Décembre 1987.

- Voilà ma chérie, tu es très jolie comme ça, fit Hermance en rajustant le col aux broderies anglaises de sa fille Dorea.

- Tu crois que Gabriel sera là ? demanda la petite fille.

- Étant donné que les Dumarais sont des amis de longue date de tes grands-parents, il n'y a pas de raison pour que leur petit-fils et ses parents ne soient pas présent au réveillon.

- L'autre jour, il m'a dit qu'il rentrait à Ilvermony en septembre. Dis maman, est-ce que moi aussi je ferais mes études à Ilvermony ?

- Non ma chérie, c'est bien trop loin pour ton père et moi.

- Mais j'aimerais rester avec Gabriel, moi ! rechigna la petite rousse.

- Dotty, Gabriel habite à New-York, il est naturel qu'il fasse ses études à Ilvermony.

- Alors où j'irai moi ? À Poudlard ?

Hermance Artwood observa sa fille, réfléchissant à cette question qu'elle s'était tant posé avec son époux.

- Nous en reparlerons quand le moment sera venu. D'accord Dott' ?

- Bien maman, obtempéra la petite fille.

À cet instant, la porte s'ouvrit à la volée sur Goderic Artwood. Il approcha de sa femme qui était agenouillée devant sa fille.

- Ma sœur vient d'arriver. Pas la peine de te décrire l'état de nerf dans lequel figure ta mère.

- Recevoir une cracmole chez elle est un calvaire chaque année, soupira Hermance. Tu veux bien m'aider pour me relever, s'il-te-plait ?

Elle tendit une main vers Goderic qu'il s'empressa de saisir pour l'aider à se hisser debout. Lorsque ce fut fait, la femme oscilla légèrement.

- Tu peux aller te coucher si tu le souhaites. J'irai te rejoindre dès que possible.

- Non… Non Goderic. Les médicomages ont dit que ce n'était pas grand-chose. Je t'assure, ça va aller.

- Bien, c'est toi qui vois ma chérie, dit-il en l'embrassant amoureusement sur la tempe.

Puis il se tourna vers sa fille qui les contemplait, un grand sourire plaqué sur son visage pourvu de petites taches de rousseur.

- Tu me trouves jolie, papa ? demanda Dorea en lissant sa petite robe de velours verte.

- Une vraie petite serpentard, complimenta son père. Si tu ne la tâche pas de sauce ou même de boue avant la fin de la soirée, ce sera un miracle.

- Goderic ! réprimanda Hermance en lui donnant une nasarde sur l'épaule.

- Tu es très jolie ma fille, réitéra Goderic avec un sourire fier.

- Allons-y avant que ma mère ne simule une crise d'apoplexie à l'idée même de se retrouver seule dans le salon avec une cracmole.

Hermance se dirigea vers la porte tandis que son époux échangeait un regard complice avec sa fille.

- Ce serait une bénédiction si cette vieille bourge de sang-pur concédait à faire une crise cardiaque, tu ne crois pas Dott' ? lui dit-il tout bas.

Dorea pouffa et succéda à sa mère dans le couloir menant au grand escalier.

Lorsqu'ils les descendirent, un couple âgé, accompagné d'un autre duo, un peu plus jeune cette fois, ainsi que d'un petit garçon châtain aux yeux noisettes, étaient déjà dans l'entrée. Le couple âgé fut accueilli par les grands-parents de Dorea, Lord Richard de Beaumont, ainsi que son épouse Lady Emilie.

Cette dernière portait son éternel tailleur de grand couturier en tweed. Seulement ce soir-là, la petite fille ne put s'empêcher de remarquer qu'il était cousu de ci et de là de fil d'or.

Malgré le désaccord qui régnait entre son père et sa grand-mère maternelle, la petite fille ne pouvait s'empêcher d'observer la femme, qui avait passé le cap de la soixantaine à présent, et notait qu'elle était toujours très apprêtée, quelle que soit les circonstances.

Ses ongles limés et peints de rouge à la perfection, ou encore son brushing qui coûtait à lui seul des centaines de galions, illustraient parfaitement la femme qu'elle était.

- Salut Dotty ! fit le petit garçon en s'approchant d'elle.

- Salut Gab' !

- Je suis ravi que tes parents soient là cette année.

- Oui, rien n'était sûr jusqu'à il y a quelques jours. Maman se sentait un peu mal. Mais ça va mieux à présent.

- Alors je suis content que ça aille.

Plus loin, la conversation s'engendrait sur les quelques convives absents.

