L'ENFANT-DEMON
Auteur : Une cinglée comme on en voit tant, complètement dingue de Gaara mais un tantinet masochiste, on me nomme Stingmon XD !
Genre : C'est pas facile de faire des poèmes tout le temps, alors m'en voulez pas trop si ça tourne parfois au Action/Adventure tout court…TT
Disclaimer : Que je n'aime pas ça…Bon, O.K, je me lance : Gaara n'est pas à moi, Shukaku non plus mais il est OOC. Par contre, tous les autres démons mis à part les Bijuus sont à moi et rien qu'à moi XD !
Couples : Comme vous l'avez peut-être deviné, il n'y a pas non plus de GaaraXIfrit dans cette fic ! (ça va devenir compliqué de trouver un couple improbable par chapitre XD)
Réponses aux reviews :
Vilaine Nadramon : Merci pour avoir répondu au chapitre 6 (à défaut d'avoir commenté le 5… . ) Mouarf, tu vas voir ça va saigner quand je vais reviewer TON chapitre…Contente qu'Ifrit ne t'ai pas plu (lol)!
Twin Sun Leader : TT Tu commentes toujours chacun de mes chapitres je suis si EMUE dans mes bras ma Leader ! Et oui…Shukaku n'est peut-être pas un démon si désinvolte que ça, finalement…Enfin, je voudrais pas dévoiler toute l'histoire ici lol !
Karasu999 : Des fanarts de ma fic ? Ce serait super bien, j'adorerais ! Hem…Le problème, c'est que je suis complètement nulle en dessin, et ma sœur a encore du mal avec les humains…TT Mais si quelqu'un voulait bien illustrer l'Enfant-Démon, je serais vraiment aux anges ! Pour ma part, j'ai entendu dire qu'Ifrit pouvait aussi s'écrire « Efreet », alors je me suis pas cassé la tête et je l'ai juste appelé « Ifrit ». Après, peut-être que tu as raison…Si c'est le cas, je m'en excuse. Quoi qu'il en soit, merci pour ton commentaire !
Elenthya : Youpi, encore une review pleine d'enthousiasme ! C'est peut-être un peu dommage de planter Abysse comme ça, alors qu'on ne connaît pas encore tous les Fondateurs, par exemple…Mais j'ai trouvé ça nécessaire : d'abord, parce que ça aurait pris trop de chapitres, et ensuite pour des raisons de crédibilité. Je tenais à mettre en scène le fait que, quand on a une quête, il arrivera souvent de devoir laisser quelqu'un ou quelque chose derrière soit, souvent sans l'avoir vraiment compris…Il y a des choses qu'il faudra sacrifier au profit du but principal. Mais je sens quand même que je vais un peu regretter les paysages invraisemblables d'Abysses, que je mettais une demi-heure à décrire XD !
Annonce : On m'a soufflé l'idée (merci Karasu :-)) qu'il pourrait être sympa de faire des fanarts de l'Enfant-Démon. Je trouve cette idée excellente, mais il y a un tout petit bug : je suis nulle en dessin…TT Alors s'il y a quelqu'un que ça intéresse, eh bah qu'il se gêne pas pour mettre des personnages, des paysages, des scènes ou n'importe quoi sur le papier à dessin ! Vous pouvez sans problème m'écrire si vous avez besoin de détails (les chaussures de Satan, par exemple…XD), il n'y a QU'UNE SEULE REGLE : vous me les montrez quand vous avez fini :-) !
Chapitre 7: Dans les montagnes
Les hauts murs d'Abysse ne tardèrent pas à s'estomper dans le décor rocheux, à mesure qu'ils progressaient. Shukaku bondissait sans ralentir, ses pieds nus fouettant la roche à chacun de ses sauts. Les quelques brûlures qui barraient ses bras et ses jambes l'empêchaient d'atteindre sa vitesse maximale. Pourtant, à aucun moment il ne laissa apparaître un quelconque signe de fatigue.
Le paysage qui défilait autour d'eux était aride et accidenté. De hautes montagnes aux pics enneigés, sur lesquelles ne poussait que peu de végétation, mis à part quelques sapins fripés comme de vieux parapluies, fendaient l'horizon. Leur route, qui serpentait entre les montagnes et parfois escaladait des cols, était tout aussi peu engageante : beaucoup de rochers, quelques plantes rampantes se traînant lamentablement sur le sol et du lichen. La matinée avançait bien, et de gros nuages gris s'amoncelaient déjà dans le ciel. Ils traversèrent un pierrier, à flanc de montagne. Des cascades de petites pierres roulèrent à chacun de leurs pas en cliquetant. Le vent était un peu froid.
Leur course les amena à un col, en hauteur, d'où ils pouvaient inspecter les environs. Le tanuki s'immobilisa aussitôt, et poussa dans l'air matinal un hurlement suraigu. Simple habitude.
-Tu ne devrais pas faire autant de bruit, Shukaku, lui reprocha Gaara, qui s'était arrêté à ses côtés ; il ne faut pas attirer l'attention sur nous.
L'autre haussa les épaules. Il se laissa tomber en position assise et étira ses bras écorchés avec décontraction.
-Ca servirait à quoi ? Rétorqua-t-il joyeusement. Ici, c'est nous les plus balèzes, gamin ! Je vois pas pourquoi j'irais me cacher dans un trou !
Le jeune shinobi soupira, mais n'insista pas. Il parcourut le paysage du regard, cherchant à visualiser mentalement la carte du monde le plus précisément possible. Cerbère les avait prévenus qu'Abysse s'était décalée au nord par rapport à Suna. Donc, d'après l'aspect général des lieux, ils se trouvaient quelque part à Iwa no kuni. Pour rejoindre son désert, il faudrait continuer d'avancer plein sud, en traversant Ame no kuni, le pays de la Pluie. Encore fallait-il se situer dans le vaste pays de la Terre. Il continua de scruter le décor, à la recherche d'une trace de vie humaine.
Le démon dut remarquer son air concentré, car il se releva et survola lui aussi l'horizon du regard. Ses pupilles dorées s'agrandirent dans ses prunelles noires. Au bout de quelques secondes à peine, un sourire triomphant apparut sur ses lèvres. Il désigna du doigt une direction.
-Il y a un village, là-bas, fit-il, petit, on dirait. Je suppose qu'il va falloir aller là-dedans, histoire de voir un peu où on a atterri !
