Petit mot de l'auteure : ce texte a été écrit pour la nuit du FoF sur le thème "Ascension". C'est le tout premier texte et thème de l'année 2022 !

Merci à Marina, Nanthana, Angelica et Aurore et pour leurs review !


Jaskier mourut au moment très précis où Geralt dit « là-haut ».

Avant, le barde n'était pas vraiment en forme, mais il était toujours vaguement vivant. Mais là... non. Ce n'était plus possible ; il avait dû mourir sans s'en rendre compte et se trouvait maintenant dans ce qui était son enfer personnel. Comment expliquer cette marche interminable, sinon ? Alors certes, Geralt lui aurait dit en levant les yeux au ciel que l'homme qu'ils devaient voir était un ermite et que, en tant que tel, il aimait vivre loin de l'agitation du monde. Et quel meilleur endroit que le sommet d'une montagne pour éviter d'avoir à croiser du monde ?

Mouais.

Jaskier n'était pas vraiment convaincu – on ne pouvait décemment pas vivre à une hauteur aussi élevée.

- Non mais quelle idée d'aller vivre aussi loin de tout... Et puis tu imagines pour faire tes courses ? Tu te tapes à descendre la montagne et surtout après à la remonter dès que tu veux te prendre une bière ? Et puis il doit pas croiser beaucoup de monde là-haut... Il a dû devenir fou ton mec. Mon dieu ! On va tomber sur un mec fou qui va nous tuer dès qu'il va nous voir ! On est en train de mourir en marchant juste pour mieux re-mourir après !

- Si tu ne parlais pas autant, tu te sentirais peut-être mieux, commenta le loup blanc.

Évidement. Typiquement Geralt ça. On voyait bien qu'il n'avait pas la même consistance que lui ! Jaskier s'empressa ainsi de lui faire remarquer, ce à quoi Geralt ne répondit que par des grognements. Ils continuèrent leur ascension ainsi, marquée par des lamentations lancinantes du barde et les hmf du sorceleur. Ce dernier n'ouvrit la bouche qu'au bout d'une heure de marche.

- Le chemin est moins frais et plus escarpé. Fait attention à ne pas glisser.

- Ah, parce que avant c'était la partie facile ? Ironisa Jaskier. Génial.

Le loup blanc ne releva pas et s'engagea dans la nouvelle portion de chemin. Il avait fait exactement quinze pas lorsqu'une chose extraordinaire se produisit : Geralt trébucha.

Après des années d'aventures communes, Jaskier n'avait jamais vu son ami perdre son équilibre. C'était même plutôt l'inverse – il était si adroit que ça en était agaçant, sans oublier vexant. Il passait pour le boulet de la bande à côté. Alors voir le sorceleur être celui qui ralentissait les choses fit plaisir au barde.

Enfin, aurait pu lui faire plaisir.

Parce que le léger détail – insignifiant, presque – c'était que Geralt ne s'était pas contenté de trébucher sur la racine. Il était carrément tombé à la renverse, s'était tortillonné pour tacher de se rattraper à ce qu'il pouvait. Ce qu'il pouvait s'était avéré être Jaskier, juste derrière lui, qui s'était à son tour déséquilibré. Et c'est ensemble qu'ils avaient joyeusement dévalé en roulant une bonne portion de la côte qu'ils avaient si difficilement monté. Alors certes, ils étaient vivants et, par miracle, n'avait pas de blessures plus sérieuses que quelques hématomes. Mais en cet instant, cela importait peu à Jaskier. Car tout ce qu'il voyait, c'était ce chemin qu'ils devaient gravir encore une fois.

Tout ça à cause de Geralt.

Alors celui-ci pouvait bien hmfer autant qu'il voulait, mais il allait passer la prochaine semaine à lui rabâcher les oreilles avec ça, et il n'avait pas intérêt à essayer de l'empêcher de parler. Cela serait sa juste compensation pour avoir donné son âme sur cette montagne.


Note de fin : Une review = un pat pat à Jaskier. Et à Geralt aussi, tient. Et à moi où il m'est arrivé presque la même chose (j'ai pas dévalé la montagne mais on était pas loin. Merci papa de m'avoir rattrapé)