Bonsoir ! J'avais hâte de poster ce chapitre, bonne lecture.

Bob Dylan – Knockin' on Heaven's Door

Sting – Shape of my Heart

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Oh, I got nothing but a heartache

I just want to let you know that I'm about to go insane

You know that I will soon take,

My gun,

My gun to shoot him down

Alice Francis - "Shoot him down"

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Clint retourne à la brigade ramener la voiture de police au garage et récupérer ses affaires. La journée a été trop éprouvante, il prend sa fin d'après-midi. Il ne veut plus quitter sa fille du regard plus de cinq secondes, et ce pendant au moins une semaine. Il sent aussi quelque chose de grave s'est passé entre Tony et lui, et qu'ils ne pourront plus être dans le même binôme.

Il s'était préparé à l'affronter en rentrant dans les bureaux, mais quand les portes de l'ascenseur s'ouvrent, Tony attend devant pour descendre.

"Où vas-tu ? S'inquiète Clint.

-Je vais vérifier quelque chose.

-Ne fais rien de stupide, tu m'entends ?

-Ou quoi ? Tu vas me tirer dessus ?"

Tony lui passe devant pour entrer, et lui lance :

"Si tu ne veux pas descendre, tu dois sortir. »

Les dents serrées, Clint sort en tenant sa fille par la main. Tony appuie sur le bouton du rez-de-chaussée avec un dernier regard dur, et les portes se referment.

"Vous êtes fâchés ? questionne Lila en levant la tête vers lui.

-Oui, soupire-t-il. Un peu.

-Il faut dire pardon et se serrer dans les bras.

-On fera ça, ma puce. On est un peu trop en colère pour l'instant, on va attendre demain."

Elle hoche la tête, et Clint va vers son bureau récupérer ses affaires.

Ses yeux tombent sur celui de Tony, et il tourne la tête vers l'ascenseur. Sa fille a une bonne technique, mais pour la mettre en pratique, encore faut-il que Tony vienne au bureau demain.

Il espère sincèrement que son ami ne va rien faire d'idiot et dangereux.

Il s'apprête à partir, mais se ravise, et écrit un sms aux autres pour leur dire de rentrer dès qu'ils peuvent.

Steve et Natasha arrivent quelques minutes plus tard et après un regard périphérique, la russe s'enquiert :

"Où est Tony ?

Clint secoue la tête, repoussant le moment où il doit raconter ce qu'il vient de se passer.

"Bonjour Lila, remarque Natasha en s'approchant de sa fille. Qu'est-ce que tu fais là ?"

Trop heureuse de raconter sa version des faits, Lila résume :

"Loki est venu me chercher à l'école, on a bu un chocolat, et Tony et papa se sont disputés."

Natasha écarquille les yeux et lève la tête vers Clint.

"Loki a quoi ?

-C'est une longue histoire, mais... Attends."

Il porte ses doigts à sa bouche et siffle. Le chat roux accoure vers lui, et Lila a un grand sourire en le voyant. Ayant distrait sa fille de leur conversation, il entreprend de tout raconter à Steve et Natasha.

"Merde, marmonne-t-elle quand il a terminé."

Elle s'approche d'un pas pressé du bureau de Tony, et s'assied devant son ordinateur.

"Qu'est-ce que tu fais ? S'enquiert Steve.

-Je regarde ce qu'il a consulté en dernier."

Elle ouvre le panneau de contrôle, où il n'y a plus que des lignes de code que Clint et Steve ne comprennent pas, et remonte la liste quelques minutes. Pendant ce temps, Steve essaye plusieurs fois d'appeler Tony, sans succès.

"J'ai trouvé, mumure-t-elle finalement. Les plaques numérologiques, et les caméras de circulation à reconnaissance de plaque, résume-t-elle. Clint, comment tu as dit que Loki s'était enfui ?

-Je ne sais pas, il ne me l'a pas dit.