Gaara se tourna vers l'endroit indiqué. Rien. Il le fixa à s'en décrocher les globes oculaires, en vain. Remarquant ses efforts infructueux, le tanuki éclata d'un rire railleur.
-C'est pas seulement pour le style, que j'ai des yeux en losange, tu sais ! Je vois plus loin que la moyenne ; pas mal, nan ? Allez, on décolle ! Il est plutôt loin, autant pas traîner !
Sur ce, il reprit sa cavalcade effrénée, non sans effectuer au passage un ou deux saltos. Gaara s'élança également.
Ils parcoururent encore un certain nombre de kilomètres, sans ralentir de toute la mâtinée. Vers midi, cependant, la faim et l'essoufflement eurent raison de leur résistance, et ils firent une pause pour se restaurer. Le village, niché entre deux montagnes et protégé par une palissade, était enfin visible.
-Il faudra que j'y aille seul, dit Gaara, aillant achevé un repas léger.
Ils avaient fait halte dans une petite vallée, au bord d'une source. L'humidité que procurait le mince filet d'eau avait permis à une herbe basse et à de petites fleurs discrètes de pousser entre les cailloux. Le garçon avait posé sa calebasse à côté de lui, et se tenait blotti entre deux rochers pour se protéger de la morsure du vent, mal protégé qu'il était par son kimono de toile. Assis de cette manière, les bras enroulés autour de ses genoux repliés, il paraissait plus frêle encore.
De surprise, Shukaku manqua de recracher le sandwich qu'il s'était enfoncé dans la bouche. Il dut prendre le temps de mastiquer et d'avaler le tout avant de lancer :
-Et on peut savoir pourquoi ?
Il ne répondit pas immédiatement, et regarda les alentours. De temps à autre, une petite marmotte pointait le museau hors de son terrier, ou galopait le long d'une pente. De minuscules oiseaux survolaient le ciel gris en émettant un pépiement aigu. Mais pas une trace de vie humaine. Si près du village, c'était étrange.
-Ton chakra, tes yeux…Tu ressembles à un démon, même avec cette apparence. Les habitants risquent de se méfier. Je vais devoir acheter des capes, pour nous deux.
Il s'interrompit, puis ajouta pensivement :
-Plus nous approcherons de Suna, plus le risque de se faire identifier sera grand.
Le démon fit mine de protester, mais il se ravisa et se laissa tomber en arrière avec un soupir agacé.
-Mince, on est pas chez les Illustres, ici ! Marmonna-t-il. Enfin, tu fais comme tu veux, gamin. Je vais poireauter ici, en attendant. Mais t'es prévenu : si je sens que tu utilises ton chakra pour te battre, je rapplique ! Pas question de te laisser t'éclater tout seul !
Gaara inclina la tête. Il se releva lentement, récupéra son arme minérale et se remit en route, laissant derrière lui un tanuki avachi, les bras croisés derrière la tête, manifestement prêt à faire un somme.
Le village paraissait plus petit encore, vu de près. Il était traversé par un torrent, qui produisait un bruit de fond régulier, semblable à un grondement d'animal. Les maisons étaient basses, construites exclusivement en pierre, d'après ce qu'il avait pu voir. Mais maintenant qu'il se trouvait face à l'entrée, il ne pouvait plus rien en dire. La haute palissade bloquait entièrement son champ de vision. Apparemment, elle avait été bâtie récemment. La porte, directement découpée dans le bois, était surmontée du nom du village « Gareki ». Deux ninjas, armés de sabres, gardaient l'entrée.
En le voyant approcher, les deux hommes eurent un mouvement de recul. L'un d'eux, le plus jeune d'après son aspect, poussa un bref cri de peur et dégaina son arme.
-A…Arrière, démon ! Bégaya-t-il.
Gaara s'immobilisa. Se pouvait-il qu'ils sachent…
L'autre, plus âgé et corpulent, réagit moins brutalement. Il porta tout de même la main à son fourreau, et dévisagea le nouveau venu avec une méfiance non dépourvue d'une certaine crainte.
-Attends, Nurasu, dit-il après un long examen, il ne correspond pas au signalement qu'on nous a donné.
-Mais…On nous a bien dit « Un gamin à l'air sombre » ! Rétorqua le dénommé Nurasu, qui maintenant tremblait comme une feuille.
-Regarde-le trois secondes, au lieu de te cacher derrière ton sabre ! Grogna l'autre, agacé. Tu t'apercevras qu'il a les cheveux rouges et pas blonds ! De plus, on ne nous a pas parlé d'une espèce de gourde qu'il transporterait avec lui. Et si ça ne te suffit toujours pas, jette donc un coup d'œil à son bandeau frontal, et tu verras que c'est un ninja de Suna no kuni.
L'interpellé examina le possédé avec hésitation. Ce qu'il voyait parut le satisfaire, car il se redressa et rangea son arme. Il continua néanmoins de le surveiller attentivement. Gaara remarqua qu'ils avaient sur eux une quantité invraisemblable de shurikens, de kunais et autres outils de mort. Un tel attirail pour défendre ce simple pâté de constructions perdu en pleine montagne…
-Que viens-tu faire par ici, gamin ? Interrogea l'aîné, suspicieux. Tu devrais savoir qu'il est imprudent de se risquer hors des villages, avec la menace qui pèse actuellement.
L'interpellé garda le silence quelques instants avant de répondre. De quelle menace pouvait-il bien s'agir, de quel démon ? Un jeune démon aux cheveux blonds, voilà qui lui aurait immédiatement rappelé Naruto, ce ninja de Konoha qui avait été le premier à le vaincre. Mais l'allusion à « l'air sombre » étayait son hypothèse. Et puis, que viendrait-il faire par ici ?
Malgré son incertitude, il jugea plus prudent de ne pas interroger ces deux gardes, décidément trop méfiants. Mieux valait ne pas attirer l'attention sur lui. Sans doute pourrait-il se renseigner à l'intérieur…
-Je cherche à retourner à Suna, lâcha-t-il finalement, je suis venu ici en quête de matériel.
Quand on était par nature incapable de mentir, il était important de parler de manière elliptique…
Le garde parut sur le point de poursuivre son interrogatoire, puis il soupira et esquissa de la main un vague geste de renoncement.
