Je me tourne encore et toujours dans ce grand lit froid, incapable de trouver le sommeil qui me manque pourtant. C'est vrai qu'une lettre écrite de la main de mangemorts ferait office d'énergisant pour n'importe qui mais ce qui me trouble encore plus, c'est que j'ai l'impression que ces fichues lettres ne sont pas l'unique cause de mon insomnie.
Granger… dans les bras de Weasley. Je savais bien que cette vision allait m'empêcher de dormir pendant un bon bout de temps. Quand même, il y a des choses qui sont hors normes… quoique je fasse, je n'arrive pas à voir cet idiot de première sortir avec une fille est aller jusqu'à… nan, Weasley à l'esprit d'un gamin, il doit également avoir ce qui va avec.
Je n'arrive même pas à m'en convaincre… et dire qu'il souriait… comme pour se moquer de moi. Il peut se la garder sa fierté d'avoir une copine, quand on voit la tronche de cette dernière.
Rien à faire… je n'arrive pas à passer à autre chose. Il m'a vaincu et même s'il ne le sait pas, ça me fout un coup. Ca c'est sûr. Mais maintenant, c'est à moi de faire tomber la balance. Ouai… c'est bien ça. Je vais lui faire regretter son attitude et bientôt, ce sera moi qui le regarderai avec ce sourire en coin. Même si l'idée d'avoir une relation rapprochée avec Granger me file des frissons.
Le soleil traverse les rideaux miteux de ma chambre et je comprends que ma nuit est achevée. De plus, j'en ai la certitude lorsque de nouveau, un hibou grand duc vient frapper ma fenêtre et attendre non sans un boucan pas possible que je vienne retirer ce morceau de parchemin noir comme du charbon.
De nouveau, mon cœur palpite dans ma poitrine et je me sais incapable de réfléchir lorsque ma main tremblante vient retirer la ficelle qui le retient à la patte de l'animal.
Assignataire de la noble mission,
Nombres de lettres vous furent envoyées, et nous les savons reçues. Par ce fait, nous prendrons en compte votre silence et vous montrerons ce qui arrive à ceux qui défient nos lois. Vous ne pourrez pas dire que nous ne vous avions pas prévenu. Et je ne peux vous donner pour seuls conseils que de vous trouver dans les jardins de votre collège, à coté des buissons au nord du saule cogneur en ce jour du mardi 14 octobre à 22Heures précises. Si pour une raison quelconque vous ne vous y trouvez pas, nous serons dans l'obligation de mettre en place les mesures nécessaires pour protéger nos secrets et nous débarrasser des mauvaises recrues dont vous ferez parti.
Je me laisse tomber sur le vieux fauteuil, m'agaçant à voir la feuille trembler entre mes mains. Cette fois, je suis dans de beaux draps et les portes se ferment une à une. Je ne vois aucun choix s'offrir à moi. Je ne peux pas en parler à qui que ce soit et cette histoire de menace que j'ai fait avaler à la vieille McGonnagall semble plus crédible que jamais.
Un rendez-vous… après le tours d'horizon des couloirs… ce soir même. Si je n'y vais pas, ils me tueront… si j'y vais… ils me tueront peut-être aussi…
La journée passe et j'enchaîne les bourdes… j'ai eu le culot d'aider Londubat à se dégager de la marche cassée. Je ne l'ai pas fait exprès, c'est sûr, mais le pire dans tout ça, c'est que Granger m'a vu. Je n'ai pas eu d'autre choix que de pousser cette idiot pour qu'il dévale les autres marches et pour ainsi rattraper ma réputation mis à mal mais cette fois, c'est le professeur Chourave qui m'a vu. Des points en moins… des heures de retenues en plus.
Puis, je me suis enfoui par le premier couloir qui apparaissait, mauvaise idée… couloir isolé… serpentards en vue… j'ai un nez cassé et du sang qui a coulé sur ma robe. Je suis arrivé en retard au cours de potion, on m'a retiré des points pour mauvaise présentation. Et dire que les pulls tricotés des Weasley ne leur valent jamais ce genre de retrait.
Cette journée est bientôt achevée et pourtant, je ferais tout pour que les quelques minutes qui me restent durent une éternité. Même si je dois les passer en compagnie de Granger.
