Chapitre 19 - Départ


Vendredi matin - Chez Taïga :

Lorsque Taïga ouvrit les yeux, il sut d'avance que cette journée serait difficile. Il les referma automatiquement, comme refusant qu'elle se déroule. Il voulait stopper le temps, rester là toute sa vie, dans son appartement avec son homme entre les bras. Oui, rien ne valait le confort de son lit mêlé à la chaleur de cet être blottis contre lui. Il resserra un peu son étreinte pour garder la chaleur que l'autre lui procurait, et nicha son nez dans les mèches en bataille. Un léger grognement se fit entendre et étira automatiquement ses lèvres.

Ses mains parcoururent la peau nue sous ses doigts, se glissant sur le fessier bombé de son homme. Hier, ils avaient passé une nuit torride, faisant l'amour comme la première fois mais avec moins d'appréhension, moins d'hésitation. Daiki avait pris les devants pour initier les choses et il avait adoré ça. Découvrir son amant avide de sexe l'avait excité au plus haut point et l'orgasme en avait été que plus fort. Faire l'amour à Daiki était tellement différent de ce qu'il avait pu connaitre avec d'autre. Tellement plus fort, plus charnelle.

Il ne voulait pas laisser ça derrière lui, mais la journée s'annonçait éreintante. Il devait préparer ses bagages, nettoyer son appartement une dernière fois, mettre des draps sur ses meubles pour une durée indéterminée afin qu'ils ne prennent pas la poussière. Il devait vider et nettoyer son frigo, jeter les choses qu'il avait commencé à entasser ci et là. Il n'avait aucune envie de penser à tout ça, mais il n'avait pas le choix. C'était son dernier jour avant son départ. Il avait retardé les préparatifs pour rendre les choses moins concrètes, mais là, il n'avait plus le choix, il devait s'y mettre sérieusement, sans compter que son homme allait le laisser seul dans l'après-midi...

Une boule d'angoisse le prit et il resserra sa prise sur son homme, le faisant grogner une nouvelle fois.

"Tai... t'm'écrase ..." Souffla une voix endormie.

Il sourit dans les mèches à l'odeur apaisante et y déposa un baiser. Il voulait garder en mémoire cette sensation de bien-être, d'apaisement et de sécurité.

"Désolé..." Chuchota-t-il.

La touffe brune laissa apparaitre un visage encore ensommeillé et un regard voilé. Son sourire s'agrandit et il ne put s'empêcher d'embrasser les lèvres à sa portée, insérant sa langue dans la cavité chaude de son amant. Il voulait garder le gout de sa bouche, de ses lèvres. Daiki remua un peu avant d'y répondre, reprenant peu à peu l'usage de ses membres certainement engourdis par la nuit. Il avait envie de le dévorer une nouvelle fois, pour ne rien oublier de lui mais il finit par le laisser respirer. Il le libéra un peu de son étreinte, plongeant son regard dans celui qu'il aimait tant. Le brun ne put s'empêcher de répondre à son sourire, un peu moqueur.

"Et bien, quel réveil..."

"Désolé, j'aurais dû te laisser dormir encore un peu.."

Le brun passa ses bras autour de sa nuque et captura sa bouche pour un nouvel échange, le sourire aux lèvres.

"Si c'est pour un réveil aussi doux, je pense que je peux te pardonner..."

Son corps frissonna et il profita de l'occasion pour en prendre un peu plus.

"Oh, dans ce cas ..."

Ses mains se faufilèrent beaucoup plus bas, faisant rire son amant qui se laissa tomber sur le dos, le laissant le surplomber.


Daiki rejoignit son homme dans la cuisine après avoir pris une bonne douche, se glissant dans son dos comme il avait l'habitude de le faire. Taïga ne fût pas surprit et réclama un baiser, malgré le fait qu'il venait une nouvelle fois de faire des cochonneries dans son lit.

"Vous êtes insatiable jeune homme..." S'amusa-t-il.

