s'ouvre sur sa personne alors qu'il n'avait visiblement même pas chercher à l'insérer dans la serrure. Il le vit clairement chercher ses mots, mais il ne lui en laissa pas le temps.

"C'est une blague ?" Demanda-t-il.

Il vit Daiki se mordre la lèvre et détourner le regard. Sérieusement, ce mec se pointait vraiment chez lui après ce qui s'était passé un peu plus tôt dans la journée ? Il l'avisa durement du regard, hésitant clairement à le faire entrer chez lui. Le brun soupira et amorça un pas en arrière.

"Laisse tomber, j'aurais pas dû venir."

Alors que Daiki tournait la tête pour partir, il avisa rapidement son visage et pris d'une pulsion, il l'attrapa par le bras. Il se pinça les lèvres en se rendant compte de son geste et dans une dernière hésitation, il le tira à l'intérieur de son appartement. Le brun resta un moment dans l'entrée, hésitant à y pénétrer complètement mais Taïga ferma la porte à clef derrière lui, ne lui laissant pas d'autre choix. Il s'avança dans le salon, attendant que Daiki fasse de même. Il l'attendait, bras croisés sur le torse, attendant une explication. Il le vit apparaitre et éviter son regard un moment avant qu'il ne pose finalement les yeux sur lui.

"Taïga ..."

"Oh, on en revient aux prénoms maintenant ?" Le coupa-t-il. "Excuse-moi, c'est que j'ai un peu de mal à te suivre en ce moment, tu vois ?!"

Le brun était mal à l'aise, et ça se voyait comme le nez au milieu de la figure mais il ne pouvait pas s'empêcher de le remettre à se place. Il le fallait, parce sérieusement, la situation devenait compliquée entre eux. Il ne savait plus sur quel pied danser avec ses changements d'attitudes.

"Je ... Merde ..." Tâtonna Daiki.

"Tu me fais vraiment chier, j'espère que tu en as conscience !"


Il ne savait pas où se mettre. Pourquoi avait-il fallu qu'il ouvre cette putain de porte. Il n'était même pas sûr de vouloir s'en servir de cette clef. Il était resté au moins cinq minutes devant la porte à hésiter et maintenant, il était comme un con au milieu de son salon et Taïga ne lui laissait aucune chance d'en placer une.

"Tu me fais vraiment chier Daiki, j'espère que tu en as conscience !"

Il regarda Taïga disparaitre dans le couloir, le laissant seul et il ne savait pas où se mettre. Il avait beau l'avoir laisser entrer chez lui, il voyait clairement que l'autre était encore fâché, et il y'avait de quoi. Contre toute attente, il le vit revenir avec une mallette à la main qu'il déposa sur la table basse du salon.

"Vient mettre ton royal postérieur sur le canapé." Grogna le rouge.

Étonné de la demande, il le fit tout de même sans rechigner, après tout, il devait se la jouer fine si il voulait passer la nuit ici, et mettre Taïga un peu plus en colère n'était clairement pas une solution. Il s'assit sans un mot et regarda la mallette avec attention. C'était une trousse de secours. Pour quoi faire au juste ? Il savait qu'il s'était pris un truc en pleine tronche mais quand même...

Le tigre s'installa entre ses jambes, assit sur la table basse et le dévisagea un moment.

"Que ce soit claire, Da... Comment je dois t'appeler enfaite ? Daiki, ou Aomine ?! Tu m'éclaires ?"

Il ouvrit la bouche mais l'autre lui coupa une nouvelle fois l'herbe sous le pied, le menaçant du regard.

"Je vais t'appeler par ton prénom, parce que même si je suis en rogne, je n'oublie pas ce qu'il s'est passé, moi !"

Il le vit ouvrir la boite et prendre une boule de coton, l'aspergeant de désinfectant. Il plissa le nez sous l'odeur de l'aseptisant mais ne dit rien pour autant. Apparemment, il n'avait pas fini sa tirade et le ton de sa voix ne lui donnait clairement pas envie de protester.

