6-Orgueil

Pourquoi te crois-tu supérieure aux autres ? Pourquoi les méprises-tu ? L'orgueil est l'un des pires péchés qui soient. Un peu d'humilité te fera du bien, chère Sherry…

oOo

Elle n'en pouvait plus. Elle était complètement vidée, épuisée et finit par poser un genou au sol. Cela faisait des jours qu'elle était enfermée dans cet endroit sale et sordide, si obscur qu'elle avait du mal à distinguer les murs. La jeune femme finit par se relever, s'appuyant sur son maudit balai, et recommença à balayer le sol de plus en plus poussiéreux. Son mystérieux ravisseur ne cessait d'en rajouter à chaque fois qu'elle finissait cette tâche ingrate. Pourquoi ? Que lui voulait-il ?

Elle sentit ses jambes flageoler mais elle tint bon. Elle ne pouvait pas s'arrêter. Il l'observait à travers des caméras disposées dans tous les coins de la petite pièce et la nourrissait à peine. Comment osait-il faire ça ? Surtout à une femme de sa classe et de sa qualité. Elle ne méritait pas ça. Et jusqu'à son dernier souffle, la jeune femme répéta inlassablement cette phrase.

oOo

Ce fut le propriétaire Ben Hoyt qui découvrit le corps sans vie de Sherry Metlaugh dans un des locaux souterrains les plus sombres du bâtiment.

Le détective Don Flack Jr et les experts Danny Messer et Sheldon Hawkes étaient arrivés rapidement sur cette nouvelle scène de crime avec toute une équipe de policiers. Ils ne comprenaient pas comment ce dernier crime avait pu être commis : les diverses équipes de surveillance placées tout autour de l'immeuble n'avaient remarqué aucune activité suspecte. Ce qui voulait dire deux choses : soit le tueur connaissait un moyen d'entrer et de sortir de l'immeuble sans se faire voir, soit il venait de l'intérieur.

Pour les policiers, la première hypothèse était fort improbable étant donné le nombre important d'équipes de surveillance. Mais la deuxième était non seulement inquiétante mais aussi compliquait l'affaire : ils se retrouvaient avec un grand nombre de suspects… Danny espérait que ce dernier meurtre leur apporterait enfin quelques indices et les mènerait sur une piste.

Pendant que Flack interrogeait le vieux propriétaire sur la victime, Danny et Sheldon examinaient avec attention la scène du crime.

Danny (intrigué) Ça a été nettoyé…

Sheldon (éclairant la morte) Sans doute par notre victime. Elle tient encore son balai…

Danny (posant une main sur son front, réfléchissant) Pourquoi lui faire nettoyer ce locale poussiéreux ?

Don (semblant arriver de nulle part) Pour l'humilier, la briser ou lui inculquer un peu d'humilité.

Danny (curieux) Comment ça ?

Don : Notre victime, Sherry Metlaugh, était la PDG de IMTEC Industry.

Danny (regardant le cadavre avec étonnement) PDG ? Mais quel âge a-t'elle ?

Don : 25 ans. (voyant l'expression incrédule sur les visages des deux experts) Je vous jure que c'est vrai ! Et d'après Hoyt, elle avait le plus grand et le plus bel appartement de tout l'immeuble. Mais cette charmante jeune femme avait tout de même un léger défaut…

Sheldon : Lequel ?

Don : Elle se sentait très supérieure. Elle traitait ce pauvre concierge comme de la merde. Et ça se généralisait sur toutes les autres personnes de la même classe.

Danny (grimaçant) Charmant. Enfin, je comprends mieux pour les haillons, le balai, le lieu… Ainsi que pour l'inscription sur le sol.

Sheldon et Flack éclairèrent l'inscription en question, profondément gravée dans le sol de ciment, et lurent : « Orgueil ».

Don : Il n'en reste plus qu'un…

Danny soupira et continua son inspection de la petite pièce tandis que Sheldon se mit à examiner le cadavre avec minutie.

Sheldon : Certains de ses muscles sont incroyablement contractés…Elle a dû avoir de nombreuses crampes.

Danny (observant toujours attentivement chaque recoin du local avec sa torche) A force de balayer, je suppose. Sa main est crispée sur le manche du balai. Mais pourquoi lui faire nettoyer ce local ?