"C'est parce que vous êtes bien trop sexy, que je le suis." Répondit le cuivré.

Daiki posa son menton sur l'épaule encore dénudé de son homme et l'observa faire la cuisine, son cœur se serra dans sa poitrine en se disant que c'était la dernière fois qu'il se retrouverait là, dans cette cuisine, dans cet appartement, avec son homme entre les bras. Ce lieu avait été le début de tellement de chose entre eux. Il gardait en son sein la majorité de leurs premières fois. Leurs premiers échanges cordiaux, leurs premières confessions, leurs premiers rires ensembles, leurs premiers gestes tendres, leurs jeux, leurs amours. Laisser cet endroit vide de monde et à l'abandon lui laissait un goût amer dans la bouche mais il préféra chasser cette idée dans un coin de sa tête. Il voulait le garder comme un lieu sacré, presque comme l'autel de leur relation. C'était idiot de s'attacher autant à un lieu, mais il était sentimentale dans le fond et Taïga n'arrangeait rien à la chose.

Il prit une grande inspiration pour se reprendre et commença à mettre la table pour se changer les idées. Taïga avait du pain sur la planche cet après-midi, et il ne serait pas là pour l'aider dans les préparatifs de son départ, il avait bien trop de chose à faire de son côté. Quelque part, ça l'arrangeait, ça rendait les choses bien trop concrètes que de voir les cartons et les valises dans un coin de la pièce. Il ne voulait pas voir cet appartement presque vide, il voulait s'en souvenir avec l'ensemble de leurs moments, de leurs souvenirs. Il voulait garder en mémoire que les bonnes choses qu'ils avaient pu y partager. C'était un peu comme une fuite de sa part, mais ça ferait surement moins mal comme ça.

Il comptait bien profiter de la matinée pour ne pas laisser la tristesse prendre le dessus sur cette journée, même si elle n'était incontestablement pas la meilleure, mais elle avait bien commencé.

"Je te prépare une bonne omelette avec du bœuf terriyaki. Ça te va ?" Demanda Taïga.

"Tout me va, tant que ça vient de toi."

Le rire de Taïga lui remua les entrailles et il se tourna pour le regarder alors qu'il posait les baguettes près des bols. Son homme était à demi tourné vers lui et ses yeux pétillaient de bonheur.

"Attention Dai, tu deviens mielleux."

"Hey, je t'emmerde Tai !"


Provoquer son amant allait lui manquer. Il aimait tellement le voir partir au quart de tour, voir son visage prendre tout un tas d'émotions si différentes les unes des autres. Il avait appris à connaitre ce mec d'une tout autre manière que celle qu'il laissait paraitre et il se sentait chanceux de faire partie de ce cercle réduit. De ce nombre de personne qui connaissait le vrai Aomine Daiki, celui gentil, souriant et taquin, bien que toujours paresseux et grognon. Il était fière de se montrer à ses côtés, de l'aimer et de l'être en retour.

Oui, Daiki allait incontestablement lui manquer.

Il chassa ses mauvaises pensées mais l'horloge de la cuisine semblait le narguer et lui rappeler que le temps passait. Il n'était que neuf heures mais ça semblait déjà être la fin de la journée. Ils y étaient, à ce fameux jour tant redouté, celui de son départ, celui des au revoirs et il détestait ça. Alors il se gifla mentalement pour repousser le moment où il devrait se quitter sur le pas de sa porte.

Le petit déjeuné se passa dans une bonne ambiance malgré que leurs regards en disaient long sur leur état d'esprit. Daiki se proposa de faire la vaisselle pour qu'il puisse commencer à préparer ses valises. Il le laissa faire et commença par la salle de bain. L'appartement appartenait à son père et il pouvait se permettre de laisser ses biens ici, sans avoir à tout mettre dans des cartons bien que sa maniaquerie le poussait à le faire pour que rien ne prenne trop la poussière en son absence. C'était au moins le côté positif de la chose. Il prendrait moins de temps avec l'emballage de ses affaires. Il n'avait pas à emmener grand-chose, mais il était du genre à vérifier plusieurs fois qu'il n'avait rien oublié. Le pire dans tout ça, c'est que sa maniaquerie le pousserait à faire le ménage deux fois plus qu'en temps normal, juste pour laisser le logement dans un état de propreté extrême.

