Résumé :
A la brigade criminelle de New York, un bleu, nommé Loki Odinson, vient d'arriver. Tony Stark, lieutenant de police, accepte de le former, parce que le bizutage est sa raison de vivre, avec le sexe, le whisky et réparer la machine à café. La première affaire de Loki est le faux suicide d'un cadre haut placé chez Apple, Mark Millow, mêlé à un triple meurtre non élucidé commis treize ans auparavant. L'inspecteur Mac Logan leur confie l'affaire, qui est réouverte. Au fil des jours, les enquêteurs apprennent que Mark Millow voulait vendre des secrets d'Apple à Samsung ; pour ne pas que l'affaire transparaisse dans la presse, Apple avait donc envoyé un mail à l'une des proches des trois victimes, avec la preuve de la culpabilité de Millow et son adresse. Sauf que lorsque cette personne, Sarah Watson, était arrivée sur les lieux pour le tuer, Mark Millow était déjà mort étranglé. Entre temps, les inspecteurs apprennent que madame Millow avait un amant, et la collent en garde à vue sans preuve. Loki est excédé par cette injustice, et songe que le véritable auteur du triple meurtre doit faire partie de la police, et que madame Millow l'avait approché pour innocenter son mari. Au lieu d'en faire part à Stark, il priorise son entretien avec des membres de la mafia. On découvre que Loki fait en réalité partie de la mafia de New York, et a été chargé d'infiltrer la police.
Playlist :
Coolio (ft LV) – Gangsta's Paradise
Bob Marley – Bad Boys
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-
"Gangsters don't cry, therefore therefore I'm
Mr. Misty-Eyes, therefore I'm…
Can you save my heavy dirty soul for me ? "
Twenty One Pilots – Heavy Dirty Soul
-o-o-o-o-
Loki ramène ses cheveux en arrière après avoir retiré son casque. Il fait toujours aussi froid dans la réserve du Walmart. Avec tout l'argent qui leur passait entre les mains, ils pourraient trouver un endroit plus confortable pour se voir. Ou utiliser leurs téléphones, ce qui lui conviendrait très bien.
Un cageot de pommes est sur sa route. Le souvenir du riz cantonais qu'il n'a pu manger lui fait voler deux pommes. Quand il arrive près des autres, il lance la deuxième à Amora. Elle l'attrape au vol, lui lance un sourire éblouissant mais un rien vicieux, quelque chose de gênant, qui donne l'impression qu'on va se faire becter dans la seconde suivante, à la sauce essence et allumette. Il est assez angoissant, le sourire d'Amora.
-Poussière-dans-l'œil ! s'exclame le responsable financier. Cela faisait longtemps. Trop occupé à cirer des bottes ?
-Le jour où le patron te confiera une mission comme la mienne, Viktor, tu me feras signer une feuille de présence. Clair ?
-Du caaalme poussin, je te taquine.
Loki hausse un sourcil au nouveau surnom. De ses bientôt dix ans la mafia, il n'a eu que deux surnoms, « le bleu » puis « poussière dans l'œil ». Von Doom note sa surprise et explique d'un ton badin :
"Il paraît que tu es chez les flics, maintenant. Il faut varier en peu.
-Justement, pourquoi tu ne varierais pas en étant utile, pour une fois ?
-Les mecs, avertit Amora, choix A, vous la fermez maintenant, choix B, je vous castre avec un flingue.
Viktor lance un sale regard à la trafiquante, mais n'ajoute rien de plus par peur de perdre une partie non négligeable de son anatomie.
« L'Autre » s'avance vers eux.
Le surnom venait d'Amora, si Loki se souvient bien. Elle est sans doute la seule de leur « famille » à connaître son vrai nom, sauf si Viktor garde cette information secrètement, sous le coude, au cas où les choses tourneraient un jour au vinaigre pour lui.