-S'il a réussi à s'échapper à cette heure-ci malgré les embouteillages, à moto, sans doute. Si Tony est parti, c'est qu'il a dû le pister sur les caméras et retrouver son adresse. Il est en danger.

-Tu peux retrouver où il est allé ?

-Je vais devoir retrouver la plaque, puis refaire le même jeu de piste... Cela risque de me prendre pas mal de temps.

-Très bien, soupire Clint. Je vais amener Lila à Laura, puis je reviens avec vous.

-J'espère juste qu'on n'arrivera pas trop tard, marmonne-t-elle en pianotant férocement."

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Loki retire son casque et reste immobile quelques instants, tentant de faire ralentir son rythme cardiaque. La détonation de l'arme a résonné dans tous ses os, il a cru que celle-ci allait être la dernière. Il descend de sa moto, et en examine l'arrière. Son siège a un impact net, et il songe qu'il aurait besoin de ces bâtons transparents de la Criminelle pour repérer où est partie la balle et si elle a touché un élément du moteur.

Il ne pensait pas que Tony lui tirerait dessus sans hésitation. Il a sous-estimé sa capacité à oublier qu'ils ont été bien plus que coéquipiers, et à pouvoir le traquer comme n'importe quel tueur.

Il s'appuie sur sa moto, et s'autorise à soupirer en baissant la tête. Ces derniers jours de méfiance, d'intimidation et de mensonges lui ont épargné de se pencher sur tout ce qu'il a perdu en abattant Fury. Son frère doit être au courant, à l'heure qu'il est. Et Tony… Tony le tuera s'il le revoit.

Pourtant, Loki n'est pas sûr d'avoir créé un tel lien avec quelqu'un de toute sa vie. Toutes ces journées glauques traversées ensemble, toutes ces soirées passées à oublier à coups de chansons, d'alcool et de vieux films, ces quelques nuits où enfin ils avaient pu être le plus proche possible...

S'il y pense trop, il peut encore sentir des mains dans son dos et un souffle brisé contre son cou.

Il secoue la tête, et serrant les trois clés dans sa main, il remonte dans l'appartement qu'il occupe depuis une semaine. Il s'agit de l'une des propriétés qu'ils possèdent et qui sert de résidence provisoire à des partenaires étrangers, comme le Mandarin ou les fournisseurs russes de Viktor. Elle est beaucoup plus luxueuse que celle que lui avait fourni Fury à son arrivée à la Crim'.

Il pose ses clefs sur l'immense et froid plan de travail de la cuisine, y plante ses paumes, et soupire. Il n'a pas vu Tony longtemps, une fraction de seconde, avant qu'il ne réalise qu'il allait mieux viser s'il ne partait pas, mais c'était suffisant pour voir la haine dans ses yeux.

Cette mission était une erreur. Il a été un idiot d'envisager pouvoir passer un an avec des personnes sans s'attacher. Des gens en sont sans doute capables, mais ce n'est pas son cas. Il croyait pourtant que ses années dans une organisation criminelle l'avaient aidé à porter un regard froid sur la ville et ses habitants, mais c'est manifestement une blague ridicule qu'il s'est racontée à lui-même.

Ou alors était-ce juste Tony, le problème. Son rire, son culot, sa carapace, qui lui ont donné l'irrésistible envie de gratter pour découvrir ce qui se cachait dessous.

Il a gratté, et il a trop aimé ce qu'il a y vu.

Un coup de feu résonne dans son appartement, et il relève la tête en sursaut. C'est sa serrure qui a sauté. Il attrape son flingue le plus vite qu'il peut et la tend devant lui. La porte s'ouvre à la volée, et Tony entre en brandissant son arme.

Merde.

Loki n'est pas prêt, et il ne le sera jamais.

Il ne veut pas avoir à faire ça.

Il doit y avoir une autre solution.

Tony le fixe avec des yeux un peu trop grands, comme s'il ne s'était pas assez préparé à l'idée que son ex-coéquipier soit dans cet appartement.