Don : Si son péché est l'orgueil, notre meurtrier a certainement voulu lui donner une leçon d'humilité…A sa manière…

Danny : Je vois.

Sheldon : Si on suit ce raisonnement et vu l'absence totale de blessures quelconques sur le corps de notre victime, je pense qu'elle est morte épuisée.

Don (fronçant les sourcils) Attendez. Comment notre tueur a pu la pousser à travailler sans s'arrêter ? Elle aurait pu se reposer.

Danny (repérant une des caméras) Oh, non…Elle était surveillée.

Don (avec espoir) On aurait donc des vidéos du meurtrier et de sa dernière victime ?

Danny : Non. On a que les caméras. Pas leur récepteur… (emballant la première caméra avec délicatesse) Espérons qu'il y ait au moins quelques empreintes.

Flack soupira, pessimiste. Vu la précision et la minutie qu'avait mises le tueur dans chacun de ses meurtres, il doutait que les experts trouvent la moindre empreinte. Le meurtrier n'avait pas fait une seule erreur jusque-là…

Don (bas à lui-même) Quelle galère…

oOo

Le docteur Hammerback confirma la cause de la mort : épuisement total de l'organisme et suractivité musculaire. Le cœur avait donc fini par lâcher.

Toute l'équipe était réunie et tentait de trouver un point commun entre les victimes, à part l'immeuble où elles logeaient, pour réduire leur liste de suspects.

Danny (s'appuyant sur le dossier de sa chaise en soupirant) Rien. A part l'immeuble, rien ne les relie entre eux.

Lindsay (s'énervant) Il ne les choisit pourtant pas au hasard ! Comment les connaît-il tous ? Il y au moins une cinquantaine de locataires !

Mac : Calmez-vous. S'énerver ne nous aidera pas. Nous devons rester posés et réfléchis, d'accord ? (se levant) Faisons une pause. Nous aurons l'esprit plus clair…

Tous se levèrent à sa suite et suivirent le conseil de leur supérieur, partant en direction de la salle de repos, histoire de se détendre un peu. Flack les croisa et intercepta gentiment Stella.

Don (avec un doux sourire) Ça te dirait qu'on sorte un peu ?

Stella (lui prenant la main et le tirant vers la sortie) Oh, oui ! J'en ai besoin…

oOo

Don et Stella étaient installés à la terrasse d'un café et attendaient tranquillement leurs commandes. Sentant la frustration et la détresse régnant chez sa petite amie, le jeune détective lui tint amoureusement la main, la caressant avec son pouce d'une manière réconfortante.

Don (l'observant de ses beaux yeux bleus) Ça va mieux ?

Stella : Un peu… (sentant des larmes de colère monter) Mais je me sens si impuissante…Si inutile !

Don (se rapprochant d'elle pour la serrer contre lui, caressant tendrement son dos) Ne te dénigres pas, Stella. Tu as fait ton travail. Tu n'as pas à te blâmer.

Stella (avec véhémence, furieuse contre elle-même) Mais je n'ai rien trouvé ! Aucune piste !

Don : Avec quoi ? Voyons, Stella, il n'a rien laissé derrière lui ! Tu n'es pas responsable !

Stella : Pourtant, je devrais…

Don (lui posant un doigt sur les lèvres, lui imposant ainsi gentiment le silence) Ecoute-moi. Tu es une excellente policière, tu fais ton boulot avec une incroyable détermination et tu fais tout ce qu'il faut pour découvrir la vérité. Si tu savais à quel point je suis fier de toi…

Stella (attendrie et flattée) Vraiment ?

Don (avec un large sourire) Vraiment. Et n'en doute jamais.

La scientifique finit par se blottir contre Don et sentit ses bras puissants l'entourer avec tendresse. Qu'est-ce qu'elle était heureuse de l'avoir auprès d'elle ! Il était son oxygène, son rayon de soleil, son Ange mais aussi la moitié qui lui manquait depuis toutes ces années…

Stella se pelotonna un peu plus contre lui, entendant ainsi le doux rythme des battements de son cœur. S'il savait qu'il était lui aussi sa fierté…