L'ENFANT-DEMON
Auteur : Toujours la même XD
Genre : Voyons…Romance ? Nan peut-être pas…Parody ? oO non plus. Action/Adventure ? Ouais, déjà mieux !
Disclaimer : « Les personnages de Naruto appartiennent à Masashi Kishimoto, je n'écris pas cette fic dans le but de gagner de l'argent. » Voilà, on a la petite phrase, on est content.
Couples : Aloooors…Si je vous dis qu'il y AURA du Gaara X Ying Long dans cette fic ? Vous vomirez sur votre clavier ? Bah vous avez raison, c'est dégueulasse, d'ailleurs j'en mets pas ! XD
Réponses aux reviews : J'ai reçu que 5 reviews pour mon chapitre 5…Vous l'avez fait exprès, c'est ça ? TT Ecoutez, si vous lisez ma fic, ayez au moins la politesse de me laisser un petit commentaire, ça mord pas…En plus, ça ralentit mon rythme de lecture, la pénurie de reviews ! (sans rire) Enfin, merci à ceux qui m'auront répondu :
Sabaku no lumina : Contente de voir que tu suis toujours ma fic ! Tu trouves Hydre MIGNON ? oO Ca dépend du sens qu'on donne au terme, je suppose…Il va hurler, quand je vais lui raconter ça ! XD
Twin Sun Leader : Et de deux ! C'est chouette que mes démons t'aient plu, je me suis bien amusée à leur imaginer des caractères les plus différents possibles, des manières bizarres de s'exprimer, et tout le reste ! Si tu veux, je vais mettre un petit paragraphe sur Sekhmet en fin de chapitre ! Merci d'avoir daigné prendre en compte le chant d'entre les mondes ! Il parle de Gaara…Hm…Oui et non, en fait. Ce qui fait toute la spécialité du poème, c'est qu'il ne parle pas d'une chose précise, mais d'entre plusieurs choses…Argh, je sais pas comment expliquer…Pour résumer, le chant d'entre les mondes relate tout ce qui a « deux tranchants ».
Dragonwing4 : Et ben ! Si tu étais si fatiguée, merci d'avoir pris la peine d'écrire une si longue review ! Au début, je voyais Seth comme un simple figurant, mais au fur et à mesure je me suis beaucoup attachée à son mauvais caractère et il a pris une place plus importante dans l'histoire ! Contente que tu apprécies le poème ! Si tu savais comme je me suis cassée la tête pour les rimes décroissantes ! Le premier est un alexandrin, le deuxième a 11 syllabes, puis 10…jusqu'à arriver à un vers d'une syllabe ! Et vas-y que je remette ça trois fois ! XD Du coup, je me suis pas cassée la tête à le faire rimer…
Maetel : TT Si tu veux te faire pardonner, tu as intérêt à reviewer chacun des chapitres à partir de maintenant ! Bouh ! Mais nan je plaisante ! XD Merci beaucoup de m'avoir écrit ! Yup, il y aura quand même de la romance à un moment donné, mais ce sera très platonique, je me sens pas très chaude pour les descriptions baveuses et un peu jeune et dégoûtée pour les lemons…Alors, ça ne prendra probablement pas une très grande place dans l'histoire. Les descriptions…Et oui, les descriptions étaient mon grand point faible, dans mes premiers essais ! Pas foutue de pondre une description de plus de deux lignes ! Alors, je me suis dit « Y en a marre ! Je veux de jolies descriptions ! », je m'y suis mise cahin caha, et finalement je me suis prise au jeu ! Comme quoi, les morales qu'on nous rabâche dans les shônen peuvent parfois se révéler (légèrement) fondées…C'est comme Naruto avec le clonage ! Quoi qu'il en soit, maintenant c'est description forever !
Elenthya : Merci merci merci de m'avoir écrit alors que je me désespérais de recevoir de nouvelles reviews ! MERCI BEAUCOUP :') Merci pour tes compliments sur l'histoire, les personnages, les poèmes…Je sais pas quoi dire d'autre…XD Ah si ! Tu vas pas déprimer à cause de mes fics, quand même ? TT Je t'assures que j'ai ADORE ton one shot sur Gaara et son père, c'était superbe !
Annonce pour ceux qui supportent mon style d'écriture : Vous lisez les scans ? Vous adorez Gaara ? Vous détestez Deidara ? Vous trouvez qu'on ne parle pas assez d'elle ? Vous aimez les couples bizarres ? Vous vous sentez l'énergie d'affronter un sens unique…original ? Et bah ça s'appelle Art de détruire, c'est un one shot et ça attend des lecteurs ! XD
Chapitre 6 : Un doute nommé « espoir »
Dans la ville des démons, le climat était tempéré. Aussi les nuits étaient-elles plus clémentes que dans le désert, moins glaciales bien que plus humides. Gaara était assis sur le toit sphérique de la maison, à observer pensivement le ciel masqué par les nuages. Une fine bruine tombait. Le jeune shinobi demeurait immobile, pour sentir l'odeur discrète de l'humidité, et pour écouter le bruit furtif des gouttelettes, et pour sentir leur fraîcheur contre son visage. Mais surtout, il réfléchissait. Son esprit était en proie à une sorte de fièvre frénétique. Au milieu de la tourmente, deux phrases revenaient sans cesse.
« J'ai un outil, mais je ne l'utilise pas. »
« J'ai trouvé. J'ai trouvé ! »
Il ne parvenait plus à tenir en place. Il se laissa tomber sur le sol, et commença à marcher sans but, suivant un sentier au hasard. Il gardait la tête baissée. Une habitude qu'il tenait de son enfance, quand il errait dans les rues de Suna, seul au milieu des ténèbres et des regards haineux. La pluie légère dégoulinait sur ses cheveux et son visage. Elle heurtait sa calebasse dans un petit bruit rythmé. Le bruit de la jarre humide. Le bruit de ses pas. Le tout formait pour ses pensées une cadence lancinante.