« Comment tu m'as trouvé ? souffle doucement Loki sans baisser son arme, espérant désespérément gagner du temps.

-La plaque de ta nouvelle moto sur les caméras de circulation. Puis le seul appartement sans nom sur l'interphone. »

Loki le tient toujours en joue en détaillant son visage. Cela ne fait que dix jours, mais il a déjà commencé à oublier quelques détails, comme les pattes d'oie qu'il devine au coin des yeux, qui lui rappellent Meryl Streep dans Sur la Route de Madison. Alors qu'il l'observe, Tony semble soudain sortir de ses gonds, et s'écrie :

"Qu'est-ce que tu attends ? Allez vas-y, tire ! Essaie ! Bute-moi comme tu as buté Fury, Vanessa, et peut-être même Coulson ! Parce que c'est juste pour ça que t'étais avec nous, tuer les indics et les bons flics. »

Loki sait que des émotions doivent s'imprimer sur son visage, mais il ne peut pas les restreindre. Tony pense que c'est lui qui a tué Vanessa ? Mais pourquoi ?

Il n'aurait quand même pas oublié de nettoyer un endroit de son appartement qu'Amora aurait touché cette nuit-là…

« Je n'ai pas tué Vanessa, ne peut-il s'empêcher de souffler. »

Il lui est déjà intolérable que Tony sache pour ses meurtres, alors ceux qu'il n'a pas commis…

« N'ose même pas l'appeler par son prénom, ou penser que je vais croire un seul mot qui va sortir de ta bouche. »

Tony fait un geste pour vérifier qu'il a bien enlevé la sécurité, et réaffirme sa prise sur son arme. Loki fronce les sourcils, mais ne bouge pas.

"Qu'est-ce qu'il y a ? C'est plus dur quand c'est une passade, c'est ça ? crache Tony.

-Je n'ai pas envie de te tuer, avoue-t-il doucement.

-Ah ? Moi si. Alors tire avant que je le fasse. »

Loki se rappelle les petits-déjeuners dans la cuisine. Il se rappelle la nuit sur la plage. Il se rappelle d'un matin de dispute et d'étreintes, où il s'était imaginé proposer une vie aux Bahamas. Le dernier matin.

Il a un beretta chargé dans sa main, et Tony en face.

Loki se sait capable de beaucoup de choses, mais ça, c'est simplement trop lui demander.

Sentant sa main se mettre à trembler, il baisse son arme.

Tony, lui, presse la détente.

L'infiltré entend le coup partir, et écarquille les yeux. La douleur lui déchire le torse quasi simultanément. Il porte sa main à la blessure, presque sur son cœur, et tombe en arrière.

Effondré sur le sol, il n'arrive plus à bouger, plus à penser. Il est glacé de douleur et de panique. La balle est au cœur. Il va mourir d'une seconde à l'autre. L'air lui manque déjà, il n'arrive plus à respirer.

La dernière fois qu'il a pensé ça, Tony lui a sauvé la vie, et là, c'est lui qui la lui prend.

Il pense à Coulson. Il pense à Fury mort pour rien, parce qu'il n'a pas pu tirer.

Il pense à Thor. Il pense à sa mère. Il se sent si désolé, il aurait tellement aimé réussir à éliminer la gangrène de la ville…

Tony s'approche, et Loki sait qu'il va lui mettre une balle dans la tête d'une seconde à l'autre.

Non, pas maintenant. Le plan, il doit venir à bout du plan. Sans lui, Maria n'aura jamais les renseignements nécessaires pour les prendre en flagrant délit, et sans cela, il y aura toujours des ripoux pour faire disparaître les rares preuves.

"Tony, supplie-t-il en tentant de lever sa main droite."

Tony serre les dents, son arme toujours pointée sur sa tête. Pour lui aussi, ce doit être plus dur quand c'est une passade, et ça pourrait lui sauver la vie. Il sent des larmes couler le long de ses tempes, et rassemble tout son souffle.