Tout simplement parce qu'il était l'Autre. L'ombre du patron, exécuteur discret auquel leurs associés ne faisaient pas gaffe, jusqu'au jour où ils étaient tués de sa main. Si quelconque, si minable, qu'il pourrait se rendre aux enterrements sans courir aucun risque, tant personne ne faisait attention à lui.
Bien sûr, il ne s'y rendait pas pour autant, d'abord parce qu'il n'avait rien à faire de ses victimes, et ensuite, parce qu'il était bien trop occupé, notamment à marcher dans les empreintes de pas du patron.
L'Autre faisait partie de la petite pègre de New York. Né dans les années soixante au sein d'une famille superstitieuse, avec six doigts à chaque main, il avait été abandonné à la naissance. Au fil des années, il était passé de famille d'accueil en famille d'accueil, se rendant, en grandissant, coupable de délinquance juvénile de plus en plus grave. Son premier séjour en prison l'avait guéri pour toujours des barreaux des cages, et il s'était arrangé pour ne plus jamais se faire prendre, notamment en se faisant remplacer au casse-pipe par des moins vicieux que lui.
Dans son ascension des barreaux de l'échelle, il avait croisé Thanos. Plus exactement, Thanos avait un jour débarqué dans sa planque et tué tous ses hommes de sa main, afin d'éliminer la concurrence. Pour sauver sa peau, l'Autre avait avoué n'en avoir rien à faire de cette vermine sans cervelle qui lui servait de sous-fifres, et ne souhaiter que travailler pour le plus grand criminel que New York ait porté. Charmé de tant de bassesse et de soumission, Thanos l'avait pris à l'essai. Comme l'Autre avait enduré les humiliations les plus blessantes sans perdre une once de sa fidélité envers lui, il avait fini par le prendre comme bras droit, après la mort de l'ancienne qui l'avait agacé une fois de trop. Enfin, ça, c'était la légende, qu'Amora en descente de MDMA avait glissé à l'oreille de Loki avant de la lui mordre.
Si le mythe était vrai, le bleu ne savait pas vraiment si l'Autre fomentait sa vengeance, ou bien s'il n'en avait effectivement rien à faire de venger ses lieutenants assassinés. S'il cirait les pompes depuis toutes ces années dans l'attente d'un moment de faiblesse, ou bien alors, s'il était réellement tombé sous le charme d'une aussi sombre, aussi parfaite, ordure humaine.
Alors que tous les quatre Victor, Amora, l'Autre et lui, testaient ensemble la nouvelle marchandise, dans les premiers mois suivant l'arrivée de Loki, le bras droit du patron, avec une fascination sincère dans la voix, leur avait avoué ce qui motivait réellement le patron dans toutes ces magouilles. Ce n'était pas l'argent, ce n'était pas le pouvoir. Ce n'était pas violer la loi en toute impunité.
C'était faire souffrir, jusqu'au dernier souffle. Pour courtiser la Mort.
Loki avait décrété ce soir-là que l'Autre et Thanos étaient fous à lier et qu'il devrait se tirer d'ici au plus vite. Faute de bon sens, et d'instinct de survie suffisant pour faire comme il avait dit, il était resté dans la mafia.
"Bonsoir, poussière-dans-l'œil, le salue l'Autre avec mépris. La réunion du patron est plus longue que prévu, mais pas besoin de l'ennuyer avec tes premiers pas chez les cafards.
-Je n'ai pas envie de tout répéter, l'affreux, marmonne Loki. J'attends le patron."
L'Autre serre étroitement ses six doigts dans un poing massif. Ce n'est pas bien grave, se dit Loki, que l'affreux était furieux une fois de plus, ils voulaient de toute façon tous se faire mutuellement la peau. Le pire était sans doute que dans leurs têtes, à tous, existait, au cas où ça tournerait mal, un petit plan naïf. Naïf parce que, dans ce plan, ils étaient chacun le seul survivant de leur petite bande, et qu'il y avait, sur ce point, un paradoxe évident.