« J'ai un outil. Un pas. Mais je ne l'utilise pas. Un pas. J'ai un outil. Un pas. Mais-je-ne-l'u-ti-lise-pas. Un, deux, trois pas. Mais-je-ne-l'u-ti-lise-pas. »
Il s'enfonçait de plus en plus profondément dans la cité, sans se préoccuper le moins du monde du paysage. Toute son attention était focalisée sur ses réflexions. C'était évident. Evident. Comment avait-il pu négliger ce détail ?
« J'ai un outil. Un pas. Pour réparer. Un, deux pas. Mais je ne l'utilise pas. Un pas. Le verre est détruit. Un pas. Elle a un outil. Un pas. Un gage de confiance. Un, deux, trois pas. Un rouleau pour me tuer. Un pas. Elle ne l'utilise pas. Un, deux, trois, quatre, cinq, six pas."
"Et je suis en vie. »
Evident. Incompréhensible. Tsunade, la singulière Hokage du village caché de Konoha. Elle possédait un rouleau, un rouleau qui permettait de lui nuire profondément. Un rouleau qui permettait de tuer Gaara. Il avait été victime d'une embuscade, orchestrée par les villages du sable et de la feuille. Le rendez-vous que lui avait donné l'Hokage l'avait entraîné dans un piège. Il avait été trahi, dans sa confiance en Konoha et même en Suna. Il avait tué de nombreux shinobis en tentant de s'enfuir. De nombreuses pertes. Une simple manœuvre d'encerclement. Un empoisonnement incertain. C'était un piège dangereux. Et elle possédait un rouleau qui lui permettait de le tuer.
Mais elle ne l'avait pas utilisé. Pourquoi ? C'aurait été si simple…
Gaara se refusait à supposer que la vieille kunoichi ait été incapable de saisir le fonctionnement du sceau. Elle n'était pas l'une des trois ninjas légendaires de Konoha pour rien ! Si elle avait voulu se débarrasser de lui, pourquoi se serait-elle privée d'un tel avantage ?
Ou alors, elle avait été mise à l'écart du complot ? Non. C'était elle-même qui lui avait demandé cette entrevue, là où était le piège. Le lieu différait très légèrement de l'endroit habituel où les envoyés des deux villages se rejoignaient. Juste suffisamment pour le rapprocher du gouffre circulaire, sans qu'il n'ait de soupçon. C'était elle qui…
A moins que le piège n'ait été encore plus profond ! La missive…Elle n'avait peut-être pas été écrite de la main de Tsunade !
Un complot entièrement différent ? Un complot dans lequel n'entraient en scène que quelques centaines de ninjas des deux villages ? Y avait-il encore des gens qui avaient foi en lui ? Qui déploraient sa disparition ?
-Tu te promènes bien tard.
Gaara sursauta et leva la tête. Il avait reconnu cette voix féminine, et elle était peut-être annonciatrice d'ennuis.
Devant lui, bien visible malgré la pénombre, il y avait la démone lionne, Sekhmet. Ses blessures avaient pratiquement toutes disparues, mais elle avait autour de la tête un bandeau blanc qui recouvrait son œil droit. Elle le toisait calmement, son œil rouge de félin brillant faiblement dans la nuit.
-C'est pas très prudent, pour un humain dans ton genre, de te balader dans les rues à cette heure-ci, reprit-elle avec un léger ricanement, surtout quand on est dans une ville peuplée de démons. Et maintenant que ce cher Shukaku le Millénaire, ton parrain, n'est plus là pour assurer ta protection ? Qu'est-ce que tu vas bien pouvoir faire, si l'un d'entre eux décide de t'attaquer et de te dévorer ?
Le jeune shinobi ne répondit pas, n'esquissa pas un geste. Mais son attitude, ainsi que le chakra qu'il commençait déjà à malaxer et à concentrer sur le bouchon de sa calebasse, interrogeaient clairement :
« C'est votre intention ? »
La femme démon dut se rendre compte que son interlocuteur était soudain sur le qui-vive, car elle éclata d'un rire sec.
-Très mignon. Tu te battrais contre moi ?
-J'ai davantage de chances de survivre en me battant qu'en implorant votre miséricorde.
Son œil s'écarquilla de surprise, puis un mince sourire amusé apparut sur ses lèvres.
-Un point pour toi.
Elle se laissa tomber sur un banc, au bord du chemin, avec un soupir las.
-Faut quand même que tu sois un drôle de gamin, continua-t-elle pensivement, pour que Shukaku s'énerve à ton sujet. T'as dû remarquer qu'il crie tout le temps, mais qu'il s'énerve pratiquement jamais. Ce tanuki est…un démon étrange.
Surpris par la réaction de la démone, il ne répondit pas. Mais il n'en pensait pas moins.
C'était la vérité. Shukaku avait toujours été exubérant au possible, ce qui le rendait bien souvent insupportable. Il râlait fréquemment sur tout et rien, quand l'envie lui prenait. Il affichait à loisir de l'excitation, de l'ennui, de la joie presque hystérique, mais il n'avait encore jamais donné réellement l'impression de se mettre en colère. Sauf lors de sa rencontre avec Sekhmet, bien sûr.
-Tu n'es pas très causant, ma parole ! Marmonna la lionne, voyant que son discours ne suscitait aucune réaction. Tu as été élevé où ? Dans une cage ?
La remarque avait quelque chose de métaphorique.
-Plus ou moins, admit-il à voix basse.
-Mouais. Comme tout le monde ici, en somme, soupira-t-elle, mais même dans les cages, on a le droit de s'asseoir, tu savais ?
D'un geste rapide, elle désigna la place restante sur le banc. Interloqué par la tournure que prenait l'entrevue, Gaara ne réagit pas immédiatement. S'agissait-il d'un piège ?
Cette idée lui parut effarante de stupidité, et il la repoussa. Un être aussi puissant qu'un démon Millénaire ne se donneraitjamais la peine d'employer la ruse pour vaincre un faible humain comme lui. Les démons n'avaient nul besoin de tendre des pièges à leurs adversaires. Il s'assit donc à côté de Sekhmet. Il conserva toutefois une certaine distance entre lui et elle, et demeura attentif à ses gestes. La lionne parut s'en apercevoir.
