Chapitre 24 : La prophétie
Salutations ! Nous sommes vendredi et aujourd'hui c'est le jour de la prophétie ! ;) Le chapitre 24, ce qui signifie qu'après celui-ci, il n'en reste plus que deux avant la fin de notre réécriture. C'est triste et c'est joyeux aussi. Triste car cela signifie que dans deux jours on ne se verra plus tous les jours comme on l'a fait ce mois-ci mais c'est heureux également car cela signifie que vous allez découvrir de nouveaux chapitres ! Encore demain et après-demain et il faudra attendre quelques jours pour le chapitre 27. Je tiens à rappeler - pour les lecteurs n'ayant pas lu la réécriture mais qui veulent reprendre DISSEMBLANCE là où nous nous étions arrêtés - que la lecture du chapitre 26 est essentielle car une partie de celui-ci est inédite. En attendant je vous laisse avec ce chapitre qui est émotionnellement fort et qui rapproche inexorablement Harry de Tom. Bonne lecture !
La salle commune des Oiseaux-tonnerre était plongée dans la pénombre, éclairée seulement par les deux cheminées aux braises mourantes. Seul le silence était audible à cette heure tardive dans Ilvermorny. Un peu partout, il régnait, pesant, rassurant, comme si dans ces lieux agités chaque journée, la nuit avait le pouvoir de tout arrêter.
Mais en ces lieux où tout semblait s'être stoppé, deux dissidents à l'ordre du temps continuaient à garder les yeux ouverts, rivés dans la direction de l'autre.
Harry faisait les cent pas dans la salle commune vide d'autres signes de vie. Il tournait sans arrêt, comme un lion en cage, levant les yeux au plafond et lançant des regards tantôt furieux tantôt désespérés à la seule porte de l'endroit, comme si elle pouvait lui apporter une quelconque aide dans sa situation.
Il était conscient qu'il ne pouvait rien faire, mais subir en silence n'avait jamais été son fort. L'envie de courir et de rejoindre le responsable de ses tourments pour arrêter ceux-ci lui avait effleuré l'esprit des centaines de fois. Mais il ne pouvait pas le faire. Il avait promis, Severus Rogue tenait à être le responsable de Tom Jedusor. Qu'il essaie.
Et en attendant, le brun s'était résigné ; il allait devoir souffrir du lien sans pouvoir le refermer.
Serrant les poings alors qu'un profond sentiment de rage le percutait de plein fouet il grinça, figé comme une sentinelle devant la porte.
— Pourquoi est-ce qu'il ne se referme pas !
Ce lien, ce pont entre les émotions de Tom et les siennes, ne s'était jamais clos. Depuis qu'il s'était brutalement ouvert le lien entre lui et Tom était resté ainsi, béant. Le laissant ressentir chacune des émotions du mage noir, sans jamais s'apaiser, sans jamais s'arrêter.
Elles lui semblaient exacerbées. Elles n'étaient pas à lui et pourtant, elles l'influençaient et le faisaient souffrir. Il luttait contre elles depuis plusieurs heures maintenant et il se sentait à bout de souffle.
Dans un soupir plein de fatigue, le lion posa sa main puis son front contre la porte définitivement close de la tour. Il ne pouvait pas l'ouvrir.
Depuis que le couvre-feu était tombé, les mots de passe n'avaient plus aucune utilité, il aurait pu la détruire, la réduire en lambeaux et partir, mais il ne voulait pas le faire.
Se laisser aller et partir, abandonner et rompre la promesse qu'il avait faite à Rogue, était hors de question.
Rogue pensait, à sa manière, l'aider en éloignant Tom de lui et... même si ce n'était pas le cas, Harry pensait que laisser Tom avec Rogue ne serait-ce que quelques jours suffirait pour que son professeur arrête de le voir de la même manière qu'il voyait Voldemort.
Même si Tom souffrait et qu'il ressentait chacune de ses émotions, même s'il souhaitait plus que tout que cela s'arrête, il ne pouvait pas tout fracasser et aller rejoindre Jedusor. Ce n'était pas une solution. Tom finirait forcément par s'apaiser, jamais Rogue ne le blesserait physiquement, sa douleur était émotionnelle.
Alors que les sentiments du jeune Seigneur des Ténèbres passaient avec brutalité du désespoir à l'affection avant de revenir sur une certaine sérénité et de rebasculer sur de la colère, Harry ferma les yeux douloureusement et se crispa en prononçant d'une voix épuisée.
— Je t'en prie, arrête, laisse-moi tranquille...
À cela sa magie, qu'il tentait de retenir, s'agita autour de lui, alourdissant l'air. Cela ne fit qu'augmenter plus encore la tension du Survivant qui resta complètement immobile quelques secondes avant de reprendre son souffle.
