James était assis à une table des Trois Balais avec Peter, Rémus, et Sirius, griffonnant des schémas sur un parchemin étalé entre eux alors qu'ils travaillaient depuis plusieurs mois sur une potion visant à aider Rémus à mieux supporter les pleines lunes, lorsque la porte s'ouvrit. Trois de leurs camarades de classe s'engouffrèrent dans le pub en même temps qu'une bourrasque froide qui manqua de renverser le plateau de Rosmerta lorsqu'elle traversa la pièce.

Ses yeux trouvèrent immédiatement Lily, emmitouflée dans un long manteau marron et une écharpe en laine écrue. Ses mains étaient enfouies dans ses poches, et elle avait l'air frigorifiée. Elle poussa un soupir de soulagement, probablement parce qu'elle venait de laisser la fraîcheur mordante de l'hiver derrière elle, et James ressentit l'envie immédiate d'aller l'étreindre. A la place, il fourra rapidement le parchemin dans sa poche.

Il adorait retrouver ses parents pour les vacances, passer du temps avec Sirius au manoir, manger jusqu'à n'en plus pouvoir et jouer aux échecs avec sa mère, mais depuis leur cinquième année, à chaque fois qu'ils avaient quitté Poudlard, il avait ressenti le manque de Lily. Un peu plus important à chaque nouvelle période de vacances. C'était comme s'il n'était pas la moitié de lui-même quand elle n'était pas là, et il n'avait aucune idée de comment il en était arrivé là. Il détestait de plus en plus ses bonnes résolutions de début d'année.

Ils s'étaient écris un peu, mais garder une relation strictement amicale par correspondance était encore plus compliqué à gérer que ce qu'il ne s'imaginait. Ils avaient principalement parlé de Poudlard, de quidditch, et des serpentards en général, tout en revenant brièvement sur le cas Rogue, et même si James n'avait eu de cesse de se retenir d'écrire des choses qu'il regretterait, de ne pas trop rentrer dans le personnel, ils s'était rapprochés. Il avait l'impression qu'il ne faisait que retarder l'inévitable et qu'aucun conflit au monde ne pourrait avoir raison de ce qui était en train de se passer entre eux.

L'histoire avec Daisy Hookum était derrière eux. Le match avait eu lieu plus d'un mois auparavant et ils avaient eu le temps d'en reparler d'avantage à tête reposée, et aussi de resserrer les liens de confiance entre chaque membre de l'équipe. Lily n'était pas la seule à en avoir besoin, et il avait appris au fil des années à ne pas négliger l'aspect relationnel du groupe dans lequel il évoluait.

« Hey ! lança t-il en leur adressant un signe de main avant de se lever et de leur donner à chacune une accolade amicale.

- Wow Potter, combien de temps est-ce que tu passes à jouer au quidditch exactement ? l'interrogea Mary en tâtant ses épaules, et il s'esclaffa alors que Lily levait les yeux au ciel. Quoi ? Je dis juste que si j'aimais les garçons, il viendrait de se propulser en haut de la liste.

- J'ai entendu ça, MacDonald ! s'exclama Sirius à quelques mètres de là.

- Ne t'en fais pas, Black, je suis certaine que tu es en première place sur celle de quelqu'un d'autre, reprit la jeune femme brune en jetant un coup d'oeil vers Marlène qui lui donna un petit coup de poing sur l'épaule avant d'aller s'asseoir avec les garçons.

- Quoi de neuf, Pete ?

- Pas grand chose, bredouilla le jeune homme blond. Enfin, si. J'ai croisé Bertram Aubrey et Daisy Hookum en venant, ils entraient chez Mme Pieddodu.