-Bah, après tout…Grogna-t-il. Tu n'as l'air ni d'un brigand, ni d'un démon, et je n'ai franchement pas envie d'avoir trop affaire avec les ninjas étrangers. Ah, mais quand même ! C'est le deuxième gamin qui se promène tout seul dans la même semaine ! Les gosses d'aujourd'hui sont d'une imprudence suicidaire…
Il ouvrit la porte de la palissade, tandis que Nurasu le fixait d'un air ahuri.
-Le DEUXIEME ? S'exclama-t-il. D'où est-ce que tu sors qu'il y a eu un autre gamin ?
-Je le sors d'il y a cinq jours, quand tu t'es endormi à ton poste. Et pour ta gouverne, il s'agissait d'une gamine. Une drôle de fillette qui disait être une invocatrice en voyage initiatique. Elle est repartie le lendemain, mais toi, tu n'étais pas de garde.
Curieusement, un frisson lui parcourut l'échine, et une brève lueur apeurée apparue dans ses yeux.
-Invocatrice à cet âge-là…Malsain, ça.
Gaara pénétra dans l'enceinte du village, sans plus se préoccuper des deux mercenaires, qui s'étaient lancés dans une vive dispute pour délibérer de leurs zèles respectifs. L'endroit avait un aspect délabré, malgré l'indéniable solidité des constructions. La cause incombait sans doute davantage à la sobriété de celles-ci, simples sphères en pierre de petite taille. On entendait toujours le sourd grondement du torrent, et il planait une légère odeur de poussière. Les rues étaient étroites et tortueuses, les nombreux habitants qui déambulaient avaient tous la même expression tendue sur le visage. De petits groupes discutaient à voix basse, leurs murmures se fondant dans la rumeur de l'eau. Certains jetèrent un coup d'œil prudemment désapprobateur à son bandeau frontal, mais le plus souvent sa présence ne suscita que l'indifférence générale. Tous ces gens semblaient craindre quelque chose…mais quoi ?
Le shinobi de Suna commença à parcourir les lieux, cherchant du regard une boutique susceptible de lui fournir ce dont il avait besoin. Tout en marchant, il ouvrait les oreilles le plus grand possible, à l'écoute des conversations. Il ne pouvait toutefois se permettre de stationner devant un groupe, si bien que, le plus souvent, seuls d'insignifiants fragments de dialogues lui parvenaient.
-…qu'il a été vu à l'ouest du pays, il a…
-…un charlatan, il ose se prétendre médecin ! Si j'étais toi, je…
-On prévoit de fuir Iwa avant que le pays tout entier…
-…de plus en plus de mioches étrangers, c'est…
-Une invocatrice ? Mais ces gens ne sont-ils pas…
-…un jour en face de ce démon, ne fuis pas. C'est se fatiguer pour rien. Quoi que tu fasses, il…
-…un art maudit ; tous les invocateurs finissent…
-La peste soit de cette créature !
-…que tu quittes le village ! Sous aucun prétexte ! Les temps sont néfastes.
-Mais d'où sort donc ce fléau ?
Gaara s'immobilisa. La chance lui souriait, apparemment. Deux hommes, dont l'un venait de poser la question, se faisaient face non loin d'une boutique proposant nombre d'articles de voyage. Qui plus était, ils parlaient fort, d'une voix rauque et dégagée, sans souci de demeurer discrets. Saisissant l'occasion d'en savoir davantage, il s'approcha et fit mine d'étudier du regard les objets, vêtements et cartes exposées.
-Ca, y'a personne qui l'sait vraiment. Paraît qu'un p'tit village, à la frontière, a été comme qui dirait réduit en cendres quand la bestiole est née. Y'a plus rien qu'un cratère fumant, là-bas. Pendant plus de dix ans, les pauvres gars qui sont passés par là ont tous disparu, on savait pas pourquoi, ouais. On dit qu'la chose a comme qui dirait survécu toutes ces années, et que là elle ratisse Iwa et démolit tout en passant, il paraît.
« Moi, j'ai jamais vu, mais j'ai écouté ceux qui ont vu, ça oui ! Ben ce monstre, tu croises son regard, c'est la mort ! Paraît qu'les ninjas du pays, les Anbus là, ils se sont comme qui dirait tous fait exterminer par lui, quand ils ont voulu l'faire crever. Y'a des chasseurs de démons qui parcourent tout l'pays, à ce qu'on dit. Des sales types, m'est avis. Ces gars-là, ils sont au moins aussi dangereux qu'les démons qu'ils chassent, tu vois. Ils te trancheraient la tête avec un d'leur sale tour sans vérifier si t'es un humain ou pas. En plus, avec tout ça, y a comme qui dirait plein de brigands qui rasent tous les villages qui sont isolés par tout ça, ça oui ! Sale temps. Les démons, ça apporte rien qu'ça : du désordre partout. Moi, j'sors plus du village avant qu'ce soit calmé, tout ça.
-Bon sang ! Les Anbus eux-mêmes ! Cette créature serait donc invincible ?
-Il paraît. En tout cas, moi, j'viendrai pas m'frotter à elle, ça non ! Une sale bête, pour sûr.
-Les ninjas d'Iwa devraient nous protéger contre de telles catastrophes ! C'est une honte !
La conversation se poursuivit, désormais centrée sur la regrettable incompétence des shinobis locaux. Gaara jugea en avoir suffisamment entendu, et il pénétra dans la boutique pour choisir des cartes.
Cette rumeur sur les démons le tracassait. Il ne savait pas exactement de qui il s'agissait, ni quelle était son histoire. Il ignorait à quel point le récit du villageois avait été déformé par les rumeurs, exagéré par la crainte. Après tout, certains villages relativement proches de Suna avaient auparavant entendu parler de l'arme suprême du pays comme d'un monstre grand comme un ours, capable de fendre la roche de son seul regard et de bannir toute vie d'une région entière d'un simple claquement de doigts…Les potins allaient bon train, alimentés par la peur. Ce n'était pas Gaara qui l'ignorait. Cependant, il ne faisait aucun doute qu'un démon, ou un humain marqué par le Diable, provoquait nombre de ravages au pays de la Terre. Un démon sanguinaire qui restait toujours seul. « Comme moi, il n'y a pas si longtemps… » Ne put s'empêcher de songer le shinobi.
