Chapitre 12 - Vouloir, c'est pouvoir.


Jeudi matin - Lycée Seirin :

Une semaine était passée depuis que Tetsu avait rendu les affaires d'Aomine. Une semaine que Kagami n'ouvrait presque pas la bouche. Même le peu de repas qu'ils avaient passé ensemble avait été silencieux, et la plupart du temps, sa lumière disparaissait à la pause de midi pour être seul et ça devenait inquiétant. Hier, il avait tout de même mis les pieds sur le terrain avec leur équipe, mais il avait eu la tête ailleurs pendant toute la durée de l'entrainement et personne n'avait osé lui dire quoi que ce soit, pas même lui. La détresse était visible à des kilomètres sur son visage et personne ne voulait réveiller la bête. Kagami essayait de remonter la pente à sa manière, mais il savait que cet après-midi serait un moment compliqué. L'équipe irait à Too pour le match amical, et il devrait voir son ex sur le terrain. Il espérait que ça irait.

Depuis qu'il avait revu son ancien camarade, il restait persuadé qu'Aomine ne laisserait pas les choses se terminer ainsi. Il avait lu dans son regard quelque chose de fort. Quelque chose comme de la détermination, presque semblable à celle lors des matchs qu'ils avaient partagé à l'époque. Si son ancienne lumière voulait récupérer Kagami, il le ferait à sa manière, et ça risquait d'être explosif.

Il espérait sincèrement que ça se finirait comme ça, mais il n'oubliait pas la présence de Kise entre eux et ce dernier n'était pas le dernier à abandonner la partie.

Il soupira. Les choses ne faisaient que commencer.

Jeudi - Après-midi

Daiki n'avait aucune énergie mais Momoi ne lui avait pas vraiment laisser d'autre choix que d'être présent sur le terrain. Ils devaient affronter Yosen avec son équipe et ce n'était pas la plus simple à battre. Le problème, c'est qu'il n'avait aucune vivacité. Il se sentait totalement vidé depuis que Taïga l'avait quitté. C'était ça une peine de cœur ? Un mal être constant, l'impression d'être vide, seul ? Et bien merci, mais il s'en serait bien passé. Ce sentiment mêlé à l'hospitalisation de sa mère le rendait tout mou.

Il soupira en enfilant son maillot et fit un doigt d'honneur à Wakamatsu qui lui gueulait déjà dessus pour qu'il se donne à fond. Il n'en avait pas envie, mais il était là, c'était une bonne chose, non ?

"Bon, Yosen s'est beaucoup entrainé depuis notre dernière rencontre, ne les prenez surtout pas à la légère. Depuis leur défaite à la Winter Cup, ils n'ont pas ménagé leurs efforts." Déclara Momoi pour les motiver.

Ses coéquipiers étaient plus que motivé et il soupira en voyant la scène. Il semblait bien loin de tout ça !

"Tu as intérêt à te bouger Aomine ! Sinon je te jure que ..." Cria Wakamatsu.

"Ouais, ouais, ça va... J'connais la rengaine." Souffla-t-il avec son petit doigt dans l'oreille.

"Espèce de ..."

"Bon !" S'écria Momoi en frappant dans ses mains. "Ça suffit, c'est l'heure d'entrer sur le parquet."

Sans attendre une seconde, il bouscula ses coéquipiers et se rendit sur le banc de touche pour y déposer ses affaires. Il entendit le public scander le nom de leur équipe mais il s'en fichait royalement. Il n'avait même pas le cœur à jouer. Lui qui avait pourtant retrouvé le gout du terrain se retrouvait totalement perdu.

"Eh bien, je ne pensais pas voir autant de monde pour un match amical." Déclara Momoi.

"Tss, ils n'ont rien d'autre à foutre ..."

"Aomine, ça suffit. Qu'est-ce que tu as en ce moment ?"

"Rien, fou moi la paix."

Il vit Momoi soupirer face à son comportement et se fustigea mentalement. Il était vraiment désagréable avec elle en ce moment, mais il n'y pouvait rien... Sa mauvaise humeur se répercutait sur les autres sans qu'il ne le veuille. Il était comme ça, on ne le changerait pas.