- Je n'avais aucune idée qu'il était physiquement possible pour un être humain normalement constitué de la supporter aussi longtemps, souffla Lily en se laissant tomber à côté de Rémus, le faisant esquisser un sourire amusé. Est-ce que c'est une nouvelle écharpe ? Oh mon dieu elle est super douce ! »

Elle pointa de son index le vêtement que Rémus portait autour du cou et il acquiesça au moment où elle tira dessus pour la caresser, l'air positivement jalouse. James adorait la voir aussi à l'aise avec les garçons, c'était comme si elle faisait partie du groupe, et quelque part, c'était le cas.

« Je n'exclue pas de te la voler. Si j'étais toi, je garderai un œil dessus, le prévint-elle alors que Mary commandait des bièraubeurres.

- Evans, tu ne peux pas voler quelque chose si tu dévoiles tes plans à l'avance, se moqua James en lui faisant signe de se décaler pour qu'il puisse s'asseoir à côté d'elle.

- Sauf s'il s'agit de son cœur, intervint Sirius en lui adressant un clin d'oeil avant de faire un signe de tête vers James qui le fusilla du regard alors que les autres poussaient des exclamations de lassitude qui ne l'atteignirent pas le moins du monde.

- J'avais oublié que tu étais aussi pénible, rétorqua t-elle en roulant les yeux. »

James en profita de le voir porter sa chope de bièraubeurre à ses lèvres pour lui donner une tape derrière la tête, et des gouttes d'alcool éclaboussèrent Marlène qui poussa une exclamation agacée avant de frapper Sirius à son tour. Le joyeux chaos régna pendant un long moment dans le pub, et il songea qu'il n'était pas possible de s'en lasser.

« Ça va, chez tes parents ? demanda t-il à Lily au bout d'un moment, l'arrachant discrètement à sa discussion avec les garçons.

- Ce n'est pas pire que la dernière fois que je suis rentrée, répondit-elle sur un ton léger, mais il la vit se tendre légèrement.

- Tu sais que tu peux venir à la maison si tu veux éviter Pétunia, on fera une partie de quidditch avec les gars, lui proposa t-il comme il l'avait déjà fait une ou deux fois l'année précédente, sans arrière pensée, juste parce qu'il voyait sur son visage que la situation lui pesait.

- Je sais, lui dit-elle en esquissant un sourire. »

Sa main se posa brièvement sur sa cuisse sous la table, comme un merci silencieux. Le contact ne dura pas plus d'une seconde, mais il le laissa absolument pétrifié. Il détestait y penser autant, il détestait avoir cette vision automatique dans sa tête à chaque fois qu'ils faisaient ne serait-ce que s'effleurer, celle où il l'étalait simplement sur la table, ou sur son bureau en classe, ou au milieu du terrain de quidditch alors que le monde disparaissait et qu'il n'y avait plus qu'une chose qui comptait : être en elle le plus rapidement et le plus longtemps possible.

« Sérieusement, Potter ? se moqua t-elle en chuchotant, et il lui jeta un regard interrogateur avant de suivre le sien, largement amusé, qui descendit vers son entrejambe. »

Il lui adressa un regard d'excuse avant d'ajuster sa position, de s'accouder à la table et de se frotter nerveusement le visage. Il sentit Lily bouger un peu à côté de lui, et il laissa échapper un soupir quand elle posa quelque chose de chaud sur ses jambes. Il baissa les yeux et vit son écharpe, étalée à la fois sur elle et sur lui, comme si elle avait juste glissé sur ses cuisses, et il l'entendit rire discrètement derrière sa main quand il lâcha un « merci » d'une voix si basse qu'il n'était pas sûr qu'elle l'ait entendu.

« Et dire que je pensais être la plus tendue de nous deux aujourd'hui, murmura t-elle alors que les autres étaient en train de crier sur Sirius pour une raison qui échappait à James mais qui devait être justifiée.

- Hilarant, commenta t-il sans pour autant réussir à s'empêcher d'esquisser un sourire.

- Je l'étais un peu, reprit-elle en haussant les épaules.

- Pourquoi ? s'enquit-il, réellement curieux.

