2 ) Au labo

John Sheppard s'appuie au chambranle de la porte entrebâillée et observe le docteur McKay, un sourire amusé aux lèvres.

Impossible de s'ennuyer. Aujourd'hui, c'est du grand McKay.

Le scientifique va et vient. Il court de Zelenka qui ne s'en laisse pas compter à Kavannaugh qui le toise d'un regard haineux en passant par le reste du personnel du labo. Personne n'est oublié. L'homme serait presque équitable dans ses engueulades. Il y en a pour tout le monde.

Il tremble, trépigne, profère des malédictions, s'énerve. Il est entouré d'incompétents. On en veut à son génie. Il est cerné par des saboteurs, des crétins et des imbéciles. Alors que tout le poids de la cité repose sur lui. On ne reconnaît pas ses immenses responsabilités.

Rien ne va assez bien.

Rien ne va assez vite.

La liste est longue .

Chacun la connaît par cœur et personne ne s'émeut vraiment.

Les mains de McKay s'agitent, s'élèvent, vibrent, tracent des arabesques dans l'espace.

Son index montre, pointe, menace, accuse.

Puis finalement il lève les bras au ciel, exaspéré, et les laisse retomber le long de son corps. Ses mains s'ouvrent et se ferment compulsivement sous l'effet de l'excitation et la colère.

La tempête cesse brusquement. Il passe d'un extrême à l'autre. Il se calme aussi vite qu'il s'emporte et se concentre sur son travail, l'air grave, attentif, presque triste. Plus rien n'existe autour de lui.

Et puis un sourire victorieux éclaire son visage. Il a trouvé. Il proclame qu'il est un génie. Comme une évidence. Et personne ne le contredit.

Parce qu'il est véritablement un génie. Il a sauvé la cité à plusieurs reprises.

Et là, il est comme un enfant dans une confiserie : l'air extatique. Son visage expressif s'est transformé. Il rayonne.

Ses yeux s'illuminent.

John Sheppard l'observe, fasciné : C'est Noël dans les yeux de Rodney McKay.

Son regard brille, pétille. Rodney ne sait rien cacher.

Il est ainsi. Tout d'un bloc, entier, émouvant.

John sourit : On dirait un gosse.

Et son jouet, c'est Atlantis.

Rodney McKay n'est pas un homme raisonnable. Il est capable de travailler des journées entières sans s'arrêter. Ou des nuits. Et parfois l'épuisement le saisit. Il en veut un peu à ce corps qui le trahit, qui ne lui donne pas assez de temps, qui l'oblige au repos.

Plus d'une fois le colonel Sheppard a vu McKay harassé, au bout du rouleau se laisser glisser le long du mur et rester là, assis à même le sol, la tête dans les genoux dans l'espoir de récupérer, de gagner du temps sur la fatigue.

Pour ne pas quitter son laboratoire. Son vrai "chez lui", passionnant, familier, rassurant. Sa caverne d'Ali Baba, son île au trésor.

Au laboratoire, Rodney est comme un poisson dans l'eau. Il y a ses repères. Il se trouve dans son élément et John découvre chez le scientifique l'aisance de mouvement et même la grâce qui lui font défaut en mission.

Et là il apréhende la véritable complexité du personnage.

Un homme aux multiples facettes : enquiquinant, envahissant, arrogant, égocentrique, formidablement intelligent mais toujours passionnant.

Et John devine un autre Rodney McKay sous la façade. Il sait qu'il existe et il a envie de le découvrir.