-Tu as peur de moi ? Interrogea-t-elle, moqueuse.
-Pas vraiment. Je me méfie. Je n'ai pas pris l'habitude de craindre les combats.
-Ouais, normal pour un morceau de démon ! Dans ton cas, tu aurais plutôt tendance à craindre les cages, non ?
Moment de silence. Après tout, quel intérêt y avait-il à se taire ?
-Peut-être…Une que j'aurais voulu voir devenir une maison.
La réponse ne parut pas surprendre la démone. Au contraire, elle hocha la tête avec compréhension.
-Une maison, c'est un endroit dont on veut pas sortir. Une cage, on ne peut pas. Après, faut savoir ce qu'on pense, c'est le moins facile. Elle émit un bref ricanement, un peu amer. J'ai mis vingt ans à me rendre compte que ma maison était une cage.
Gaara l'observa avec surprise, mais ne posa aucune question. Il n'avait pas l'intention de l'interroger sur son histoire. A elle d'en parler si l'envie l'en prenait. Pourtant, la personnalité de Sekhmet l'étonnait de plus en plus.
Celle-ci paraissait d'humeur à bavarder. Elle observa pensivement les nuages gris qui déversaient leur bruine, puis elle reprit la parole :
-Les humains ont toujours eu peur de moi. Quand j'étais gamine, ils m'idolâtraient comme une déesse, ils m'apportaient tout ce que je voulais. Quand ils avaient besoin de mes pouvoirs, ils s'agenouillaient devant moi et me suppliaient de leur venir en aide. Le tout avec des offrandes, des prières…Comme une statue dans un temple. Et ils voulaient surtout pas que leur statue s'anime.
Elle s'interrompit, apparemment vaguement interloquée d'avoir évoqué ainsi sa vie humaine. Et puis elle haussa les épaules et se passa la main dans les cheveux, comme pour dire : « Oh, après tout, quelle importance ? »
-J'ai mis vingt ans à me rendre compte que mon palais était une prison. Ils ne voulaient surtout pas que je quitte leur sale village. Des abrutis. Au grand jour, j'étais la Noble Sekhmet, la déesse de la guerre. Mais dans les rues, là où je regardais pas, j'étais le monstre, la fille marquée par le Diable. Que des imbéciles, de la nourriture pour démon. J'ai tué ces abrutis, et je suis devenue démone. Vite fait bien fait. Je ne supporte pas les humains, ils sont serviles et sournois. Tu as de la chance. Si tu t'étais jeté à genoux devant moi, quand j'ai fait mine de t'attaquer, je t'aurais dévoré !
Elle fit claquer ses crocs avec satisfaction.
Gaara ne bougea pas. C'était un récit incomplet, il s'en rendait bien compte. Mais l'essentiel était là. Ce qui semblait relier tous les démons entre eux. La marque du Diable, et le rejet des humains. La pluie continuait de tomber, apaisante.
-Toi aussi, si tu es là, c'est que les humains t'ont repoussé, dit-elle brusquement, tu comptes rester ici indéfiniment ?
Il n'y avait aucune nuance d'approbation ou de désapprobation dans sa voix. En fait, son ton n'aurait probablement pas été plus neutre si elle avait parlé de la météo.
-Non, répondit le jeune ninja, je dois retourner là-bas.
Inutile de préciser ce que signifiait « là-bas ».
-Sérieusement ? Interrogea l'autre, une note de sarcasme dans la voix. Et qu'est-ce que tu as à gagner chez eux ?
-Je ne suis pas sûr…Hésita-t-il. Qu'ils m'aient tous trahi.
-Mignon ! Tu es juste « pas sûr », et tu espères ? Pourquoi est-ce qu'ils ne te trahiraient pas tous ?
Un temps d'hésitation.
-Je suis un humain, moi aussi. Et…Mon but était de gagner leur confiance. Je ne peux pas renoncer maintenant. Pas si j'ai encore un doute.
La lionne le dévisagea un bon moment, une véritable stupéfaction lisible sur son visage, en dépit des ténèbres alentour. Et, soudainement, elle éclata de rire.
-Voyez-vous ça ! Dit-elle, légèrement moqueuse. C'est beau, la jeunesse ! Et Shukaku est au courant que tu vas mettre les voiles ?
-Non, pas encore. J'ai pris cette décision cette nuit.
La démone arbora une expression particulièrement ironique, mais ne répondit pas. Le silence se remit en place, uniquement troublé par le crépitement de la pluie sur les pierres du sentier. Les gouttelettes tombaient à un débit régulier, des milliers de petites voix assoupies qui soupiraient à l'unisson. « C'est un faible murmure, un soupir adouci » Se surprit à penser Gaara. Tout autour d'eux, les ténèbres se teintaient progressivement d'une fine brume blanche.
-Le jour va se lever, constata Sekhmet en se relevant.
Elle se déplaçait avec cette dignité naturelle, propre aux guerriers et aux pratiquants d'arts martiaux. Bien droite, ses mouvements avaient cette fluidité, cette efficacité qui devenait si implacable durant les combats. Elle toisa le jeune humain, avec toujours sa mine légèrement désapprobatrice.
-Personnellement, je pense que ta tentative va échouer lamentablement, dit-elle de but en blanc, les humains sont ce qu'ils sont. Ils ont décidé de te trahir, ils te trahiront jusqu'au bout. A mon avis, tu reviendras ici dans peu de temps, la tête basse…Si tu survis, bien sûr. Mais bon, si tu tiens tant à tenter le tout pour le tout, prends toujours ça.
Elle retira le pendentif qu'elle avait enroulé autour de son poignet et le lui tendit. Gaara resta quelques instants interloqué. Il prit lentement l'objet entre ses mains, et l'examina. Il s'agissait d'une curieuse croix de bois, de la taille de sa main, dont l'une des extrémités formait une grande boucle. Une croix ansée. Le collier en lui-même se constituait d'une simple corde, suffisamment fine pour que sa présence ne fût pas gênante.
