Harry
reconnut aussitôt la benne à ordures et la cabine
téléphonique délabrée. Il se dirigea vers
celle-ci et entra dedans.
- Harry, tu te souviens du code ?
demanda Mr Weasley.
- Oui, pourquoi ?
- Je te
laisse ici, je ne passe pas par l'entrée des visiteurs cette
fois-ci.
- D'accord, je saurai trouver mon chemin.
Mr Weasley transplana, laissant Harry seul. La
dernière fois qu'il était venu au ministère de
la Magie remontait à la fin de sa cinquième année,
et il se félicita d'avoir retenu le code tout ce temps. A
l'aide du cadran circulaire, il composa le numéro
soixante-deux mille quatre cent quarante-deux. Après un très
court instant, une voix de femme s'éleva dans la cabine aux
vitres brisées :
- Bienvenue au ministère
de la Magie. Veuillez indiquer votre nom et l'objet de votre
visite.
- Harry Potter, le ministre m'a convoqué…
- Merci, répondit la voix froide. Le visiteur est prié
de prendre le badge et de l'attacher bien en vue sur sa robe.
Un badge glissa dans le réceptacle destiné à
contenir la monnaie rendue. Le garçon s'en empara
fébrilement et l'épingla sur son sweat. Il ne pensait
plus qu'à son parrain, peut-être trouverait-il un
moyen de le faire sortir de… l'arcade. Une phrase de Dumbledore
lui revint en mémoire. Il avait dit à Fudge, l'ancien
ministre, que des Mangemorts étaient retenus dans la « chambre
de la Mort ». Or, cette salle n'était autre que
la salle de l'arcade. Harry avala sa salive avec difficulté.
- Le visiteur est prié de se soumettre à une
fouille et de présenter sa baguette magique pour
enregistrement au comptoir de la sécurité situé
au fond de l'atrium.
Harry s'adossa à la porte et
attendit que la cabine ait terminé sa descente dans
l'obscurité. Lorsqu'il atteignit enfin le hall, il
constata que la fontaine de la Fraternité magique avait été
réparée. Partout autour s'amassait une foule de
visiteurs et d'employés qui semblaient débordés
de travail. Le garçon se fraya un chemin jusqu'au bureau du
sorcier-vigile. L'homme le toisa du regard, marquant un court arrêt
sur sa cicatrice. Il passa ensuite une tige dorée autour de
Harry. Ce dernier savait qu'il s'agissait d'une fouille et bien
qu'il n'ait rien à se reprocher, il transpirait. Le
sorcier reposa la tige et tendit la main. Harry le regarda dans les
yeux. Il se souvint du vigile de l'année précédente
et pensa si fort au fait qu'il n'aimait pas le nouveau qu'il
crû, l'espace d'un instant, l'avoir dit à voix
haute. Pour incommoder le sorcier, Harry déposa directement sa
baguette sur la balance à un plateau, en ignorant la main
tendu. Après un légère vibration, la machine
cracha un morceau de parchemin. Le vigile lut sèchement les
informations qui y étaient inscrites et Harry confirma d'un
signe de tête. Le vigile lui rendit ensuite sa baguette et
planta, le bout de parchemin sur une pointe. Harry partit sans le
remercier vers les ascenseurs aux grilles dorées, dans le
petit hall.
La lenteur de l'ascension mettait le garçon hors de lui, et dès qu'il le put, Harry courut à toutes jambes jusqu'au bureau de Scrimgeour et y entra sans frapper. Le ministre le dévisagea en souriant.
- Merci d'être
venu si vite Harry.
- De rien… Amenez-moi à
l'arcade !
- Je comprends que dans un moment pareil
tu oublies les formules de politesse, gloussa-t-il, mais j'ai
toutefois quelqu'un à te présenter.
Voyant
que Harry ouvrait la bouche pour parler, Scrimgeour s'empressa
d'ajouter :
- Avant de descendre à l'arcade
malheureusement… Ne t'inquiètes pas, ça ne sera pas
long.
