Jour 3.
Le lendemain matin, Regina ouvrit les yeux et constata que la blonde dormait paisiblement à côté d'elle. Elle voulut sortir du lit sans geste brusque afin de ne pas la réveiller mais elle sentit le bras d'Emma s'allonger sous la couverture, passer autour de sa taille et l'enlacer pour la ramener près d'elle. La respiration de la Reine se figea dans sa poitrine, elle n'osa plus bouger et Emma vint se blottir contre son corps.
« Reste avec moi… je n'aime pas quand ta chaleur quitte les draps… » Marmonna-t-elle, les yeux clos.
« Euh… Emma, c'est moi… Regina… » Chuchota la Reine, ayant soudain peur que dans son sommeil, Emma ne se soit crue de nouveau avec son Pirate de mari.
« Hm… oui, je sais très bien que c'est toi… Que crois-tu ? Que je t'aie prise pour lui dans la confusion du matin ? » Grogna Emma.
Regina toussota pour faire passer sa gêne car c'est effectivement ce qu'elle avait pensé en voyant Emma la retenir auprès d'elle.
« Je ne peux absolument pas vous confondre... » Ajouta la blonde.
Bien qu'agacée, Emma ne lâcha pas son étreinte pour autant, elle se sentait bien et elle voulait encore grapiller quelques minutes de sérénité. Regina comprit que la tendresse manquait cruellement à sa vie – et à la sienne aussi d'ailleurs – alors elle consentie à rester couchée quelques instants encore.
Elle se surprit même à se recaler confortablement sous les couvertures, laissant Emma se blottir à sa guise d'une façon peut-être un peu trop intime, ce qui la fit déglutir difficilement. Emma soupira d'aise et Regina sentit la main de la blonde se presser sur sa hanche, sur sa peau nue, entre son haut en soie qui était légèrement remonté et son bas de pyjama. Elle sentit ensuite son pouce commencer à la caresser très subtilement, presqu'imperceptiblement, et pourtant cette toute petite caresse lui fit l'effet d'un électrochoc, les battements de son cœur partirent au quart de tour, tout son être se crispa sous la tension et elle tenta de dissimuler au mieux l'effet dévastateur que ce simple geste avait sur elle.
Emma se rendormie mais Regina, elle, en fut incapable.
SQ
Elles déjeunèrent dans le calme, la maison étant très silencieuse depuis qu'Henry était parti à l'Université, et dans le courant de l'après-midi, David et Mary-Margareth sonnèrent à la porte. Le sort de protection les laissa passer et ils purent entrer dans le Manoir puisqu'ils étaient invités et attendus. Emma patientait dans le salon et se leva pour venir à leur rencontre. Mary-Margareth se figea sur place en voyant le visage encore tuméfié de sa fille. Elle remarqua que les blessures dataient de quelques jours à peine et elle faillit fondre en larmes.
« Mon Dieu, Emma… » Souffla sa mère avant de l'enlacer de ses bras puis d'examiner son visage avec un air dévasté.
Elles entamèrent alors une discussion à sens unique du genre : « Qu'est-il arrivé à ton visage d'ange ? Tu vas bien ? Tu aurais dû venir nous voir, tu aurais dû ceci, tu aurais dû cela… ».
David, quant à lui, resta stoïque, la mâchoire et les poings serrés. La peine et la colère se mélangeant en lui pour le laisser pétrifié sur place. Regina était à sa hauteur dans l'entrée du salon et elle resta silencieuse, le laissant faire redescendre la pression qu'avait engendré la vue de sa fille, blessée, battue. Il expira lourdement l'air retenu dans ses poumons avant de pouvoir s'exprimer.
« C'est Killian qui a fait ça ? » Demanda-t-il tout bas à la Reine.
« Oui. »
« Je vais le tuer. »
« Alors faites la queue… parce que je passe en premier. » Répondit Regina.
Pour la première fois, Regina et David échangèrent un regard entendu, pour la première fois, ils étaient tous les deux en parfait accord. Même si Regina n'était plus l'Evil Queen depuis longtemps et, qu'elle et Mary-Margareth étaient devenues de bonnes amies, avec David il y avait toujours eu de la retenue, de la distance et peut-être même encore une peu de méfiance mais pour la première fois, depuis des dizaines d'années, ils étaient sur la même longueur d'onde. Silencieusement, il se scella un pacte en vue de protéger Emma. Regina ne pouvait nier que David était un bon père et David dû admettre que Regina n'avait que de bonnes intentions envers sa fille, et que l'affection qu'elle semblait lui porter à cet instant était flagrante et sincère.