Il leva les yeux dans les gradins à la recherche d'une tête connu. Il vit rapidement Kise et son équipe dans un coin des gradins et grimaça. Il n'avait vraiment pas envie de le voir celui-là, mais au moins, il ne semblait pas être aux côtés de Taïga, c'était déjà un bon début puis il vit une touffe de cheveux rouge et remarqua Akashi. Même le groupe de Rakuzan était présent. Il soupira et regarda de l'autre côté, puis les cheveux bleus de Tetsu au milieu des gradins attirèrent son attention.

Son cœur loupa un battement. Si Tetsu était là, alors Taïga devait probablement y être aussi. Il se mordit la lèvre inférieure et décala un peu son regard et sa gorge se serra. Il était là, les yeux rivés sur lui. Ces yeux qui semblaient l'avoir capturé en un instant. Il avait les traits fatigués, certainement comme lui, mais il était là, et il le regardait. Il était toujours aussi beau. Ses cheveux de feu toujours un peu en pagaille dont il rêvait de passer sa main de nouveau. Bordel, il l'avait enfin sous les yeux et son ventre se tordit de bonheur. Il avait tellement voulu le revoir depuis leur séparation que s'en était presque douloureux. Il lui avait tellement manqué. Il avait tellement envie de tout planter là, de monter les marches des gradins, de l'attraper par le col et de l'embrasser.

Il abaissa le regard et attrapa rapidement son téléphone et tapa un message avant le coup d'envoi, puis il replongea rapidement son regard dans celui de l'autre lorsqu'il l'envoya. Il ne savait pas ce qui lui avait pris. Il y'avait de grande chance qu'il l'ignore de nouveau, mais il devait essayer. Il devait tenter de le faire réagir. Il voulait voir son regard pétiller de nouveau. Il voulait le voir sourire comme il avait pris l'habitude de le voir. Il voulait retrouver son Taïga, pas cette pâle copie de lui-même.


Taïga se sentait mal. Il était stressé. Totalement perturbé à l'idée de le revoir, même si s'était de loin. Connaissant la panthère, il le chercherait probablement du regard, et là, dieu seul savait ce qui pourrait lui passer par la tête. Il aurait voulu être une petite souris pour se dissimuler et ne pas croiser son regard, mais si Riko, ni Kuroko ne le laisserait manquer ce match. Il avait donc pris les devants et c'était collé un air impassible sur le visage, mais la boule de stresse ne faisait que grandir. Plus il avançait, plus il était angoissé.

Il se trouva assis juste à côté de son ombre qui ne cessait de lui jeter des coups d'œil, guettant son état. Il allait mal, il le savait, il n'y avait pas besoin d'en rajouter une couche. L'avantage avec Kuroko, c'est qu'il ne posait pas trop de question, il savait, point. Il se contentait de le surveiller du regard et ça lui allait très bien, et de toute façon, il savait le pourquoi du comment. C'était certainement pour ça qu'il semblait plus alerte que d'habitude.

Le commentateur du match annonça les équipes et son cœur battait la chamade. Il se passa furtivement une main dans les cheveux, tremblante. Il avait chaud et ce n'était pas la foule présente qui le faisait se sentir aussi fébrile. Ils ne s'étaient pas revus depuis leur rupture et les sentiments étaient toujours là, bien accrochés.

L'équipe de Too fut la première sur le parquet, et son brun le premier à y mettre les pieds. Au moins, il était là, et il jouerait. Quelque part, ça le rassurait de voir que Daiki n'avait pas abandonné le jeu pour lui. Si ça avait été le cas, il se serait arrangé pour lui remettre les idées en place. Ou pas... Il ne savait même pas s'il en aurait eu la force. Daiki avait toujours cette aura lorsqu'il entrait sur le terrain. La foule scanda le nom de l'équipe mais il vit l'air fatigué de Daiki et ça lui tordit les boyaux. Il n'était pas dans son assiette non plus.