"Donc que ce soit clair, c'est la dernière fois que tu joues à ça avec moi. Pigé ? Je ne suis pas un putain de jouet que tu prends et que tu jettes quand tu as envie ! Et comment tu t'es fait une coupure pareille bordel ? Ça peut s'infecter !"

Il ne put retenir un léger rire de quitter ses lèvres en écoutant l'homme devant lui, coton en main, prêt à le soigner.

"Pourquoi tu ris ? Je ne vois pas ce qu'il y'a de drôle dans ce que je te dis."

Il voyait le visage de Taïga, proche du sien. Ses sourcils froncés sous la colère, ce pli qu'il arborait lui-même entre eux. Cette lueur coléreuse mais inquiète dans le regard. Cette bouche pincée, fâchée mais tentant de retenir des paroles trop vulgaires. Ses mèches cuivrées se baladant librement sur son front.

"Sérieusement Tai ... Y'a que toi pour m'engueuler et t'inquiéter en même temps." Chuchota-t-il.

Taïga garda le silence sous sa phrase. Il ouvrit la bouche et la referma, soupirant bruyamment.

"Et y'a que toi pour me mettre dans des états comme ça ..." Soupira t'il.

Taïga déposa lentement le coton sur sa joue mais il ne le quitta pas des yeux une seule seconde. Il était concentré sur sa tâche et avoir quelqu'un qui prenait soin de lui comme ça, ça lui retournait le ventre. Comment pouvait-il passer de la colère à l'inquiétude aussi rapidement ? Il devait très bien savoir d'où provenait cette blessure mais il n'avait pas insisté pour autant. Il ne le forçait à rien, ni à s'expliquer, ni à parler. Il était juste là et ça, c'était énorme pour lui. Au final, il n'y avait que là qu'il se sentait bien. Avec lui.

"Ça va te laisser une trace ... et tu vas surement avoir un bleu... "

Les yeux de Taïga sur sa peau semblaient laisser une trace chaude à leurs passages. Il sentait le souffle sur sa peau, la caresse du coton et le mouvement des yeux rubis sur lui. Il était comme captivé par chaque mouvement, chaque geste, chaque chose qui émanait de Taïga. Il sentit son ventre se tordre délicieusement et il connaissait bien cette sensation, ça lui faisait peur mais en même temps ...

"Je vais te chercher de la glace pour que ça ne gonfle pas."

Le numéros dix allait se lever mais sa main captura le poignet encore près de sa joue. Il sentit les yeux interrogatifs sur lui mais il resserra sa prise. Il ne voulait pas qu'il s'en aille, même une seconde.

"Reste. On s'en fou..."

"Qu'est-ce que tu racontes ?"

"On s'en fou..."

Ouais, là, il s'en foutait d'avoir la joue gonflée, bleue ou de n'importe quelle couleur. Il se sentait étrange, tiraillé entre sa raison et son corps qui semblait parler pour lui. Il le voulait. C'était viscérale et il le sentait, il le savait. Il voulait Taïga tout entier. Juste pour lui. Il se savait possessif, mais à quel point ? Il était en train de le découvrir.

Il le voulait pour lui, et lui seul.

Mais avoir ce genre de relation c'était ... Putain, il ne pouvait s'empêcher de le revoir avec Kise et la colère montait en lui comme une mèche allumée à une dynamite prête à exploser.

"Daiki, tu vas avoir ..."

Il ferma les yeux durement et lâcha la bombe.

"Je m'en fou, je veux juste plus ... Putain, sors plus avec lui."

Un silence flotta dans l'air et il sentit la main de Taïga bouger, quittant sa joue pour se poser sur ses genoux, mais il ne lâcha pas sa prise de peur que Taïga le laisse.

"De quoi tu me parles ?"

"De Kise. Le revoit plus." Tonna t-il.

Il baissa la tête, il ne voulait pas croiser son regard. Il ne savait même pas pourquoi il lui demandait une telle chose. Il était qui pour lui demander ça ? Tout était si confus dans sa tête.

"Attend, tu es sérieux là ?"

Sa prise se resserra et il releva la tête, plongeant son regard dans celui perdu de Taïga. Le sien devait montrer toute sa détermination et sa confusion.