Jamais il n'allait réussir à tenir. Une nuit, un jour, deux ; combien de temps cela allait durer ? L'éternité...
À chaque fois que le lien entre Tom et lui s'était éteint, ils avaient été en contact physique. Harry en avait conclu que cela devait être la seule manière pour que cela prenne fin.
Tant que Tom irait mal, qu'il serait perturbé, émotionnellement instable, ils souffriraient tous les deux et cela durerait jusqu'à qu'il le rejoigne, Jedusor était incapable de se calmer seul.
Plus le temps passait et pire cela lui semblait, pourtant Harry percevait parfois des sentiments positifs chassant les négatifs mais ils lui semblaient tout autant brutaux, tout autant incontrôlables. Qu'ils soient agréables ou non, les sentiments de Tom étaient si violents qu'ils l'empêchaient de penser à autre chose, de les ignorer et d'essayer de les mettre de côté pour agir normalement.
Il en était incapable. C'était comme entendre des hurlements en se bouchant les oreilles.
Il avait testé l'occlumancie et cela avait échoué, il ne pouvait pas empêcher le lien de l'atteindre. La seule solution était d'essayer de rassurer Tom, le stabiliser pour qu'il aille mieux et que le lien entre-eux se referme. Mais Harry n'avait trouvé aucun moyen de le faire à distance.
Enfin... si, il pensait avoir trouvé une possibilité mais il se refusait à l'expérimenter. Remonter le lien jusqu'à atteindre Tom de manière à influencer ses sentiments. Il l'avait déjà fait lorsque Tom était face au directeur. Il s'était contenté de lui transmettre sa volonté et cela avait fonctionné mais... il ne le refera pas.
C'était ses sentiments, ses ressentis, il n'avait pas le droit de les lui retirer de cette manière-là comme s'il n'était qu'une sorte de chose qu'il pouvait contrôler. Il se sentait déjà assez mal en pensant qu'à chaque fois que le lien entre-eux s'ouvrait, sans que Tom en ait conscience, il violait son intimité. Lui se serait senti très mal à l'idée que quelqu'un puisse avoir accès à ses émotions et Harry se disait que Tom ressentirait la même chose.
Il préférait encore subir les émotions de Jedusor, quitte à rester éveillé toute la nuit en attendant que cela passe plutôt que de les lui retirer sans pour autant l'aider. Ce serait inhumain d'inhiber des sentiments qui n'étaient pas les siens par égoïsme.
Expirant lentement, Harry profita d'un instant où les ressentis du Seigneur des Ténèbres étaient plus calmes pour se ressaisir. Impossible, une demi-minute plus tard, cela reprit avec la même intensité et il eut la terrible envie de se fracasser le crâne contre la porte en face de lui.
Il allait devoir trouver une solution... il fallait qu'il trouve une solution, n'importe quoi pour le contacter à distance. Essayer de l'apaiser de loin.
Sans le toucher... sans pouvoir lui parler... cela semblait impossible.
Il n'en eut pas besoin. Alors qu'il s'était remis à tourner comme un oiseau pris au piège, il l'avait senti, sa magie, sa présence. Elle était là, si proche... Tom n'était pas dans son dortoir, il n'était pas non plus avec Rogue qui était censé le surveiller, il était dehors et était arrivé devant la tour des Oiseaux-tonnerre.
Ses sens avaient été complètement paralysés par les émotions du mage noir et il n'avait même pas réussi à percevoir sa présence se rapprocher, mais maintenant c'était le cas. Il le sentait s'approcher de la porte, et en écoutant attentivement, il pouvait même entendre ses pas retentir contre le sol un peu au-delà de sa position.
Réagissant sans même réfléchir, il courut vers la porte, puis il se rappela qu'il ne pouvait pas l'ouvrir sans la détruire, un simple Alohomora ne suffirait pas...
Résigné à l'idée que la venue de Tom ne changeait rien à la situation tant qu'il y aurait cette porte entre-eux, il se sentit de nouveau mal, une main posée sur la porte, le bras tendu comme si en poussant un peu, il pourrait l'ouvrir. Il entendit tout à coup un sifflement bas et, à travers le bois, il sentit une main se poser contre la sienne.
§ Tu es derrière cette porte. Est-ce que tu vas bien ? §
Harry soupira profondément alors qu'enfin le lien diminuait en intensité. Il ignorait si c'était le lien qui refluait ou si c'était les émotions de Jedusor qui se stabilisaient. Seul un sentiment de paix et d'affection réussissait à entrer en contact avec lui. Un sentiment bien plus doux que tous ceux qui l'avaient précédé.
Se sentant tout à coup un peu plus maître de lui-même, il siffla en réponse.