- Nous avons souhaités inviter les Malefoy à notre table cette année, mais Abraxas a contracté une maladie étrange et Narcissa et Lucius préféraient rester auprès de lui, dit pompeusement Émilie à l'épouse Dumarais.

- N'est-ce pas avec Lucius Malefoy que vous avait signé un accord dernièrement Goderic ? demanda Monsieur Dumarais.

- C'est exact, approuva Goderic. Un homme extrêmement ingénieux, mais dont il faut se méfier tout de même.

- Ho, ne racontez pas de bêtises Goderic. Abraxas est un ami de longue date et je connais Lucius depuis sa plus tendre enfance. C'est un homme tout à fait charmant, et sa femme est d'une beauté sans pareille.

- Je crois qu'ils ont un fils du même âge que Dorea, ajouta Richard.

- Oui, un futur très bon parti si vous voulez mon avis, releva Emilie

À cet instant, la sœur de Goderic fit son apparition et l'assemblée se tut.

- Tante Deirdre ! s'exclama Dorea en se jetant dans les bras de la jeune femme qui la réceptionna.

Cette dernière ressemblait en tout point à son frère. Elle avait les yeux d'un bleu intense, les cheveux bruns et était aussi grande et élancée que l'était Goderic.

- Tu m'as manqué tante Deirdre !

- Tant mieux, car à moi aussi Dotty chérie.

- Est-ce que le père Noël a été généreux cette année ? questionna Dorea.

- Dorea Artwood, je te prie de contenir ton impertinence, fit Hermance sèchement.

- Ne t'inquiète pas Hermy, dit Deirdre en secouant la tête.

À l'entente du prénom, Emilie leva les yeux au ciel, mais la bienséance l'empêcha d'admonester la sœur de son gendre.

Cette dernière reposa Dorea et lui caressa affectueusement la joue.

- Il a été excessivement généreux.

Le regard vert émeraude de la petite fille s'illumina tandis qu'Émilie convia la famille à se joindre dans le salon pour l'apéritif.

- Tu ne devrais pas la gâter autant Deirdre, chuchota Hermance. Tes études de médecine à Harvard te coûtent une somme.

- C'est ma nièce, et je ne peux concevoir de ne pas la gâter pourrir quand je le peux.

Hermance campa une main amicale sur l'épaule de sa belle-sœur puis toutes deux suivirent le reste des invités dans le salon.

Bien plus tard dans la soirée, alors qu'ils se distribuaient tous les cadeaux, Gabriel s'approcha de Dorea et lui tendit un petit paquet rectangulaire que la petite fille s'empressa d'ouvrir.

Lorsqu'elle ouvrit la boîte de velours, elle vit un bracelet fait d'or où en son centre était inscrite une gravure.

« Le temps confirme l'amitié. »

- J'espère que tu ne m'oublieras pas lorsque je serais à Ilvermony ?

- Alors c'est sûr, tu vas à Ilvermony en septembre ? questionna la petite fille, le regard affolé.

- Ben oui, c'est l'école de magie où je suis inscrit depuis ma naissance. Tout comme toi, à Poudlard.

- Mais on peut changer d'école, si on le souhaite. Tu pourrais aller avec moi, à Beaubâtons ou à Poudlard, répondit la petite fille avec un brin d'espoir dans la voix.

- Qu'est-ce que j'irai faire à Beaubâtons ou à Poudlard ? Ma place est à Ilvermony Dott', dit Gabriel en fronçant des sourcils.

- Oui, mais on ne sera pas ensemble. C'est triste, rétorqua Dorea en baissant les yeux sur le bracelet.

- C'est comme ça Dott'. Et puis dis-toi que tu te feras d'autres amis que moi.

Dorea releva ses prunelles et fixa son ami l'air tout à fait incrédule.

- Mais je ne veux pas avoir d'autres amis que toi ! s'exclama Dorea en lui jetant le bracelet en pleine figure.

Elle sortit en trombe de la pièce, suivit de près par sa mère qui la héla dans les escaliers. Tout compte fait, elle s'enferma dans sa chambre pour le reste de la soirée.

Dorea était collé contre la porte vitrée de l'auto-école qui était, de toute évidence, fermée. Elle se recula, tout à fait déconcertée par cette découverte. Pourtant, nous étions vendredi et Miguel travaillait toujours le vendredi. C'était même l'une de ses plus grosses journées.