"Maria... articule-t-il difficilement, Hill..."

Chaque mot et chaque respiration sollicite son torse, et sa blessure le déchire de douleur. Pourtant, il lui suffirait de tout expliquer à Tony pour survivre, mais son corps ne suit pas sa tête.

"Qu'est-ce que tu lui veux, à Maria Hill ? Elle est comme toi ? C'est pour ça que tu as été prévenu aussi vite pour le transfert au FBI ?

-Non... le… le plan...

-Quel plan ? De tuer Fury sous nos yeux alors qu'on te faisait tous confiance ?"

Tony est de plus en plus énervé, et de plus en plus convaincu de sa culpabilité. Il doit soigneusement choisir son prochain mot, ou ce sera aussi son dernier. Qu'est-ce qu'il peut dire que Tony comprendra à coup sûr, et résumera la situation si complexe et poisseuse dans laquelle il est embourbé depuis deux ans...

"Loren... zaccio."

Tony entrouvre les lèvres, et baisse son arme. Il le fixe un instant, secoue la tête, puis s'agenouille pour mieux l'entendre.

"Comment ça, Lorenzaccio ? proteste-t-il. Non, écoute, tu serais prêt à raconter n'importe quoi pour sauver ta peau...

-S'il te... plaît... supplie-t-il en levant la main. Confiance."

Il croit un instant que Tony va lui cracher dessus, pour lui demander de lui faire confiance, après qu'il ait tué Nick et kidnappé Lila. Mais Tony le fixe, murmure "Lorenzaccio" en détournant les yeux, et tend sa main vers son épaule. Il appuie dessus, et Loki comprend qu'il va le torturer pour être sûr qu'il dit la vérité. Il se met à hurler quand la douleur le foudroie, et tente de se débattre.

"Il faut faire pression, le raisonne Tony, ou tu vas trop saigner. Je suis désolé. Ecoute, je vais appeler une ambulance, et on en discutera à l'hôpital.

-Non, proteste-t-il en grimaçant. Hôpital... prison... le plan...

-Tu ne peux pas me demander de te laisser comme ça, tu es grièvement blessé, et coupable d'un homicide.

-Tony, appelle-t-il en levant sa main droite de nouveau."

La douleur le fait trembler terriblement, mais il réussit à amorcer son geste. Tony change sa main, et prend la sienne. Le sang qu'il voit dessus le fait paniquer, mais il doit rester concentré.

"Trop... important. Les faire... tomber... Infiltré...

-Tu ne peux pas me dire ça. Tu aurais tué Fury dans le but de les convaincre que tu étais toujours dans leur camp ? On marche sur la tête !

-Cancer..."

C'est trop décousu, Tony ne comprendra rien, il croira que c'est lui, ou Maria Hill qui a un cancer, mais pas Fury. Contre toute attente, Tony écarquille les yeux en ayant l'air de comprendre quelque chose.

"Comment tu es au courant pour... Vous êtes complètement malades, tous les deux... Non, écoute, ton épaule saigne trop, je dois vraiment appeler quelqu'un..."

Loki laisse sa main, maintenant trempée de sang, et atteint sa poche. Sa main tremble trop, et son téléphone tombe, mais Tony le récupère au sol. Il souffle longuement par le nez et contemple l'objet un long moment. Puis il relève la tête vers lui, et demande simplement :

"Qui ?"

Loki grimace. Celle-ci va très mal passer. Tony pourrait bien changer d'avis et l'achever, avec celle-là. Mais les autres ne répondront pas, ou arriveront trop tard.

"Amora."

Tony serre les dents, et appuie sur la blessure plus que nécessaire. Loki pousse un cri, mais l'entend taper sur les touches. La tonalité résonne, et il soupire intérieurement de soulagement. Tony baisse sa main pour coller le téléphone près de son oreille à lui, et il entend bientôt :

"Qu'est-ce qu'il y a, Loki, je travaille.