§ Ce serait plutôt à moi de te poser cette question... que s'est-il passé avec Rogue ? §
La réponse de Tom mit un peu de temps à venir et Harry ressentit sa crainte et ses inquiétudes à ce sujet.
§ Comment sais-tu qu'il s'est passé quelque chose ? §
Harry grimaça... il hésita un petit moment puis il décida que ce serait mieux comme ça. Tom devait le savoir cela améliorerait peut-être les choses, s'il en était conscient cela ne serait peut-être plus aussi violent. Il fallait qu'il lui explique pour le lien.
Se rapprochant de la porte de manière à pouvoir siffler à voix basse, Harry souffla.
§ Il faut que je te parle de quelque chose. §
Tom lui répondit immédiatement et Harry le sentit se rapprocher encore.
§ Moi aussi, tu peux m'ouvrir ? §
Le lion siffla avec épuisement, se doutant que Tom n'apprécierait pas sa réponse.
§ Je ne peux pas, les mots de passe ne fonctionnent pas passé le couvre-feu et elle est verrouillée de manière à ce qu'un sortilège ne puisse pas la déverrouiller. §
§ Je veux te voir. §
Cela avait sonné avec force et en même temps que ces mots, des sentiments purement possessifs et contrariés le percutèrent, fermant les yeux du brun sur le coup. Harry essayait de ne pas y penser, de ne pas réfléchir à ce qu'impliquaient parfois les sentiments que Jedusor lui envoyait.
Juste après cela le mage noir lui dit en anglais.
— Éloigne-toi de la porte, je vais l'ouvrir.
Comprenant que Tom signifiait qu'il allait la forcer, le Gryffondor voulut lui crier de ne pas le faire mais il n'en eut pas le temps. La porte sauta de ses gonds et il eut tout juste un instant pour s'éloigner avant qu'elle ne frappe le sol, en silence.
Tom marcha dessus comme si de rien n'était, se remit face à elle et la replaça là où elle était, d'un léger coup de baguette, il avait lancé un sortilège d'insonorisation pour étouffer chaque bruit que pourrait faire la porte.
Harry le regarda faire un peu surpris, se rendant compte qu'il n'avait même pas pensé à cette solution. Il était vraiment épuisé, cette journée l'avait complètement abattu. Il s'était passé tant de choses...
Lorsqu'il eut fini Tom se retourna vers lui et lui adressa un sourire, ses yeux virant immédiatement au rouge alors qu'il semblait le regarder de haut en bas. Il perdit néanmoins ce sourire pour une expression soucieuse lorsqu'il lui demanda.
— Je pensais que tu dormirais ou, au moins, que tu serais dans ton dortoir. Il s'est passé quelque chose ?
Harry vit le regard du mage noir buter sur sa lèvre écorchée et des images de ce matin lui revinrent en mémoire, il se crispa un peu, mal à l'aise et gêné. Puis il se rappela ce qu'il souhaitait dire à Jedusor quand un mélange confus de désir et culpabilité le frappa, ces émotions ne lui appartenaient pas...
Il prit un air grave, sans vraiment y faire attention.
— Il faut que je t'avoue quelque chose...
Il détourna les yeux, ne souhaitant pas particulièrement voir la réaction de Jedusor lorsqu'il lui dirait et, comprenant qu'il avait toute l'attention du jeune Seigneur des Ténèbres à son silence, il continua.
— Parfois... lorsque tu te sens mal ou qu'il t'arrive quelque chose de fort... que ce soit positif ou négatif... je... je suis capable de le sentir. Cela fait comme un pont entre ce que tu ressens et ce que je ressens et je peux percevoir tes émotions...
Retournant son regard vers le mage noir, il inspira et continua.
— C'est pour ça que je suis toujours debout, il y a quelques heures cela a recommencé, j'ai senti que tu allais mal et depuis...
Dans un mouvement involontaire qu'il se retenait de faire depuis un long moment, Harry agrippa sa robe à l'endroit de son cœur.
— Et depuis cela ne s'arrête pas. Cela fait des heures que tu me transmets tes émotions...
Il eut à peine le temps de finir sa phrase que ce fut bien pire que les fois précédentes. Le lien s'ouvrit, lui paraissant encore plus étouffant qu'auparavant ; il eut cette impression de suffoquer, de se noyer, et ses sens furent complètement submergés par des vagues déferlantes de sentiments contradictoires. Des sentiments qu'il ne prit même pas la peine d'essayer d'identifier, il n'était plus assez lucide pour le faire.
Il ne pouvait rien faire, ni se défendre ni empêcher cela, perdant la bataille contre ses sens, il vacilla.