Il le regarda en contre-bas, discuter avec Momoi, ça avait l'air d'être tumultueux entre eux. Puis il releva la tête vers les gradins, scrutant le public présent pour le match. Il sentit le regard de Kuroko mais ne lui rendit pas la pareille. Son cœur tambourinait dans sa poitrine tant il anticipait le fait de croiser son regard.

"Est ce que ça va ?"

"J'ai l'air d'aller bien, Kuroko ?" Répliqua-t-il agacé.

Son ombre soupira et il se figea lorsque les yeux bleus tombèrent sur sa personne et que leurs regards s'accrochèrent. Il ouvrit la bouche et voulu détourner la tête mais il n'y arrivait pas. Comme si Daiki l'avait immobilisé d'un simple coup d'œil. Il serra les poings et le détailla rapidement. Il n'avait vraiment pas l'air en forme. Du moins, tout autant que lui. Ils se détaillèrent un long moment, comme si une bulle s'était formée autour d'eux, comme si la foule avait disparue pour ne laisser qu'eux. Le brun détourna le regard et attrapa ce qu'il devina comme son téléphone. Il haussa un sourcil et très vite, une notification retentit. Il se mordit la lèvre et attrapa son téléphone sans lâcher le brun du regard. Du pouce, il ouvrit le clapet de son mobile et détourna enfin les yeux pour lire le contenu de son message. Sans surprise, c'était lui.

Dai - Jeu. 14h12:

Je gagnerais ce match pour toi, alors ne me quitte pas des yeux.

Il planta un peu plus fermement ses dents dans sa chaire. Devait-il lui répondre ? Ne serait-ce pas une manière de relancer la machine ? De toute façon, Daiki le voyait lire ses messages, alors autant y répondre, non ? Et puis il ne voulait pas que le brun perde le match par sa faute.

Moi - Jeu. 14h13:

Himuro ne te laissera pas gagner si facilement.

Simple, court, concis.

Il releva les yeux et vit Daiki froncer les sourcils et sourire sadiquement avant de taper de nouveau sur son clavier. Rapidement le message lui parvint.

Dai - Jeu. 14h14:

Ton frangin ne me fait pas peur. Je gagnerais bébé, et ce sera pour toi, que tu le veuilles ou non. Tu le sais, non ? Le seul qui puisse me battre, c'est ... toi.

Il s'enfonça un peu dans son siège, cachant son visage derrière sa main sous le surnom qui venait de lui retourner le ventre. Il avait senti ses joues s'échauffer à sa lecture et des papillons élire domicile dans son bas ventre. A quoi est-ce qu'il jouait au juste ? Il n'était plus ensemble, et voilà qu'il tentait de le faire craquer. Sérieusement, ce mec avait le don de le faire vriller. Puis, c'était quoi cette dernière phrase ? Comment ça c'était lui ?

Moi - Jeu. 14h15:

Ne raconte pas d'idiotie et concentre-toi sur ton match.

Taïga tenta de garder le plus de distance possible dans ses réponses mais Daiki ne lui laissa aucune échappatoire et il semblait user de ses charmes pour le faire succomber.

Dai - Jeu. 14h15:

Ça va être compliqué en sentant ton regard sur ma peau. Je t'ai vu rougir d'ici bébé. Je t'aime.

Il se racla la gorge et s'enfonça plus encore dans son siège, regardant à droite et à gauche que personne ne lise ses échanges. Il devait être aussi rouge qu'une tomate à l'heure qu'il était tant Daiki venait de le surprendre. Kuroko se tourna de nouveau vers lui et le dévisagea avant d'avoir un sourire aux coins des lèvres.

"Quoi ?" Grogna t'il.

"Rien, je me suis sans doute inquiété pour rien." Déclara son ombre.

Il détourna le regard et tomba de nouveau dans celui de Daiki en contre bas qui lui fit un clin d'œil.

"P'tin..." Grommela-t-il.

Il tapa furieusement sur son téléphone et le rangea dans sa poche.

Moi - Jeu. 14h17:

Arrête ça, idiot !

Il vit Daiki rire puis lui tourner le dos, posant ses mains sur ses hanches. Cet imbécile allait le rendre chèvre. C'était quoi ce petit jeu-là ? Qu'est-ce qu'il cherchait à faire au juste ?