Le un contre quatre n'a pas de bonnes statistiques.
Aussi détendu que s'il était devant une machine à laver, Loki se laisse gracieusement tomber au sol. Assis en tailleur, il s'allume une cigarette, contemplant d'un air amusé les airs furieux et impatients de ses acolytes.
"Je n'en reviens pas que le patron t'ait choisi pour infiltrer le seul service de police qui nous restait, grommelle Amora."
Elle tapote le béton d'un mouvement agacé, comme si elle se retient d'envoyer son pied dans la gueule d'ange de Loki.
"Je les aurais tous eus en une journée, affirme-t-elle en reprenant un chewing-gum.
-Il y a des femmes dans la police, objecte Victor en regardant sa montre.
-Ce sont elles qui tombent les premières, fait-elle à leur comptable dans un sourire plein de dents."
Loki perçoit tout à coup le pas lourd et menaçant, et écrase sa cigarette sur le sol de l'entrepôt avant de se redresser.
Thanos était un colosse, un titan. Deux mètres quatre, environ cent quinze kilos, il n'avait pas à avoir du sang sur les mains pour faire peur, ni à sourire pour que vous vous écrasiez. Loki lui-même était pourtant plutôt grand, avec ses un mètre quatre-vingt-sept, et pas inentrainé sur le plan physique. Cependant, là où il dominait Stark d'une bonne tête et pensait pouvoir le prendre à la loyale, il se sentait fourmi face à une botte avec Thanos, et était certain qu'avec une claque bien sentie derrière la tête, ce dernier lui briserait la nuque.
Thanos avait conscience d'être à mi-chemin entre Vin Diesel et Undertaker, et en jouait quand un partenaire en affaires arrivait toujours à contrôler son sphincter devant l'Autre, Amora ou Loki. Le patron dégageait alors quinze minutes de son emploi du temps de ministre, et le gars ne posait plus de problèmes. Voir le visage de Thanos revenait soit à mourir, soit à travailler pour lui.
(ce qui était arrivé à Loki presque dix ans auparavant, mais c'était une autre histoire)
Le problème de la célébrité, supposait Loki. L'Autre, qui pratiquait la même activité de jour comme de nuit, n'avait qu'à cacher son nom pour rester anonyme, et encore, qui s'en souciait. Mais pour Thanos, son succès dépendait de sa discrétion. Quand on aimait autant diriger une organisation criminelle et tuer les gens, c'était un problème. Heureusement que les cadavres ne parlaient pas.
Le patron est alors devant eux, les dominant tous de deux têtes, voire de trois. Mis à part l'Autre, il les dévisage tous un par un, juste le temps que les épaules se tendent, puis fixe son nouvel infiltré. Loki soutient son regard. Avec l'accumulation de ses deux vies, (quand ce type arrivait-il à dormir, il possédait une gemme du temps ou une connerie du genre ?) le patron avait, d'aussi loin que Loki se souvenait, d'énormes cernes tirant sur le violet, mangeant ses joues, creusant ses yeux. Elle était là, sa faiblesse, il l'avait toujours su, mais plus ce type était fatigué, plus il était violent. Il devenait aussi plus intelligent, agissant comme un animal acculé, et imprenable. Un rhinocéros enragé.
-Bonsoir Loki, chuchote Thanos en se penchant légèrement.
La taupe fait prudemment un pas en arrière, retroussant légèrement le nez, expliquant son geste par la mauvaise haleine de son patron. Cette mimique ne trompe personne, mais ce n'était pas comme si les autres en ont moins peur que lui. Malgré sa carrure impressionnante, le boss peut parler à voix très basse, et sous le contraste se glisse, dans chaque mot qu'il prononce, une menace insidieuse.
-Alors, qu'as-tu appris ?
-Les noms pour l'instant.