Lorsque Tom vit Harry perdre pied avec la réalité, vacillant un peu avant de s'écrouler, il franchit immédiatement la distance entre-eux pour le retenir. Inquiet et paradoxalement apaisé de le tenir enfin dans ses bras, il soupira, resserrant sa prise inutilement autour de lui.
Il eut désespérément envie de vérifier que son cœur battait encore, il savait que c'était le cas puisqu'il sentait son souffle et était capable de voir sa poitrine se soulever et s'abaisser, mais cela faisait partie des choses qu'il ne pouvait pas rationnellement maîtriser.
Le retenant contre lui, il posa une main contre son cœur et lorsqu'il le sentit pulser sous ses doigts, le sien arrêta de battre de manière déséquilibrée en proie à une panique irraisonnée.
Encore une fois, il savait que c'était entièrement de sa faute... il ignorait qu'il le faisait mais il savait que c'était une possibilité. Deux âmes-sœurs pouvaient se transmettre des émotions à distance, il le savait mais il ne pensait pas que cela arriverait sans même qu'il ne le veuille. Pourquoi Harry ne lui en avait-il jamais parlé ?
Est-ce que cela arrivait fréquemment ? Est-ce que Potter pouvait réellement éprouver chaque chose que lui ressentait ?
Si c'était le cas... il ignorait s'il était heureux de ce fait ou anxieux à cette idée. Qu'Harry ait pu ressentir les sentiments d'amour qu'il éprouvait pour lui le remplissait de joie mais... aussi de peur...
Et si c'était le cas cela signifiait également que Harry avait enduré tous ses autres sentiments, ceux possessifs envers lui, ceux de haine envers les autres, sa colère, sa peine, tout...
Finalement, il prit la décision que cela ne le dérangeait pas tant que cela. Si c'était Harry, alors ça allait. Harry avait le droit d'accéder à tout ce qu'il le concernait.
Tom savait que Potter ne le jugerait jamais sur une émotion ou un sentiment qu'il ne pouvait pas réellement maîtriser. Il s'en voulait seulement de ne pas s'être rendu compte du problème plus tôt. Il connaissait ses ressentis et il savait qu'ils étaient... brutaux. Si Harry devait endurer cela en plus de ses propres émotions, il en avait forcément souffert.
Pourquoi Potter se contentait de souffrir en silence jusqu'à qu'il ne puisse plus tenir debout ? Il aurait pu lui en parler, il aurait dû lui en parler...
Il ne lui faisait pas confiance... ni à lui ni au reste du monde. Harry se pensait toujours seul même lorsqu'il était entouré, même lorsqu'ils étaient ensemble.
Si Tom avait eu les moldus lui ayant inculqué une telle manière de vivre devant lui, il les aurait massacrés.
Les images d'Harry lorsqu'il n'était qu'un enfant, recroquevillé sur lui-même, alors que son énorme oncle brandissait cette barre de métal brûlante pour le battre avec, le rendirent aveugle de rage contenue. Seule la présence d'Harry dans ses bras lui permit de se reconnecter à la réalité.
Alors qu'il détaillait le visage de son âme-sœur endormie, il se sentit d'autant plus coupable en voyant sa blessure à la lèvre...
Comment pouvait-il souhaiter que Potter lui fasse confiance après qu'il eut profité de lui de cette manière-là ?
Maintenant qu'il avait obtenu la prophétie de la bouche de Rogue, il fallait qu'il avoue à Potter qu'il la connaissait et il ignorait comment celui-ci réagirait à cela. Il lui avait déjà fait tant de mal, volontairement ou non...
Mû par une soudaine envie de voir la cicatrice qui avait fait de son étoile un Obscurial, Tom écarta les pans de la robe de celui-ci et souleva lentement sa chemise, les yeux rivés sur sa hanche, il la sentit immédiatement sous ses doigts... cette cicatrice marquée au fer blanc sur sa peau.
La colère du jeune Seigneur des Ténèbres s'évanouit lorsque Potter fronça les sourcils dans son sommeil. Il lui transmettait encore ses émotions. Tom essaya de se calmer, caressant du bout des doigts cette marque qu'il exécrait sur le corps de l'être aimé.
Une bouffée de désir pour le Survivant inconscient le submergea mais il se retint de faire un geste qu'il savait qu'il regretterait. Comme l'embrasser dans son sommeil.
L'avoir dans ses bras lui suffisait, il en profitait déjà bien assez. Il retira sa main à regret et se contenta d'étreindre son âme sœur sans arrière-pensée.
Après un instant supplémentaire, il sentit la magie d'Harry s'agiter autour d'eux, signe évident que celui-ci reprenait conscience.