Ils prirent tous place dans le salon, Regina apporta du thé, et un cognac pour David qui devait à tout prix calmer ses nerfs, et ils entamèrent une discussion pénible.
« Écoutez, je comprends votre inquiétude et peut-être même votre colère pour vous avoir laissé à l'écart. » Commença Emma calmement.
« Oui, du coup, on a failli croire ce qu'il nous a raconté puisqu'on avait aucune nouvelle de toi. »
« Je ne voulais tout simplement pas qu'il me retrouve tout de suite, c'est pour cela que je ne suis pas venu chez vous. Désolé si ça vous a inquiété mais c'est lui qui déraille, pas moi. »
« Explique-nous. »
« Il… il a changé, ou bien, plutôt il redevient celui qu'il a toujours été, avant de m'aimer. Enfin, je ne sais pas trop et je m'en fiche… Ça fait un moment que je sens qu'il n'est plus le même et que notre relation se dégrade… mais la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, c'est l'apparition des pouvoirs de Hope… »
« Quoi ? Hope a des pouvoirs ? » S'étonna joyeusement Mary-Margareth.
« Oui. Et il n'a pas du tout apprécié cet état de fait, il s'est mis en tête de lui ôter ses dons… et les miens aussi… et ça a dégénéré. »
« Il a levé la main sur toi ? » Demanda David, les dents serrés.
« Oui »
« Pourquoi tu ne l'as pas maitrisé ? »
« Je… je me suis défendu comme j'ai pu mais je n'ai pas utilisé la magie… parce que j'étais dans un tel état de rage moi aussi que j'aurais pu le tuer. »
« C'est inacceptable d'avoir levé la main sur toi. »
« Je vais demander le divorce. » Annonça Emma.
Regina ricana sans se contrôler et releva aussitôt la tête pour s'excuser de sa maladresse.
« Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit de drôle ? »
« Ce n'est pas un divorce qui arrêtera ce foutu Pirate. Ni même une mesure d'éloignement, les règles de ce Monde, il s'en fiche éperdument. » Argua la Reine.
« Je sais, tu as raison mais n'empêche que, sur le papier, je ne veux plus être mariée avec lui. »
« Alors j'appellerai mon notaire demain, il pourra t'arranger ça en deux secondes. »
« Il faudra sa signature ? »
« Hm, non pas besoin. » Répondit Regina avec un sourire rassurant.
« N'empêche qu'il faut raisonner Killian, il n'a pas le droit de vouloir t'ôter tes pouvoirs, ni ceux de ma petite fille. » Reprit Mary-Margareth, prête à en découdre.
« On ne peut plus le raisonner. » Murmura Emma.
Tout d'un coup, un grand bruit se fit entendre contre la porte d'entrée. Killian avait vu les Charmants entrer et avait pensé, à tort, que l'enchantement était levé. Il se prit la déflagration du mur de protection magique en pleine face et fut projeter jusque sur le trottoir d'en face. David et Regina se précipitèrent d'un même élan jusque dans le jardin puis dans la rue, mais ils ne virent que le manteau en cuir noir du Pirate tourner au bout de l'avenue. Killian avait été sonné et avait fuis en titubant.
« Le lâche. » Grogna David.
Il voulut partir à sa poursuite mais Regina l'en empêcha, le rattrapant de justesse par le bras.
« Attendez, David. Nous l'aurons mais pas maintenant. »
Puis ils rentrèrent auprès d'Emma et Mary, la mère tenant sa fille tout près d'elle.
Emma se dégagea gentiment de son étreinte, elle détestait paraitre faible, elle détestait se montrer vulnérable et dans ses yeux, Regina reconnu la flamme combative qu'avait toujours animée Emma. Elle aima la revoir en plein possession de ses moyens et de ses forces, mais elle comprit aussi que ses moments de faiblesse, ces moments où elle se dévoilait, lui étaient réservés à elle et que même sa mère n'y avait pas le droit et elle apprécia cette idée.