Il repéra enfin une carte détaillée du pays, qu'il consulta rapidement. Dans cette vaste contrée, on se repérait principalement grâce aux différentes montagnes, et aux grandes villes disséminées dans les plaines et sur les plateaux. Le rouleau indiquait tout de même les noms de certains petits villages, notamment aux endroits les plus isolés, où l'on ne risquait pas de dénicher une quelconque ville importante. Aussi put-il trouver Gareki, niché entre les deux montagnes jumelles qui portaient le même nom : « Sôseiji ». Il constata avec soulagement que le village était situé nettement plus au sud d'Iwa qu'en son centre. Ils avaient tout de même du chemin à faire, avant de rejoindre la frontière d'Ame.
Il choisit également deux tenues de mercenaires, deux longs manteaux gris sombre aux manches larges, pourvues de capuches masquant entièrement le visage. Satisfait, il acheta le tout au vendeur sec et myope, ses énormes lunettes rondes penchées sur ses comptes, qui lui accorda à peine un regard.
Il ne s'attarda à Gareki que le temps de consulter plus profondément la carte, dans une rue vide et sombre. L'endroit était décidément trop imprégné par la peur, l'air en était presque saturé. Il chercha du regard un itinéraire qui lui permettrait de rejoindre rapidement la frontière sud, sans croiser les grandes villes. Il ne tenait pas à se rendre dans ce genre de lieu, où les gens risquaient fort d'être mieux informés que dans ces trous perdus au milieu des montagnes. Il risquait d'y croiser des ninjas, peut-être davantage au courant des derniers événements survenus à Suna, et il ignorait si cela le mettait en danger ou non. Il ne tenait pas à le savoir dans l'immédiat. Par ailleurs, il préférait demeurer loin des foules.
Fort heureusement, les villes étaient suffisamment espacées pour lui permettre de les éviter sans rallonger de manière significative leur trajet. En progressant à un bon rythme et sans faire trop de mauvaises rencontres, ils atteindraient la frontière au bout d'environ une semaine. Pourtant, il doutait quelque peu des chances qu'avait la seconde condition de se réaliser…
Un brusque élancement, au niveau de ses méridiens, le tira de son immobilité songeuse. Cette sensation qu'on tiraillait son propre chakra…Cette impression de mouvement, alors qu'il n'avait pas esquissé un geste…
Shukaku était en train de se battre !
Son premier réflexe fut de se précipiter dans la direction que lui indiquait le courant d'énergie. Mais il se ravisa à temps. Ne pas attirer l'attention. Ne pas attirer l'attention. Il se força à adopter une marche vive mais dégagée, et se dirigea tout droit vers les portes du village. Quand il sortit, les deux gardes se disputaient toujours avec véhémence, le plus jeune faisant mine de dégainer son sabre. Ce fut à peine s'ils constatèrent la présence de Gaara. Celui-ci attendit tout de même de se trouver hors de leur champ de vision, après quoi il se mit à courir. Il ignorait lui-même si c'était pour Shukaku ou pour ses adversaires qu'il craignait.
Le démon s'était déplacé, manifestement. Le garçon retrouva leur sac, laissé à l'abandon là où ils avaient fait halte pour se restaurer. Il le récupéra, y fourra la carte et les vêtements, puis il reprit sa poursuite, bondissant de rochers en rochers. Le décor défilait autour de lui, les rares traces de végétation disparurent peu à peu, remplacées par des roches nues et acérées, de tailles variées, qui formaient un fantastique labyrinthe. Il avait beau se percher systématiquement sur les plus hauts amas pierreux, sa vue était toujours bloquée par quelque chose qui gênait sa progression. Le sol s'éloignait peu à peu.
Un hurlement strident se fit entendre, suivi du rire hystérique qui caractérisait le tanuki millénaire. Gaara accéléra encore. Il hésitait à bloquer ou à faciliter la circulation de son chakra. Ce qui avait autrefois dû être un rocher en forme de pic, du temps où il était encore entier, lui indiqua qu'il se trouvait dans la bonne direction. Comme s'il en avait eu besoin, avec les glapissements de plus en plus proches du démon…
Arrivé sur une plate-forme élevée, il s'immobilisa. En face de lui se trouvait un vaste trou dans le labyrinthe rocheux. Il parcourut la scène du regard, paralysé.
L'endroit aurait merveilleusement convenu à une embuscade, avec les nombreuses plates-formes qui l'entouraient, et les maintes roches qui gênaient les mouvements, s'il n'avait été consciencieusement saccagé par une tempête venteuse. Les obstacles avaient tous été broyés, balayés, repoussés au loin, suivant leurs natures. Du liquide vermeil se mêlait à la poussière, teintant le cimetière de pierre d'une lueur rougeâtre.
Au milieu du sinistre, Shukaku se tenait debout, une lueur malsaine dans son regard or. Ses vêtements portaient quelques traces de poussière et de sang, mais lui-même était indemne. De petites pointes de sable étaient accrochées aux articulations de ses doigts, ses longues mains fines étaient poisseuses de sang. Une masse brisée gisait à ses pieds. Le vent sifflait autour de lui, témoin de son excitation.
En face, tremblants de peur, une poignée d'hommes trapus, barrés de cicatrices et pourvus d'armes hétéroclites se tassaient misérablement contre une paroi de roche. Leurs yeux effarés s'agitaient frénétiquement, à la recherche d'une mince chance de s'échapper. Les brigands avaient été plus nombreux, lors de leur embuscade. En tous cas, la pierre n'était pas la seule matière à avoir été broyée et balayée, sur le champ de bataille. Et le démon ne semblait pas en avoir fini…
Un tel massacre…Si semblable à tant d'autres…
Tellement de morts…
« Non…Songea Gaara. Il ne faut pas que cela recommence… »
Shukaku émit un ricanement moqueur, et lécha négligemment ses doigts enduits d'écarlate. Il s'approcha de ses victimes, sans se presser. Son sourire malsain s'élargit quand il les vit se tasser encore davantage en gémissant.
-Alors les rigolos, on joue plus ? Faudrait savoir ce que vous voulez !
Il se jeta sur eux avec un hurlement suraigu. Gaara se téléporta immédiatement devant le groupe d'hommes. Un mur de sable s'éleva entre lui et le démon, le protégea du choc. Les bandits écarquillèrent les yeux, interloqués par cette nouvelle apparition. Mais le jeune garçon ne se préoccupa pas d'eux, pas même pour leur ordonner de fuir. Ses deux perles de verre ne quittaient pas les losanges dorés du tanuki. Le temps parut s'arrêter. Tous deux restaient immobiles, tendus. Pendant quelques secondes, l'éclat de démence perdura dans le regard de Shukaku, avant de décroître. Les griffes de sable se désagrégèrent et dégoulinèrent le long de ses doigts.