-Blessé... balbutie-t-il. Balle... Planque... Vite.

-J'arrive. Avec un chirurgien."

Elle raccroche, et Loki ferme les yeux de soulagement. Il les rouvre pour regarder Tony, et murmurer :

"Désolé.

-Désolé aussi. Pour ton épaule.

-Bien... mérité.

-On peut dire ça, oui."

Loki lève à nouveau sa main valide, et Tony la prend dans la sienne. Ils se regardent un instant, Loki essayant de faire passer de nouvelles excuses dans son regard. Quel gâchis. Ils étaient si bien, tous les deux. C'est sans doute frôler la mort qui le fait dire ça, mais aucun plan au monde ne valait la peine qu'il fasse tant de mal à cet homme.

Tony se penche vers lui pour effacer du pouce une nouvelle larme au coin de ses yeux.

"Pars, souffle Loki. Amora.

-Combien de temps ?

-Peu. Quinze.

-Je reste un peu faire pression.

-Pars, insiste-t-il.

-Non, désolé, tu ne m'as pas claqué entre les doigts la première fois, tu ne vas pas commencer à la deuxième."

Loki a un sourire agacé, mais arrête de protester. Le temps qu'Amora trouve un médecin, Tony peut bien rester deux minutes, et il y a toujours l'escalier de secours.

Tony soulève prudemment sa main un instant, avant d'appuyer de nouveau et de lui décrire :

"C'est juste en dessous de la clavicule, je ne sais pas si les poumons sont touchés. Tu respires bien ?

-Oui. Juste douloureux."

Même si Tony vient de lui mettre une balle sous la clavicule et que rien ne lui jamais fait aussi mal, pas même sa fracture ou sa presque overdose, il lui a tout de même manqué.

"Je ne pouvais pas savoir, se justifie Tony en ayant l'air de parler tout seul. Je ne sais même pas si c'est vrai, ce que tu racontes, ou si tu m'as encore manipulé pour que je fasse ce que tu veux."

Loki le regarde dans les yeux, et fait une petite grimace d'excuses.

"Promis. Mais... Silence. Danger.

-D'accord. Natasha a lu Lorenzaccio, et avait des doutes sur toi. Mais elle n'en a parlé qu'à moi. Tu peux la remercier, moi je voulais te refroidir.

-Merci, alors."

Loki pose sa main droite sur les deux mains de Tony faisant pression, et lève la tête. Probablement à cause de sa perte de sang, le monde commence à tourner, et il ferme les yeux.

"Hey. Hey !

-Vertige, souffle-t-il.

-Je sais, mais garde les yeux ouverts, tu me fais peur.

-Inquiet ? provoque Loki en tentant un sourire.

-Oui, sombre imbécile."

Son sourire s'élargit. S'il ne se trompe pas, c'est l'insulte qu'il a utilisée lorsqu'il a avoué à Tony ses sentiments pour lui. Poussé par une bouffée d'affection, il soulève légèrement sa main pour faire un petit signe vers lui. Tony fronce les sourcils, et Loki recommence, avant de lever sa main vers la joue de Tony. Il l'attire doucement à lui, malgré le fait qu'en se penchant vers lui, les mains appuient davantage sur la plaie et ravivent la douleur.

"Sûr ? Murmure Tony.

-Oui.

-Je te hais.

-Je sais."

Tony l'embrasse, et Loki en frissonne presque. Il est complètement marteau d'être attiré par un type venant de lui tirer dessus. Il mettra cela sur le compte de l'anémie.

Il a l'impression qu'ils n'ont pas fait cela depuis un million d'année, mais aussi que c'était hier. Tony a un goût de whisky sur les lèvres, et le fait toujours se sentir invulnérable.

Cela ne dure pas longtemps, car la peur qu'Amora ne tombe sur Tony se ravive, et il le repousse pour murmurer :

"Pars. Amora."