Il n'aurait pas dû répondre à ce foutu message. Il aurait dû l'ignorer, comme il avait fait avec les autres. Il était tombé dans le piège comme un idiot, et maintenant quoi ? Il allait forcément avoir le regard rivé sur lui pendant tout le match. Il allait repenser à ses échanges sans pouvoir se concentrer sur le jeu.

Foutu Dai...

Le commentateur annonça l'arrivée de la seconde équipe et le Yosen pénétra sur le terrain.


Daiki salua d'un signe de tête l'équipe adverse et vit rapidement le regard qu'Himuro lui jeta. Un regard insistant qu'il n'avait jamais reçu de sa part. Il haussa un sourcil et l'autre détourna le regard. C'était quoi son problème à celui-là ? Il repensa au fait que Taïga lui avait parlé de leur situation, et il se douta que le brun à la mèche devait également savoir pour leur rupture. Il grimaça d'avance, ça allait être compliqué sur le terrain.

L'arbitre les invita à prendre place sur le terrain et le match débuta. Il devait se reprendre. Taïga le regardait et il lui avait promis de gagner pour lui. Il ne devait pas perdre. Pas ce match-là.

Les passes et dribbles s'enchainèrent et il retrouva rapidement sa motivation. Il enchaina les paniers même si Yosen ne se laissait pas faire. L'équipe avait effectivement dû beaucoup travailler et ça se ressentait, mais eux aussi n'avait pas chômé ! Leur jeu était beaucoup plus fluide qu'avant. Il se la jouait moins perso et ça se ressentait dans le score.

Rapidement la mi-temps arriva et Momoi lui demanda de marquer Himuro comme joueur. Il tenta de demander un changement mais elle savait se montrer implacable lorsqu'il s'agissait de basket. Il se retrouva donc devant le joueur numéro douze qui le toisa du regard lorsqu'il se positionna à ses côtés.

"Tiens donc, c'est donc toi qui vas défendre sur moi ?" Lança Himuro.

"Ça te pose un problème ?"

"Pas vraiment, au contraire. Je vais pouvoir te mettre une raclée."

"Tu t'y crois un peu trop, je crois."

Himuro lui lança un regard torve et un sourire se dessina aux coins des lèvres.

"Non, crois-moi, je suis bien motivé à t'en coller une."

"Ah ouais, et je peux savoir pourquoi ?"

"For my brother of course."

Daiki fronça les sourcils et lui lança un regard hautain.

"Bah laisse tomber, parce que c'est moi qui vais gagner pour lui."

"Really ? Je croyais que tu n'assumais pas ?"

Le sifflet coupa la réplique cinglante qu'il s'apprêtait à lancer. De quoi il se mêlait au juste ? Il était au courant de quoi ? Il ne savait rien sur leur relation. Il n'avait pas vécu ce qu'ils avaient partagé avec Taïga, il ne pouvait pas parler à sa place. Il n'en avait pas le droit, frère ou pas ! Alors oui, il avait involontairement blessé Taïga, mais aujourd'hui il savait où il voulait aller, et il lui montrerait. Il lui montrerait le vrai Aomine Daiki. Celui qu'il voulait être. Celui qui assumerait l'entièreté de sa personne. Il savait qu'il avait encore du boulot à faire sur lui-même, mais avec de la volonté, on pouvait tout faire, Tetsuya lui avait bien prouvé, et Taïga aussi.

Il courut vers le numéro douze et contra son shoot mirage au plus étonnement d'Himuro. La balle rebondit bruyamment sur le parquet et il planta son regard dans celui de son homologue.

"Ecoutes moi bien, j'ai peut-être commis une putain d'erreur, mais je compte bien la réparer, même si ça doit me prendre du temps. Alors ta victoire, tu peux te la carrer ou je pense, parce qu'aujourd'hui, c'est moi qui vais gagner !"