- Parce que je... »

Elle s'interrompit quand la porte du pub s'ouvrit de nouveau et que Daisy Hookum et Bertram Aubrey y pénétrèrent, se dirigeant vers une table du fond de la pièce. Son visage se ferma et elle se redressa légèrement. James avait eu une nouvelle conversation avec Daisy sur le fait que son entrée dans l'équipe n'avait jamais été une option, et il avait cru que les tensions entre les deux filles s'étaient apaisées. Il songea qu'elles allaient peut-être plus loin que ce qu'il ne s'imaginait quand la petite-amie de Bertram jeta un regard de dégoût vers Lily qui prit une profonde inspiration comme pour se calmer.

« Hé. Regarde-moi, lui ordonna James, et son cœur vrilla quand ses yeux se plantèrent aussitôt dans les siens. Est-ce que tu m'obéis maintenant ? s'étonna t-il, un sourire amusé s'étalant sur son visage.

- Est-ce que tu veux que je récupère mon écharpe ? l'interrogea t-elle sur le même ton.

- Je t'en prie. Il me suffit de penser à Rusard et de compter jusqu'à trente.

- Trente ? Ça te prend si longtemps ? C'est inquiétant. »

Il laissa échapper un rire un peu plus fort que prévu qu'il ravala dès qu'il sentit les regards curieux de Mary et Rémus sur lui. Lily s'assit un peu plus confortablement au fond de la banquette, satisfaite, et il se jura qu'elle allait le payer sur le terrain à la rentrée.

« A quel point est-ce que tu étais sérieux à propos de cette partie de quidditch ? reprit-elle juste après avoir jeté un ultime coup d'oeil vers Hookum et Aubrey.

- A peu près à cent pour cent, répondit-il en portant sa choppe de bièraubeurre à ses lèvres.

- Donc, en théorie, on pourrait y aller maintenant ? »

Il manqua d'avaler une gorgée de travers. Il haussa les sourcils surpris, et hocha lentement la tête avant d'esquisser un sourire narquois.

« Regarde-toi, Evans, à vouloir envahir mon espace personnel le plus vite possible.

- Très intelligent quand on sait que mon écharpe est sur tes genoux parce qu'il a suffi d'une main sur ta cuisse pendant un centième de seconde pour te donner envie d'envahir mon espace personnel le plus vite possible. Littéralement, compléta t-elle en lui rendant son sourire avant de tourner la tête vers leurs camarades et de taper bruyamment dans ses mains pour attirer leur attention. James nous invite tous chez lui ! »

Merde.

Elle était meilleure que lui. Globalement, elle l'avait toujours été, mais il ne pouvait jamais s'empêcher de rentrer dans ce jeu avec elle et de finir profondément décontenancé à chaque fois. C'était à peu près le seul auquel il se fichait de perdre.

Il songea un instant à lui préciser que ce n'était pas seulement sa main, mais toutes les idées qui s'étaient enchaînées dans sa tête après coup sans qu'il ne puisse les arrêter. Une cascade interminable qui menaçait tous ses plans. Cependant, il croisa le regard de Marlène, et il ravala les mots. Il y avait des parties d'elle qui lui manquaient et qu'il ne retrouverait jamais, et il avait appris à accepter cela, mais il savait qu'il ne pourrait pas le faire avec Lily si jamais les choses se gâtaient, alors il se contenta de répondre aux exclamations ravies des autres par un hochement de tête et une brève courbette.

Quelques minutes plus tard, ils quittèrent le pub et transplanèrent directement chez Fleamont et Euphemia qui s'étaient absentés tout l'après-midi pour des réunions au Ministère qui n'annonçaient rien de bon. James préféra ne pas y penser alors que Sirius ouvrait la porte devant eux. Lily était déjà venue l'année précédente, mais elle semblait toujours aussi fascinée par le manoir. Il esquissa un sourire en la regardant fixer le lustre qui flottait au dessus d'eux sans aucune attache.