Il se dirigea vers la salle de bain, attrapa sa trousse de toilette et bien vite, les placards se virent débarrasser de ses produits, de ses serviettes. Il en profita pour laver de fond en comble la salle d'eau pour la laisser dans un état irréprochable. Une fois fait, il se dirigea vers sa chambre et ouvrit une valise qu'il déposa à ses pieds, grande ouverte. Il la contempla un instant puis repoussa un peu ce moment.

Il s'activa dans sa chambre et commença par retirer les draps pour faire une dernière lessive tandis que son homme s'occupait de la cuisine.

Il vida ses tiroirs, ses étagères de vêtements, ajouta dans son sac quelques photos que Kuroko lui avait laissé. Puis en relevant les yeux, la vue de sa chambre laissa place à un vide qui le remua. Il était assis à même le sol, sa valise ouverte dont les piles de vêtements reposaient désormais. Son regard était braqué sur les planches désormais nu et son cœur se serra instantanément. C'était étrange de laisser tout ça dernière lui, ça lui rappelait son arrivé au Japon, il y'a deux ans de ça. Ce moment où il avait posé ses valises, tout seul à l'autre bout du monde. Il s'était sentit comme en cet instant, peu sûre de lui et stressé.

Il y'a deux ans, il était arrivé sans motivation particulière, sans attente aucune. Il voulait juste continuer sa scolarité et jouer au basket, ni plus, ni moins. Il avait remplis ses étagères qu'il vidait aujourd'hui. Il avait grandi dans ce pays, bien plus qu'il n'aurait pu le penser. Il avait découvert tellement de personnalité, tellement de chose sur son propre compte. Il avait rencontré du monde, trouvé une équipe en or, s'était fait des amis, même un petit ami. Ouais, finalement il avait débarqué avec rien, et repartait avec tellement de choses en tête. Il avait le cœur plein d'émotion, du bonheur, de l'apaisement, de l'amitié, de l'amour... Et la tête emplis de tout autant de choses, des souvenirs, des rigolades, des prises de têtes, des larmes.

Non, il n'avait rien attendu en venant ici, mais il repartait sans regret. Il avait fait le bon choix en venant ici, même si ça rendait les choses plus douloureuses pour en repartir.

Un froissement derrière lui le figea un instant, puis il sentit le corps de son homme s'installer derrière lui, assis à même le sol, entourant le sien de ses bras. Le torse de Daiki se colla contre son dos et son menton reposa sur son épaule alors que ses doigts caressaient son torse à travers ses vêtements.

"Est ce que ça va ?"

Depuis combien de temps était-il là, devant sa penderie à regarder dans le vide ? A repenser à tous ses moments, à ses amis, à ses coups durs, et à ceux plus heureux ?

"Ouais, ça va ..."

La prise autour de lui se resserra et son homme déposa un baiser au creux dans sa nuque, cherchant à le soutenir. Le brun n'était pas dupe, il le connaissait. Il savait qu'il cherchait à se montrer fort mais que son départ allait être une épreuve pour lui. Il attrapa la main de son homme sur son ventre et lia ses doigts entre les siens, les enserrant fortement.

"Ça va être dur, mais ça va aller. Je ... Je repensais à mon arrivé ici, et à ce que je laisse derrière moi, maintenant. Mais ... Je vais rester positif. Ce n'est pas un adieu, je le sais. C'est juste une parenthèse de ma vie, je sais que je reviendrais ici, que je retrouverais tout le monde..."

"Evidemment que tu vas revenir. " Souffla le brun.