- Presses-toi Malefoy…
Oui mais non… aucunes envies de me presser même si je sais qu'un retard de quelques minutes serait une bonne raison pour un doloris en bonne et due forme.
- Il nous reste plus que le quartier de tes amis les serpentards… tu devrais être content…
Elle ne pourrait pas se taire un peu ? Fichtre, c'est quoi cette manie qu'ont les filles à pas pouvoir se la fermer trente secondes ? Même dans les moments les plus intimes, elles sont capables te demander un truc genre : « chéri t'as pensé à racheter de la poudre de cheminette ? ».
- Pourquoi t'es pas allé voir Pomfresh.
- Quoi ?
Elle s'est arrêtée et pointe son doigt vers mon nez qui ressemble à tout sauf à cet organe qui nous sert à respirer.
- Toi peut-être mais moi, je ne suis pas du genre à aller à l'infirmerie pour un petit bobo…
- C'est toi qui dis ça ? Laisse-moi me souvenir…
- La ferme Granger.
Le penser c'est bien, le dire c'est encore mieux.
- Qui t'as fais ça ?
- Qui te dis que quelqu'un m'a fait ça ?
- Oh tu te frappes tout seul maintenant… la prochaine fois, si tu as besoin d'aide, appelles-moi.
Je m'apprête à riposter quand je vois sa baguette frôler mon nez endolori. Je frissonne à l'idée qu'elle puisse avoir des idées plus sadiques que moi et ne peut m'empêcher de respirer bruyamment lorsque je l'entends murmurer un sort.
- Garde ton merci.
Je rouvre les yeux et voit que la bosse qui bouchait ma vision a disparu. Au moins j'aurais l'air présentable pour ce soir… ce soir. Mince… 21H58.
Sans m'en rendre compte, je viens de faire demi-tour et déjà la voix de Granger me rattrape.
- On a pas fini !
- Non mais j'ai pas confiance en toi. Je vais voir Pomfresh et lui demander de m'ausculter.
Ca c'est parfait… et trop rapidement, les jardins s'offrent à moi. Je m'avance en tremblant vers le saule cogneur, et je sers ma baguette contre mon torse. Je sais que ça ne sert à rien mais… ça me rassure presque.
- Ponctuel… un bon point pour toi Drago.
Mon propre père se trouve devant moi et c'est loin de me rassurer…
- Qu'est-ce que tu veux ?
- Te remettre dans le droit chemin fils… te rappeler que tu es un mangemort et que de ce fait, tu as des comptes à nous rendre.
Des feuilles se chiffonnent derrière moi et si je n'avais pas aussi peur de le voir utiliser sa baguette le temps que j'aurais le dos tourné, j'aurais regardé ce qui pouvait bien être à l'origine de ce froissement.
- Ne t'avises plus de jouer à l'homme invisible Drago où je serais obligé de t'y aider… tu ne voudrais pas devenir un fantôme n'est-ce pas ?
- Non… non père.
- Bien, tu m'as reconnu, il y a du mieux. Alors souviens-toi de toutes les autres choses aussi… Appliques à la lettre ce que les hiboux t'apportent.
Je le vois s'éloigner, plus surpris d'être encore en vie et en un seul morceau que je ne sursaute même pas en sentant la main de Granger étreindre mon bras. Je me retourne alors et ai juste le temps de remarquer que c'est bien son poing droit qui va frapper mon visage.
- Ca Malefoy, c'est pour nous avoir menti à tous.
J'ouvre le seul œil qui reste valide et vois pour la seconde fois de la journée, sa baguette rencontrer ma peau. Incroyable… une sang de bourbe qui aura eu ma peau aujourd'hui…
Sauf que l'éclair aveuglant ne jaillit pas de sa baguette… sauf que l'éclair aveuglant ne me frappe pas moi… mais bien elle. Je me retourne et vois l'ombre encagoulée de père me faire signe et s'éloigner dans la forêt interdite. Je ne sais pas si c'est de la compassion pour cette fille qui gît à terre, je ne sais pas si c'est l'antipathie ressentie à l'égard de mon père qui me fait faire ça… mais me voilà la baguette en l'air, lançant des éclairs en sa direction… Trop tard, je le sais.