« Vous voulez vraiment faire un quidditch ? demanda Mary en grimaçant légèrement, trop contente d'avoir retrouvé la chaleur d'une maison pour avoir envie de la sacrifier aussitôt.

- Ne me dis pas que tu vas te défiler, lui reprocha Marlène en lui jetant un regard suppliant.

- On est sept, c'est un nombre impair, il faut que je me défile. Et il y a peu de chance pour que les garçons aient assez de balai pour tout le monde.

- Bien essayé Mac', mais il y en a sur tout le mur de sa chambre, intervint Sirius en faisant un signe de tête vers James après avoir laissé échapper un rire tonitruant.

- Il vous faut un arbitre, quelqu'un qui vous regarderait de derrière les baies vitrées par exemple, répliqua t-elle aussitôt.

- Très bien, très bien. Mary à l'arbitrage, déclara Rémus avant de se tourner vers les autres. Comment est-ce qu'on procède pour le reste ?

- Un gardien, un poursuiveur, un attrapeur dans chaque équipe ? proposa Peter.

- Ça me va, approuva Lily. Est-ce que je peux jouer poursuiveur ?

- Dans ce cas là, Evans, ce sera toi contre moi, lui répondit James avec un sourire en coin avant de disparaître dans les escaliers, Sirius sur ses talons. »

Ils longeaient le couloir en direction de sa chambre lorsque le rire moqueur de Sirius lui parvint aux oreilles. Il tourna légèrement la tête vers lui et arqua un sourcil.

« Je croyais que tu ne sortirais plus avec des filles de l'équipe, pointa son meilleur ami.

- Je ne sors pas avec Lily, affirma t-il aussitôt.

- Redis-moi ça à la fin de la journée.

- Est-ce que tu me crois assez stupide pour risquer quoi que ce soit ?

- Est-ce que j'ai besoin de faire semblant de réfléchir pour répondre oui à cette question sans blesser ton ego ? se moqua le jeune homme tout en riant. »

James secoua la tête en soupirant, puis poussa la porte de sa chambre et, alors qu'ils étaient tous les deux en train de récupérer les balais fixés au mur par des supports en bois, Sirius reprit la parole.

« Est-ce que ce serait si mal ?

- Oui, répondit James sans aucune hésitation.

- A cause de ce qu'il s'est passé avec Marlène ?

- Pas seulement. Je n'ai pas envie de prendre de risque pour l'équipe, ma relation avec Lily est trop fragile.

- Oh tu as une relation avec elle, maintenant ? souligna Sirius, et James put entendre son sourire narquois sans avoir à tourner la tête vers lui pour le voir.

- Ferme là, Patmol. Je dis juste que si on venait à se mettre ensemble et que les choses ne se passaient pas bien, l'ambiance de l'équipe en prendrait en coup. Et même dans le cas où ça fonctionnerait entre elle et moi, est-ce que tu crois que ça lui rendrait service après ce qu'Hookum a insinué en début d'année concernant les sélections ? »

Sirius se contenta de hausser les épaules, et lorsqu'ils eurent récupéré les balais, ils firent le chemin inverse jusqu'au salon. Lily et Rémus étaient en train de discuter devant la baie vitrée alors que les trois autres s'étaient confortablement installés dans le canapé.

« On a fait les équipes pendant que vous étiez en haut, annonça Marlène. James, tu seras avec Pete et moi. Sirius, avec Lily et Rémus. »

Il n'y eut aucune réclamation. Au contraire, Sirius eut l'air absolument ravi. Il se dirigea vers ses deux coéquipiers, se fit une place entre eux, et passa ses bras autour de leurs épaules avant de leur ébouriffer les cheveux, les faisant s'écarter aussitôt.