Devant le regard perplexe du shinobi, Sekhmet expliqua, sur un ton passablement désintéressé :
-Une amulette. Là d'où je viens, l'Ankh symbolise la vie. Même s'il s'agit d'un simple bout de bois, certaines personnes se sentent davantage en sécurité avec qu'en portant la plus solide des armures. Qui sait ? Peut-être que cette chose te sauvera la vie, un jour.
Gaara contempla l'amulette un moment. Il la passa ensuite autour de son cou et glissa la croix ansée sous ses vêtements. Si son visage avait à peine frémi, ses yeux exprimaient clairement de la reconnaissance. La lionne hocha la tête, dans un « C'est ça » ennuyé. Il songea à la remercier, mais quand il ouvrit la bouche, ce fut une question qui franchit ses lèvres.
-Votre œil ?
Un moment de silence.
-Aucune importance, dit-elle finalement, en passant un doigt dédaigneux sur son bandeau ; j'irai voir Chimère tout à l'heure, et ça ira mieux. Allez, je te souhaite bien du plaisir.
Et elle s'éloigna rapidement. La lumière était montée, et éclairait la brume matinale d'une lueur laiteuse. La pluie ne tombait plus, remplacée par de petites gouttes de rosée, qui envahissaient les plantes, le banc et les vêtements de Gaara. Une brise fraîche lui agitait les cheveux.
-Je retournerai à Suna. Je comprendrai ce qui est arrivé, murmura-t-il pour lui-même.
Il se leva, remit sur son dos sa calebasse et reprit le chemin qui menait à la demeure du démon. Il fallait le prévenir, avant tout. Ses pensées se remirent à vagabonder dans son esprit. Son expression s'assombrit. Il songea furtivement que son comportement ne manquait pas d'égoïsme. Profiter ainsi de la protection de Shukaku, tant qu'il en avait besoin, et partir dès que l'occasion se présentait à lui. Il aurait au moins aimé lui rendre ses services…
Gaara s'immobilisa. S'était-il à ce point accoutumé à la présence exubérante de son démon, pour nourrir ce genre de remords ? Il s'était donc attaché à lui ? Après tout…Le tanuki était un monstre, qui prenait un plaisir malsain à tuer des humains et à massacrer ce qui passait à portée de sa main. Mais il lui avait avant tout apporté du soutien quand il s'était retrouvé seul, un asile quand il s'était perdu. Pour lui, le délaissé, ces marques d'attention étaient trop rares pour ne pas éveiller sa reconnaissance, fussent-elles apportées par un démon.
-TROUVE, GAMIN !
Et quand on parle du tanuki…
Gaara releva la tête. Shukaku se tenait assis en tailleur sur un petit nuage de sable, à une dizaine de mètres au-dessus du sol. Ses blessures étaient complètement guéries. Un peu essoufflé, il affichait son éternel sourire hilare, qui semblait ne jamais devoir quitter ses lèvres.
Le shinobi ne voyait pas en quoi l'avoir retrouvé constituait un exploit, étant donné qu'il leur était facile de déterminer leurs positions respectives à l'aide de leur chakra. Mais il ne fit aucune remarque et se contenta de le saluer d'un signe de tête. Il avait d'autres sujets de préoccupation.
-Shukaku…Hésita-t-il. Il faut que je quitte Abysse.
-Ah ouais ? Demanda l'autre en se laissant tomber à ses côtés. Et pour faire quoi ?
-Je dois retourner là-bas. A Suna. Il faut que je comprenne ce qui m'est arrivé.
Le démon s'immobilisa. Il le regarda fixement, son expression trahissant son étonnement. Et, avant que tout autre sentiment n'ait pu se lire sur son visage, il se mit brusquement à cavaler droit devant lui, en direction de sa demeure.
Interdit, Gaara ne broncha pas. Il ne s'était pas attendu à ce genre de réaction. Plutôt de l'irritation, une séance de railleries bien cinglantes, ou encore un désintérêt total. Il ne s'était pas attendu à cela. Comment l'interpréter ? Désintérêt ? Déception ? Autre chose ? Sans vraiment s'aviser de ce qu'il faisait, Gaara se mit à courir à sa suite.
Le démon était plus rapide que lui. Quand il arriva à la hauteur de la maison, la porte était déjà ouverte. Après un temps d'hésitation, il se risqua à l'intérieur.
Sur la table trônait un petit plateau, qui contenait quelque chose qui ressemblait vaguement à des toasts comestibles. Vaguement. Shukaku avait troqué sa tenue habituelle contre un kimono de voyage gris perle, plus discret. Il était occupé à mettre un peu d'ordre dans le coffre à rouleaux, qu'il avait dû renverser à son réveil, dans un accès de joyeuse frénésie.
-Eh ben, gamin ? Fit-il en constatant la présence de son hôte. On part aujourd'hui ou dans trois siècles ? Avale ça et on décolle !
-On part ? Répéta Gaara, interloqué.
-Ouais, toi et moi. Je suis ton parrain, je te rappelle ! Et je suis supposé te coller aux basques quand tu vas quelque part !
Il poussa un rire tonitruant, qui força le garçon à reculer.
-Suna, YEAAAAAAAH ! Beugla-t-il avec ravissement. On est parti pour le désert ! Ca me changera de ce climat de fillette ! GYAH HAHAHA !
Le jeune ninja dut se répéter mentalement la situation de nombreuses fois pour la comprendre. Shukaku l'accompagnait. Shukaku restait avec lui.
« En gros, ça implique qu'on reste avec son filleul, et qu'on l'aide à réaliser ses objectifs. »
Shukaku allait l'aider dans sa quête.
Un sourire apparut sur ses lèvres, plus visible qu'auparavant. Un véritable sourire soulagé.
-Merci...
-Ouais, ouais, c'est ça. Dépêche-toi de bouffer, on va pas attendre toute la journée !
