Les personnages du manga détective Conan appartiennent à Gosho Aoyama.
Chapitre 2
Il ne s'était même pas écoulé une semaine depuis le retour inespéré de Shinichi Kudo qu'il avait déjà de nouveau disparu. Là encore, la seule raison qu'il avait donné à ses proches pour expliquer son absence était une nouvelle enquête particulièrement complexe, peut-être même plus que la précédente… Si certains parmi eux se doutaient que la vérité était ailleurs, aucun n'avait la moindre idée de ce que pouvait être la véritable raison de cette nouvelle disparition. Le professeur Agasa semblait être la seule véritable exception, mais la seule réponse qu'il donna aux questions qui lui furent posé fût on ne peut plus énigmatique… D'après lui, le détective était en train de faire face au même criminel qui l'avait obligé à s'éloigner de sa famille et de ses amis pendant si longtemps. Heiji, après avoir entendu les paroles du savant, s'empressa de lui demander si l'organisation était impliquée dans cette soi-disant affaire. Même si le détective d'Osaka était très bien placé pour savoir que le syndicat du crime avait définitivement cessé d'exister, après tout, il avait participé à son éradication, il n'avait pas pour autant rejeté la possibilité que quelques uns d'entre eux aient pu échapper au FBI et à la police japonaise. Au sourire du professeur, Heiji compris qu'il ne s'était pas trompé, il y avait effectivement un membre de l'organisation qui n'avait jamais été appréhendé et qui n'avait pas oublié le détective.
Mais il comprit également qu'il n'avait pas à s'inquiéter pour son rival. Lorsque Kazuha lui demanda plus tard si le détective de l'Est avait fait parvenir de ses nouvelles à son ami ou s'il lui avait réclamé de l'aide pour son enquête, Heiji se contenta de répondre avec un sourire complice que Shinichi ne pourrait compter que sur lui-même lors de cette affaire.
Deux personnes seulement connaissaient les circonstances exactes de la disparition du détective, le disparu et celle qui était responsable de son absence.
Et aucun d'entre eux ne risquait de les oublier…
Quatre jours seulement après avoir retrouvé ses proches, Shinichi s'était rendu à la maison du professeur où l'attendait celle qui la partageait avec le savant depuis le départ inexpliqué de la petite fille dont il s'occupait jusque là.
Ayant la surprise de la voir en train de faire ses bagages, Shinichi craignit un moment qu'elle avait finalement refermé le couvercle de la boite qui contenait leurs espérances communes.
« Où comptes-tu aller ? »
« Pour l'instant, j'ai prévu de me rendre à Pékin. Cela fait des années que je voudrais passer un après-midi au palais d'été, ensuite…Eh bien, je n'en sais rien…Peut-être que je pourrais faire un voyage en Europe, j'aviserais sur place… »
« Je suppose que je ne te reverrais pas avant longtemps…Si je te revoie un jour… »
« A moins que tu n'accepte de venir avec moi, oui. »
Haibara ferma sa valise sans ajouter un mot.
« Quand est ce que tu compte partir ? »
« Ce soir, les billets d'avion sont déjà réservés. Si tu veux venir, je te conseille de te dépêcher de te préparer. »
« Ce soir ! Tu te moques de moi ? »
Pour toute réponse, la chimiste lui tendit deux billets d'avions. Un simple coup d'œil suffit au détective pour constater qu'elle ne se moquait absolument pas de lui.
«Ai, tu m'annonces ça a peine deux heures avant le départ… Comment est-ce que tu veux que j'aie le temps de me préparer ? »
« N'emporte que le stricte nécessaire, pour le reste, nous achèterons sur place. Vraiment… Dès que l'on sort du domaine criminel, tu es incapable de te débrouiller, Kudo. »
« Sur place ? Est-ce que tu me prends pour un millionnaire ? Je n'ai même pas de quoi payer les billets de retour… »
« Ne t'inquiète pas pour ça, nous avons largement les moyens… Sauf si je décide de te laisser rentrer à la nage, ce qui ne serait pas une mauvaise idée d'ailleurs… »
« Tu vient d'hériter ou tu quitte le pays pour ne pas que la police te mette la main au collet après le braquage d'une banque ? »marmonna Shinichi exaspéré.
« Ni l'un ni l'autres… Disons que j'ai enfin réussi à arracher à mes ex-employeurs mes indemnités de licenciement. Autant en profiter… »
Le détective ne mit que quelques instants à comprendre. Lors de la fameuse nuit où ils avaient réussis à mettre la main sur les principaux membres de l'organisation, la chimiste avait réussi à s'infiltrer dans leur système informatique. Le FBI avait ainsi eu l'heureuse surprise d'avoir à leurs dispositions la liste complète des membres du syndicat, ainsi qu'un compte-rendu aussi fidèle que complet de la totalité de leurs activités criminelles depuis sa création. Il aurait fallu des mois voir des années pour exploiter toutes les données qui venaient de leur tomber du ciel, et les préparatifs pour mettre en place le démantèlement total du syndicat du crime mobiliseraient toutes leurs forces pendant des mois, aussi ne se rendirent-ils pas compte qu'on ne leur avait pas remis la totalité des secrets de leurs ennemis.
La formule de l'apotoxine demeurerait un secret à jamais… Mais comme les rares membres de l'organisation à connaître son existence avaient définitivement disparus, il était fort probable que le FBI ne se rendrait jamais compte de l'importance de ce qu'on leur avait volé.