Le ministre se tourna
ensuite vers un vieux tableaux et s'adressa à son occupant,
un petit homme coiffé d'une perruque aux plumes d'argent :
- Prévenez-le de notre arrivée.
Le petit
homme du tableau se dirigea vers le cadre et disparut. Harry n'avait
qu'une envie, c'est que la rencontre se fasse le plus rapidement
possible. Quelques instants plus tard, une petite voix annonça
que le Premier Ministre les attendait. Harry fronça les
sourcils. Cette appellation était donnée à un
Moldu. Mais il n'eut pas le temps d'y réfléchir
plus, des flammes vertes se déchaînaient maintenant dans
la cheminée et Scrimgeour l'y poussait.
- La destination est
« Bureau de Premier Ministre Moldu ». se
contenta-t-il de préciser.
Harry se baissa pour entrer
dans l'âtre. Il prononça distinctement le nom du lieu
que le ministre venait de lui indiquer et, quelques secondes plus
tard, il s'époussetait sur le tapis d'un luxueux bureau
Londonien.
- Mais c'est une manie chez vous ! s'indigna un homme derrière le bureau qui faisait face à Harry.
Scrimgeour s'avança aux côtés de Harry et d'un geste rapide envoya un peu de suie supplémentaire sur le tapis. Le visage du Premier Ministre devint écarlate mais aucun son ne sortit de sa bouche ouverte. Après un long silence, le ministre de la Magie prit la parole.
- C'est le garçon
dont je vous ai parlé. Nous plaçons beaucoup d'espoirs
en lui.
- Bien, bien, murmura le Premier Ministre. C'est
tout ? Je ne veux pas paraître désagréable
mais j'ai beaucoup de travail.
Harry apprécia cette
remarque et rit intérieurement.
- Il me reste un ou
deux points à vous exposer. Tout d'abord, je dois vous
prévenir du décès de l'un des plus grands
sorciers de notre communauté : Albus Dumbledore, qui
était le directeur de Poudlard. Un de nos professeurs, qui est
en fait à la solde de
Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom, l'a assassiné.
- En quoi cela me concerne-t-il ?
Harry lui jeta un
regard noir et eut l'irrésistible envie de sortir sa
baguette de sa poche. Scrimgeour dut le ressentir car il posa sa main
sur le bras du garçon.
- C'est le seul sorcier qui a
jamais fait peur à Vous-Savez-Qui. Sa mort a ouvert une faille
dans la sécurité de l'école.
- Je comprends… articula-t-il, visiblement gêné. Et l'autre point ?
- Le traître en
question s'appelle Severus Rogue. Il s'est enfui avec l'un de
nos élèves, Drago Malefoy, qui semble aussi servir
Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom.
- Bien sûr
qu'il le sert ! s'écria Harry. Il s'en est vanté
toute l'année devant les élèves de Serpentard,
mais personne n'a rien fait…
- Allons, allons
Harry, ce qui est fait est fait. Monsieur le Premier Ministre, nous
n'allons pas abuser plus longtemps de votre accueil, je vous ferai
parvenir des affiches que vous placarderez un peu partout. Si un de
ses deux hommes est aperçu, prévenez-moi
personnellement. Au revoir.
- C'est ça, au revoir !
soupira le Moldu.
Harry ne dit rien, il
prit un pincée de poudre dans la main ouverte de Scrimgeour,
la lança dans le foyer de la cheminée, pénétra
dans les flammes et dit d'une voix enjouée :
-
Bureau du ministre de la Magie !
Dès que
Scrimgeour mis un pied dans son bureau, il comprit que Harry ne
pouvait plus attendre. Ils se dirigèrent donc vers la salle de
l'arcade. Dès qu'ils sortirent du bureau, le petit homme
qui occupait le tableau sortit de son cadre.