« Regardez-moi ces deux spécimens, chantonna t-il avant de se tourner vers les autres en leur jetant un sourire menaçant. On va vous atomiser. »

Et ce fut absolument le contraire qui se produisit. Toutefois, alors qu'ils volaient depuis près d'une heure dans le vent froid sur le terrain des Potter beaucoup plus réduit que celui de Poudlard, James ne put que remarquer à quel point Lily était à l'aise au poste de poursuiveur. Il n'en était pas tellement surpris, mais il ne s'était pas attendu à autant de feintes, ni autant de pirouettes, et alors qu'elle se dirigeait droit vers leurs buts, il songea qu'encore une fois, il ne parviendrait pas à l'arrêter.

Le score était de cent quatre-vingt à cent vingt pour l'équipe de James selon Mary, et cent quarante à cent quarante selon Sirius qui avait passé le plus clair de son temps à chasser d'avantage Marlène que le vif d'or.

Peter stoppa le souafle avant qu'il ne passe au travers de l'anneau, et James lui lança un tonitruant « bien joué Queudver ! » alors que Lily volait déjà dans la direction opposée, prête à se replier en défense. Efficace. C'était le mot. Elle était efficace. Et il était soufflé.

Il se demanda pendant un bref instant s'il était influencé par ses sentiments pour elle, mais quand elle l'empêcha d'accéder aux buts que défendaient Rémus en lui barrant systématiquement la route, il dut se rendre à l'évidence. Elle était douée, et il était perdu. Il était meilleur, indubitablement, mais son jeu n'était pas infaillible et elle parvint à lui subtiliser le souafle deux fois sans qu'il ne sache par quel subterfuge.

« J'ai l'impression que tu commences à fatiguer, Potter, le nargua t-elle alors qu'ils étaient tous les deux à l'arrêt, à se jauger, et qu'il cherchait comment passer outre sa défense.

- Je suis en pleine forme Evans. Tu n'as jamais vu ma tête au réveil, répondit-il aussitôt.

- Je ne serais pas contre. »

Il s'était préparé à rebondir sur n'importe quel commentaire, mais pas sur celui-ci, et il cligna des yeux plusieurs fois en se demandant si ses oreilles lui avaient joué des tours. Elle se mordit presque imperceptiblement la lèvre, et il se jura intérieurement qu'il n'avait jamais été aussi près de tomber de son balai en dix ans de quidditch.

« Pardon ? dit-il alors qu'il sentait le souafle glisser légèrement sous son coude.

- Je suis vraiment désolée pour ça, souffla t-elle. »

Et avant qu'il n'ait eut le temps de poser la moindre question, elle fonça sur lui, donna un coup de poing dans la balle, la propulsant derrière lui avant de la rattraper presque aussitôt, et cette fois, lorsqu'elle tira de toutes ses forces en direction des anneaux, elle marqua. Le tonitruant juron qui s'échappa de la bouche de Peter se mêla au rire de Lily. Marlène attrapa le vif d'or au même moment, offrant la victoire à son équipe.

Sirius s'empressa de la suivre sur la terre ferme, et il lutta un instant avec elle pour lui arracher la petite balle dorée des mains. Ils terminèrent à quatre pattes sur le sol, recouverts de terre, et le long regard qu'ils s'échangèrent fit siffler Peter. Ils sortirent de leur brève torpeur, et Marlène bondit sur ses pieds tout en tendant sa main au maraudeur qu'elle poussa en arrière avec un éclat de rire dès qu'il la saisit.

« Je veux assister à ce mariage, affirma Lily, et James ne remarqua qu'à ce moment là qu'elle était debout à côté de lui.

