« Faites qu'il s'en sorte, je ne le supporterais pas s'il venait à mourir » pensait amèrement Ryoma, le dos courbé, et ses mains soutenant sa tête qui menaçait à cet instant d'exploser.
Tout s'était passé incroyablement vite, les ambulances, la séance de réanimation, les perfusions… toutes ses images défilaient devant ses yeux, cauchemardesques.
Une infirmière venait de passer pour leur dire que son état était stable mais qu'il n'avait pas encore repris conscience.
Il regarda à ses côtés sa cousine et sa mère qui avaient fini par s'assoupir.
Ses yeux se mirent à lui brûler et il lui semblait que son cœur était empli d'eau en songeant à la dispute qu'ils avaient eu le matin même, son père et lui. Il ne se souvenait plus très bien comment ils en étaient arrivés à se disputer mais la dernière phrase qu'il lui avait lancée, il ne se la pardonnerait jamais.
« Tu peux même crever, j'en aurais rien à faire »
Bien sûr il ne le pensait pas, il y avait tant de choses qu'il jetait à la figure de son père, sans les penser. Tout simplement pour préserver, ce qui lui semblait aujourd'hui comme de l'orgueil mal placé. Cette situation qu'il vivait, il avait l'impression d'en être entièrement responsable. « Si mon père est entre la vie et la mort, c'est de ma faute, je suis responsable du coma de l'être que j'aime le plus au monde »
« Monsieur Echizen ? Vous m'entendez ?» demanda une voix inquiète.
Il releva la tête avec difficulté et reconnut une des infirmières.
« Votre père vient de se réveiller, il demande à vous voir. Il n'est pas au mieux de sa forme donc nous vous demanderons de ne pas rester trop longtemps ».
Il se leva promptement en grommelant un merci, puis suivit l'infirmière qui lui ouvrit la porte.
Il entra dans une chambre d'hôpital de ce qu'il y a de plus classique. Immaculée, avec une petite commode où trônait un vase dépourvu de fleurs. Il prit une chaise, la rapprochant le plus possible du lit de son père et s'y assit. Le célèbre Samourai avait une perfusion nutritive, ainsi qu'une perfusion de sang ainsi qu'un peu de morphine pour qu'il ne souffre pas trop.
« Oyaji, tu nous as fait tellement peur, mais tiens bon, tu es un battant » murmura Ryoma tandis que son père ouvrait péniblement les yeux.
« Ry..o..ma » ?.
La voix de son père était si faible, si chevrotante que le jeune garçon eut du mal à croire que l'homme devant lui était bien son père.
« Oui Oyaji, c'est moi.
-Mon…fils…. Il s'arrêta pour déglutir.
-Papa, tu ne devrais pas te fatiguer, ne cherche pas à parler. » lui dit avec douceur Ryoma en serrant sa main bien fort.
Un petit non de la tête lui répondit tandis que son père cherchait à reprendre son souffle pour continuer.
« Je sais…que je n'ai…pas toujours été…un bon père…pour toi.
-Oyaji, cesse de dire des bêtises, tu as toujours été un très bon père, le meilleur. C'est moi.. qui n'ai… jamais été un bon fils dit en sanglotant Ryoma. »
L'électrocardiographe émit un bip inquiétant. Ryoma remarqua que les pulsations devenaient de plus en plus irrégulières.
« Oyaji tais toi, il faut te reposer
-Je..sais..que..je…vais mourir.. »
La détresse que Ryoma lisait dans les yeux de son père fut comme un couteau en plein cœur. Les larmes qu'il cherchait jusque là à retenir, coulèrent abondamment sur ses joues.
« Je t'interdis de dire ça ! » cria-t-il faisant un sourire éclairé pendant un fugace instant le visage de son père.
L'électrocardiographe émit des bips de plus en plus fréquents. La fréquence cardiaque du tennisman diminuait de plus en plus.
« Tu es le meilleur fils que j'aie pu avoir » dit en un souffle le célèbre Samouraï avant que ses yeux ne se ferment à jamais.
Une larme perlait au coin de son œil, et s'écoula sur sa joue tandis que l'électrocardiographe émettait un son continu, horrifiant.
« Oyaji non ! Oyaji réveille toi ! murmura Ryoma tandis qu'il le secouait de plus en plus fort. OYAJI ! ».
Ses épaules se convulsèrent, tandis qu'il pleurait en criant le nom de son père. Des infirmières et des docteurs accoururent, cherchant à le réanimer. Une infirmière prit la main de Ryoma, cherchant à le faire sortir mais celui-ci ne voulut pas bouger.
Il regardait la poitrine de son père, se soulever au fur et à mesure qu'on lui faisait des électrochocs jusqu'à ce que le diagnostic final tombe. Il est bien mort, il n'y a plus rien à faire.
Il commença alors à se débattre tandis que l'infirmière cherchait à l'emmener.
« Vous avez tué mon père, vous l'avez tué ! » se mit-il à crier alors qu'il donnait coups de pieds et de coudes à la pauvre infirmière.
« Allez chercher un sédatif » demanda un médecin qu'on lui administra. Il s'évanouit alors dans les bras de l'infirmière tandis que des larmes continuaient à couler sur ses joues.
Un léger rayon de soleil filtra à travers la fenêtre de la chambre, caressant la joue du bel endormi. Les draps étaient tombés par terre prouvant le sommeil agité de Ryoma.
Il se réveilla en sursaut, le souffle court et bénit le ciel que tout ce qu'il venait de vivre n'était qu'un affreux cauchemar. Il toucha ses joues et essuya ses larmes, et remarqua que son oreiller était trempé. Puis mû par un mauvais pressentiment, il sauta du lit, en direction du temple. Il voulait en être sûr.
Il trouva son père sous la cloche à lire ses magazines. Il lut une lueur d'inquiétude dans son regard lorsque son père leva les yeux vers lui. Il n'avait pas fait garde à sa tenue.
« Shonen, qu'est-ce qu'il y a ? » demanda Nanjiroh en s'asseyant et en regardant son fils.
Ce ne fut que lorsqu'une larme tomba par terre que Ryoma remarqua qu'il était bien en train de pleurer. De soulagement, de joie il n'aurait pu le dire.
« Oyaji dit-il d'une voix enrouée tandis que son père, gêné se grattait la tête. Il y a une chose que je ne t'ai jamais dite.
-Laquelle demanda son père en souriant »
Il se jeta à son cou, le faisant tomber par terre.
« Je suis heureux de t'avoir pour père ».