Par contre, il y avait de grandes chances pour qu'ils se rendent compte, après avoir fini d'examiner la comptabilité du syndicat du crime, qu'elle était incomplète.
Certes les sommes qu'une apparente négligence avait soustraits à leurs investigations étaient négligeables par rapport à l'ensemble du pactole accumulé par l'organisation après plus de cinquante ans d'activités criminelles. Mais la quantité d'argent était plus que suffisante pour permettre à n'importe qui de vivre confortablement pendant plusieurs dizaines d'années si le fisc n'était pas trop regardant sur la fortune qui lui était tombé du ciel du jour au lendemain…
« Ai, ne me dit pas que… Tu n'as pas remis à Jodie et Akai toutes les informations que tu avait récupéré dans cet ordinateur, n'et ce pas ? »
« Bien sûr que non… Nous nous étions mis d'accord, toi et moi, pour ne pas leur remettre la formule de l'apotoxine… »
« Mais ce n'est pas la seule chose que tu a récolté dans leur chute sans la remettre au FBI, n'est ce pas ? Combien de temps comptait-tu me cacher cela ? »
« Je ne t'ai rien caché… Tu m'avais dit que certains secrets ne devaient pas être révélés… Tu ne m'as pas précisé lesquels et tu ne m'as jamais demandé lesquels j'avais choisis… »
« Tu sait très bien à quoi je pensait quand je t'ai dit cela ! »
« Il faut croire que non… C'est toi qui me reprochais de m'exprimer de manière trop ambigu, non ? Il semble que finalement tu sois mal placé pour me donner des leçons sur ce point… »
Le sourire sarcastique de la scientifique acheva de mettre son compagnon hors de lui.
« Si je n'ai pas pris la peine d'être plus précis, c'est parce que je pensait qu'il était évident pour toi que c'est de la formule de ce maudit poison que je parlait… Ne joue pas les idiotes avec moi. »
« Voyons, Kudo. Tu sais très bien que je n'ai jamais manqué d'exploiter à mon avantage la moindre zone d'ombre dans tes paroles, tu devrais le savoir après plusieurs mois à subir mes sarcasmes… »
« C'est du vol, Ai ! »
« Sans doute, mais je ne me sent guère coupable d'avoir volé des voleurs… »
« C'est au FBI que tu as volé des informations qui leur revenait de droit… »
« Pardon ? C'est moi et non un de leurs agents qui s'est infiltré dans leur ordinateur, c'est donc à moi qu'elles revenaient de droit. Et j'étais en conséquence libre de choisir d'en garder quelques unes pour mon usage personnel… Tu as oublié ? J'ai refusé de participer à leur programme de protections des témoins, je ne leurs doit plus rien maintenant que l'organisation est détruite… »
Se décidant à capituler, Shinichi marqua sa reddition par un soupir de découragement et un geste de lassitude.
« Et maintenant ? Pourquoi ce voyage ? »
« Pour la première fois depuis des années, je me sent vraiment libre… Alors je veux en profiter pleinement… »
« Et pourquoi si soudainement ? Pourquoi maintenant ? »
« Je n'ai plus besoin de surveiller mes moindres faits et gestes maintenant, alors je me paye le luxe d'être capricieuse… Est-ce que ce n'est pas ça, être libre ? »
« Et tes amis, Ai ? Tu ne prends pas la peine de leur dire au revoir ? »
« Mes amis ? Que ce soit Ayumi, Ran, Mistuhiko ou encore Genta, ils n'ont jamais été mes amis… Ils étaient l'ami d'une petite fille qui vient de disparaître et qui ne reviendra plus… Si j'allais les voir maintenant, ils ne me reconnaîtraient pas… »
Shinichi ressentit une légère tristesse en voyant la mélancolie qui avait brillé un instant dans les yeux de sa compagne quand elle avait prononcé ces paroles.
« Et le professeur ? »
« Je lui ait laissé une lettre… Il comprendra… »
« Est-ce qu'il n'y a vraiment plus rien qui te retienne ici ? »
« A moins que tu ne refuse de me suivre, non. »
Le silence s'installa pendant plusieurs minutes, les laissant chacun seul avec leurs pensées. Essayait-elle de le mettre à l'épreuve ? Voulait-elle voir s'il l'aimait vraiment au point d'être prêt à tout abandonner du jour au lendemain pour la suivre ? Il avait la désagréable sensation d'être au bord d'une falaise et de s'apprêter à sauter… La seule chose dont il était certain, c'est que quelque soit sa décision, il risquait d'avoir des regrets.
« Est-ce que tu compte revenir ici un jour avec moi après ce voyage ? »
« Cela dépendra de la manière dont il se déroulera… »
Le détective continua de réfléchir à la décision qu'il allait prendre. Puis après un temps qui leur parut durer à tout les deux une éternité, il se dirigea vers le téléphone de la maison.
« Qui est ce que tu appelle ? »
« Ran… »
« Pour lui dire quoi ? »
« Que l'affaire que je vient de résoudre s'avère avoir des ramifications plus complexe que je ne l'imaginait et que je vais devoir de nouveau m'absenter pour une période indéterminée… »
« Tu va encore lui mentir… »
« Je ne lui ait jamais menti… »
Après tout, il ne lui avait jamais dit que la stricte vérité quand il avait dû lui cacher son identité. Qu'il faisait face à l'une des affaires les plus complexe de sa carrière et qu'il ne pourrait vraiment revenir auprès d'elle qu'après l'avoir résolue. Mais ce qu'il n'avait pas prévu à l'époque, c'est que cela allait lui prendre une vie entière pour la résoudre complètement…