Ils discutèrent encore un long moment de la situation puis David et Mary-Margareth prirent congé en fin d'après-midi, devant récupérer leur fils Neal à l'école. Sa mère avait longuement insisté pour qu'Emma vienne avec eux mais cette dernière avait catégoriquement refusé. Elle n'osa pas avouer qu'elle se sentait plus en sécurité auprès de Regina, et plus sereine aussi mais elle tenue bon face à sa mère. Regina était venue à son secours, prétextant que l'enchantement du Manoir était une protection sûre - qui venait de faire ses preuves contre le Pirate d'ailleurs - et que leur fille pouvait rester là sans le moindre problème.
Mary nota une proximité nouvelle entre les deux femmes, une proximité physique dans les gestes et les regards mais aussi dans le ton de leurs voix quand elles s'adressaient l'une à l'autre, elle trouva cela un peu étrange, mais elle ne s'attarda pas dessus. Elle fut aussi un peu blessée qu'Emma préfère rester là mais, l'argument de la barrière de protection du Manoir était assez pertinent pour qu'elle cesse d'insister, et puis, elle connaissait bien sa fille, plus elle insisterait, plus Emma refuserait.
Après s'être promis de se donner des nouvelles tous les jours et de s'appeler au moindre signe de la présence de Killian dans les parages, les Charmants quittèrent le Manoir.
SQ
Après le départ de ses parents, Emma s'affala lourdement dans le canapé du salon.
« Tu veux un verre ? » Lui demanda Regina.
« Hm… oui merci. »
Regina leur servit deux verres d'un très bon alcool magnifiquement ambré et prit place à ses côtés, épaule contre épaule. Elles restèrent là un long moment, murées dans un silence reposant. Et puis Emma se tortilla sur place avec une moue enfantine, son esprit ayant fini par divaguer plus loin que la surface de ses problèmes.
« Tu sais de quoi j'ai envie ? »
« Non mais, dis-moi… de quoi as-tu envie ? » Demanda Regina, méfiante, ne sachant franchement pas à quoi s'attendre mais se préparant au pire.
« D'une pizza ! »
« Oh… » Souffla Regina, soulagée.
« Oui, dans cette foutue contrée en bord de mer où Killian m'a emmené vivre, il n'y avait pas de pizza ! Il y avait une odeur d'anchois frais qui planait constamment dans le village, mais pas de pizza ! »
« Mais c'est scandaleux ! » S'amusa à lui répondre Regina.
« Je ne te le fais pas dire ! Est-ce que tu crois qu'on pourrait … »
« Se faire livrer ? Evidemment ! On est dans un monde civilisé ici ! » Rétorqua la Reine.
Emma éclata de rire, Regina qui avait autrefois régnée sur un Monde Médiéval, c'était plutôt bien habitué au Monde Moderne. Regina, quant à elle, fut agréablement surprise, Emma avait ri et ce son était merveilleux à ses oreilles, un instant de joie, éphémère mais délicieux. Elle partit chercher le flyer du menu de chez « Tony » - le petit restaurant italien de Storybrooke qui avait ouvert après la réunification de tous les Royaumes et dont le cuisinier, Joe, donnait souvent les restes de boulettes de viande sauce bolognaise aux chiens errants du quartier. Emma fit son choix puis elles commandèrent leur diner : pizza 4 fromages pour Emma, spaghettis au pesto pour Regina. La Sauveuse arborait un grand sourire, tentant de contenir son appétit qui se réveillait tel une enfant à qui l'on a promis son dessert préféré.
Plus tard dans la soirée, elles étaient installées dans le salon, devant un feu de cheminée, avec un verre de vin à la main. Emma, totalement repue de sa pizza tant désirée, se releva un peu dans l'assise du canapé où elle avait trop tendance à s'affaler.
« Regina, je sais que je t'ai déjà remercié un certain nombre de fois mais … je tiens à te le dire encore… alors merci. »
Regina la regarda avec un petit sourire en haussant les épaules, l'air de dire : « Je ne fais rien d'extraordinaire, c'est normal ».
« Non vraiment tu ne te rends pas compte, tu es géniale avec moi… Par exemple, aujourd'hui, avec mes parents, tu as été … d'un soutien sans faille… et tu m'as sauvé, une fois de plus… »
« C'est toi qui m'as sauvé la première, tu sais. » Lança Regina sans réfléchir.
« Comment ça ? »
« Tu… tu m'as sauvé, il y a longtemps déjà… » Murmura Regina, sans oser aller plus loin.
Emma posa sur elle un regard étonné, ne comprenant pas de quoi elle parlait alors la Reine se décida à préciser le fond de sa pensée.