Taïga ne savait pas ce qui était en train de lui arriver. Daiki avait fait tomber sa colère en un battement de cil, il l'avait soigné et là ... Là il était en train de se passer un truc qu'il ne pigeait pas.

"De Kise. Le revoit plus."

C'était quoi cette phrase ? Il sentit son ventre se tordre sous la demande. Pas douloureusement, mais agréablement. Comme s'il avait attendu que cette phrase quitte ses lèvres depuis leur rencontre dans la journée. Il se sentait aussi perdu que l'homme devant lui. Il avait du mal à croire ce qu'il venait d'entendre. Les mots de Kise faisaient échos avec ceux du brun en cet instant, ce répercutant violemment dans sa poitrine.

"Il était jaloux, Kagami."

Ça ne pouvait pas être possible. Il ne savait plus où il en était avec ce mec.

"Attend, tu es sérieux là ?"

Il sentit la poigne se raffermir sur son poignet et Daiki releva la tête vivement, le surprenant. Il plongea les yeux dans les siens où une tempête faisait rage.

"Je ne supporte pas. Le voir avec toi comme ça, j'supporte pas. Je ne sais pas pourquoi, mais je n'y arrive pas."

"Attend, c'est..."

"Ça m'a fait péter un plomb tout à l'heure. J'ai mal réagi, encore. Je le sais. Mais ..."

"Daiki ..."

"Je sais que j'peux être casse-couille, colérique, hautain et toutes les merdes que tu veux, mais j'peux pas lutter contre ça. Je ne le supporte pas."

Taïga avait les yeux écarquillés sous la surprise. Il faut dire que voir Daiki tenter de lui expliquer un truc pareil était juste hallucinant. Il avait l'air perdu dans ces explications et semblait chercher lui-même à travers leurs échanges la signification de cette discussion. Il essayait de se mettre à sa place et il devait avouer que ça l'avait énervé aussi de le voir avec cette nana au bras tout à l'heure, mais ils n'étaient pas en couple tous les deux. Pourtant, la scène qui était en train de se dérouler semblait montrer tout le contraire. Comme une jalousie mal placée, une envie féroce de garder l'autre dans son sillage. Il fronça les sourcils et se pencha un peu vers lui.

"Je dois te rappeler que tu étais avec une nana tout à l'heure ?"

Il vit le brun grimacer et reprendre.

"On s'en fou d'elle ! Ce n'est pas sérieux, et d'toute façon, on a même pas couché ensemble."

"Je n'ai pas couché avec Kise non plus, et je ne vois pas le rapport."

Daiki se leva violemment, le surplombant de toute sa hauteur.

"Ne t'avise même pas de le faire !" Grogna t'il.

Il se leva à son tour, le défiant du regard.

"Ah ouais, et sinon quoi ?"

"Ne joue pas à ça Taïga !"

"Bordel ! Tu te rends compte de ce que tu me dis ?"

"Je sais !" Cria Daiki.

Le brun avait le souffle court à cause de l'énervement et se pinça l'arête du nez pour se calmer. Il expira lourdement et replongea ses orbes ténébreux dans les siens.

"Écoutes, j'sais que ça parait dingue et … certainement tiré par les cheveux… mais … Putain Taïga, je ne veux pas voir ça."

"Pourquoi ?" Souffla-t-il.

Daiki haussa les épaules et attrapa le bas de son tee-shirt entre ses doigts. Il sentait les mains tremblantes de l'autre contre lui. Il ne savait pas si c'était la frustration, la colère ou autre chose qui tiraillait le brun, mais il était dans un drôle d'état. Et lui aussi. Il était pendu à ses lèvres.

"J'en sais rien... C'est ... Putain, dis-moi que je ne suis pas le seul à trouver qu'il y'a un truc entre nous."

Son cœur loupa un battement.

"Non, tu n'es pas le seul à le penser. Il se passe un truc."

"Je ne peux pas le définir mais, je sais que ça… Ça c'était trop pour moi. De le voir comme ça avec toi, rire, partager des trucs. Je voulais être à sa place. Je voulais que tu ne regardes que moi. Juste moi."