-C'est toi, gamin ? Demanda-t-il, un peu troublé.
Il regarda autour de lui, considérant sans émotion particulière le carnage qu'il avait provoqué. Il observa avec la même surprise passablement désintéressée les brigands qui s'enfuyaient dans un beau désordre. Il baissa de nouveau les yeux sur son hôte, interrogateur. Manifestement, la raison pour laquelle Gaara s'était interposé lui paraissait mystérieuse.
Celui-ci se laissa tomber sur le sol en position assise, et se passa une main sur le visage. Ses doigts tremblaient.
Cette lueur dans le regard…La même que celle qu'il avait eue si longtemps…
Shukaku l'avait aidé…Il avait tellement besoin d'aide…
Shukaku était un démon. Un démon qui l'avait soutenu, lui avait offert sa protection, mais un démon. Ils étaient les mêmes. Ce jeune homme nonchalant aux yeux étranges qui avait choisi de le parrainer…Il était également ce gigantesque monstre trapu, coupable de tant de massacres, qui hurlait de ravissement à la seule vue du sang...Celui qui avait vécu sous sa peau, qui lui avait communiqué sa soif du carnage…Ils étaient la même personne. L'avait-il oublié ?
Il ne se préoccupait plus vraiment du monde extérieur. Aussi mit-il un certain temps à prendre conscience du regard doré qui le fixait avec insistance. Il releva lentement la tête. Le tanuki s'était assis en tailleur, penché en avant pour que sa tête parvienne à la hauteur de celle de son hôte. Son expression surprise avait quelque chose de presque comique.
-Et ben, gamin ? Y a un problème ?
Peut-être était-ce une simple impression, mais il sembla à Gaara que sa voix s'était adoucie. Il contempla ses doigts rouges, poisseux, son kimono trempé d'écarlate, puis ses yeux revinrent se poser sur le garçon. Il eut un petit rire amer.
-J'ai encore fait une connerie, c'est ça ?
L'autre laissa échapper un faible soupir. Une soudaine lassitude s'était emparée de lui. La voix douce de Baku s'était mise à raisonner dans son esprit.
« Il m'est apparu, je me suis persuadé, au fil des jours, des mois et des années, que les demis ne se mêlent pas aux humains, et que le calme ne vient pas quand on voyage en quête de l'impossible. »
-C'est ce que sont les gens comme…comme les habitants d'Abysse.
Il avait hésité à dire « les gens comme nous ».
Shukaku secoua la tête.
-Et meeerde. Si maintenant on peut même plus s'éclater un peu de temps en temps…C'est quand même pas un crime, non ?
C'était probablement ce qu'il devait considérer comme une plaisanterie. Mais, voyant que son hôte ne se déridait pas, il se tut un moment. Sa mine était devenue préoccupée. Il balança la tête d'un côté et de l'autre, en pleine réflexion, avant de reprendre :
-Bon, OK gamin, j'ai compris. Raser le décor, c'est drôle, c'est mal, Shukaku méchant. Mais tu sais, je vais pas forcément faire le fou furieux toute la durée de la mission ! Tiens, je veux bien promettre de me tenir plus ou moins à carreau, si tu veux !
Cette fois-ci, l'abattement s'estompa un peu dans les yeux turquoises de Gaara, masqué par une franche surprise.
-Pardon ? Balbutia-t-il.
-Mais oui ! Tiens, regarde, je me calme !
Il se redressa promptement et recula de quelques pas, là où il pouvait disposer de plus d'espace. Sous le regard interloqué de son hôte, il s'y tint immobile, les yeux fermés, et respira plusieurs fois profondément. Une légère brise se mit à souffler, fit rouler la poussière sous ses pieds nus, agitant à peine sa tunique grise. Ce vent-là était bien trop faible pour servir à une technique de Fûton, et pourtant le démon ne semblait pas vouloir en intensifier le flux.
Enfin, il leva les bras devant lui, et tourna lentement, gracieusement sur lui-même. Le vent suivait ses mouvements. D'autres pas suivirent. Ses bras faisaient dans le vide des tracés souples, son corps s'arquait à mesure que ses gestes devenaient plus rapides et compliqués. Son visage était devenu songeur, ses losanges dorés scintillaient, il paraissait en transe. Son pied frappait le sol dynamiquement, marquant une cadence rythmée pour la mélodie imaginaire qui guidait ses pas. La brise tournoyait autour de lui, chassait les traces de sang qu'il avait sur les mains et les vêtements, accompagnait ses gestes. Shukaku dansait.
-Et voilà ! S'exclama-t-il, quand il eût fini, la mise aussi impeccable que s'il n'avait jamais touché une arme. Je te promets que tant qu'on bossera ensemble, je ferai de mon mieux pour tuer personne sans raison ! Promesse d'un con pas fichu de manquer à sa parole ! T'arrêtes ta déprime, maintenant ?
Gaara ne répondit pas, trop étonné par les réactions du tanuki. Pourtant, il sentit distinctement le furtif éclat de soulagement, sur son visage fermé. Il se releva et, après un moment d'hésitation, hocha la tête. Le démon se remit aussitôt à sourire.
Pendant un court instant, il sembla à Gaara que ce sourire avait quelque chose de douloureux. Quelques minutes plus tard, Shukaku s'était remis à hurler joyeusement, et il n'y pensa plus.
-Un démon dans le coin ?
Son vêtement de mercenaire ramené sur ses épaules, Gaara hocha vaguement la tête, sans détacher son regard du ciel noir, sans étoile, qui ondulait au-dessus d'eux. Ils ne s'étaient arrêtés que tard dans la nuit.
Il avait relaté à son démon les conversations surprises à Gareki, mais celui-ci semblait peu intéressé. Dénigrant son propre manteau, il restait assis, exposé au vent nocturne, sans paraître souffrir de la morsure du froid. Ils avaient jugé peu discret d'allumer un feu pour la nuit, et pas indispensable. Plus ou moins habitués aux nuits glaciales du désert, celles d'Iwa ne les inquiétaient pas vraiment. Par ailleurs, les ténèbres n'étaient pas une grande contrainte pour leurs yeux de démons. Les deux perles de verre de Gaara sondaient sans difficulté les formes sombres et indistinctes du paysage. Quant aux yeux jaunes du tanuki, ils brillaient dans l'obscurité comme de l'or en fusion.