« Il y a près de 10 ans maintenant, tu as déjoué la Malédiction et j'ai dû m'adapter aux changements que ta venue avait déclenché. Oh, bien sûr, je t'ai détesté pour ça au début et puis finalement, grâce à toi… j'ai pu me défaire de mes veilles rancunes, me repentir de mes mauvaises actions, j'ai pu être une meilleure mère pour Henry, j'ai même réussi à pardonner à ta mère et à devenir amie avec elle… tu as … tu as fait de moi un meilleur être humain. »
Le regard d'Emma ne trompa personne, elle était émue par ce qu'elle venait d'entendre mais elle ne voulut pas s'en attribuer tout le mérite.
« Hm… tu sais bien que je n'y suis pour rien, déjouer la Malédiction ça faisait partie du Sort Noir en lui-même. Rumpel l'a créé ainsi… moi je n'ai pas fait grand-chose en réalité. J'ai même failli tout faire rater en m'obstinant à ne pas croire en la magie, à ne pas croire ce qu'Henry me racontait, à ne pas croire qui vous étiez vraiment, tous autant que vous êtes… j'ai failli tout bousiller. »
« Mais tu as réussi. Tu réussi toujours… tu es la Sauveuse. »
« La Sauveuse, elle est dans un sale état en ce moment. Tu l'avoueras, je ne suis plus celle que j'étais. »
« Tu rayonnes toujours autant Emma, ais confiance en toi. »
Emma se stoppa sur cette phrase, les mots de Regina la touchaient si profondément qu'elle sentit son cœur se serrer d'une façon bien étrange.
« Ce n'est pas comme moi… » Ronchonna Regina pour elle-même, mais Emma, bien que perdue dans ses pensées, l'avait entendu quand même.
« Qu'est-ce que tu veux dire ?! Voyons, tu es The Good Queen, tu es la Reine des Reines ! La Souveraine de tous les Royaumes ! Tu n'as jamais été plus puissante et plus belle qu'aujourd'hui. »
Regina tiqua sur les paroles d'Emma mais reprit le court de sa pensée.
« Mais je suis seule Emma, terriblement seule… Et je ne se serais jamais… la femme de quelqu'un. » Avoua-t-elle péniblement.
« Ne dis pas ça. » Souffla Emma, soudain bouleversée par la peine qui transpirait au travers des mots de la brune.
Regina secoua la tête d'un mouvement bien trop familier, un geste fataliste, un geste de désespoir qu'Emma n'avait pas vu depuis longtemps chez elle.
« Tu sais, je suis heureuse d'être qui je suis aujourd'hui mais le bonheur, le vrai, je … Je crois que je n'y aurais jamais le droit. »
« Non, c'est f… »
« Bien sûr que si. Après tout, regarde mon histoire : ma mère a régi ma vie selon ses envies, allant jusqu'à tuer mon premier amour parce qu'elle ne voulait pas que j'épouse un simple palefrenier, même si je l'aimais, elle s'en fichait royalement. Ensuite, elle m'a forcé à épouser le roi et mon cœur est devenu dur comme de la pierre après ça. Elle a détruit la part de moi qui savait aimer... J'ai fini par faire tuer Léopold, puis je me suis simplement joué des hommes à ma guise, avide de vengeance et de pouvoir, Sidney, Graham, et d'autres dont je ne me souviens même plus du nom... Et puis quand j'ai voulu croire à une seconde chance, Robin est reparti avec sa femme en me brisant le cœur, puis il est revenu, puis il est mort… (Elle soupire) Je crois que je n'ai pas le droit au bonheur Emma, pas celui-là en tout cas, pas celui qui veut qu'on soit heureux à deux… Non, je n'ai pas le droit d'être aimé… C'est mon karma ... »
Emma avait voulu l'interrompre un bon millier de fois pendant son discours mais elle l'avait écouté attentivement, comprenant combien toute sa vie, Regina avait souffert. Oui, elle avait été mauvaise et dangereuse, mais on l'avait poussé dans cette direction, jamais personne ne l'avait aimé pour qui elle était vraiment - si ce n'est Daniel et c'est pour ça que Cora l'avait tué car il anéantissait ses rêves du Trône pour sa fille - et jamais personne n'avait vraiment tenté de la remettre sur le droit chemin ou de creuser un peu plus sous la surface pour comprendre qui elle était véritablement. Sauf peut-être la Sauveuse elle-même, fut un temps, elle avait essayé.