Taïga se laissa un peu tomber contre son homme, voulant sentir sa présence contre lui. Evidement qu'il reviendrait, ne serait-ce que pour lui, pour Daiki. Jamais il ne pourrait le laisser derrière lui.

"Je sais que ça va être dur pour toi, tu laisses plein de chose derrière toi, tes amis, tes souvenirs, cet appart' mais ... Ce ne sont pas des choses qui se perdent, ce sont des choses qui se gardent dans ta tête et dans ton cœur. Des trucs qui te poussent en avant, qui t'aident dans tes choix, dans tes décisions. Tout le monde te soutient et a confiance en toi, moi le premier. Ça va être une belle aventure Taïga, qui peut faire peur, mais je sais que ça va être magique. Ça va être une nouvelle vie, de nouvelles découvertes, de nouveaux challenges... Et puis L.A, il y'a pire pour quitter le Japon. La mer, le soleil ... Ce sera bien, j'en suis certain."

Il laissa un petit rire sortir de sa bouche et se tourna à demi contre lui, pour croiser son regard.

"Tu parles comme si c'est toi qui partait..."

L'étreinte de son homme se resserra contre lui et un léger rire quitta ses lèvres alors qu'il cachait son visage dans ses cheveux, y déposant un baiser.

"Fini ta valise, je vais commander des pizzas pour ce midi, je partirais après, ok ?"


Daiki avait vu son regard mélancolique devant son armoire. Il n'avait pas pu s'empêcher de venir jusqu'à lui, de tenter de le rassurer, de lui montrer que tout irait bien. Taïga n'était pas du genre à ressasser le passé, mais il comprenait que trop bien son ressentis.

Il savait les liens qu'il avait créé ici, bien plus que son homme aurait pensé en faire. Il le connaissait, cet homme au regard froid mais qui cachait tant de tendresse. Taïga voulait toujours se montrer détachée, mais au fond, il était bien plus sensible que ce qu'il ne laissait paraitre. Il avait découvert tout ce que pouvait renfermer ce grand gaillard, et il savait qu'il en découvrirait bien plus encore par la suite. Ce qu'ils allaient vivre dès demain allait les changer du tout au tout, et il était anxieux et pressé à la fois.

Pour sa part, il avait toujours vécu au Japon, dans son quartier. Il n'avait jamais pris l'avion, alors imaginer un autre continent loin d'ici lui paraissait totalement hors de portée et pourtant, il allait devoir s'y faire. Il connaissait presque tout ici : chaque ruelle, chaque recoin, chaque visage du quartier, puis il avait découvert celui de Taïga. Ce quartier un peu plus populaire que le sien, et ça l'avait un peu sorti de sa zone de confort. Il avait découvert un autre environnement, d'autres têtes... Oui, il avait pris des habitudes ici, sa routine s'était installée et il y avait pris goût.

Il imaginait sans mal les sentiments de son homme face à la situation. Devoir partir de nouveau ne devait pas être facile pour lui, il en avait plus que conscience, il le savait même trop bien, mais il savait que Taïga avait des repères là-bas, il ne partait pas en zone inconnue.

Il se redressa rapidement pour attraper son téléphone resté sur le coin de l'ilot central et contacta une pizzeria pour le déjeuner. Un repas simple et efficace et qui éviterait à son homme de s'embarrasser de nouveau avec de la cuisine, de la vaisselle et des restes, bien que ce dernier n'en laissait quasiment jamais.

Il se posa dans le canapé, ne voulant pas être dans les pattes de son amant qui avait déjà son planning bien en tête pour ses préparatifs. Ca l'amusait toujours de voir Taïga si carré, si maniaque, bien que cette fois, la finalité serait bien moins sympathique. Il avait presque hâte que les pizzas arrivent pour mettre fin à cette tension qui ne semblait pas prendre fin. C'était étrange comme sensation, il avait du mal à réaliser qu'il ne remettrait plus les pieds ici, que c'était sa dernière fois dans ce canapé.

Il soupira et alluma la télévision pour se changer les idées, même s'il ne suivrait probablement pas ce qui défilerait à l'écran, ça aurait au moins le mérite de rompre le silence.