Taïga regardait d'un œil inquiet le match. Le score était serré entre les deux équipes et le deuxième quart temps n'avait rien pour le rassurer. Il avait vu clairement Daiki se diriger vers son frère et il les avait vu échanger. Il avait bien vu que la discussion ne semblait pas être cordial entre les deux et il en devinait aisément la cause. Il s'était confié à Tatsuya concernant leur début de relation, et son frère l'avait appelé après leurs ruptures pour prendre de ses nouvelles et il s'était effondré au téléphone. Il avait pleuré comme un gamin et n'avait même pas réussi à s'exprimer tant les sanglots l'avait pris. Le joueur de Yosen lui avait laissé le temps de se calmer puis il avait déballé son sac. Il lui avait expliqué pourquoi il avait quitté Daiki. Le brun n'avait pas mâché ses mots, et ils en avaient pris tous les deux pour leur grade. Il l'avait traité d'imbécile pour avoir abandonné comme ça, pour ne pas s'être accroché plus solidement à ce bonheur tant mérité selon lui. Daiki avait pris chère aussi. Tatsuya était en colère contre lui, s'écriant que l'autre avait une grande gueule que quand ça l'arrangeait.

Au final, Tatsuya s'était calmé et avait tenté de comprendre sa position, mais il ne s'était pas gêné pour lui dire qu'ils étaient tous les deux des imbéciles nés. Malgré le fait qu'il comprenait sa décision, il ne comprenait pas comment deux personnes qui s'aimaient pouvaient se quitter de la sorte.

Les voir tous les deux sur le terrain en train de s'expliquer était donc loin d'être rassurant. Il espérait que ça ne finirait pas en pugilat. Daiki avait un caractère explosif comme le sien et bien que Tatsuya soit plus posé, il n'en demeurait pas moins dangereux quand on s'en prenait aux gens qu'il aimait.

Il les vit se séparer pour mieux se retrouver un peu plus loin. Le joueur de Tōō venait de contrer le shoot mirage de son frère sous les exclamations du public et tout le monde vit le doigt de Daiki pointé sur son adversaire, menaçant. Il était fébrile et s'accrocha aux accoudoirs, espérant qu'il n'en vienne pas aux mains.


Sur le terrain le score était de plus en plus serré et on aurait presque dit que ça jouait en un contre un. Daiki suait et Himuro semblait se donner à fond. Même Murasakibara n'en menait pas large en tant que pivot.

"Mon frère mérite de trouver le bonheur. Si tu n'es pas capable de lui donner pleinement, abandonne maintenant." Grogna Himuro en se postant devant lui.

Daiki dribbla juste devant lui, le narguant avec la balle.

"Je crois que tu ne m'as pas bien compris tout à l'heure."

"Si, mais tu as l'air d'être long à la détente. Tai se donne entièrement et il souffrira encore si tu n'es pas capable d'en faire de même. "

"Je le sais très bien !"

"Alors tu attends quoi au juste ? Parce que crois-moi, je ne te laisserais pas recommencer tes conneries avec lui. Il en assez chié comme ça."

Himuro lui vola la balle et marqua avec sa technique, le faisant grogner. Ce type avait don de le faire sortir de ses gonds. Il savait très bien tout ça ! Il savait qu'il devait assumer entièrement s'il voulait se montrer de nouveau devant lui sans hésitation. Le problème c'est que l'ombre de Kise était trop proche pour qu'il ne puisse pas le prendre en compte. Il devait continuer de montrer qu'il était là. Que c'était lui qu'il lui fallait à ses côtés et pas un autre. Il devait lui montrer toute l'étendue de ses sentiments, et ça commençait par gagner ce putain de match. Il rattrapa la balle et esquiva tous ses opposant pour se trouver face à Murasakibara.

"Tu commences à m'agacer, je vais t'écrabouiller."

"Désolé, mais pas aujourd'hui."

Il le contra rapidement et mit un nouveau panier. Il se reposta devant Himuro et lui sourit avec toute l'arrogance dont il pouvait faire preuve.

"Je sais que tu veux jouer au grand frère, mais je suis très sérieux. Je récupérais Taïga, que ça te chante ou non et même ta montagne sous le panier ne m'en empêchera pas."