Emma ressentit un frisson et son cœur se serra à cette pensée, cette idée soudainement flagrante. Elle ne reniait aucun des aspects de la vie de Regina, ni son passé, ni ses mauvaises actions, ni son tempérament de feu, ni sa façon de prendre les gens de haut. Elle avait appris à apprécier Regina dans son intégralité, avec son mauvais caractère ainsi que son apparente insensibilité - qui les avait souvent sorties de mauvais pas d'ailleurs. Et puis elle n'était pas que cela, bien caché derrière le masque, Regina savait être douce, attentionnée et incroyablement prévenante. Emma en avait toujours eu conscience.
Regina était une femme complexe, oui, mais une femme que l'on pouvait aimer, contrairement à ce qu'elle semblait croire. Emma inspira un grand coup après avoir gardé le silence un peu trop longtemps, ce qui avait malheureusement conforté Regina dans l'idée qu'elle se faisait de sa vie et de sa solitude bien mérité.
« Moi, tout ce que je vois… c'est que tu as la poisse avec les hommes. » Constata la Sauveuse.
« C'est rien de le dire, merci Emma, c'est affreusement pertinent ! » Fit remarquer Regina en levant les yeux au ciel.
« Mais peut-être qu'avec… une femme… » Osa dire Emma, avec un léger tressautement dans la voix qu'elle ne put contrôler.
Regina se figea, le regard soudain terrifié. Emma avait-elle comprit ce qu'elle ressentait pour elle depuis toujours ? Ce qu'elle cachait si bien au fond d'elle, qu'elle même avait presque failli l'oublier ? Ce qui s'était imposé à elle, une fois la haine disparue ? Elle se mit à rire nerveusement mais une larme coula sur sa joue. Emma s'approcha plus près qu'elle ne l'était déjà et effaça cette larme qui ressemblait à une perle étincelant à la lueur du feu. Regina avait cessé de respirer face à ce geste extrêmement doux.
« Non Emma, ne fais pas ça…. S'il te plait… Ne t'engage pas sur cette voie là avec moi… » Murmura Regina, la voix étranglée et sa légendaire assurance lui faisant soudainement défaut.
« On dirait que ça te fait peur ? »
« Non, ce n'est pas ça… »
« Ose me dire que jamais une femme ne t'as fait de l'effet ? »
« N… non. » Hoqueta Regina, mal à l'aise.
« Hm, mon œil oui ! Et Maléfique alors ? » Lança Emma, pour la taquiner.
Regina ouvrit de grands yeux, avant de secouer la tête et de respirer de nouveau avec pourtant un très vieux souvenir qui se rappelait à elle.
« Non, tu te trompes, il n'y a jamais rien eu entre Mal et moi. »
« Pourtant j'ai remarqué comment tu la regardais quand elle revenu d'entre les morts et que tu as dû t'associer avec elle, ainsi qu'avec Cruella et Ursula. »
« Je… je devais seulement faire en sorte qu'elles me croient dans leur camp. Rien de plus. »
« Hm, mouais j'suis pas convaincue… alors jamais une femme ne t'as attiré ? »
« Je te le répète, non. » Affirma Regina avec un peu plus de confiance pour cacher son mensonge.
« Pas même, moi ? » Demanda soudain Emma avec un aplomb insensé.
Regina se figea de nouveau, alors qu'elle s'était momentanément détendue, Emma la prenait encore de court. Elle aurait beau répondre n'importe quoi, la réaction de son corps l'avait trahi. Sa respiration s'était encore bloquée quelques secondes dans sa poitrine, ses pupilles s'étaient dilatées et Emma avait remarqué sa main qui se crispait sur le tissu du canapé. Emma savait qu'elle ne répondrait pas et elle n'en avait pas besoin, sa seule réaction lui avait suffi à l'amener là où elle voulait.
« Qui ne dit mot, consent. » Rajouta Emma avec un petit sourire délicieusement espiègle.
« Ne jouez pas à la plus maligne avec moi, Miss Swan. » Grogna Regina.
« Oh, j'ai touché une corde sensible si tu nous ressors les vieilles formules de politesse ! »
Regina soupira d'agacement. Emma était de retour, la Emma insolente et sans gêne qu'elle avait tant détesté à leur rencontre puis qu'elle avait fini par apprécier - beaucoup trop d'ailleurs mais sans jamais lui avouer. Cette Emma aux répliques bien tranchantes auxquelles Regina souriait en cachette, cette Emma souriante mais têtue comme une mule, oui, cette Emma dont Regina était tombée amoureuse en secret, était enfin de retour.