Elle soupira, remettant ses excuses à plus tard, et chemina vers sa moto qui était garée juste devant. Elle aperçut Tonks, Lupin et Maugrey à l'autre bout de la rue et souffla d'exaspération se demandant s'ils ne la suivaient pas à la trace.

- Et merde ! fit une voix imposante dans son dos.

La jeune Artwood fit volte-face et vit un homme, ou plutôt un jeune homme aux cheveux châtains se tenir devant l'auto-école. Étonnée de voir qu'il avait juré en anglais, elle engrena la conversation.

- Vous cherchez Miguel ? questionna-t-elle poliment.

L'homme se retourna et Dorea eut la sensation de l'avoir déjà-vu auparavant. Elle fronça les sourcils, déroutée par ce qu'elle venait de découvrir.

- Nous nous connaissons ? demanda-t-elle aussitôt

- Je ne crois pas, non, dit le jeune homme en s'approchant d'elle.

Un reflet de soleil s'abandonna sur le fin bracelet d'or qu'il portait. Ce que Dorea remarqua comme plus un bracelet féminin, voir même, fait pour une petite fille.

- Vous savez où est…

- Miguel ? conclut la jeune sorcière.

- Oui, c'est ça.

- Non. Justement, je souhaitais le voir également. Ordinairement, il travaille le vendredi, c'est bien la première fois que je le vois fermer boutique avant le week-end.

- Ce n'est pas grave, je repasserai plus tard.

- Alors on se reverra certainement, sourit Dorea en rangeant son casque dans le coffre sous l'assise qu'elle verrouilla d'un tour de clé.

L'homme sourit à son tour et hocha la tête tout en la regardant se diriger vers la place du marché où elle devait rejoindre le restaurant où elle travaillait. Lorsqu'elle disparut derrière un étal de fruits exotiques, l'homme eut un mot pour lui-même :

- Comme tu as changé Dotty…

Il jeta un coup d'œil à l'autre bout de la rue et vit les trois membres de l'Ordre l'observer avec suspicion. Il les salua d'un geste de main tout aussi provocant que son sourire évocateur puis il partit dans l'autre direction.

Le lendemain Dorea observait le soleil se coucher alors qu'elle était assise sous son porche. Elle n'avait pas bougé depuis des heures, contemplant les champs de maïs étendus à perte de vue devant elle.

Elle réfléchissait. Elle ne cessait de réfléchir à cette conversation qu'elle avait eu la veille avec Remus Lupin, Nymphadora Tonks et Alastor Maugrey. Les paroles blessantes du lycanthrope ne cessaient de lui revenir en tête.

« La mort de tes parents, de Sirius, auront été vaines si tu fuis lâchement tes obligations ! »

Ses obligations… Elle n'en revenait pas que l'ancien professeur eut l'audace de lui sortir une telle sommation. Et rien que d'y penser, cela la rendait hors d'elle.

Un bip sonna à ses côtés à cet instant et Dorea se saisit du téléphone portable, qui pour une fois, captait le réseau environnant.

Elle y lut un message de Payton qui apparemment avait tenté de la joindre plusieurs fois dans la journée.

Fermant les yeux et soupirant de dépit, elle rédigea un rapide SMS, comme disaient si bien les moldus, pour rassurer son amie. Ce fut ainsi qu'un bruit de moto attira son attention alors qu'elle appuyait sur la touche « envoyé ».

La jeune femme releva la tête et reconnue l'engin de Miguel, dont ce dernier tournait le guidon pour se garer près de sa propre moto.

Elle le vit retirer son casque et lui adresser un sourire charmeur.

Elle nota ainsi qu'il était élégamment vêtu d'un costume noir, habillé d'une chemise blanche et d'un nœud papillon.

La jeune sorcière se mit aussitôt à rougir au souvenir de la veille alors qu'elle avait totalement agi avec désinhibition auprès du brun.

- Holà Gringa ! salua-t-il, alors qu'il descendait de sa moto pour déverrouiller le coffre sous l'assise et en sortir une housse de vêtement muni d'une petite pochette.

Dorea se releva de son banc, tandis que Miguel refermait l'assise dans un claquement sec, intriguée par cette visite impromptue alors qu'il fut absent durant deux jours sans laisser la moindre nouvelle. Elle s'avança vers le petit escalier, alors que le brun le grimpait pour la rejoindre. Lorsqu'il s'approcha, elle remarqua avec effarement de légères cernes bleutées encercler ses yeux.

- Mais … que s'est-il passé ? dit-elle avec stupeur.

- Un abruti m'a frappé. Il n'a pas supporté que j'ai le dessus sur lui.