En revenant à lui, Harry se rendit immédiatement compte qu'il s'était écroulé et qu'il était actuellement dans les bras de Tom, sa douleur s'apaisa en même temps que le lien diminuait en intensité. À demi conscient, il poussa un soupir douloureux alors que les bras du mage noir l'entouraient de manière possessive.
Il entendit le jeune Seigneur des Ténèbres lui souffler avec inquiétude.
§ Je suis désolé... j'aurais dû deviner que quelque chose comme ça arriverait, je suis celui de nous deux qui connaît la nature de notre lien, je savais que la transmission d'émotions était possible entre nous mais j'ignorais que je le faisais... Je suis désolé Harry. §
Reprenant peu à peu possession de ses sens, le lion essaya de bouger un peu. Peine perdue ; Tom le tenait bien trop fermement contre lui pour qu'avec sa force actuelle et sans utiliser sa magie, il arrive à se dégager. Il sentit les mains de Jedusor agripper sa robe, son bras gauche dans son dos et le droit maintenant sa taille contre la sienne.
Harry sentait les émotions de Tom se calmer et comme celles-ci, il avait l'impression que ses nerfs s'apaisaient. Après un instant, il sentit quelque chose glisser contre son cou et entendit un tout petit sifflement qu'il reconnut immédiatement.
§ Harry ? §
Ce petit sifflement interrogatif réussit à lui faire recouvrir l'intégralité de ses sens. Bougeant légèrement en ouvrant les yeux, le Gryffondor vit qu'il était contre l'épaule du mage noir et qu'entre leurs deux cous un jeune serpent le regardait avec curiosité et adoration.
Souriant sans pouvoir s'en empêcher en voyant Diligitis ouvrir grand les yeux en imitant sa surprise, il siffla doucement.
§ Bonjour toi. Alors comme ça on part en excursion nocturne ? §
Diligitis ne semblait pas avoir bien compris ce qu'il lui avait dit mais il siffla avec joie.
§ Harry ! §
Et il vient se blottir contre son cou. Harry entendit alors Tom siffler.
§ Je lui avais promis de l'emmener te voir. Tu lui manques beaucoup. §
Harry se redressa un peu, portant une main à son cou pour caresser les écailles du petit serpent tout en sifflant avec lenteur.
§ Lui aussi m'avait manqué, je suis heureux de voir qu'il va bien. §
Puis il releva la tête qu'il avait abaissé vers le petit serpent et se retrouva à quelques centimètres seulement du visage de Tom. Les yeux de celui-ci devinrent immédiatement carmin, et son regard se fixa un moment sur ses yeux avant de descendre sur ses lèvres et il les ferma avec force en expirant lentement, comme s'il luttait contre quelque chose.
Harry comprit très rapidement contre quoi Tom essayait de lutter et il voulut s'éloigner sur-le-champ mais le mage noir ne desserra absolument pas son étreinte. Au lieu de cela il rouvrit les yeux, toujours rougeoyant mais d'une teinte moins forte que précédemment et lui demanda en détaillant ses traits.
— Est-ce que tu te sens mieux ?
Harry confirma d'un signe de tête puis ajouta.
— Il s'est refermé. Le lien entre toi et moi s'apaise lorsque nous sommes en contact.
Jedusor baissa les yeux et lui dit.
— Je sais. C'est de ma faute. Je n'avais pas conscience de le faire mais je savais que c'était une possibilité.
Il releva les yeux vers lui et lui demanda.
— Pourquoi ne pas m'en avoir parlé avant ? On aurait pu essayer de trouver une solution, je sais comment je ressens les choses et je sais que ressentir cela en plus de tes propres sentiments a dû être insupportable.
Potter profita de ce qu'il desserre sa prise autour de lui pour se redresser complètement. Son visage était marqué par la fatigue et Tom ne se sentit pas capable de le relâcher, craignant qu'il ne s'écroule une seconde fois.
Harry soupira en lui jetant un regard bref puis il lui dit la mâchoire un peu contractée.
— Au début je ne savais pas vraiment ce qui provoquait cela. Je pensais que ça passerait. Ce n'était jamais vraiment long, on était généralement ensemble quand cela arrivait et cela finissait toujours par disparaître. Je me suis dit que je t'en parlerais si ça devenait plus récurrent et je n'ai jamais eu l'occasion de le faire. Je me suis dit que ça ne te plairait pas de l'apprendre et...
§ Tu t'es contenté de souffrir en silence. §
Potter le regarda avec incompréhension puis il grinça en fourchelang.
§ Je vais bien. §
Tom s'était douté que Potter oserait lui dire quelque chose comme ça.
Jedusor était certain que le lion serait capable de lui dire qu'il allait bien dans n'importe quelle situation. Juste par automatisme. C'est ce que le reste du monde attendait de lui ; qu'il soit capable de surmonter n'importe quelle difficulté pour vaincre.