-Etant donné la rumeur concernant le village détruit, plutôt un enfant marqué par le Diable, se décida à répondre Gaara.
-Ouais, je suppose. Il doit pas être bien fort, alors. On a qu'à pas s'en occuper.
Il éclata d'un rire enjoué.
-Il a l'air de se passer des trucs marrants, par ici ! Des démons, des brigands, des Anbus…On a débarqué au bon moment, gamin !
-Des chasseurs de démons, aussi…Continua lentement le garçon. On raconte que ce sont de puissants manipulateurs de Juuinjutsu.
L'espace d'une seconde, il crut voir une ombre passer dans le regard du démon. Mais, avec le faible éclairage, il n'y avait aucun moyen d'être sûr. Shukaku répliqua d'un ton désinvolte :
-Des fossiles et des idiots. On s'occupe pas d'eux non plus.
Gaara garda le silence un moment, intrigué. Qu'un démon accordât si peu d'intérêt à la présence de créateurs de sceaux et de sortilèges, ces arts même qui constituaient le point faible des êtres démoniaque, lui semblait pour le moins déraisonnable. Mais il connaissait désormais le caractère nonchalant du tanuki. Aussi choisit-il de changer de sujet.
-Ils ont parlé d'invocateurs. Cette pratique les effrayait, apparemment. Je n'ai pas eu l'impression qu'il s'agissait de l'appel d'animaux ninjas par dons de sang.
Le problème parut éveiller l'attention de Shukaku. Il s'abîma lui aussi dans la contemplation du ciel, ses sourcils clairs froncés par son effort de réflexion. Enfin, un sourire satisfait indiqua qu'il venait de trouver une réponse.
-J'en ai entendu parler, il y a longtemps. Dit-il joyeusement. C'est vrai que c'est pas très courant, à Suna…Je crois que ça n'a rien à voir avec les pratiques ninjas : un invocateur très doué serait sûrement capable de prendre un kunaï pour une barrette !
Il éclata de rire, se plaisant sans doute à imaginer la scène.
-L'invocation est un art compliqué, que les humains se transmettent de parents à enfants comme s'ils avaient des pouvoirs héréditaires. C'est pour ça que seules de très anciennes familles le pratiquent. Du coup, on sait pas très bien comment ça marche. Ils font appel à l'esprit d'un certain nombre d'animaux doués de pouvoirs magiques, et peuvent les faire apparaître sous plusieurs formes différentes : les forme Primaire, Intermédiaire et Définitive pour la puissance, les éléments Air, Terre, Eau et Feu pour l'aptitude. Ils se déplacent toujours seuls pour se perfectionner. Ils peuvent faire beaucoup de choses, et je suppose que ce serait pas compliqué pour un bon invocateur de rivaliser avec un shinobi…C'est peut-être pour ça qu'ils font peur à tout le monde…
-Comme pour les détenteurs de pouvoirs héréditaires, commenta Gaara.
-Plus, même, assura Shukaku, qui était maintenant allongé à même le sol avec décontraction pour regarder le ciel, ils fichent une trouille bleue aux humains ! T'imagines, certains les trouvent même pires que les démons ! Ils disent que l'invocation est un art maudit. Même il y a mille ans, la rumeur circulait que les pratiquants finissaient tous par perdre leur humanité. J'ai lu un vieux bouquin là-dessus, un jour. Y a un passage que j'ai trouvé rigolo…
Il se tut un moment, son regard un peu crispé par sa concentration soudaine.
-Ah ! Voilà ! Fit-il enfin. « Détournez-vous des Invocateurs, qui ont abandonné leur âme humaine au profit de celle, trompeuse et changeante, des Maîtres des Esprits ! » Digne d'un discours de Sphinx, acheva-t-il en pouffant de rire.
-A Iwa aussi, les temps sont troublés…Murmura le Kazekage déchu, sans quitter des yeux le ciel noir et mouvant.
Le démon émit un grognement d'approbation. Il se plaça sur le côté, tournant le dos à son hôte, dans une position indiquant qu'il avait décidé de faire un somme. Gaara regarda durant quelques minutes la sombre silhouette humaine, dont la respiration devenait progressivement plus profonde et régulière. Depuis leur arrivée au pays de la Terre, Shukaku réagissait…curieusement. Quelque chose semblait le tracasser, assombrir son humeur exubérante. Etait-il furieux d'avoir quitté Abysse ? Ce n'était pas l'impression qu'il lui avait donnée.
Il réfléchit à ce problème un long moment, mais ne trouva aucune raison aux changements d'humeur de son démon, et il préféra abandonner. Il jeta un coup d'œil à la forme indistincte de sa calebasse, adossée à un rocher, qu'il avait abandonnée pour la nuit. On la distinguait mal.
Quelle sombre nuit…
Les épais nuages masquaient entièrement la lune et les étoiles, et plongeaient les montagnes dans une obscurité lourde, silencieuse, presque palpable. Même Gaara, qui avait passé la moitié de sa vie les yeux ouverts dans les ténèbres, ne parvenait pas à se repérer parmi les ombres fantastiques du paysage.
« Je me demande ce qui se passe, maintenant, à Suna. » Songea-t-il furtivement.
Y avait-il quelqu'un d'autre à la tête du pays, à présent ? Au bout de quelques jours à peine, c'était peu probable…Avait-on envoyé des shinobis à sa recherche ? Pour le Kazekage qu'il était ? Pour l'arme qu'ils avaient toujours vue en lui ? Et Temari ? Et Kankurô ? Etaient-ils au courant, ce jour-là, quand il avait quitté le village pour assister à cette discussion entre les ninjas des deux pays, cette discussion qui n'avait jamais eu lieu ? Etaient-ils…soulagés de le savoir si loin d'eux, peut-être mort ?
Il se concentra pour maîtriser le flot de questions qui bouillonnait en lui. Il n'aimait pas penser à son village natal. Cela le faisait toujours souffrir, le submergeait d'angoisse. Il sentit une nouvelle fois ce mélange d'impatience et d'appréhension, en songeant au moment où il atteindrait son objectif. Que se passerait-il, ce jour-là ? Combien étaient-ils, ces gens qui l'avaient trahi ?
-Disparais, sale créature !
Il ne voulait pas repenser à ces instants cauchemardesques. La douleur amère, la défaite cuisante qu'il avait subies étaient encore trop présentes dans son âme.