Dorea fronça des sourcils, totalement désorienté par ce brusque revirement.

- Mais… Miguel, tu as été absent durant deux jours. Où étais-tu passé ?

- Ho, j'étais à une convention à Mexico sur le développement des automobiles électriques et quel impact cela avait sur l'écologie.

Même si Dorea ne comprenait pas grand-chose au jargon moldu, elle nota le regard fuyant de son ami.

- Et tu t'es fait tabasser là-bas ? Pourquoi ?

Miguel se mit à sourire et laissant quelques secondes de silence. Tout compte fait, il rehaussa les yeux et encra ses prunelles dans celles émeraudes de la jeune Artwood.

- Comment vas-tu depuis notre … nuit… ensemble ?

L'ancienne Serpentard haussa un sourcil devant la palinodie du brun. Elle croisa les bras sur sa poitrine, et balaya le sable sur le parquet de la véranda pour émettre d'un ton hésitant :

- Honteuse, je dois l'avouer.

- Tu n'as pas à l'être. C'était sensationnel.

Dorea ne put s'empêcher de rougir.

- Tu devrais oublier ça, Miguel.

Miguel plissa le front à son tour, faisant mine de ne pas comprendre.

- Sauf que je n'y arrive pas, Kate. Chaque fois que j'y pense, je n'ai qu'une envie, c'est de t'avoir à nouveau dans mes bras.

Un silence confus s'installa entre eux quelques instants, jusqu'à ce que Dorea n'y tienne plus.

- Écoute Miguel, j'étais totalement ivre. Complètement bourrée… Ce n'était pas moi, loin de là. Et sans rien te cacher, je n'ai ni l'envie, ni le temps de m'engag…

Le jeune homme l'interrompit en levant la main.

- J'avoue que te voir te révéler à moi comme tu l'as fait, même ivre m'as beaucoup touché. Mais si tu penses que ce n'était dû qu'à l'effet de l'alcool alors je crois que l'on devrait arrêter de se voir.

- Quoi ? Mais …

- Tu sais parfaitement bien ce que je ressens pour toi, Kate. Je veux uniquement que tu me fasses une place dans ton cœur, même ne serait-ce qu'en tant qu'ami, répliqua-t-il le regard suppliant.

- Miguel, souffla Dorea. Je… je ne sais pas. Tu sais, ce n'est pas facile pour moi. Je … Je ne peux pas entamer une relation comme ça. On se connaît à peine après tout.

- Ok, je comprends, mais alors laisse-moi au moins essayer et je t'assure que rien ne changera entre nous si tu décides de ne pas faire évoluer notre relation.

Dorea observa le jeune homme pour qui elle n'éprouvait que de tendres sentiments. Elle ne voulait pas lui faire de peine. Comment refuser poliment sa proposition de faire évoluer leur relation ? Elle n'en avait pas tellement envie.

Cependant, à bien y réfléchir, elle pouvait au moins lui accorder sa chance. Elle se rappela que sa gouvernante disait fréquemment que celui qui ne tente jamais rien dans la vie, n'obtiendra jamais plus que ce qu'il mérite.

- Bien, on peut tenter quelque chose, dit Dorea alors que les yeux ténébreux de Miguel s'enflammèrent d'un nouvel espoir.

- Tu ne le regretteras pas, je te l'assure.

- Si tu le dis, sourit Dorea. Au fait, dis-moi, tu es extrêmement élégant, ma parole ! complimenta-t-elle en se reculant de quelques pas pour le détailler de bas en haut.

- Ça Gringa, c'est parce que je t'invite à un rendez-vous galant et nous allons dans un grand restaurant de Guadalajara.

- Mais je ne me souviens pas d'avoir accepté une quelconque invita…

- Tu as dit que l'on pouvait tenter quelque chose entre nous, alors je tente.

Dorea s'esclaffa devant l'audace de son compagnon alors que ce dernier déplia la housse pour l'ouvrir. Dorea découvrit une magnifique robe décolleté bleue nuit.

- J'ai pensé que tu serais splendide dedans.

- Heu…

Dorea n'avait pas les mots. En aucun cas un homme ne lui avait offert quoique ce soit et même si la mode avait toujours été le dernier de ses soucis, elle ne pouvait s'empêcher de reconnaître que l'étoffe de l'habit était magnifique. Simple, sans artifice, tout ce qu'elle aimait dans une telle robe dont elle ne pouvait se permettre de revêtir, soit dit en passant.