Le patron grince des dents. Loki sentit le frottement de l'émail jusque dans ses os.
-Tu as sans doute plus que ça, non ? Je me fiche de leurs noms, poussière-dans l'oeil. Il n'y a que Fury qui m'intéresse.
-Fury est méfiant, il ne me dit rien, ni ne me laisse accès à son bureau. Les sous-fifres, par contre, ont des femmes, des maris, des enfants, des problèmes d'argent. Selon moi, aucun flic n'est imprenable. Fury, c'est par en dessous qu'on l'aura.
Le seul qui lui pose toujours problème, c'est Stark, semblant célibataire et sans enfants. Un évident problème d'alcool, mais aucunement d'argent, et il n'a pas l'air d'en vouloir plus. Il vit pour son boulot, aux seuls côtés d'une bonne bouteille. Comme son alcoolisme semble de notoriété publique dans la hiérarchie, le révéler ne semble pas un moyen de le faire chanter.
Mais si Loki a appris quelque chose dans la mafia, c'était qu'il existait chez tout le monde une petite manivelle fragile plus ou moins bien cachée, et qu'il suffisait de la tourner pour obtenir de n'importe qui n'importe quelle chanson.
Et Stark ne ferait certainement pas exception. Car même si, après épluchage méthodique, la petite manivelle restait introuvable, il y avait toujours le moyen long mais radical de créer, voire de devenir ladite faiblesse. C'était l'une des spécialités d'Amora. Lorsque les affaires étaient menacées, elle trouvait toujours le temps de passer chez une sénatrice ou un directeur de journal pour la ou le convaincre de regarder plutôt son décolleté que leur carnet de comptes, voire de faire une petite donation à leur très humanitaire organisation.
S'il était repéré par les policiers comme membre de la mafia, en revanche, même Fury ne pourrait pas le sauver. Cependant, ce n'était probablement que de la revente de cannabis à côté de ce qu'allait lui faire Thanos quand il réaliserait que Loki l'avait trahi.
"Quand tu en sais assez, fais une liste avec nom, marié, enfants, addiction, argent et combien, ordonne le boss. Donne-la à l'Autre. Je te donnerai une enveloppe quand je le jugerai utile. Un rat nous suffit pour l'instant, les pourris viendront à la prochaine étape. Bien joué, poussière-dans-l'œil.
Poussière-dans-l'œil.
C'est ce fichu surnom et son histoire qui l'ont lentement poussé à tout vouloir plaquer en grande pompe, quitte à en crever douloureusement. Car s'il tombait, il en entraînerait d'autres dans sa chute.
Le boss en a manifestement terminé avec lui, car il entraîne Viktor à part, probablement pour lui parler de la transaction sur les docks de la nuit à venir.
Pour rester le patron et en pleine santé lorsqu'on était parrain de la pègre de New York, il fallait absolument compartimenter. Donc Amora et Loki n'entendraient rien de ce qu'ils se diraient, tout comme plus sa mission allait avancer, plus Loki allait avoir droit aux face-à-face avec Thanos, détecteur de mensonge à la clef. De temps en temps, le boss organisait de petites « réunions de famille » comme celles-ci, pour les mettre en concurrence d'une part, mais aussi resserrer un peu la corde autour de leur cou à tous.
Car il ne faudrait pas qu'ils se sentent trop en sécurité. Les humains font beaucoup plus de choses stupides, avec un sentiment de sécurité. La sensation de danger force à réfléchir, et il ne faut pas aller chercher très loin pour comprendre que la chose stupide à faire dans leur situation, et bien, c'est trahir le patron.
Quelle coïncidence, ce que Loki est justement en train de faire.
Il est tellement foutu.
-o-o-o-o-
Quand il ressort enfin, abruti par le manque de sommeil, il a le réflexe de sortir son téléphone. Il a quatre appels manqués de son formateur. Bien qu'épuisé, il fait pourtant l'effort d'écouter les messages vocaux que ce fossile de flic lui a laissés, tout en cherchant ses clefs de moto dans ses poches. Si Amora les lui avait encore volées, elle allait l'entendre.