Le scoreur entra dans la zone pour ponctuer ses dires, délaissant son adversaire principale derrière lui. Il donnerait tout pour gagner ce match. Il montrerait à Taïga combien sa volonté pouvait être forte. Il prouverait à Himuro qu'il avait tort de ne pas lui faire confiance. Il prouverait à tout le monde qu'il était capable de prendre sur lui, et s'il devait casser des gueules par la suite, il le ferait sans hésitation. Parce que ce que plus les jours passaient, plus il prenait conscience de son besoin de l'avoir avec lui. Il était son pilier, sa béquille pour avancer, sa lumière, et il ne laisserait plus personne se mettre en travers de sa route. Il était sur la bonne voie, et il ne comptait pas dévier une nouvelle fois.


Taïga ne pouvait pas lâcher Daiki du regard. Il venait d'entrer dans la zone après une nouvelle altercation avec son frère. Il ne savait pas ce que les hommes pouvaient se dire sur le terrain et ça l'agaçait, mais ce qu'il voyait, c'est que ça avait eu le don de pousser Daiki au maximum de ses capacités. Il n'avait pas l'air en colère, mais il semblait déterminé. Déterminé à quoi, il ne le savait pas, mais c'était là, et bien visible malgré l'air impassible qu'il arborait dans la zone.

Sa panthère était rapide et elle ne laissait plus aucune chance à ses adversaires. Daiki semblait avoir le terrain pour lui tout seul. Il savait ce que ça faisait de se retrouver dans la zone, mais le voir des gradins restait tout aussi impressionnant que de le vivre sur le terrain, si ce n'est plus. Ça prenait une tout autre ampleur vu de haut. Il voyait la rapidité et la précision de ses gestes. Était-il pareil lorsqu'il y entrait ?

Daiki remonta rapidement le score et il entendit Kuroko ouvrir la bouche.

"S'en ai fini de Yosen, il ne reste plus que trois minutes et Aomine ne leur laissera plus aucune chance de marquer."

"Ouai, on dirait..."

"Je ne sais pas ce qui l'a motivé, mais il est déterminé à remporter la victoire. Ca faisait longtemps que je ne l'avais pas vu si enthousiaste pour un match."

Taïga réprima un rougissement en repensant aux messages de Daiki en début de partie. C'était lui la cause. C'était lui son enthousiasme. Daiki lui avait promis de gagner, et il s'en donnait les moyens. Il voyait à quel point il se donnait physiquement depuis le coup de sifflet de départ. Il n'avait pas arrêté de bouger sur le terrain, reprenant difficilement son souffle. Il puisait dans toutes ses ressources et il enchainait les paniers depuis son entrée dans la zone. Son frère ne lâchait rien mais il avait un sourire aux coins des lèvres malgré la défaite qui semblait lui pendre au nez. Il avait l'air satisfait et quelque chose lui disait que les échanges qu'il avait eu sur le terrain avec son ex n'y était pas pour rien.

L'arbitre siffla la fin du match et Tōō remporta la victoire de 112 points à 102. Il ne put réprimer un sourire et les larmes de lui monter aux yeux. Il l'avait fait. Il avait gagné pour lui. Il refoula les larmes qui montaient et observa Daiki, se tenant fièrement debout, félicité par ses coéquipiers. Il avait mérité cette victoire.

Daiki amorça un geste mais ses jambes le lâchèrent brutalement, le faisant tomber sur le parquet. Son corps se leva instinctivement, inquiet. Il sentit la main de Kuroko attraper un pan de son pantalon pour le forcer à se rassoir mais il ne le fit pas.

"Il a trop forcé sur la fin, détend toi."

Il ne lui répondit pas, trop concentré à observer le brun qui se faisait relever par l'un de ses coéquipiers. Il le savait qu'il avait forcé, il l'avait vu lui aussi, mais ça n'empêchait en rien l'inquiétude de courir dans ses veines. Son corps avait agi pour lui.

Rapidement le regard de Daiki tomba dans le sien, et il vit ses yeux s'écarquiller. Certainement du fait de le voir debout au milieu des gradins alors que tout le monde était encore assis, mais là, il s'en foutait clairement. Il voulait juste vérifier que tout aille bien chez lui. Qu'il ne se soit pas blessé pour une stupide promesse sortie de nulle part. Il vit Daiki lui sourire et lui faire un clin d'œil, et seulement là, son corps se détendit et il expulsa l'air de ses poumons qu'il avait retenu sans s'en rendre compte. Il fronça les sourcils et soupira de son comportement. Il avait flippé comme un gamin.