Elle saisit le tissu entre ses mains, qui était doux et soyeux et compris que cette soirée allait être bien plus qu'un rendez-vous galant. Mais elle savait d'avance que cela n'irait pas plus loin qu'un flirt innocent. Elle ne le permettrait pas à nouveau. Si leur relation devait évoluer alors ils le feraient correctement.

- Miguel… je … je ne peux pas enfiler une robe pareille.

- Bien sûr que si, s'outra le brun. Et encore plus, maintenant que j'ai vu ce qui s'y cachait dessous !

- Ho, c'est vrai, exhala Dorea en obstruant les prunelles, prise d'embarras.

- Ne t'inquiète pas, je conserve égoïstement ces images pour moi. J'ai toujours éprouvé de l'admiration pour les belles choses. Et toi Kate, tu es une très belle jeune femme. Alors cette robe est faite pour toi.

Dorea s'empourpra face au sous-entendu à peine subjectif du brun, trop gênée pour le remercier.

- Allez, enfile-là avant que notre chauffeur de maître n'arrive.

- Tu as commandé une voiture avec un chauffeur de maitre ? Mais nous n'y allons pas à moto ? dit Dorea en se saisissant du cintre et de la pochette.

- Tu es folle ! On ne va pas au McDo, mais à l'Americano. Un hôtel-restaurant très chic. Je ne me vois pas donner les clés de ma moto au voiturier en arrivant là-bas.

- Entendu, j'ai compris, pouffa de rire Dorea devant la mine outrée du brun. J'en ai pour une petite dizaine de minutes.

Sur ces dernières paroles, Dorea rentra dans la maison, tandis que le Mexicain s'installa sur le banc-balançoire du porche.

Ce furent quelques minutes plus tard, que la jeune sorcière fut prise d'un énorme doute en contemplant son reflet dans le miroir de sa chambre. La robe était peut-être élégante mais également très osée.

Le décolleté était plongeant allant jusqu'à son plexus, sa poitrine était recouverte uniquement du fin tissu de soie.

La fente qui longeait ses jambes remontant jusqu'en haut de ses cuisses, et découpée de part et d'autre de la robe.

Sur son cou, un collier en étoile et en argent, finissait la tenue. Elle avait également appliqué une légère touche de maquillage se résumant à un mascara et un baume à lèvre rouge. Ce qui donnait un côté éclatant à son accoutrement.

Elle se mordit la lèvre, se demandant si finalement elle n'allait pas refuser ce rendez-vous galant ?

L'ancienne serpentard entendit une voiture se garer au-devant de la maisonnette et c'est sans plus réfléchir, qu'elle saisit sa pochette de soie bleue, posée sur la commode, et sortit de la chambre pour rejoindre Miguel qui l'attendait sous le porche.

Elle le découvrit alors au milieu de son salon, faisant des allers et venues et marmonnant des paroles incompréhensibles.

- Tout va bien, Miguel ? s'enquit Dorea.

Ce dernier se retourna et la détailla lentement de bas en haut. Dorea n'arrivait pas à comprendre l'étincelle sournoise qui s'était installée dans son regard à l'instant même où il l'avait vu. Cela en était presque embarrassant…

- Puta de mierda ! souffla-t-il en espagnol. Je ne vais pas pouvoir me retenir longtemps.

Putain de merde !

- Je te demande pardon ? répliqua Dorea sur la défensive.

L'air embarrassée, il s'éclaircit la gorge et reprit d'un ton plus séant :

- Je veux dire que… que la voiture est là, si tu es prête.

- Oui, je suis prête, mais calme tes ardeurs, veux-tu ? prévint-elle d'un œil suspicieux.

- Je suis désolé, Kate, s'excusa Miguel en levant les mains en signe de reddition.

Ladite Kate s'empara des clés de la maison et sortit au-dehors suivie de Miguel.

Une vingtaine de minutes plus tard, le chauffeur de maître avança la voiture jusqu'à l'entrée du restaurant-hôtel. Un groom vint leur ouvrir la porte. Dorea se glissa sur le tapis rouge qui ornait les grands escaliers menant au hall bondé de monde, tandis que Miguel adressait des instructions au chauffeur en espagnol.

Dorea nota que la plupart des clients étaient des hommes, pour certains vêtus de costumes de grands couturiers européens, d'autres d'un simple jean, t-shirt et veste, dont le browning était camouflé dessous. Il y avait également deux grands hommes robustes qui gardaient l'entrée avec des pistolets-mitrailleurs. Et ce qui l'interpella, ce furent les allers et venues de ce qui représentait apparemment les hommes de main d'un des cartels du pays.