Taïga ferma les yeux et se sentit rougir en entendant les mots sortir de sa bouche. Daiki était en train de lui livrer ses sentiments, et il ne s'en rendait même pas compte cet idiot. Il l'attira contre lui et posa sa joue contre sa tempe, passant un bras autour de ses hanches.

"Tu es jaloux, imbécile."

Il sentit Daiki se figer dans ses bras, comme s'il réalisait seulement la portée de ses mots. Comme s'il venait de comprendre le pourquoi du comment. Il sentit les bras du brun autour de sa taille, timide, et sa tête se nicher dans son cou.

"Je n'ai jamais agis comme ça… Je ne sais pas ce que j'fais, mais je sais que j'ai besoin de toi. Je sais que j'suis égoïste de te demander ça, alors que je ne comprends pas moi-même… Toi et moi, c'est juste… obsessionnel. Tu es partout et nulle part à la fois... Depuis l'autre jours, c'est... vital, j'sais pas..."

Taïga se pinça les lèvres et se retint de ne pas l'embrasser sur le champ. Ses mots l'atteignaient en plein cœur et il avait l'impression que tout ce qui sortait de cette bouche reflétait ses propres sentiments. Sauf que pour lui, ça devenait une évidence. C'était certainement plus facile pour lui de s'avouer les choses, après tout, être avec un homme ne le dérangeait pas plus que ça. Ils avaient voulu se le cacher mais depuis l'autre soir, tout devenait clair. Ils se voulaient l'un et l'autre. Ils voulaient tout partager. Le sport, les sorties, le sexe, mais ça, il fallait le faire comprendre à Daiki... Et ça, c'était une autre paire de manche... Mais il savait comment s'y prendre.

"Si je te demande de ne pas coucher avec cette fille de tout à l'heure, qu'est-ce que tu ferais ?" Demanda-t-il.

Daiki se décolla un peu de lui, l'interrogeant du regard. Il lui demanda de répondre simplement à ses questions, comme elles venaient dans sa tête.

"Je ... Ouais, j'accepterais, je crois. Je ne sais pas."

"Si je te disais que je voulais sortir avec Kise, tu dirais quoi ?"

"Hors de question. Pas lui. "

"Donc, ça ne poserait pas de problème si je ... sortais avec quelqu'un d'autre ?"

Une grimace passa sur son visage.

"Pourquoi tu ..."

"Répond Daiki."

"Je n'en sais rien !" S'écria t'il en s'éloignant de lui.

Daiki se mit à faire les cent pas dans son salon en regardant à droite et à gauche, cherchant des réponses. Il le regarda faire, attendant encore sa réponse. Il vit l'autre s'arrêter dans son élan et le regarder.

"Ça me ferais chier."

"Pourquoi ?"

"J'en sais rien, tu m'emmerdes Taïga ! Je t'en pose des questions, moi ? Parce qu'on se verrait moins, que tu joueras moins au basket avec moi, qu'on ne pourras pas jouer à la console, mâter des films et que tu seras avec une autre ou un autre !"

Daiki était essoufflé par sa tirade et lui lançait un regard noir avant que ses yeux ne s'agrandissent un peu, réalisant ses propres paroles. Il ouvrait et refermait la bouche comme un poisson hors de l'eau.

Taïga sourit légèrement, croisa les bras sur sa poitrine. Au moins, il était maintenant sûr que le problème n'était pas Kise, mais bien lui. Il continua son questionnement pour pousser l'autre à comprendre.

"Donc si je te disais que je ne voulais sortir avec personne, ça t'irait ? Parce que j'aurais du temps pour toi ? C'est ça ?"

"Ouais, je crois ..."

Taïga se mordit la lèvre et tenta une autre approche, un peu différente.

"Tu demandes à Tetsu de faire la même chose ? De rester célibataire pour toi ?"

Daiki le fusilla du regard, comme si ça question n'avait rien à faire là. Comme si elle était stupide.

"Bien sûr que non !"

Taïga le fixa sans ciller et ouvrit une nouvelle fois la bouche.