"Imbécile..."

L'air de rien il se rassit sous le regard interloqué de ses camarades qui avaient suivis ses gestes du regard. Se sentant épié, il se tourna vers eux, les dévisageant.

"Quoi ? Aboya-t-il.

Hyuga se gratta le menton et ouvrit la bouche.

"Rien, tu nous a fait peur à te lever comme ça..."

Mitobe haussa les épaules en souriant et Koganei fit la traduction comme à son habitude.

"Il dit que tu as l'air inquiet pour le numéro cinq."

Il se mordit la lèvre face à son impulsivité. Evidement qu'il l'était, il aimait cet imbécile qui ne tenait plus sur ses jambes ! Il était agacé et se leva de nouveau, fusillant du regard ses coéquipiers.

"Et si c'était le cas, qu'est-ce que ça peut vous foutre ?!"

Sans un mot de plus, il quitta les gradins sous le regard abasourdis des joueurs de Seirin. Qu'est-ce qu'ils avaient tous à l'emmerder en ce moment ? On aurait dit qu'ils s'étaient tous ligué contre lui. Ça devenait vraiment chiant ! Il marcha dans les couloirs du gymnase avant de tomber sur Kise et son équipe. Il ne manquait plus que ça.

"Salut." Lança le blond.

"Désolé mais je ne suis pas d'humeur." Le coupa t'il.

Le blond soupira et le retint par la manche alors qu'il tentait de fuir en continuant son chemin. Il s'arrêta et plongea son regard colérique dans celui doré.

"Hou ... Quel regard !"

"Pas aujourd'hui Kise..."

Le blond se passa une main dans les cheveux et lui sourit.

"Est ce que tu veux qu'on aille boire un truc pour te changer les idées ?"

Il secoua négativement la tête et tira un peu sur son bras pour le faire lâcher, ce que l'autre fit en voyant qu'il n'obtiendrait rien de lui aujourd'hui.

"On dirait qu'Aomine c'est donné à fond aujourd'hui."

"Ouais, comme d'habitude."

"Vraiment ?"

Il observa le blond qui tentait de lui sortir les vers du nez mais il n'aurait rien de sa part. Il vit du coin de l'œil certain membres de Yosen et rapidement, Tatsuya fit son apparition, prêt à entrer dans les vestiaires.

"Désolé, je dois y aller."

Sans attendre de réponse de sa part, il se dirigea vers son frère qui releva la tête vers lui et lui sourit.

"Hey Bro' ! How are you today ?"

"I'm fine, but I can't say the same for you. You lost. "

"Yeah... My opponent was determined to win apparently..."

Taïga laissa un sourire prendre place sur son visage et s'adossa au mur pour plonger son regard dans le sien.

"Qu'est-ce que tu lui as dit pour le faire sortir de ses gonds comme ça ?" Demanda-t-il.

Un sourire énigmatique lui répondit et son frère haussa les épaules.

"Ça ne te regarde pas... C'est entre lui et moi, mais j'ai eu mes réponses, à toi d'avoir les tiennes."

Il haussa un sourcil et Tatsuya posa sa main sur son épaule en signe d'apaisement.

"Je dois y aller pour le débrief'. On se voit après si tu veux."

"Ouais..."

"Et puis, je crois qu'on t'attend..." Termina son frère en regardant derrière lui.

Taïga se retourna, surpris et tomba dans le regard de Daiki, appuyé contre un mur à quelques mètres seulement, visiblement calme. Il l'observait intensément et attendait qu'il vienne à lui. Himuro disparut dans les vestiaires le laissant seul avec Daiki. Il soupira et se passa une main dans les cheveux, hésitant à fuir une nouvelle fois mais la voix du brun retentit dans les couloirs. Affronter Daiki était la plus grosse épreuve qu'on pouvait lui demander.