- C'est placer beaucoup d'espoir en Sirius, répondit-il en esquissant un sourire malin. Il me redemande tous les ans à quelle date est Noël, tu crois vraiment qu'il peut se rappeler d'un jour, d'un lieu et d'une heure précise ? »

La réflexion fit pouffer Lily, et il s'efforça de ne pas trop réfléchir quand elle lui pressa amicalement le bras avant de trottiner vers leurs amis qui rejoignaient Mary de l'autre côté des baies vitrées. Pendant un moment, il ne parvint pas à se sortir de la tête ces quelques mots qu'elle lui avait jetés comme si l'idée lui paraissait si simple à accepter que l'énoncer devant lui ne l'avait même pas troublée.

Ils flirtaient dangereusement avec les limites et il n'était pas totalement contre, mais il n'avait aucunement l'intention d'aller plus loin. Toutefois, il avait du mal à croire qu'il serait capable de la laisser quitter Poudlard, en juin, sans un au revoir digne de ce nom, ou un « à bientôt » rempli d'impatience. Il préféra ne pas trop y penser maintenant.

Quand il pénétra derrière eux dans le salon du manoir, Lily tenait déjà quatre balais dans ses mains, et il s'empressa de récupérer celui de Peter avant de lui faire signe de le suivre dans les escaliers, un drôle de silence flottant autour d'eux. Et puis, une seconde après, la panique. Il se dirigeait vers sa chambre avec Lily. Lily Evans.

Combien de fois avait-il pensé à ce moment ? Ou plus spécifiquement, celui qui venait après et où elle était allongée dans son lit, les doigts mêlés à ses cheveux bruns alors qu'il était entre ses jambes et qu'il pouvait enfin la goûter.

Il prit une profonde inspiration, déglutit, et tenta au prix d'un effort surhumain de penser à autre chose. Rogue. Rogue était certainement efficace pour faire retomber tout ce qui devait retomber. Ses doigts se crispèrent sur les balais alors qu'il essayait d'ignorer le frottement régulier du coude de Lily contre le sien.

« C'était un bon match, commenta t-elle finalement quand il poussa la porte de sa chambre devant eux. »

Il lui répondit par un hochement de tête et un sourire, se saisissant de chaque balai qu'elle lui tendait tout en se demandant s'il avait imaginé le changement de ton dans sa voix lorsqu'elle était entrée derrière lui.

« Oh non, Potter, souffla t-elle, et lorsqu'il se retourna, elle était debout, les bras croisés devant un énorme poster des Faucons de Falmouth.

- Vu ta tête, j'imagine que tu n'es pas fan, s'amusa t-il en accrochant l'avant dernier balai au mur opposé.

- Comment est-ce que ça a pu m'échapper en deux ans d'amitié ? demanda t-elle, mais il sembla à James que la question était rhétorique alors il se contenta de rire. Je suis en train de tout remettre en question. Les Faucons, vraiment ?! reprit-elle en lui jetant un regard ahuri.

- Oh laisse moi deviner, tu supportes les Flèches d'Appleby, déclara t-il en la regardant droit dans les yeux, et elle parut si surprise qu'il sut qu'il avait visé juste. Je m'en doutais, trancha t-il en levant les yeux au ciel.

- Qu'est-ce que c'est supposé vouloir dire ? s'offusqua t-elle en pivotant complètement vers lui cette fois-ci, croisant ses bras contre sa poitrine. »

Elle avait rapidement attaché ses cheveux en un chignon pour leur match, et il n'avait que peu résisté à la vitesse avec laquelle elle avait fendu l'air sur son balai, mais cela n'empêcha pas James de ressentir l'envie dévorante de le ruiner d'avantage. Il se contenta d'enfoncer ses mains dans ses poches à la place et de hausser les épaules en lui adressant un sourire en coin sur lequel elle s'attarda un peu trop pour qu'il puisse croire que ses pensées étaient plus honorables que les siennes.

« Rien. Je veux dire, aucun problème, Evans, tu as le droit d'encourager des idiots qui se tirent littéralement des flèches dessus en plein match.

- Ils ne le font plus depuis au moins un siècle ! répliqua t-elle, un poil offensée.