"Et ça ne te met pas la puce à l'oreille ?"

"Je ne vois pas à quoi tu joues, Tai ! Qu'est-ce que tu veux que je dise au juste ?!"

"Écoutes juste tes réponses..."

Daiki sembla réfléchir, mais en vain, si bien qu'il ne savait plus comment lui faire comprendre. Si la manière douce ne fonctionnait pas, il tenterait la dure. Il se leva, faisant sursauter le brun. Il amorça un pas, le regard déterminé.

"On va se la jouer autrement alors, Dai."

"D..De quoi tu parles?"

Il s'avança lentement, tel un prédateur face à sa proie.

"Si tu refuses de comprendre l'évidence, je vais te la mettre dans la tête."

"Quelle évidence ?"


Daiki perdait ses moyens et il n'en avait pas l'habitude. Le basketteur était en train de le bassiner à jouer aux devinettes ! Ce n'était pas son truc et il ne voyait pas où il voulait en venir avec ses questions. Ça le mettait mal à l'aise de répondre à ça. Ok, il était en train de lui dire qu'il n'avait aucune envie de le voir avec un autre mec, ou une nana, qu'il était jaloux de Kise, mais ça changeait quoi ? C'était juste ses sentiments, ses émotions.

Puis, d'un coup, le tigre avait bondit sur ses deux pieds. Il marchait vers lui avec un regard effrayant. De ceux qui vous font vous sentir minuscule, et là, il se sentait comme une biche devant un tigre affamé. Il recula au rythme des pas de Taïga.

"C'est simple. Je vais me la jouer plus franc, et je te demande de faire pareil."

"O.. ok."

"Si j'ai envie de toucher, tu dis quoi ?" Demanda Taïga.

"Quoi ?" Coassa-t-il.

"Si j'ai envie de sentir ta peau sous mes doigts, là, maintenant, tu réagis comment ?"

Le fauve s'approchait dans un mouvement lent mais bien trop déterminé pour lui. Il lui faisait quoi là ? Il sentait ses joues s'enflammer et son ventre papillonner sous les questions audacieuses qui sortaient de cette bouche tentatrice. Il recula encore d'un pas et se trouva acculé contre le mur, et Taïga n'arrêtait pas d'avancer vers lui. Son cœur battait la chamade, il allait se faire dévorer, c'était certain.

"Et si j'ai envie de te déposséder de ton tee-shirt pour te voir, pour sentir ma peau contre la tienne, tu me laisserais faire ?

Taïga arriva à sa hauteur et posa une main juste à côté de son visage, le surplombant légèrement et il approcha son visage du sien, ne le lâchant pas du regard une seule seconde.

"Si j'ai envie de t'embrasser..." Murmura-t-il à quelques centimètres de sa bouche. "Est-ce que tu me laisserais faire ?"

Daiki se passa machinalement la langue sur les lèvres, elles étaient sèches et la température de la pièce semblaient bien trop chaude tout d'un coup. Non, ce n'était pas la pièce, c'était l'effet Taïga. C'était ces yeux braqués dans les siens, désireux et pleins d'envie. C'était ce corps au-dessus du sien, presque collé à lui. C'était son désir qui coulait dans ses veines, son ventre qui se tordait d'envie, ses mains qui tremblaient d'impatience. Il lui faisait un effet monstre, là, tout de suite. Il avait envie de l'attraper par la nuque et de l'embrasser pour le faire taire une bonne fois pour toute. Il le voulait et c'est là qu'il réalisa.

Toutes ses réponses qu'il avait lâché à la volées, cette envie qui courait sur sa peau, ce désir ardent, cette envie d'être avec lui constamment. Il était …

"Putain de merde..." Murmura-t-il.

Ses yeux s'écarquillèrent et la bouche s'entre ouvrit sous le choc de la révélation. Il vit Taïga lui sourire franchement. Le tigre avait visiblement compris bien avant lui. Il l'avait poussé à comprendre le dénouement de toute cette histoire avec toutes ces questions, et il venait d'en trouver la réponse.

Bordel de putain de merde.

Il était ... amoureux de Taïga.


A suivre...