-Vous avez deux nouveaux messages. De Grincheux, aujourd'hui, à 21h26. Pour rappeler votre correspondant, tapez…
Loki a retrouvé ses clefs durant l'enregistrement, et dans l'impatience de rentrer chez lui dormir, il presse rageusement la touche deux. Qui enregistre encore des messages vocaux, nom d'un chien.
-Eh le bleu, résonne la voix de Stark dans la rue sombre. Faut vraiment que tu prennes la règle numéro un au sérieux tu sais. Donc j'appelais pour te dire que… c'est pas que j'avais tort, mais je pense que ce n'est pas elle. Nat' pense comme moi, donc, on va sans doute la relâcher.
Loki fronce les sourcils, se remémorant difficilement son train de pensée avant d'arriver au Walmart.
Il avait flairé que ce n'était pas la veuve.
Qu'elle avait connaissance du triple meurtre des sœurs à Little Hollow. Qu'elle semblait heureuse et satisfaite avec son mari. Que si elle le trompait, c'était sans doute pour l'innocenter.
Il gratte machinalement d'inquiétude sa coupure à la main, causée par une feuille quelques heures auparavant.
S'ils relâchaient madame Millow, et qu'elle ne quittait pas la ville en détruisant téléphone et carte de crédit, son amant allait apprendre sa détention, et paniquer. Dans un cas, il disparaissait dans la nature : le meurtre de Marc Millow et des sœurs Wilson restaient irrésolus. Dans l'autre, Mme Milllow était en danger de mort.
Sans qu'il ne comprenne trop pourquoi, la douleur dans sa paume le ramène à ses vieux comics X-men qui devaient toujours être dans sa chambre. Il chassa le souvenir. Ce devait être la faute à la forme de griffure qu'avait l'estafilade, griffe, Wolverine, comics. Affaire classée, se recentrer sur Mme Millow, et le deuxième message vocal.
-De Grincheux, aujourd'hui, à 22h52. Pour rapp-
-Le bleu nom de nom, change de téléphone, ce n'est pas possible d'avoir une batterie aussi merdique ! On a relâché la veuve Millow, pour ta gouverne, alors si t'avais un avis dessus, c'est trop tard.
Loki ferme étroitement les yeux et souffle par le nez.
Ce n'est pas possible d'être aussi con !
L'heure sur son téléphone indique 23h01.
S'il grillait quelques feux rouges, et que les paperasses pour quitter la garde à vue étaient aussi chiantes que lorsqu'il était ado, ils pourraient peut-être la sauver.
Il saute sur sa moto, fait claquer le clip de fermeture de son casque, et file à vitesse non autorisée dans les rues poisseuses de New York. Dans ses écouteurs, la sonnerie d'appel résonne.
Il crut qu'il allait devoir ficher la carte « hypocrisie » en plein milieu du front de son formateur, mais celui-ci décroche au bout de la quatrième sonnerie.
-Nom de dieu le bleu, je vais te la graver sur la main cette foutue règle !
-Vous avez relâché Millow ? s'enquiert-il dans son casque, alors qu'il doublait un taxi.
-Elle vient de sortir, ça a été long comme je l'avais arrêtée sur présomption, marmonne-t-il, et Loki devine là-dessous une douloureuse séance de remontrances dans le bureau de Fury.
-Rattrapez-la, elle est en danger ! aboie-t-il par-dessus le raffut de sa moto.
-Quoi ? lance son formateur avec une pointe d'agacement.
-Elle en sait plus qu'elle ne le dit sur le meurtrier, il va la tuer !