- C'était aussi la dernière fois qu'ils ont gagné un match, non ? »

Il se mordit l'intérieur des joues pour ne pas rire à la façon dont son visage s'embrasa, et il s'efforça de ne pas prêter attention à son lit, juste derrière elle, et au fait qu'il lui suffirait de faire deux simples pas pour la pousser dessus.

« Pour ton information, ils ont réussi à tenir un match de seize jours sous la pluie, ajouta t-elle.

- Seize jours pour attraper un vif d'or ? Une prouesse, c'est indéniable, ironisa t-il. »

Son cœur manqua un battement lorsqu'il la vit se pencher sur son lit, et le temps qu'il comprenne ce qu'elle était en train de faire, son oreiller venait déjà de lui arriver en pleine figure. Cette fois, il s'autorisa à éclater d'un rire franc.

« Les Faucons, Potter ? répéta t-elle. Parmi toutes les équipes de Grande Bretagne, les Faucons ?!

- Qu'est-ce que tu leur reproches exactement ?

- La question, c'est plutôt qu'est-ce que je pourrais éventuellement ne pas leur reprocher ? Et même à ça, je n'ai pas de réponse, dit-elle en se laissant tomber en arrière sur le matelas, les yeux rivés vers le plafond. »

Sa main plongea immédiatement dans ses cheveux bruns, et il se retourna pour vérifier que le balai le plus proche de lui tenait correctement sur son support parce qu'il lui était impossible de la regarder se vautrer dans son lit. D'autant plus quand il savait ce qu'il y avait fait le matin même en pensant à elle. Il avait espéré que cela l'aiderait à passer la journée. Il songea à cet instant qu'il n'avait jamais été aussi naïf.

« Tu me tues, James. Tes goûts me tuent, soupira t-elle avant de reprendre presque aussitôt. Tu te rends compte qu'ils ne gagnent que parce qu'ils sont affreusement violents, n'est-ce pas ?

- Ils ne sont pas violents, réfuta t-il tout en se mettant à gratter une tâche qui n'existait que dans son imagination sur le balai qui se trouvait en face de lui. ils ont juste un jeu... Dynamique.

- Dynamique ? répéta t-elle vivement. Leur devise dit que s'ils ne peuvent pas gagner à la loyale, ils fêleront des crânes !

- C'est juste pour impressionner, réfuta James en balayant sa remarque d'un revers de la main.

- Comme les flèches que tirent mon équipe préférée, pointa t-elle.

- … Sur leurs propres joueurs et supporters, compléta t-il en se retournant dès qu'il l'entendit se redresser. »

A son grand soulagement, elle s'était levée, mais son regard était toujours vissé sur son poster avec un dégoût notable.

« Est-ce que tu les as vus jouer récemment ? l'interrogea t-il.

- Pas depuis des années. J'ai juste entendu des choses, répondit-elle en le fixant.

- Ils sont victimes de la réputation de leur toute première équipe. Je t'assure que leur jeu est différent depuis. Ma mère, Sirius, et moi allons aux matchs dès que nous en avons l'occasion, tu devrais venir la prochaine fois. »

Il avait prononcé la dernière phrase sans réfléchir, mais dès qu'il croisa ses yeux verts, ses propres mots lui revinrent en plein visage, comme un boomerang.

Il venait de lui proposer de sortir.

Avec lui.

Et accessoirement, avec sa mère.

Il n'était pas sûr qu'il aurait pu faire pire s'il l'avait voulu, mais en y réfléchissant une seconde, c'était moins catastrophique que toutes les choses qu'il aurait définitivement pu laisser échapper lorsqu'elle était allongée sur son lit. Sa main s'enfouit une énième fois dans ses cheveux alors qu'une tiédeur inconfortable remontait le long de sa nuque, et avant même qu'il n'ait pu rajouter quoi que ce soit, elle lui donna le coup de grâce.

« Avec plaisir, James. »