§ Tu n'as pas besoin de faire ça, pas avec moi. Je veux seulement t'aider si tu ne me dis jamais ce qui ne va pas, je ne peux rien faire. §
Potter fronça davantage les sourcils et Tom comprit que le Gryffondor ignorait complètement pourquoi quelqu'un voudrait prendre la peine de s'inquiéter pour ce qu'il ressentait. Il le faisait pour les autres tout en étant persuadé que c'était différent pour lui, qu'il n'en avait pas le droit.
Voilà ce que lui avait fait sa famille moldue et le reste du monde sorcier. Ce n'était pas visible au premier regard. Ce n'était pas une cicatrice sur son corps, ce n'était pas quelque chose qu'on pouvait remarquer en croisant son chemin. C'était bien pire aux yeux du mage noir, ils lui avaient retiré le droit à l'humanité ; ne pas montrer de faiblesse, ne pas être différent, ne pas haïr, lui interdire de mourir.
Lui avait fait le choix de quitter son humanité pour survivre là où elle semblait le détruire. Potter n'avait pas eu ce choix, on lui avait interdit de l'être. Être humain, avoir autant de défauts que de qualités, pouvoir faire des erreurs et continuer d'avancer sans être condamné pour ça. Ils lui avaient pris jusqu'au droit de dire qu'il avait besoin de repos. Il n'avait pas le droit de se plaindre.
Et le monde entier trouvait cela normal parce qu'il était Harry Potter, parce que c'était ainsi qu'ils voyaient leur héros. C'était un miracle qu'il soit resté si bienveillant.
Ils avaient réussi à lui retirer tout ce qu'ils considéraient comme mauvais. Harry Potter était le résultat d'une éducation désastreuse et si Tom devait donner un nom au responsable de cette ignominie, Albus Perceval Wulfric Brian Dumbledore était tout désigné, même si celui-ci n'était peut-être pas réellement conscient du mal qu'il lui avait fait.
Pour arrêter la guerre qu'il n'arrivait pas endiguer seul, il lui avait fallu une aide, la prophétie l'avait guidé vers un enfant et il avait pris la décision de faire de celui-ci la solution. Celle qui arrêterait les guerres et détruirait le mal.
S'en était risible. Écœurant. Oser faire ça à sa réincarnation...
Cela rappela brutalement à Tom la raison pour laquelle il était venu rejoindre Harry. La prophétie... il l'avait obtenue de la bouche de Severus Rogue après lui avoir avoué que lui et Harry étaient des âmes-sœurs, des Obscurials.
Il avait dû le demander plusieurs fois, l'ancien espion ne voulait pas faire deux fois la même erreur mais celui-ci avait finalement compris ; s'ils voulaient sauver Harry, ils allaient devoir partager leurs informations.
C'était ainsi qu'il l'avait obtenu. La prophétie, son contenu ne l'étonnait pas, il s'attendait à découvrir quelque chose comme ça et même si sur le coup il s'était senti mal, cela avait rapidement passé. Elle ne changeait rien à leur situation désespérée, elle ne faisait que confirmer les conséquences de leur lien et de leur nature à ses yeux.
Il comprenait pourquoi Voldemort avait paniqué en l'entendant la première fois. Incomplète, elle paraissait lui ordonner de tuer l'Élu pour pouvoir continuer de vivre. Mais avec les connaissances qu'il avait aujourd'hui, elle ne paraissait qu'être qu'un élément de plus dans l'équation.
Relâchant son âme-sœur sans pour autant trop s'éloigner de lui, regardant avec une certaine tendresse son serpent câliner le cou du Survivant, il inspira et expira profondément avant de prononcer clairement en fourchelang ses yeux captant immédiatement ceux de sa moitié.
§ Celui qui a le pouvoir de vaincre le Seigneur des ténèbres approche... il naîtra de ceux qui l'ont par trois fois défié, il sera né lorsque mourra le septième mois... et le Seigneur des Ténèbres le marquera comme son égal mais il aura un pouvoir que le Seigneur des Ténèbres ignore... et l'un devra mourir de la main de l'autre car aucun d'eux ne peut vivre tant que l'autre survit... Celui qui détient le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres sera né lorsque mourra le septième mois... §
Harry sentit son corps s'immobiliser. Le sang dans ses veines se glaça et il lui sembla impossible de respirer correctement.
Au milieu de la course effrénée de ses pensées, il songea que c'était la première fois qu'il l'entendait en fourchelang. Elle lui paraissait d'autant plus menaçante dans cette langue si particulière.