C'est la sonnette de l'appartement qui le sortit de son rangement. Il termina rapidement de fermer sa valise et se dirigea vers la porte où Daiki la refermait déjà, boite à pizza en main.

"Tu aurais dû m'appeler, j'aurais payé."

Il vit son homme hausser les épaules et lui sourire tout en s'avançant vers la pièce à vivre avant de s'arrêter et de faire volteface, sourcils froncés.

"C'est vrai, maintenant que tu le dis, vu la quantité que tu manges, ce n'est pas rentable pour moi."

Taïga leva les yeux au ciel en riant.

"Tu ne vas pas remettre ça sur le tapis. Laisse mon estomac tranquille un instant et vient t'assoir."

Daiki déposa les cartons sur la table et vint lui voler un baiser, passant ses bras autour de son cou. Instinctivement, il rapprocha leur corps en nouant ses bras autour de sa taille, approfondissant leur baiser. Il ne put s'empêcher de sourire contre sa bouche.

"Fais attention, je peux dévorer bien d'autres choses que ces pizzas." Susurra-t-il.

Le brun lui répondit amusé, les yeux brillants de malice.

"Je ne suis pas certain que mon derrière s'en remette, Bébé."

Taïga nicha son visage dans le cou de son homme, réprimant un rire. Il huma cette odeur naturelle qu'il aimait tant, comme pour s'en gorger pleinement. Il déposa un léger baiser, presqu'une caresse sur le bout de peau à sa portée avant de replonger son regard dans celui bleuté de son homme. Il posa son front contre celui de l'autre, les yeux dans les yeux et inspira fortement.

"Allons manger avant que je me mette à déprimer, ok ?" Chuchota-t-il.

Daiki se contenta d'hocher la tête mais personne ne bougea. C'était étrange, comme si le fait de se séparer physiquement allait les séparer à jamais. Les minutes passaient et l'un comme l'autre ne pouvait les retenir, rester là n'y changerait rien, ils le savaient. Le temps s'écoulerait sans leur accord.

C'est lui qui amorça le premier geste et l'autre suivit.

Le repas se fit relativement en silence et il ne pouvait s'empêcher son regard d'errer sur le visage du brun. Il ne voulait oublier aucun détail, aucuns traits, aucune expression. Il voulait se noyer dans son regard tant qu'il le pouvait encore, puis vint la fin du repas.

Taïga empila les boites désormais vide et les posa devant l'entrée à côté d'autres sacs poubelles qu'il avait déjà mis de côté pour les descendre plus tard. Il se tourna vers son amant et leurs regards s'accrochèrent. Il se mordit la lèvre et détourna le regard. Il entendit Daiki s'approcher et glisser ses mains sur ses joues pour le forcer à le regarder. Le brun lui souriait. Un sourire qui se voulait rassurant et convainquant.

"C'est pas un adieu, Bébé."

Ces mots le rassurèrent autant qu'ils faisaient mal. Il attrapa les hanches de son homme pour l'amener contre lui, laissant ses mains remonter dans son dos. Il le sera contre lui et nicha son visage dans son cou alors que Daiki l'enlaça lui aussi.

"J'sais... mais ce moment ... je le redoutais plus que tout ..."

Son ventre se tordit douloureusement et les larmes lui montèrent aux yeux. Il avait tellement emmagasiné sa peur et son stresse que tout semblait retomber en cet instant. Bien sûre que ce n'était pas un adieu, mais il n'avait aucune idée du temps qui s'écoulerait avant de pouvoir de nouveau le serrer ainsi contre lui. Des semaines ? Des mois ? Peut-être plus ...