-MEURS, DEMON !
Pourquoi fallait-il que ces souvenirs réapparaissent avec une telle netteté, au point que les cris de haine faisaient de nouveau vibrer ses tympans, qu'il pouvait se figurer l'odeur de la poussière dans laquelle il avait été traîné, au point que tout lui revenait, jusqu'à la sensation oppressante d'être pris en tenaille au milieu de ses meurtriers ? Il ne voulait pas repenser au regard dément de son maître…Repenser à la trahison de Baki-sensei. C'était probablement le plus douloureux.
-Tuez-le ! Lapidez cette chose !
Il aurait fait n'importe quoi pour chasser ces hurlements de rage de son esprit. Mais il ne le pouvait pas. Tout resurgissait, s'agglutinait dans son esprit. La souffrance du poison, le regard lourd de menaces de ses opposants invisibles, les pierres sur son visage, la malveillance palpable des ennemis, leur présence qui brûlait sa chair, la sensation d'être encerclé…Avec une telle netteté…
Il bondit sur ses pieds et scruta les ténèbres, en alerte. Il avait juré entendre…
-Shukaku ! S'exclama-t-il soudain. On nous attaque !
Il n'eut que le temps de désagréger sa calebasse et de rassembler le sable autour de lui pour se protéger. Une créature translucide percuta son bouclier en mugissant, tenta de lacérer le sable de ses griffes nacrées. Dans l'obscurité, tout ce que Gaara pouvait distinguer était une forme longue, immense, qui se débattait furieusement. Elle repoussa sa protection, s'approcha de sa cible. C'était un gigantesque dragon à demi transparent. Il se rua sur lui, sa gueule ouverte découvrant sa dentition effrayante. Le sable s'enroula rapidement autour de la taille du monstre, et l'arrêta à quelques mètres de sa proie. D'autres bruits se firent entendre, des incantations, des ordres…
Gaara sentit avec horreur une puissante énergie l'attirer, inexorablement, vers l'ouverture béante et garnie de lames qui constituait les mâchoires du monstre. Ce ne pouvait être du Ninjutsu, ni une invocation. Il serra les dents, se concentra pour faire un pas en arrière, mais ses efforts n'aboutissaient à rien. Pire, le sable qui retenait le dragon commençait à faiblir, à s'effriter. Il sentit ses sandales crisser contre le sol, le traîner lentement vers lui.
Il distingua des écritures, gravées en noir sur le front de la créature. « Exorcisme »
C'était un Juuinjutsu.
Le sable retomba. Le dragon se rua sur lui, écumant de colère.
Il sentit alors un bras s'enrouler autour de sa taille et le tirer sans ménagement vers le haut. Il y eut une légère résistance, mais il s'éleva tout de même dans les airs. Le monstre heurta violemment le sol et disparut.
Gaara jeta un coup d'œil au-dessus de lui. Shukaku le soutenait. Il atterrit sur une plate-forme de sable, scruta le décor du regard. On n'y voyait goutte. De petites lumières s'allumaient ça et là, s'éteignaient aussitôt. Le bruit des sortilèges allait s'amplifiant, semblait venir de partout à la fois. Des attaques éclataient tout autour d'eux, sifflaient à leurs oreilles, de sorte que le démon ne pouvait jamais rester immobile, de peur de se faire atteindre par un projectile.
Il s'élança brusquement dans une direction pour esquiver les offensives, regagna le sol et déposa son hôte à côté de lui. Celui-ci appela immédiatement à lui le sable, prêt à riposter.
-Ce sont…
-Ouais, acheva le tanuki, des chasseurs de démons.
Leur manœuvre avait été si rapide, si silencieuse…Ils s'étaient laissés encercler sans même les voir arriver. Au fond, ce n'était pas surprenant. Ce genre d'embuscade était bien dans leurs habitudes. Si Gaara ne les avait pas perçus à temps…Shukaku secoua la tête, et commença à malaxer son chakra.
Maintenant que l'offensive était lancée, les chasseurs de démons n'avaient plus d'utilité à rester discrets. On entendait les sortilèges se préparer, sans savoir de quel côté ils arriveraient. Les deux traqués s'étaient instinctivement placés dos à dos, tournant sur eux-mêmes pour faire face aux ennemis. S'élevant au milieu des murmures, une voix lança :
-Seul l'un d'entre eux est un démon ! Repérez-le ! C'est celui-là qu'il faut viser !
Le tanuki sentit plus qu'il ne vit un bras s'abattre sur lui, kunaï au poing. Il concentra son chakra dans ses mains, frappa à l'aveuglette. Un Juuinjutsu arrivait sur sa droite. Il composa rapidement un sort Fûton, balaya les alentours. Il entendit son hôte déclamer un sortilège, et concentra son énergie pour l'aider à lancer son attaque. Il y avait du sang sur ses mains. Etait-ce le sien ? Il ne savait plus. Un sortilège passa devant lui, manquant de peu son buste. Shukaku grogna de douleur. Il n'aimait pas le Juuinjutsu. Ces sorts avaient une odeur tellement amère…
-Ils…Ils sont forts, haleta Gaara, si nous les laissons nous prendre en tenailles…Nous ne pourrons pas les vaincre.
Le garçon transpirait beaucoup, malgré la fraîcheur de la nuit. Le sable parvenait à bloquer la plupart des attaques, mais il peinait à repérer ses adversaires, camouflés dans le noir. Le démon hocha la tête sans répondre. Il savait ce qui allait suivre. Et cela l'agaçait.
-Shukaku, retire ton élastique. Si tu utilises tout ton chakra, nous pourrons briser leur cercle.
Le démon grogna. Bien sûr, c'était une idée logique. Bien sûr, c'était la seule solution pour s'en tirer.
-Pas envie, marmonna-t-il.
Que pouvait-il dire d'autre ?
-Notre nature ne détermine pas notre vie à l'avance. Tout dépend de la voie que nous prenons.
« Tais-toi !»
Traversé par une brutale onde de fureur, Shukaku s'élança en avant, et frappa au jugé ses adversaires, ses mains couvertes de chakra. Son pied rencontra quelque chose qui semblait être un cadavre, mais il n'y fit pas attention. Il savait que son comportement était stupide. Il n'arrivait pas à se concentrer, Gaara devait déployer des efforts colossales pour contrôler les vagues d'énergie instables qu'ils partageaient.