Tony se lève et Loki a soudain peur qu'il ne parte sans un mot, mais il allait chercher une veste pendue à la porte. Il revient rapidement vers lui pour la poser sur la blessure, positionner la main valide de Loki par-dessus, et lancer :

"Appuie autant que tu peux, d'accord ?

-Fais attention, lui lance Loki.

-… Toi aussi. Ne laisse personne d'autre que moi te tirer dessus.

-Silence.

-Je vais le prendre dans les deux sens."

Loki soupire, et Tony s'en va. Loki entend ses pas se stopper et devine qu'il hésite.

"Pars ! Insiste-t-il."

Les pas s'éloignent enfin, et il peut respirer.

Merde. Merde de merde de merde. Maintenant, il a un trou dans l'épaule, il doit expliquer qui est la personne qui lui a tiré dessus pour ensuite sauver sa vie et sa liberté, et il a embrassé Tony.

Comme si la situation n'était pas déjà suffisamment dramatique.

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Quand il rentre à la Brigade, ses trois collègues de terrain sont sur son ordinateur avec des visages très inquiets. Ils ont levé la tête en entendant l'ascenseur, et leurs regards alternent entre ses yeux et ses mains.

Il soupire intérieurement. Il a été stupide de penser que Clint serait rentré chez lui sans rien dire, et que Steve et Natasha seraient toujours dehors à enquêter sur leur affaire. Maintenant, il doit trouver une explication solide pour avoir le sang de Loki sur les mains.

« Tony ? balbutie Steve. Tu es couvert de sang !

-Ce n'est pas le mien, les rassure-t-il en les levant pour montrer qu'il n'est pas blessé. J'ai trouvé l'appartement de Loki, mais il n'était pas seul. Je l'ai touché à l'épaule, mais ils se sont enfuis, sans que je n'aie pu voir la plaque. »

Natasha écarte le siège, s'approche de lui, et le gratifie d'une grande gifle avant de l'injurier :

« Tu es un imbécile d'y être allé seul, tu aurais pu y laisser la vie trois fois ! Qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse, qu'on te mette une laisse ? Qu'on te menotte à ton bureau ? Je peux le faire, Tony, et je t'assure que je le ferai, si c'est la seule façon de m'assurer que tu meurs un autre jour !

-Pierce Brosnan, 2002, glisse-t-il.

-Je ne suis vraiment pas d'humeur pour tes références cinématographiques d'idiot inconscient.

-Je suis désolé de vous avoir inquiétés. Je me suis fait peur aussi. Promis, je ne le ferai plus. »

Il ne ment pas. Voir Loki, son bleu et bien plus que ça, pointer son arme sur lui et réfléchir à le tuer ou non, lui a glacé le sang et brisé un peu plus le cœur.

Mais Loki n'a pas tiré. Il a baissé son arme, il était prêt à discuter, peut-être même à lui dire la vérité. Et lui, il lui a tiré dessus.

« Tony ? lui souffle Clint. Écoute, je suis désolé pour tout à l'heure. Vraiment. Je me faisais un sang d'encre pour Lila, mais depuis une heure, c'était pour toi. »

Tony soupire, et baisse ses épaules en lançant :

« C'est moi qui ai merdé, je n'aurais dû vous mettre en danger avec ma vengeance ridicule, ta famille et toi. Mais ne pointe plus ton arme sur moi, d'accord ? On m'a fait le coup deux fois aujourd'hui, ça commence à faire beaucoup. »

Clint a un maigre sourire coupable, et s'approche pour l'étreindre. Tony écarte ses mains tachées de sang séché, et se laisse serrer dans les bras de son ami. Ils restent comme ça quelques secondes, puis Clint s'écarte avec une tape virile et maladroite pour laisser la place à Steve. Ce dernier ferme son poing, et, le levant au dessus de Tony, commence à lui frictionner douloureusement la tête.

« Ne-refais-jamais-ça, compris ? articule-t-il en frottant énergiquement.