Il sentait le pouce de Daiki caresser son dos pour le consoler, lui montrer qu'il était là, et qu'il le serait encore par la suite, qu'il l'attendrait quoi qu'il arrive. Une première larme roula sur son visage et il serra plus fort son homme, laissant les autres suivre la première. Il se fichait bien de se montrer faible en cet instant, il n'avait rien à cacher à Daiki, encore moins sa peine et ses sentiments. Il se foutait d'avoir une sale gueule et les yeux rouges, il voulait juste se laisser aller. Laisser tomber sa retenue, laisser son mur de protection s'effondrer devant lui. Il le voulait juste lui.

"Bébé, ça va aller, je te le jure ..." Tenta Daiki.

"Je sais."

"On va vite se revoir."

"Je sais."

"Je t'aime."

Taïga se décolla légèrement de lui, liant une fois de plus leurs regards entre eux. Daiki n'en menait pas large non plus, les larmes aux bords des yeux et un sourire crispé accrochée aux lèvres.

"Je sais. Et je t'aime aussi Dai... Je t'aime tellement ..."

Il vit le sourire de Daiki s'agrandir et ses yeux se clore, comme pour garder se moment précieusement au fond de lui. Ne résistant plus, il captura ses lèvres, lentement, chastement. Il revient pour un second baiser, juste à la lisière de sa bouche, puis un autre sur sa joue, son nez. Il embrassa chaque parcelle à sa portée avant que son homme ne vienne prendre en otage sa bouche. Leurs langues se mélangèrent, se caressèrent. C'est à bout de souffle qu'ils se séparèrent, front contre front. Daiki vint sécher ses larmes de ses pouces, délicatement.

"Je devrais y aller ..." Chuchota son homme.

"Je sais ..."

"Tu sais beaucoup de chose, hein ?" Tenta l'autre de le dérider un peu.

Il tenta un sourire et expira bruyamment pour se reprendre.

"Tu ne pourras vraiment pas venir demain ?"

"Je suis désolé... Je dois vraiment voir ma mère ..."

"Je comprends ..."

"Je t'aime."

Il l'embrassa une nouvelle fois et se força à reculer pour le laisser se préparer.


Daiki se sépara de son homme difficilement. Il se pencha dans l'entrée étroite pour enfiler ses chaussures et les nouer difficilement. Ses mains tremblaient et il était près de craquer lui aussi. Voir Taïga dans cet état était probablement plus dur que la séparation en elle-même. Il se se mordit la lèvre pour se reprendre, il ne devait pas se laisser aller maintenant.

Il serra fermement ses lacets et se redressa, hissant son sac à dos sur son épaule. Il ancra une nouvelle fois son regard dans celui de son amant qui tentait tant bien que mal de garder le cap. Il crocheta sa nuque et l'amena contre lui, le serrant possessivement contre lui. Taïga en fit de même et il approcha ses lèvres de l'oreille de son homme.

"Je t'aime, tu le sais, hein ?"

"Je sais, Dai. Je t'aime aussi."

Il se décala légèrement et posa son front contre l'autre.

"Pars Dai, sinon je ne vais pas y arriver..." Souffla Taïga.

"Ok, j'y vais. Fais attention à toi."

"Hm."

Il déposa un dernier baiser sur ses lèvres et recula jusqu'à la porte. Il l'ouvrit à l'aveuglette et recula lentement, le regard encore ancré dans celui de l'autre, jusqu'à franchir le seuil. Il agrippa la poignet et referma la porte, clôturant leur échange silencieux.


Il était déjà vingt heures lorsque Taïga termina l'ensemble de ses tâches. Il s'effondra dans le canapé et attrapa son téléphone, annonçant la nouvelle à son homme. Il y était. Daiki était partis, et lui avait fini tous ses préparatifs. Cette nuit, il dormirait sans lui, et demain, il quitterait le sol japonais, sans lui. Il souffla fortement pour ne pas craquer une nouvelle fois. Il avait réussi à tenir depuis son départ, il devait s'y tenir. Il devait être fort à partir de maintenant, il devait garder son objectif en tête et faire tout son possible pour accomplir son but. Daiki ne serait jamais loin de lui, il était bien gravé dans sa mémoire.


A suivre...