Aucun des deux n'avait réellement d'affaires à emporter. Leur arme était le sable. Leur protection était le sable. Aussi s'étaient-ils contentés d'un sac contenant quelques provisions, de l'eau et un peu d'argent. Gaara avait également dû se résoudre a avaler les prétendus toasts que le démon lui avait présentés. Heureusement pour lui, ils s'étaient révélés tout à fait comestibles, quoique légèrement carbonisés.
C'était une bonne journée pour un départ. La brume matinale se dissipait lentement, le sol était encore humide sous leurs pas, l'air était pur, lavé par la pluie nocturne.
Ils arrivèrent devant l'unique porte d'Abysse. Cette grande porte tordue, qui fermait la ville aux humains depuis près de vingt mille ans…
-Tu comptes quitter notre cité, Shukaku le Millénaire.
C'était une voix calme, masculine. Neutre bien que suffisante, la phrase prononcée n'était pas une question. L'interpellé pivota tranquillement pour faire face à son interlocuteur. Il prit toutefois le temps de souffler à Gaara :
-Ifrit. Un Illustre démon vieux de douze mille ans.
Et à voix haute :
-Ouais, pourquoi pas ? T'as instauré un service de douane ?
Gaara se retourna également, et put dévisager le nouveau venu.
C'était un homme d'âge mûr, encore jeune toutefois. Sa taille n'était inférieure à celle de Shukaku que de quelques centimètres. Son visage était dur, intouchable, un aspect que renforçait encore ses yeux bleu électrique, froids et perçants. Il portait une toge écarlate, dont la teinte oscillait parfois vers le rouge sang. Tout, dans son regard comme dans sa posture, était imprégné d'une dignité formelle. Seuls ses cheveux de couleur flamme, brasier désordonné qui s'hérissait et ondulait en permanence, ajoutaient une touche de sauvagerie à l'ensemble. Il ne prêta aucune attention à la remarque du tanuki.
-Reconduire ce jeune humain dans son monde après l'avoir accueilli dans l'enceinte d'Abysse est folie pure, continua Ifrit de sa voix grave et solennelle, si par malheur il parle, si par malheur il dévoile notre secret à ses semblables, la période de paix que nous avons connue sera à jamais révolue.
-Toujours aussi dramatique ! Railla Shukaku. Perspicace comme tu l'es, tu dois savoir que Gaara peut pas mentir, lui non plus. Il a qu'à jurer de pas vendre la mèche.
Gaara hocha lentement la tête.
-Abysse a été mon asile. Je ne la trahirai pas.
Le démon baissa les yeux sur lui pour la première fois. Le jeune shinobi dut retenir le frisson qui parcourait son échine. Cet être…Son regard semblait le transpercer, le sonder entièrement avec une précision insensible, scientifique.
Heureusement, l'examen ne dura pas plus de quelques dizaines de secondes. Les sourcils orangés d'Ifrit s'élevèrent imperceptiblement, accentuant encore son air hautain. Une moue méprisante apparut sur son visage.
-Sache, pitoyable éphémère, articula-t-il lentement, que je n'accorde point de crédit à la parole d'un pantin tel que toi.
L'insulte le fit frémir, mais il ne broncha pas. Face à ce type d'individu, mieux valait conserver son sang-froid. L'atmosphère était tendue, autour de lui. Il émanait du démon une aura dangereuse. Le vent semblait cesser de souffler, quand il pénétrait son périmètre. Malgré la fraîcheur de l'aurore, le ninja sentit une goutte de sueur dégouliner le long de son dos.
-Vous ne quitterez point ce lieu, reprit le démon de feu, dussé-je vous en dissuader par la force.
-Illustre Ifrit, déclama Shukaku de sa voix railleuse, ponctuant son apostrophe d'une profonde révérence, vous foutriez-vous de ma gueule ?
L'interpellé toisa de nouveau le tanuki, avec un profond dégoût, comme s'il considérait quelque charogne grouillante de larves.
-Shukaku le Millénaire, dit-il, chaque pore de sa peau suintant de mépris, tous ces siècles, j'ai fermé les yeux sur tes manières insolentes et ton irrespect des règles. Cependant, si cette aisance naturelle que tu affiches aura donné le change aux six Fondateurs, ne te figure point qu'elle m'aura aveuglé. Tous deux, vous êtes des menaces pour Abysse, la noble cité des démons. Laissés en liberté, les agissements d'une marionnette sans volonté et d'un traître tel que toi suffiraient à faire s'ébranler nos murailles.
Les poings de Shukaku se crispèrent, ses deux losanges d'or se rétrécirent jusqu'à ne former plus que deux fentes de lumière au milieu du noir. Quand il prit la parole, sa voix s'était faite basse, grondante, comme le bruit menaçant qui marque le début de l'orage.
-On t'a déjà dit que tu étais chiant, le vieux feu follet ? Traite-moi encore une fois de traître, et je te refais le portrait. Radicalement.
-Le mensonge qui emplit ton être me souille à chacune de tes paroles, pitoyable démon. Ta vilenie ne peut échapper à mon sixième sens. Mon sens de la Vérité Absolue. Nourrissais-tu la pathétique illusion de nous cacher éternellement tes actes ?
Shukaku s'était figé. Tout son être tremblait de fureur. Son chakra subissait une forte tension, se tenait ramassé, prêt à bondir. Pourtant, au son de la dernière phrase d'Ifrit, sa main se plaqua violemment contre son torse, et se crispa sur ce qui devait être son pendentif, sous son kimono. Ses yeux étaient écarquillés, une faille s'y était ouverte. Les sentiments étaient nombreux à s'y agglutiner : peur, souffrance, haine, ressentiment, regret, déception, angoisse…Mais la rage dominait tout.
-Tu vas…Remballer immédiatement ! Articula-t-il. Sa hargne le faisait presque suffoquer. Sinon…Je t'arrache la tête et j'écrase ta cervelle entre mes mains !
Ifrit demeurait immobile. La colère du tanuki le laissa sans réaction. Il continuait simplement de le toiser avec cette expression écœurée qui ne le quittait pas.