-Je méprise les démons, non pas pour ce qu'ils sont, mais parce qu'ils ont choisi la voie la plus vile. Nos décisions ont bien plus de poids que tu ne sembles le croire, Shukaku.
Le démon secoua la tête. Il en avait assez d'entendre cette voix lointaine, ce trop vieux souvenir. La même honte brûlante affluait dans ses veines, jusqu'à le faire suffoquer de rage. Il poussa dans la nuit un hurlement hystérique, le plus fort, le plus aigu possible, pour balayer cette sensation qu'il détestait tant. Pourquoi n'arrivait-il jamais à s'en débarrasser entièrement ?
Il n'esquiva que de justesse un dragon translucide, qui lui aspira une partie de son chakra. Le sol, sous ses pieds nus, était poisseux de sang, les cris avaient redoublé. Ces Juuinjutsu qui n'en finissaient pas. Cela l'agaçait profondément. Ces incantations lui rappelaient trop de souvenirs désagréables. Il savait que ses réactions étaient stupides. Il n'était pas assez concentré pour livrer un tel combat, et il déconcentrait son hôte. Il savait tout cela, mais cela ne faisait que l'agacer encore davantage.
-L'enfant n'est que son hôte ! Paralysez-le ! Il sera exorcisé dès la mort du démon !
La fréquence des attaques s'amplifia encore. On ne les distinguait qu'à la dernière seconde, du coin de l'œil. A moins de miser entièrement sur ses réflexes, il était impossible de les esquiver. Shukaku sentit les lames, les sorts, les créatures artificielles le frôler de toutes parts. Il se mit à danser rageusement sur place. Les sifflements des projectiles créaient une cadence mortelle pour ses mouvements.
Dans un éclair, il devina plus qu'il ne vit un mince faisceau de lumière, qu'il reconnut être un sortilège paralysant d'une grande puissance. Sa vitesse était impressionnante, même lui aurait eu quelque difficulté à l'éviter. Mais il n'était pas dirigé sur lui.
Le sortilège éclaira un bref instant le visage de Gaara, dévoilant son expression surprise, puis le percuta en plein cœur. Le garçon poussa une brève exclamation avant de se laisser tomber face contre terre, inerte. Un sort d'une telle force d'impact était suffisant pour paralyser quelqu'un plusieurs dizaines de jours…
Au même instant, toutes les attaques se réorientèrent vers Shukaku, qui dut accélérer encore le rythme de sa chorégraphie improvisée. Sur son visage était apparu un sourire sans joie, tandis qu'il goûtait à l'ironie de l'instant. Gaara n'avait pu esquiver cette slave de sortilèges. Comment l'aurait-il pu ? Ses réflexes d'autodéfense les plus basiques, ceux qui ne consistaient pas en la maîtrise du chakra, avaient toujours été médiocres. Par la faute du bouclier de sable, justement. Celui que le démon lui-même avait dressé pour protéger sa vie, à travers son hôte. A quoi cela lui aurait-il servi d'utiliser ses bras ou ses jambes pour se protéger, puisqu'il y avait cette arme vive, rapide, implacable, pour le défendre ? Ironie…Ce jeu du destin était parfois tellement agaçant…
Un faisceau lumineux effleura ses cheveux. Il ne l'avait pas vu venir, et l'avait esquivé sans vraiment en prendre conscience. Une créature transparente lui griffa la jambe, aspirant une grande quantité de chakra. Le cercle des ennemis s'était resserré, autour de lui. Les chasseurs de démons approchaient, enjambant le corps paralysé de Gaara sans faire attention à lui, sautant par-dessus des formes sanglantes qui devaient être des cadavres. Il ne pourrait pas les vaincre. A moins, bien sûr, de retirer ce handicap qui bloquait le flux de son énergie. Mais il n'en avait pas l'intention. La seule vérité qu'il pouvait dire. Les autres, il préférait les oublier. Il ne voulait surtout pas repenser à…
-Je te montrerai la voie à suivre. La voie noble, celle qui fera peut-être de toi un être digne de respect. Je suis là pour ça. Mais tu dois me faire ce serment…
« LA FERME ! »
Il ne voulait pas y repenser…Il en avait ASSEZ d'y repenser. Un bref instant, sa colère figea ses gestes.
Un instant de trop.
Il n'eut que le temps d'apercevoir un éclat doré, devant ses yeux. Il s'affaissa, recroquevillé sur le sol, et tenta de protéger son visage à l'aide de ses mains. Mais il ne pouvait plus faire un geste. Une multitude de fils d'or, fins comme des cheveux et acérés comme des lames de rasoir, s'était enroulée autour de son corps, lui avait aspiré toute son énergie, et l'immobilisait. Il ferma étroitement les yeux.
-Ca y est ! Nous le tenons !
La toile recouvrait tout son corps. Certains fils passaient même en travers de son visage, et avaient écorché le coin de ses lèvres ainsi que son arcade sourcilière. Ils entaillaient ses doigts, les maintenaient espacés pour l'empêcher de composer des signes. Il y avait longtemps qu'il n'avait pas ressenti une telle haine pour le Juuinjutsu.
-Emportez-le ! L'exorcisme doit être terminé dès les premières lueurs de l'aube !
Sa rage impuissante grandit encore, quand il sentit ses opposants saisirent les cordes dorées qui gisaient par terre, et le traîner après eux. Cela devenait lassant, tous ces sentiments de plus en plus violents qui se bousculaient en lui. Il tenta de secouer la tête, comme il le faisait habituellement en pareille circonstance, mais le sortilège l'en empêchait. Alors il abandonna toute résistance, et poussa un soupir ennuyé tandis qu'on l'entraînait, il ne savait trop où, dans un lieu probablement très agaçant.
Encore un chapitre de bouclé ! Je vais essayer de les raccourcir un peu par rapport au 5, les gros pavés de 25 pages World c'est peut-être pas l'idéal…
Sondage : Alors, comme exceptionnellement je n'ai aucune imbécillité à sortir, je vais faire un sondage à la place : Shukaku mis à part (sauf si vous le trouvez tellement OOC que je peux prétendre en avoir fait mon personnage, à vous de voir), quel est le démon d'Abysse que vous avez préféré, et pourquoi ? Sekhmet ? Cerbère ? Ifrit ? Ying Long ? Baku ? Satan ? Hydre ? Seth ? La muraille ? La boucle d'oreille d'Hydre ? (holà je m'égare…)