On lui raccroche au nez, et il jure. Saletés de poulets hautains pas foutus d'écouter les avertissements de quelqu'un, même quand une vie en dépendait ! Il réessaie plusieurs fois tandis que sa main entaillée tourne convulsivement pour le faire aller plus vite. Pour une inconnue et agaçante raison, ces satanés comics continuen d'affluer dans son cerveau. Sans doute est-ce parce que sa peau fine s'entaille souvent sur les pages des bd neuves, et qu'il y affilie donc sa coupure, mais nom de nom pourquoi il pense à ça en essayant d'aller sauver les fesses d'une veuve ?!
Il déboule dans la rue du commissariat. Madame Millow sort à cet instant, seule, tournant la tête des deux cotés de la rue, semblant chercher un taxi. Justement, une voiture jaune arrive en face de Loki, une lueur verte sur son toit. Il ralentit. Il avait traversé Brooklyn à 120 à l'heure pour rien. Il devrait soigner sa paranoïa. Par exemple en arrêtant d'être un agent double entre la NYPD et la pègre de New York, en voilà une idée, qu'elle est bonne. Il soupire en se trouvant ridicule, alors que devant lui une moto double le taxi qui ralentissait, s'arrêtant pour faire monter sa cliente. La moto était noire, le casque était noir, le flingue était noir.
Merde.
Les coups de feu résonnent sans qu'il ne puisse faire un geste. Le tireur vide son chargeur, et dans son champ de vision, Loki voit deux corps s'écrouler sur le trottoir. Il s'agit de la veuve et de Stark, qui a déboulé du commissariat pour la rattraper.
Oh, l'enfoiré.
Ce tireur va manger le bitume pour ça.
Alors que le type allait passer devant lui, accélérant au maximum pour fuir, Loki accélère brusquement, déporte d'un geste sec sa moto vers la droite, la faisant chuter sur le coté. Il se retient au siège et au guidon pour rester en place lors de sa chute, puis se met en boule sur le bitume, faisant corps avec sa bécane, la tête rentrée dans les épaules. Le choc de l'impact fait glisser le véhicule, et l'épaule et la cuisse de Loki râpent sur le sol, tandis que la moto du tireur s'envole en l'air. Le conducteur perd l'équilibre, tombe de son véhicule en vol et roule sur le sol. La machine va s'écraser sur le bitume dans un grand fracas de tôle.
Loki se redresse d'un bond, sa coupure à la main, qui l'avait tant obnubilé ces dernières minutes, faisant pâle figure à coté de ses nouvelles écorchures. N'osant pas regarder les dégâts qu'il a infligés à sa moto, il rejoint le tireur gémissant sur le sol. Il vérifie que le type n'a pas d'autre arme, puis qu'il n'a rien de plus grave que des fractures. Loki relève la visière de son casque, lui pose des questions sur son nom et la date du jour, mais décide que « va te faire mettre, p'tit con » est une preuve de conscience suffisante.
Près de lui, le chauffeur de taxi est sorti de son véhicule, et se rapproche de lui en tremblant, tenant à bout de bras un pistolet automatique.
-Tout va bien, fait Loki, je suis policier. Appelez une ambulance.
Au tireur, il annonce :
-Vous êtes en état d'arrestation pour homicide volontaire…
Nom de nom, Stark et Millow.
Surveillant le motard blessé d'un œil, il se précipite vers le trottoir pour apercevoir les deux corps, cachés derrière une berline. En l'entendant arriver, Grincheux relève la tête, soutenant la veuve Millow d'un bras. Elle se redresse difficilement, muette, ses mains tremblant furieusement. Sur leur droite, six impacts de balles fendillent la façade du commissariat. Loki veut bien qu'on le dénonce à Thanos plutôt que de reconnaître qu'il est soulagé. Ou plutôt, il est soulagé pour la veuve, parce qu'elle n'a sans doute pas mérité ça, et qu'elle a des tas d'autres choses à leur raconter. Son formateur, lui, ça lui ferait du bien de ne plus entendre sa voix agaçante, et que ce foutu flic arrête de poser des questions dangereuse pour sa couverture.