-Quelle réaction futile, méprisable traître. Te figurais-tu réellement pouvoir nous cacher tout cela ? Sache que je ne suis point aussi crédule que les six Fondateurs. Tu as éveillé en moi de la méfiance, et j'ai percé à jour tes méfaits. Je sais toutes ces choses. Je suis au courant, quant à cette technique que tu as apprise. Je sais de quelle manière tu as prononcé le Serment. Et, évidemment, je sais d'où te viens cette chose que tu portes sur toi depuis ta jeunesse humaine. Je sais que tu la tiens de cette personne…
-MAIS TU VAS FERMER TA GUEULE, OUI ? Hurla Shukaku, le visage maintenant convulsé par la haine. JE VAIS TE BUTER, SALOPARD !
D'un geste rageur, il arracha l'élastique qui nouait ses cheveux et le passa à son poignet. Sa toison, libérée, dégringola sur son dos, entraînant avec elle un raz-de-marée noir et or. L'effet était saisissant. Les petites griffes de sable qui constituaient l'élastique semblaient servir de barrière pour diminuer le flux de son chakra. Il tourbillonnait maintenant autour de lui, jaillissant de sa peau. Le tanuki se jeta sur le démon de feu avec un hurlement de rage, suraigu comme l'étaient toujours les cris de Shukaku. Mais cette fois, c'était un bruit plus douloureux, comme celui d'un oiseau blessé.
Ifrit n'eut pas même un froncement de sourcil. Il s'effaça sur le côté, à une telle vitesse que Gaara crut tout d'abord à une téléportation. Il avait gardé les bras négligemment croisés, et semblait avoir à peine bougé.
-Prétends-tu vaincre un Illustre démon, jeune insolent ? Murmura-t-il calmement.
Et il esquissa un unique signe. Sous les pieds de Shukaku, le sol trembla imperceptiblement. Sur ses gardes, celui-ci bondit exactement au même moment. La terre fondit en une marée de lave sur un rayon de plusieurs mètres, là où le démon s'était trouvé un instant auparavant. Un nuage de vapeur se forma dans l'air humide. L'herbe fut instantanément carbonisée, tout autour d'eux.
Dans les airs, Shukaku créa une plate forme de sable sur laquelle il atterrit avec souplesse. Il effectua une série de mouvements qui ressemblaient étrangement à des pas de danse. Il tournait sur lui-même, fouettait le vide de ses bras, ralentissait, reprenait de plus belle. Le vent se mit à souffler. Il suivait les gestes du démon, se rassemblait au-dessus de lui.
-Fûton ! Tonna-t-il soudain. Renkudân ! La distorsion de l'air !
Une véritable bombe d'atmosphère et de chakra apparut dans le vide. Elle était énorme, au moins dix fois plus grosse que le démon. Elle fut propulsée vers Ifrit, immense, tourbillonnante. Gaara dut appeler à lui l'intégralité de son sable pour se préserver des ondes cinglantes qu'elle dégageait.
Le démon du feu se crispa légèrement, et effectua une série de signes compliquée.
-Kâton ! Yoogan no tsumé ! Les griffes de lave!
Un flot de chakra blanc, aveuglant, surgit de son corps. Il se dressa devant lui, sous l'apparence d'une gigantesque main crochue. Elle se jeta vivement sur le sortilège de Shukaku, l'agrippa entre ses griffes brûlantes. Le vent mugissait, balayant tout sur son passage. L'Illustre démon se protégea le visage de ses bras. Un sourire suffisant se lisait sur ses lèvres fines.
La lave griffue enserra la distorsion, et finalement la broya. Ifrit se redressa en époussetant sa toge. Ses doigts formèrent un certain nombre de signes. Le chakra blanc s'élança à la poursuite du tanuki. Tout ce qu'effleuraient ces lianes immaculées fondait instantanément, qu'il s'agît de terre ou de roches. Shukaku pirouetta pour en esquiver une, appela à lui le vent pour balayer les autres. Il se battait avec autrement plus de sérieux que durant son combat de la veille. Plus de figure inutile. Plus de risque casse-cou. Désormais, il combattait pour tuer.
Il était en mauvaise posture, cependant. Eviter les assauts mortels de son adversaire l'absorbait totalement. Malgré toute sa vitesse, il ne parvenait pas à préparer une offensive. Il fallait détourner l'attention de l'Illustre démon.
Gaara jeta un regard dans sa direction. Il ne faisait pas attention à lui, entièrement concentré qu'il était sur ses attaques de chakra pur. C'était un démon. Il ne parviendrait sans doute pas à le blesser, mais peut-être pourrait-il créer une ouverture pour Shukaku…
Lentement, en s'appliquant à camoufler son chakra, il rassembla du sable autour de lui. Il le projeta ensuite sur le démon, sous formes de lames minérales qui visaient simultanément sa gorge, la base de son crâne, son cœur et son flanc. Ifrit vit au dernier moment le piège qui se précipitait sur lui. Il s'enveloppa de son chakra blanc. Le sable retomba en fumant. Les lianes de chakra, ne recevant plus d'ordre, interrompirent leur poursuite et se laissèrent mollement tomber sur le sol.
Shukaku ne perdit pas de temps. Une lame de chakra noire et or fendit l'air, droit vers l'interstice entre les omoplates de son ennemi. Celui-ci n'eut que le temps de s'effacer sur le côté et de placer son bras entre lui et l'attaque. Le chakra ne fit que l'effleurer, et pourtant il entailla profondément sa chair, libérant un flot de sang qui vint souiller sa toge. Le bruit sec d'un os brisé se fit entendre. Ifrit considéra pensivement son bras ensanglanté, puis rassembla du chakra autour de la blessure afin de stopper l'hémorragie. Il se tourna lentement vers Gaara, qui se tenait bien droit, son sable frémissant, prêt à jaillir.
-En fait, dit tranquillement le démon, c'est avant tout toi qui désires quitter les murs d'Abysse. Ton décès règlera au moins ce problème.
Ses yeux le scrutaient avec un calme mépris.
-Disparais à jamais de ma vue, pantin éphémère.
Ses doigts formèrent un signe.