"Ne pense même pas à te faire la malle, je viendrais te chercher même en rampant s'il le faut." S'écria Daiki.

Le salaud, il jouait de sa blessure pour le faire venir à lui, et le pire, c'est que ça marchait. Il était bien trop altruiste pour son propre bien. Ses mains devinrent moites et l'angoisse revint à la charge. Merde, il n'avait pas prévu de le confronter si tôt...

"Est ce qu'il faut vraiment que je me déplace, Tai ?"

Le surnom lui retourna le ventre et il se dirigea vers lui en grimaçant et le pas trainant. Daiki souri, visiblement content de son petit effet. Il se planta devant lui sans oser le regarder en face.

"Tu vas bien ?" Demanda-t-il lentement.

Il vit le brun bouger du coin de l'œil et une main vint se poser sur sa joue, le forçant à le regarder dans les yeux. Une décharge parcouru son corps et il ferma les yeux sous le geste, voulant profiter du contact. Une fois le visage tourné vers brun, la main quitta sa peau et il rouvrit les yeux, tombant dans deux saphirs qu'il avait tant voulu revoir d'aussi près.


Daiki avait demandé à Wakamatsu de le laisser dans le couloir lorsqu'il avait vu Taïga un peu plus loin avec son adversaire du jour. Son nouveau capitaine avait râlé mais avait accepté la requête et il avait attendu que le joueur de Seirin termine sa discussion. Il avait habilement joué de sa blessure pour forcer Taïga à venir le voir, et le voilà enfin devant lui.

"Tu vas bien ?"

Cette voix l'ensorcela en un instant et il lui sourit sincèrement. Il voyait bien le malaise de son homme. Il lui releva le visage, il voulait le voir entièrement mais Taïga le fuyait du regard. Sa main retrouva la douceur de son visage et c'était bon de le toucher, même si c'était furtif. C'était captivant de revoir ses traits d'aussi près. C'était vivifiant de respirer le même air que lui, alors oui, même si tous ses muscles le lançaient, il allait bien parce qu'il avait gagné et que l'homme qu'il aimait était devant lui.

"Ouai, arrête de paniquer."

"Je ne panique pas ..." Grommela Taïga.

"Bien sûre que non..." Ironisa-t-il. "Tu ne t'es pas inquiété du tout, debout au milieu de la foule encore assise ..."

Taïga piqua un fard et détourna les yeux de gêne.

"Ça va ..."

Daiki laissa un petit rire quitter ses lèvres et il l'embrassa du regard. Revoir son air embarrassé et un peu prude par moment lui avait manqué. Non, Taïga lui avait manqué. Il se mordilla la lèvre et la relâcha pour sourire.

"J'ai gagné."

Taïga l'observa silencieusement et lui rendit son sourire, le rose aux joues.

"Ouais, j'ai vu ça. Félicitation."

"J'ai gagné pour toi. Pour te montrer que je tenais à toi."

Son ex se passa la langue sur les lèvres et se gratta l'arrière du crâne.

"Dai ..."

"Taïga. Je suis désolé de t'avoir forcé à faire ça, à me quitter, mais ... je n'abandonne pas. C'est ce que je voulais te dire." Le coupa-t-il.

Les yeux rubis se plongèrent dans les siens, étonné. Ils étaient proche l'un de l'autre dans ce couloir où les gens circulaient en leur jetant parfois des regards. Daiki ne chuchotait pas et Taïga sembla remarquer le changement. Il ne cherchait pas à cacher leur proximité, il n'en avait aucune envie.

"C'est moi qui viendrais te séduire la prochaine fois. " Affirma t'il.

La porte du vestiaire s'ouvrit brutalement à leur côté, forçant Taïga à se retourner pour regarder l'opportuniste.

"Oy ! On ne va pas t'attendre toute la journée !" Gueula Wakamatsu.

Daiki sourit et se redressa sur ses deux pieds, lâchant le mur sur lequel il s'appuyait, tanguant un peu. Il se dirigea d'un pas difficile vers le vestiaire et se tourna une dernière fois vers lui.

Attends-moi encore un peu, je saurais où venir te chercher."


A suivre ...