Rassuré, l'infiltré revient vers le tireur et corrige les chefs d'inculpation :
-Je vous arrête pour tentative de meurtre, et tentative de meurtre d'un officier de police.
Alors que le suspect se débat sur le sol avec une vigueur supplémentaire, mécontent de l'annonce de la survie de sa cible, une voix derrière la taupe rectifie :
-Lieutenant de police, le bleu !
-Vous avez le droit de garder le silence… je vous connais vous, marmonne soudain Loki, coupé dans sa récitation par le visage du motard. Où est-ce que je vous ai vu…
Le type ne veut manifestement pas l'aider, serrant les dents sous la douleur. Il était vrai que son bras était dans un angle bizarre, et comme Loki déteste être traité de petit con, il est tenté de dire aux ambulanciers que ce type est allergique aux analgésiques.
Soudain, le souvenir de sa première scène de crime, du bon coté de la loi cette fois, revint devant ses yeux. Il y avait Banner qui examinait le pendu, beaucoup trop de flics dans la pièce, et l'officier Mac Logan qui certifiait que c'était la veuve qui avait trouvé le corps, et que les voisins n'avaient rien entendu.
J'ai passé des mois sur cette affaire, pratiquement toute la brigade était dessus, y compris mon bleu, Mac Logan, avait dit le vieux lieutenant qui enquêtait sur le meurtre des trois soeurs.
Loki lève soudain sa main entaillée. Les comics, Wolverine, tout est clair maintenant.
-Nom de dieu, Mac Logan, s'étrangle Stark, arrivé dans le dos de Loki. Je savais que vous ne m'aimiez pas, mais à ce point-là !
-Je crois plutôt que votre collègue a démarré sa carrière à Little Hollow, et était à l'époque membre du Klu Klux Klan, rectifie Loki. Pas vrai mon vieux ?
-Je veux une ambulance, marmonne-t-il tandis que les sirènes s'approchaient.
Tandis que les brancardiers déposent Mac Logan sur la civière, Loki intime à la veuve de respirer profondément, et Stark téléphone à ses collègues de nuit pour que mme Millow puisse remonter et être accueillie par le psy de garde. Lui accompagnerait l'assassin à l'hôpital pour qu'il y reste, le temps que l'équipe de surveillance n'arrive.
Avant de monter dans l'ambulance, et tandis que Loki attend la dépanneuse de sa moto, Stark lui lance :
"Bien joué, le bleu. Même si tu es complètement malade.
-Dit celui qui s'est jeté sous des balles pour une suspecte.
-Ah bon, tu ne le savais pas, que les policiers sont des héros ?
-De un, la plupart sont des assassins, et deux, sans mon coup de fil, elle était morte, grogne Loki. Puisque vous m'aviez apparemment raccroché au nez en vous foutant de ma gueule.
-Pas du tout, j'écoute les bleus quand ils crient comme ça au téléphone, on sait jamais, sur un malentendu…
-Allez, dégagez. Et bonne nuit aux urgences.
-Bonne nuit, Odinson."
Loki fait semblant de ne pas avoir remarqué que le lieutenant de police ne l'a pas appelé par son surnom. Alors que Grincheux monte dans le véhicule, lance une blague et que Mac Logan lui fait un doigt d'honneur de son bras valide, Loki lance :
"Eh ! Vous croyez que Fury pourra payer les réparations de ma moto ?
-Même pas en rêve, le bleu ! affirme son formateur en claquant la porte de l'ambulance."
Stupide flic, songe Loki.
95%, songe Tony.
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-o-
Il vous a plu ?
J'ai encore un chapitre de coté, qui termine cette première enquête. Ensuite, le rythme de publication dépendra de l'avancement de mon mémoire.
Merci d'avoir lu, et à bientôt !