-C'EST PAR LA QUE CA SE PASSE ! Hurla Shukaku en se jetant sur lui. C'EST MOI, TON ADVERSAIRE !
Sans se préoccuper du chakra ardent qui protégeait l'Illustre démon, il le frappa de toutes ses forces, son poing enveloppé de son propre flux noir et or. Un grognement de douleur se fit entendre des deux côtés.
-Tu es horripilant, soupira Ifrit.
D'un geste de la main, il fouetta Shukaku de sa lave immaculée. Celui-ci était trop près de son assaillant pour esquiver le coup. Il ne bénéficia que de la protection de son chakra. Avec un hurlement de souffrance, il fut projeté contre le sol noir et craquelé. Il tenta de se redresser, sans succès. La douleur de la brûlure était trop forte pour lui permettre de faire un geste. Tout s'était passé trop vite pour que Gaara pût réagir. Et le sable n'était d'aucune efficacité contre cette marée ardente.
-Mourez, à présent.
Deux lianes de chakra se détendirent en même temps. L'une chargeait Shukaku. L'autre avait pris Gaara pour cible. Son sable ne protégerait ni l'un ni l'autre. La chaleur insupportable, ainsi que la vapeur, gênait ses mouvements. Il ne pourrait pas esquiver. Il ferma étroitement les yeux et attendit l'impact.
Une seconde. Deux secondes.
Toujours rien.
Anormal.
Il décolla lentement ses paupières, pour voir la liane de chakra à quelques mètres de lui. Tout juste suffisamment loin pour ne pas le brûler. Elle s'était immobilisée. Plus exactement, un long serpent noir, enroulé autour d'elle en sifflant furieusement, lui interdisait tout mouvement.
Il tourna vivement la tête vers Shukaku. Il était toujours au sol. Un autre serpent avait maîtrisé la seconde liane. Les queues des deux reptiles étaient toutes deux tendues vers un même endroit.
Ifrit ne bougeait pas, lui non plus. Il ne le pouvait pas. Pas avec les huit serpents qui immobilisaient ses bras, ses jambes et même son cou. Il regardait avec ahurissement le lanceur de toutes ces créatures d'ébène. Les serpents de chakra noir surgissaient tous du collier qu'arborait le nouveau venu. C'était un homme chauve, petit et corpulent, des dizaines de clés accrochées à sa ceinture, que Gaara avait déjà rencontré, auparavant. Et il paraissait passablement irrité.
-Bon sang ! Aboya Cerbère de sa voix rauque. Un combat à mort juste sous mon nez ! Et inéquitable, avec ça ! IFRIT ! Tu as deux secondes pour me trouver une explication !
Le démon frémit à l'appel de son nom, mais il ne tarda pas à retrouver le contrôle de lui-même. Il fit disparaître ses lianes de chakra d'un geste de la main, cessa de se débattre contre l'emprise des reptiles et prit la parole :
-Cerbère le Fondateur, mes seules motivations sont la pérennité de notre cité. En tant qu'Illustre démon, je n'ai pu souffrir que ces deux créatures aillent se mêler aux humains. Vos pouvoirs excellent de loin les miens. Vous connaissez le danger que représente ce pantin humain d'apparence, et davantage encore la menace que constitue ce traître qui se prétend démon, alors qu'il a enfreint l'intégralité de nos règles.
Le gardien d'Abysse secoua la tête avec mauvaise humeur.
-Et TU me parles d'enfreindre des règles ? Riposta-t-il. C'est quoi, tout ça ? Tu as tenté de tuer cet humain ! Tu as oublié que Satan en personne lui avait offert ce lieu pour asile, PEUT-ÊTRE ? Et ces attaques de brute que tu distribues sans aucune retenue ! Tu te crois où ? C'est le VESUVE, ici, maintenant ! Une minute de plus et c'était toutes les maisons alentour, qui y passaient ! Il y a des limites, quand même !
Ifrit fronça les sourcils, mais ne broncha pas.
-Avec tout le respect que je vous dois, noble gardien d'Abysse, l'affection que vous éprouvez pour Shukaku le Millénaire vous aveugle dans votre jugement. Nous ne pouvons tolérer plus longtemps cette situation. Vous ne pouvez point fermer les yeux sur cette technique qu'il conserve enfouie aux tréfonds de ses connaissances. Vous ne pouvez négliger le Serment qu'il a prononcé. Cet être n'est pas comme nous. Il n'a point sa place dans l'enceinte de nos murs.
-Tu tiens le même langage que les humains qui nous ont chassés, gronda le chien à trois visages, une colère méprisante dans la voix ; est-ce qu'il faut que je te RAPPELLE la fonction première de cette ville ? La promesse qui a été faite il y a vingt mille ans ? Abysse n'est pas une forteresse soucieuse de perdurer contre vents et marées ! Cet endroit est un asile pour les gens qui ne sont pas comme les autres ! C'est un abri pour ceux qui n'ont leur place NULLE PART ! Ce sont les gens anormaux et dangereux qui se rassemblent ici ! Sache, jeune impertinent, qu'il est tout à fait HORS DE QUESTION de refuser l'accès à notre ville à un être en raison du danger qu'il représente !
-Et qu'en est-il des traîtres, des fourbes ? Nous devons assurer notre sécurité contre ce genre de…
-MAIS TU VAS TE TAIRE ? Ca commence à bien faire, tes sottises dès le matin ! Nous réunirons un conseil pour parler de ta conduite, tu pourras t'expliquer tout ton saoul à ce moment là ! Mais pour l'instant, HORS DE MA VUE !
Il décrocha une lourde clé verte, décorée de symboles étranges, et la tendit devant lui, en direction d'Ifrit. Il considéra un moment la profonde blessure qu'il portait au bras.
-Au fait, termina-t-il un peu plus calmement, je te suggère de t'entraîner un peu, au lieu de faire le Bijuu. Te faire une coupure de ce genre contre un démon Millénaire et un humain…Tu te ramollis.