« Pourquoi, j'ai l'impression que tu me caches quelque chose ? » Demanda la Sauveuse plus sérieusement.
« Je ne te cache rien. »
« Si, je le sens et ça … ça te fait peur. »
« Tu dis n'importe quoi ! »
« Si je le sens… tu as peur. »
« Je n'ai peur de rien ! »
« Oh si… mais… »
« Evidemment que ça me fait peur ! » Coupa Regina dans une impulsion qu'elle ne put retenir.
« Pourquoi ? »
« Tous ceux que j'ai aimé, tous ceux qui m'ont approché, de près ou de loin, sont mort… et je refuse que ça t'arrive à toi. C'est aussi simple que cela. » Avoua enfin la Reine.
Emma se mit à sourire, Regina venait d'avouer à demi-mot. Elle venait d'avouer que si elle n'avait jamais laissé Emma l'approcher de trop près, c'est parce qu'elle tenait trop à elle et qu'elle refusait qu'elle subisse le même funeste destin que tous ceux qui l'avait aimé, ou côtoyer de trop près.
« Mais voyons Regina, je suis la Sauveuse, ton amour ne peut pas me tuer… »
« Mais qui te dis que je t'aime d'abord ?! » Reprit Regina, soudain sur la défensive et quelque peu mal à l'aise.
« Tu viens de l'avouer. »
« Certainement pas, tu as mal compris. » Tenta Regina.
« Hm… tu as oublié que je vois quand on me ment ? »
« Oh, c'est vrai… ce fichu don… » Grogna Regina, acculée et faussement agacée.
Elles se défièrent un instant du regard. Regina ne voulant pas donner raison à Emma, elle soutenait son regard provocateur et cela leur rappela leurs premières batailles l'une contre l'autre, se défiant pour l'amour d'Henry. Entre elles, tout avait toujours été électrique, tout n'avait été que jeu de répartie et de provocation, aucune des deux ne lâchant jamais le morceau, et même plus tard, lorsqu'elles avaient commencé à collaborer, il y avait toujours eu une tension entre elles, une alchimie particulière et indéfinissable.
Et ce soir, dans leurs regards tout revenait au centuple, un léger voile parcouru leurs iris, une pression atteignit leurs cœurs et le regard de Regina vacilla entre les yeux verts d'Emma et ses lèvres roses. Elle sut tout de suite qu'elle devait faire diversion où bien, elle allait craquer et succomber à cette envie qui la bouffait depuis des années.
« Emma, tu n'as pas les idées claires de toute façon. Tu es peut-être même encore en état de choc après ce que tu as vécu… je crois que tu divagues un peu… »
« Oh n'exagère pas ! Je vais m'en remettre. Je ne vais pas sombrer à cause de cet imbécile, crois-moi ! Je l'ai laissé me frapper, oui, mais j'aurai pu le tuer et je ne l'ai pas fait… j'ai gardé la maitrise de la situation même si ça n'en a pas l'air… Je... Je suis contrarié par la tournure que prend mon mariage, je me suis laissé duper alors que d'habitude je suis plus clairvoyante que ça mais... Je ne suis pas dévastée. Je suis très lucide au contraire… Ok j'ai eu besoin de quelques heures pour m'en remettre et de beaucoup dormir, j'étais épuisée mais crois-moi, je suis pleinement consciente de ce que je ressens, je suis en possession de tous mes moyens et de toutes mes facultés… en revanche toi... J'ai l'impression que tu me caches quelque chose… un truc lourd, un truc ancien que tu gardes pour toi depuis longtemps. »
« Ça y est tu as fini ? » Renchérit Regina, autant agacée que surprise par son discours.
« Oui… je crois. »
« Pourquoi faut-il que tu ne sois perspicace que dans les moments où tu ne devrais pas l'être ? »
« Bonne question ! » Ria Emma.
Regina secoua la tête, elle était ravie de revoir Emma en plein possession de ses capacités, avec son aplomb et son insolence légendaire, mais en revanche la tournure que prenait leur conversation ne lui plaisait pas. Elle avait peur de se dévoiler, peur de faire remonter ses sentiments - sentiments qui, de toute façon, étaient juste là, au bord de son cœur depuis le retour d'Emma. Tout ça la laissait intérieurement fragile et à fleur de peau malgré la solidité et l'assurance dont elle faisait preuve chaque jour.