- Miguel, on devrait aller autre part, ça n'a pas l'air sûr ici, dit Dorea en se tournant vers le brun qui était à présent à ses côtés.

- Ho, soupira-t-il, ne t'inquiète pas. Nous sommes des gens du petit peuple, donc inintéressant pour eux.

- Mais tu crois que l'on est en sûreté ici ?

- Je ne t'amènerai jamais dans un endroit qui craint Kate. Et au demeurant, c'est le lieu le mieux gardé de Guadalajara.

- Si tu le dis, répondit Dorea en hochant la tête.

- Mira ese maldito auto ¡ dit Miguel en fixant un point précis par-dessus l'épaule de Dorea.

Regarde cette putain de voiture !

Dorea vira la tête et imita le regard de son ami pour voir une auto grise, garé non loin de l'entrée.

- Ça a l'air d'être une Anglaise, remarqua Dorea en voyant le volant en acajou sur la droite.

- Ça l'est effectivement. C'est une Aston Martin, une DB5 plus exactement. C'est une GT sport. Enfin Kate, tu ne reconnais pas la voiture légendaire des films de James Bond ?! fit le Mexicain d'un ton outré.

- Des quoi ? questionna Dorea en grignant le front.

- James Bond… l'agent secret, expliqua Miguel qui perdait patience. 007 !? Sean Connery !?

Dorea haussa un sourcil, se disant que ça devait être encore un « truc » de moldu et Miguel lui prit la main, tout en marmonnant qu'elle était désespérante et l'emmena à sa suite vers l'entrée du restaurant qui se trouvait en haut des escaliers.

La jeune femme éprouva brusquement un réel malaise en discernant les vues intéressés, appréciatrices, ou même lubrique de la gent masculine qui se trouvait sur leur chemin.

- Miguel, je … je ne me sens pas à l'aise. Sincèrement, on devrait faire demi-tour.

Le jeune homme se tourna vers elle, puis parcourut du regard l'extérieur où se trouvait les hommes positionnés, prêts à faire feu au moindre signe de sa part.

- C'est parce que tu es extrêmement désirable dans cette robe. Mais ne t'inquiète pas, je te protège.

Il l'enlaça par la taille, la collant contre lui avec une rudesse que l'ancienne serpentard ne lui connaissait pas. Ils pénétrèrent enfin le hall et furent accueillis en grande pompe par un homme moustachu vêtue d'un ensemble veste et pantalon crème, le ventre proéminent tirant sur sa chemise blanche.

- ¡Miguel Juajez! ¿Pero qué honor me haces aquí, hijo?

Miguel Jujez ¡ Mais quel honeur me fais-tu ici, fils ?

L'homme enlaça Miguel - qui lâcha la taille de Dorea - dans une étreinte respirant la virilité. Ils se détachèrent et tous deux se tournèrent vers la jeune Artwood.

- Esta es Kate Harrington. Una inglesa procedente de las afueras de Londres, presenta le brun.

Voici Kate Harringhton. Une anglaise qui nous vient tout droit des environs de Londres.

- ¿Pero qué belleza me traes aquí Miguel? Souffla l'homme en détaillant Dorea avec impudicité.

Mais quelle beauté m'apportes-tu là, Miguel ?

- ¿Encantado de conocerle, signor ...? questionna Dorea froidement.

Enchanté de vous rencontrer Monsieur… ?

Il saisit la main de la jeune femme et se pencha pour l'embrasser avec déférence. Dorea éprouva un frisson d'écœurement. Cet homme ne lui disait rien qui vaille et ses doutes se confirmèrent lorsqu'il se présenta à son tour.

- Guzman. Joaquin Guzman. Mais tout le monde m'appelle « El Chapo », signora Kate, annonça-t-il en roulant ostensiblement les « r ».

Dorea fut saisi de malaise et extirpa aussitôt sa main puis lança une œillade furieuse à Miguel, qui venait tout juste de la présenter à l'un des plus grands mafieux de ce pays. Elle contracta la mâchoire sous le coup de la colère tandis que Miguel et Monsieur Guzman échangèrent un regard entendu.

- Je vais vous accompagner à votre table.

La jeune femme tentait de faire bonne figure. Elle ne voulait surtout pas attirer l'attention sur eux, mais dès qu'elle en aurait fini avec cette soirée qui virait presque au cauchemar, elle se promit d'en adresser deux mots à Miguel.