Il y eut un grand bruit d'explosion. Comme s'il avait été percuté par un projectile particulièrement imposant, l'Illustre démon se retrouva projeté dans les airs et partit se fracasser contre un haut bâtiment, au loin.
Cerbère respira à plusieurs reprises pour recouvrir son sang-froid, puis il se tourna vers Shukaku. Celui-ci entreprenait de se relever, non sans quelques grognements douloureux. Gaara constata avec soulagement que ses blessures ne mettaient en aucun cas sa vie en danger. Protégé par son chakra, l'attaque n'avait fait que frôler le démon, et il était simplement incommodé par la sensation de brûlure insupportable dont il avait été la victime.
-C'est du propre, Shukaku, soupira le chien, tu ne peux vraiment pas t'empêcher de t'attirer le plus d'ennuis possible, toi.
L'interpellé avait réussi à se mettre en position assise. Il balança la tête d'un côté et de l'autre avec dédain. Ses cheveux lâchés continuaient de déverser du chakra à chacun de ses mouvements.
-Il m'a énervé, cet abruti, marmonna-t-il, t'aurais dû me le laisser.
Le démon Fondateur demeura quelques instants interdit, puis il éclata d'un rire rocailleux. Il tendit la main vers le tanuki pour l'aider à se relever. Shukaku accepta l'aide de bon cœur. Son sourire joyeux était réapparu sur ses lèvres.
-En tous cas, il en menait pas large, quand t'as débarqué ! Railla-t-il, une fois debout. Faut dire que tu t'es bien foutu en rogne, vieux clébard ! Ca faisait longtemps que je t'avais pas vu comme ça !
-Et toi donc ! Rétorqua le chien en désignant l'élastique qu'il tenait toujours autour de son poignet.
-Bah, il était fatigant, ce feu follet. Fit le démon en rattachant ses cheveux. Sa mine s'assombrit quelques instants. Par contre, pour…tout ça, c'est moi qui ai semé, c'est moi qui récolte, OK ?
Cerbère le dévisagea avec un regard compréhensif, qui ressemblait presque à de la tristesse. Il hocha la tête.
Shukaku retrouva aussitôt le sourire. Il se tourna vers son hôte.
-Et toi, gamin, t'es entier ?
L'autre acquiesça. Il n'avait pas été la cible principale de l'Illustre démon, et il n'était même pas blessé. Mis à part de bénignes brûlures occasionnées par la chaleur que dégageaient les sortilèges Kâton, et qu'il sentait à peine.
-Hm, vous avez eu de la chance, tout de même, soupira Cerbère, bien, j'ai cru comprendre que vous souhaitiez quitter Abysse. Ton séjour prolongé de l'autre fois ne t'a pas suffit, Shukaku ?
L'autre secoua la tête, avec une expression qui ressemblait de plus en plus à de l'hilarité.
-Là, c'est pas pareil ! Se défendit-il. Le gamin doit retourner chez lui pour vérifier des trucs.
-Il ne va pas nous trahir, au moins ?
Son ton relevait presque de la plaisanterie.
-J'ai juré de ne pas le faire, dit Gaara, rompant à contrecœur son propre silence, si ma parole vaut quelque chose.
Cerbère le considéra un moment. Son regard s'attarda quelques instants sur le torse du shinobi, et une expression indéchiffrable apparut sur son visage. Il répondit d'un ton dégagé :
-Certaines personnes ne sont pas comme les autres. C'est pour ces personnes-là que nous avons créé Abysse, et c'est en ces personnes-là que nous faisons confiance. Je te souhaite de ne pas mourir en chemin.
Il rangea sa première clé, et ressortit la plus volumineuse. Cette clé vieille et rouillée, qui ouvrait la vieille porte tordue de la cité démoniaque. Il l'engagea dans la serrure, et écarta les lourds battants de ses deux bras courtauds.
-Par contre, prévint-il, nous sommes assez loin de Suna. Nous nous sommes beaucoup déplacés vers le Nord, dernièrement. Dans cette chienne de dimension parallèle, pas moyen de savoir où on peut se retrouver ! Ca me rappelle il y a cinq mille ans, quand on s'est perdu en plein océan ! Quel cirque…Il va vous falloir voyager un peu.
-Pas de problème ! Pas de problème ! Assura Shukaku, qui déjà s'engageait entre les battants de bois. Ca nous fera voir du pays ! Allez, à plus, vieux clébard !
Le gardien d'Abysse le regarda un moment avec une sorte d'attendrissement. Puis il hocha la tête et marmonna d'un ton bourru :
-A dans cinq siècles, tel que je te connais ! Essaye tout de même de faire un peu attention à toi, tu serais capable de te faire enfermer dans une porcelaine.
Le démon émit un joyeux éclat de rire et se rua à l'extérieur, Gaara à sa suite. Celui-ci avait de quoi s'interroger, avec le singulier discours qu'avait tenu l'Illustre démon, sur Shukaku et également sur lui. Mais pour l'heure, ses pensées étaient ailleurs. Très loin. Elles volaient au-dessus des dunes de sable, sous un soleil de plomb, portées par un vent sec et mordant. Il allait éclaircir tout cela. Il allait enfin comprendre. Et puis, il retournait dans son désert.
Il rentrait à Suna.
Fiouuu…Encore un chapitre de bouclé ! Shukaku nous cacherait-il des choses ? En promo, un mini paragraphe sur Sekhmet et deux-trois phrases sur Ifrit:
Sekhmet : déesse égyptienne vénérée à Memphis, son nom signifie « la puissance ». Elle est souvent représentée sous la forme d'une femme à tête de lionne, portant le sceptre et l'Ankh, symbole de la vie. Avec sa force dévastatrice, elle incarne la guerre et la puissance. Elle apportait également des épidémies, mais comme certains de ses pouvoirs écartaient les maladies, elle était aussi la protectrice des médecins et des magiciens !
Ifrit : J'ai moins d'informations sur celui-là…Il s'agit d'un génie du feu de la mythologie arabe. Ils avaient non seulement le pouvoir de commander au feu, mais aussi celui de passer au travers des murs, des arbres, etc.