-Oui, oui, arrête, arrête, ça fait très mal ! »

La seconde d'après, il se retrouve écrasé contre des pectoraux, et il se dit que Peggy est tout de même une sacrée veinarde.

« Pas de câlin de ma part, assène Natasha derrière eux, je suis encore en colère.

-C'est honnête, tente-t-il de souffler.»

Steve le relâche en se rendant compte qu'il a peut-être du mal à respirer. Tony sourit quand ses talons touchent de nouveau le sol, heureux de voir les tensions entre eux s'effacer. Ses yeux se posent sur le bureau vide de Loki, et il détourne le regard.

« Je vais… souffle-t-il, aller me laver les mains, on a déjà son ADN, et je vais épargner ça à Darcy. Ne m'attendez pas, on se voit demain. »

Il part aux toilettes en s'efforçant d'avoir l'air naturel. Amora est-elle vraiment venue ? Avec un chirurgien ? Comment aurait-elle pu en trouver un en quinze minutes ? Loki lui a menti, il a lui a forcément menti pour qu'il s'en aille, il est peut-être encore en train d'agoniser dans son immense nouvelle cuisine…

Il commence à laver ses mains, et sa gorge se serre en voyant l'eau teintée de rose disparaître en tourbillon dans le siphon. Il a son sang sur les mains. Il a son sang sur les mains…

Même s'il survit, même si son épaule est correctement soignée, comment ses « collaborateurs » vont réagir s'ils apprennent qu'il a eu un flic pointant son arme sur lui, mais qu'il n'a pas tiré ?

Ils vont le tuer, et ce sera de sa faute.

On pousse la porte des toilettes des hommes, et il lève la tête.

« Je sais que tu ne portes jamais de robe, lance-t-il à l'intruse, mais le bonhomme avec un pantalon ça veut dire…

-Comment tu as fait pour avoir autant de sang sur les mains ? l'ignore Natasha. Tu as eu le temps de faire pression sur la plaie, et l'autre est arrivé après ? Qui c'était, le Russe ou le gros bras ?

-Je… »

Natasha est un détecteur de mensonges humanoïde, et elle a dit être toujours en colère contre lui. Il ne veut pas lui donner plus de motifs pour lui en vouloir, alors il avoue :

« J'ai menti devant les autres. Je lui ai bien tiré dans l'épaule, mais il était seul. Je voulais lui mettre une balle dans la tête, mais il m'a dit… « Lorenzaccio ».

Natasha détourne le regard, a un mince sourire en coin, puis semble réfléchir.

« Peut-être qu'il t'a menti, souffle-t-elle.

-C'est ce que j'ai pensé aussi, mais… Je ne sais pas s'il aurait pu inventer ça d'un coup, avec une épaule trouée, sans y avoir pensé avant. Tu comprends ?

-Oui… Je suppose qu'on ne saura que quand on l'aura attrapé. Donc, s'il était seul, et que tu n'es pas passé le déposer à l'hôpital avec des menottes... »

Tony grimace. Il se souvient maintenant pourquoi il ne voulait rien dire.

« Je l'ai laissé prévenir des gens à eux. Il m'a dit que l'hôpital le mènerait tout droit en prison, et qu'alors il ne pourrait pas mettre en œuvre son plan.

-Autant de mots que ça ?

-J'ai brodé autour, mais je crois que c'est ça. Il a répété ça plusieurs fois, « le plan ». Il a aussi dit… « cancer », souffle-t-il après une hésitation. »

Les yeux de Natasha se durcissent. Elle baisse la tête un long moment, avant de lever rapidement son poing pour frapper le mur et sortir des toilettes sans rien ajouter. Tony appuie ses paumes sur le rebord du lavabo, et soupire.

Il croyait que mettre une balle à Loki le ferait se sentir mieux.

Il se trompait lourdement.

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J'espère que le chapitre vous a plu, il ne devrait en rester que quatre avant la fin de cette histoire. Bonne année, portez-vous bien !