La prophétie se répéta plusieurs fois dans son esprit, liée à des souvenirs sinistres. La mort de son parrain. Celle de ses parents. Le hurlement de sa mère alors qu'elle s'écroulait, terrassée par le sort mortel.
Lui si petit, si insignifiant face à la guerre, celle qui ravageait Poudlard. Les combats s'enchaînaient devant ses yeux et il continuait d'avancer. Sans lui, l'espoir mourrait et c'était tout ce qui leur restait ; de l'espoir. La guerre, l'odeur du sang, les hurlements des loups-garous, le sifflement des malédictions à ses oreilles, la destruction des murs de sa seule véritable maison. Ses amis tombant au sol, blessés ou... morts.
Lui et sa présence. Si sombre. Si imposante dans ce carnage, son sourire paradoxal à sa rage de le voir toujours en vie, de les voir de nouveau face-à-face, sa fierté de posséder entre ses mains la baguette de Sureau.
Et plus rien, il l'avait tué et il s'écroulait en lui adressant quelques mots avant de s'éteindre. Le ciel s'était éclairci, il avait été ébloui un instant et tout à coup, le bruit, des hurlements de joie, des cris de délivrance. Des bras le serrant, l'étouffant, ignorant les cadavres autour d'eux, ils le félicitaient et à ses pieds. Le corps de Voldemort se désagrégeait, partant en poussières. Pourtant son visage montrait une certaine sérénité, comme si, au dernier moment, il s'était résigné, comme s'il savait.
Après tout n'était-ce pas seulement leurs destinées ?
Harry se souvient d'avoir eu un frisson et dans la cohue, il avait levé les yeux vers les cieux éblouissants et elle s'était rappelée à lui. La prophétie.
Il l'avait maudite. Pour s'être réalisée, pour l'avoir forcé à commettre cet acte qu'il regretterait chaque jour de son existence. Il l'avait fait. Lui, si petit, si insignifiant face à une armée tout entière, face à une guerre. Il avait gagné.
Était-ce réellement une victoire que de voir le désespoir envahir les yeux du monstre ayant abattu ses parents ?
Harry ne souhaitait pas se venger, juste vivre, et il était écoeuré par le fait qu'il ait dû tuer pour ça. Il n'avait pas ressenti de joie ni de fierté à le voir mourir, seulement du soulagement et de la pitié. En ce jour où tous criaient son nom en répandant la nouvelle de la mort du Seigneur des Ténèbres, Harry ne s'était jamais senti aussi proche de Lord Voldemort.
Tous les deux condamnés à suivre une destinée toute tracée où l'un devait abattre l'autre pour pouvoir continuer d'arpenter ce monde. Il avait haï ce sentiment. Celui d'avoir simplement été un jouet entre les mains de quelque chose de plus grand. Comme si sa naissance n'était qu'une aberration qu'il venait de rendre un peu plus légitime en retirant la vie à un autre. Un autre qui aurait pu être lui.
L'Élu avait cette impression tenace à chacune de leurs rencontres que les rôles auraient pu être inversés.
Puis, il revint à la réalité. Clignant des yeux comme pour retrouver le monde qui l'entourait. Il sentit l'air saturé par sa magie et respira profondément, la restreignant de nouveau, lentement.
Il fit un ou deux pas en arrière. Tom connaissait la prophétie. Jedusor avait obtenu la prophétie de Rogue, comme il le craignait...
Harry se sentit tout à coup dépassé. Ses épaules s'affaissèrent. Il avait déjà tout donné au nom de cette prophétie. Elle lui avait déjà pris chaque chose qu'il avait aimé dans sa vie. Il ne la craignait plus. Elle faisait partie de son existence, comme une chaîne autour de sa gorge, l'empêchant de respirer trop profondément, de s'éloigner trop loin, étouffant ses espoirs et sa liberté.
Diligitis siffla un baragouinement qu'Harry ne comprit pas en descendant de son épaule, allant apparemment faire de même auprès de son maître.
Harry l'ignora et se retourna, tournant le dos au mage noir. Il se sentait fébrile et faible. Sa raison essayait de lui crier que sa réaction était disproportionnée et que Tom n'allait pas lui faire de mal seulement parce qu'il avait connaissance du contenu de la prophétie.
Mais ses souvenirs les plus durs se rappelaient à lui par le biais de cette prédiction et il se sentait comme si son équilibre fragile s'effritait pour le laisser sans défense et son cœur lui faisait mal, peut-être parce qu'il se disait que tant que Tom n'en avait pas conscience ; la prophétie avait moins de chances d'influencer leurs existences.
Si Jedusor ne la connaissait pas, peut-être qu'elle ne le forcerait pas à se battre contre lui. Peut-être qu'il n'aurait plus jamais à voir le désespoir envahir ses yeux alors que son corps s'écroulait. Peut-être n'aurait-il pas besoin de le tuer ou de mourir.