Le garçon
se souvenait du chemin et courait au devant du ministre, des dizaines
de questions s'entrechoquant dans sa tête. Ils débouchèrent
enfin en haut des gradins. Rien n'avait changé, mis à
part la présence de sorciers tout autour du podium, en bas,
ainsi qu'un prénom qui résonnait. La voix semblait
provenir de nulle part mais Harry savait que c'était celle
de son parrain. Il se sentit presque flotter quand il dévala
les marches jusqu'à l'arcade. Scrimgeour fit signe aux
sorciers de sortir et lui même les suivit.
Harry tourna d'abord
autour de l'arcade, écoutant la voix de Sirius se répercuter
contre les murs de la salle. Puis n'en pouvant plus, il tenta de
communiquer :
- Si… Sirius ?
La voix s'éteignit aussitôt. Harry tendit l'oreille en vain. Il faisait machinalement tourner le bout de miroir dans sa poche.
- Sirius ? Je
suis là, répond-moi !
Harry resta plus
d'une heure assis sur le podium, espérant une réponse,
mais rien ne vint. Puis Scrimgeour entra dans la salle pour lui
demander de remonter. Il semblait compatissant à la tristesse
du garçon et Harry lui en fut reconnaissant. Il demanda cinq
minutes de plus, qui lui furent accordées. Il fit face à
l'arcade et jeta de toutes ses forces le bout de miroir à
travers le voile fantomatique. Quelques larmes coulèrent le
long de ses joues. Il les essuya d'un revers de manche et
s'apprêtait à faire demi-tour quand il entendit un
bruit près de ses pieds. Il se baissa et un sourire se dessina
sur ses lèvres. Par terre se trouvaient son bout de miroir et
un autre identique. Il les empocha tous deux et rejoignit Scrimgeour.
En remontant, le ministre lui fit prendre un tout autre chemin et après plusieurs minutes de marche, pendant lesquelles Harry faisait tourner les deux morceaux de miroir ensemble, ils arrivèrent dans un petit bureau. Face à Harry se tenaient deux hommes que le garçon aurait préféré ne pas voir. L'un était petit et faisait tourner un chapeau melon vert vif entre ses mains potelées. Cornélius Fudge, l'ancien ministre de la Magie, avait vraisemblablement reprit du poids. L'autre était fin et portait des lunettes en écaille. Son visage était presque aussi flamboyant que ses cheveux roux.
- Bonjour Harry… murmura Percy Weasley, l'un des frères de Ron.
- Toi ? s'indigna Harry.
Harry regarda la main tendue du rouquin et l'ignora, comme il
l'avait fait avec celle du vigile. Scrimgeour jugea bon
d'intervenir. Il toussota et se planta entre les deux garçons.
- Oui, c'est bien lui Harry. Il va rentrer à Poudlard
avec toi, pour retrouver sa famille. Il m'a donné sa lettre
de démission hier. Il craint que Tu-Sais-Qui ne veuille
s'attaquer à ceux qui lui sont chers et il veut tout faire
pour les protéger.
Harry ne sut pas quoi répondre.
Il sentait que Percy allait communiquer des informations au ministre
et ne souhaitait pas que le ministère soit informé de
ses faits et gestes.
- Si j'annonce publiquement que vous
faites du bon travail, comme vous me l'avez demandé à
plusieurs reprises, il pourrait ne pas revenir ? questionna
Harry.
Scrimgeour sembla réfléchir quelques
instants.
- Malheureusement, ça n'est pas possible.
Il souhaite revenir auprès des siens. Et je peux te promettre
qu'il ne travaille pas à notre compte.
Harry fixa
intensément le visage de Percy puis baissa la tête.
- D'accord, c'est
bon… Mais je prédis un grand froid à son arrivée,
avec plusieurs membres de sa famille. On peut y aller ?
- Oui, tout est dit je pense. Puis-je quand même faire mon
annonce ?
- Mais oui, si vous y tenez tellement…
soupira Harry.
Fudge s'avança un peu.
- Je
vais venir avec vous, je dois m'entretenir avec le professeur
McGonagall.
Harry tourna le dos et sortit d'un pas rapide,
talonné par les deux hommes. Ils sortirent du ministère
puis transplanèrent à Pré-au-Lard, d'où
ils remontèrent jusqu'à Poudlard.