« Emma je t'en prie… ce n'est pas le moment de parler de ça… » Souffla-t-elle, désespérée.
« Mais si, au contraire... »
« Je te dis que non ! »
« Gina … » Supplia Emma.
« Oh et puis, ne m'appelle pas comme ça ! »
« Pourquoi pas ? »
« Parce que ça me trouble quand tu m'appels comme ça, voilà tu es contente ?! » S'énerva presque la Reine.
« Moi, je te trouble ?! C'est la meilleure, moi je trouble la Reine ? Notre énigmatique et superbe Reine ! Celle dont la beauté et l'élégance me coupe le souffle depuis le premier jour ?! Non, c'est toi qui me troubles Regina, et pas le contraire. »
« Bah faut croire que si. » Avoua Regina qui sentait bien que la situation était en train de leur échapper.
Encore une fois, elles se dévisageaient, mais il leur sembla que l'émotion était inédite, comme si elles se découvraient d'une toute nouvelle façon, dans un combat de regard perdu d'avance.
« Tu veux dire que je te plais ? »
« Emma… » Soupira la Reine désabusée en détournant le regard.
« Quoi ? »
« Tu es insupportable ! »
« Oui, je sais. » Renchérit fièrement Emma.
Regina ne put s'empêcher de sourire en levant les yeux au ciel. La complicité entre elles prenaient une autre tournure, c'était toujours explosif mais en même temps elles se rapprochaient dans un élan qui se voulait de plus en plus intime. Ce n'était plus la haine qui les guidait dans leurs petites querelles mais bien l'attirance et l'affection, une grande affection qu'elles n'osaient pas encore nommer Amour.
« Arrête. » Ordonna Regina, la voix plus ferme.
« Mais je veux savoir. »
« Savoir quoi ?! » Hurla presque la Reine
« Si tu veux de moi ? Parce que moi… » Dit Emma en se mordant la lèvre, explicitant par ce geste la fin de cette phrase qu'elle avait laissé en suspens.
Le cœur battant, la respiration saccadée, le regard hésitant, papillonnant entre les lèvres et les yeux, elles étaient toutes les deux presque à bout de nerfs. Emma combla le peu de vide qu'il y avait encore entre elles et roda dangereusement près de la bouche de Regina qui ne bougeait plus du tout. La chaleur et la tension montaient d'un cran et Regina dû se faire violence pour ne pas succomber à la tentation de l'embrasser, là, maintenant, sur le champ.
« Emma… je vais tuer ton mari pour ce qu'il a osé te faire et ensuite… ensuite on verra si tu veux toujours de moi. » Lança Regina avant de reculer son corps du sien, de se lever du canapé et de s'en aller pour monter se coucher afin de clore cette discussion qui allait dégénérer.
Emma resta immobile, seule sur le canapé, tentant de réaliser ce qui avait failli se passer, tentant de réaliser qu'elle venait bel et bien de faire des avances à Regina. Elle ne lui en voulait pas de les avoir refusées, après tout, elle n'avait pas tort, ce n'était vraiment pas le moment de mettre encore plus de pagaille dans son esprit. Quitter Killian était déjà une lourde entreprise, alors rajouter son attirance pour la Reine dans l'histoire, n'était pas une bonne idée… et pourtant, ça lui semblait quand même la meilleure de toutes les idées qu'elle n'ait jamais eues.
Une demie heure plus tard, alors qu'elles s'étaient toutes les deux un peu calmées, Emma monta les escaliers. Regina, qui ne dormait évidemment pas, senti Emma se coucher à ses côtés comme les nuits précédentes. Elle soupira entre aise et exaspération, elle comprit qu'Emma ne lui en voulait pas et elle n'avait aucune envie de la chasser de son lit alors elle ne put s'empêcher d'ouvrir les bras et Emma ne put s'empêcher de se glisser dans l'étreinte offerte.
Sans un mot, sans un regard, elles avaient juste besoin de cette nouvelle proximité qui s'était installée entre elles. Et malgré tous les sous-entendus de la soirée, malgré l'attirance quelque peu révélée, malgré la tension incandescente qui naissait aux creux de leurs reins, elles avaient besoin l'une de l'autre, en toute simplicité, sachant qu'il y aurait un jour et une heure plus propice pour dévoiler la vrai nature de leur sentiments.
SQ