Se dire que Tom ne connaissait pas la prophétie l'avait aidé à la retirer de son esprit, à penser qu'il n'y avait rien de malsain à ce qu'ils se parlent, s'apprécient, parce que Tom n'était pas encore Voldemort et que, avec un peu de chance, il ne le deviendrait jamais.
Mais ce n'était plus le cas maintenant. Quoi qu'ils fassent, au-dessus de leur tête tourneraient ces mots funestes ;
« Et l'un devra mourir de la main de l'autre car aucun d'eux ne peut vivre tant que l'autre survit... »
Et Tom l'aimait. C'était horrible...
Le pire des scénario s'offrait à eux, Rogue avait peut-être raison, rien de bon ne resortirait de leur relation.
Harry savait au plus profond de lui que la prophétie était là à cause de quelque chose de plus fort, de plus grand, qui le liait à Tom et cette chose n'allait pas disparaître. L'un d'eux devrait mourir de la main de l'autre, c'était ainsi. Ils ne pouvaient pas être deux.
Peu importe ce qui les liait, cela prenait toujours l'apparence de la mort aux yeux du Survivant et s'il se retrouvait incapable de le tuer alors ce serait à lui de mourir.
Alors qu'il avait le dos tourné, les épaules basses et qu'il essayait de se reprendre pour ne pas paraître faible plus longtemps, Harry sentit tout à coup un corps dans son dos et deux bras enlacer ses épaules.
Tom...
Son cœur accéléra brutalement à cela et il ne réussit pas à se ressaisir. Il sentit quelque chose d'humide tracer des sillons sur ses joues. Et il entendit quelque chose, un cri mêlant sa douleur et ses pleurs, issu de sa gorge.
§ Je ne voulais pas que tu l'apprennes. §
La chaleur dans son dos et les bras autour de ses épaules ne lui permirent pas de se reprendre, Tom lui offrait le droit d'être faible en lui apportant son soutien et Harry le détesta pour cela. Il n'avait pas besoin de ça. Il... il pouvait surmonter ça, ce n'était rien que de la fatigue et de la peur. Il irait bien n'est-ce pas ?
Pourtant il attrapa les bras de Tom avec ses mains et il y enfouit son visage, pleurant plus qu'il ne se souvenait l'avoir fait devant qui que ce soit.
Derrière lui, dans son cou, il sentait Tom poser des baisers sur sa peau, sur sa nuque. Chuchotant qu'il était désolé, que tout irait bien. Que rien n'allait leur arriver, que la prophétie ne changerait rien. Ni pour aujourd'hui ni pour demain.
Il l'autorisa à pleurer en lui assurant que cela non plus ne changeait rien, que pour lui, il resterait toujours fort. Il lui chuchota qu'il souhaitait seulement être là pour lui, qu'il les protégerait de tout et du monde entier, peu importe le danger et il sentait les larmes de Jedusor tomber et couler le long de son dos. Tom pleurait aussi.
Il ne savait pas combien de temps ils étaient restés dans cette position, combien de temps Tom avait pleuré dans son dos et lui dans ses bras. Mais à un moment, il s'était apaisé, un peu. À cela, Tom, qui s'était tu, avait expiré.
Un soupir de soulagement, comme si tout ce temps son corps avait été aussi éprouvé que le sien. Puis il lui dit avec lenteur, comme pour éviter de le brusquer.
§ Nous devrions aller nous coucher. Tu es épuisé et je n'ai pas la force de te parler de la prophétie. J'aimerais juste me coucher avec l'assurance que tu vas bien et que tu n'auras pas disparu demain matin quand je me réveillerai. §
Et Harry avait compris, Tom ne comptait pas repartir d'ici cette nuit. N'ayant pas la force de se battre contre la volonté du jeune Seigneur des Ténèbres, il ne le contredit pas. Ayant l'impression désagréable que, lui-même, n'avait pas la volonté de se séparer de Tom ce soir.
Il se souvient qu'ils étaient montés dans son dortoir ensemble, sans prendre la peine de mettre des vêtements de nuit, retirant seulement leurs uniformes, se couchant en chemise et pantalon sous les draps du lit à baldaquin, un peu trop petit pour deux.
Harry avait fermé les yeux sans se soucier du fait que Tom était à côté de lui et qu'ils étaient censés être ennemis. La dernière chose dont il eut le souvenir était qu'au moment où ses pensées devenaient floues et qu'il sentait qu'il allait s'endormir, Tom avait saisit sa main pour la serrer dans la sienne et lui avait chuchoté dans un fourchelang d'une grande douceur.
§ Je t'aime. §
À suivre...
