Petit mot de l'auteure : j'ai faim.
Poussant un léger soupir de fatigue, Marilla fit une pause dans son ménage. Mine de rien, Anne et Diana avaient mis une sacrée pagaille dans le rez-de-chaussée. Ce thé qui devait s'annoncer distingué s'était transformé en véritable carnage alcoolisé. La mère de Diana s'était indignée contre le comportement indécent des deux jeunes filles, faisant fi de leurs protestations ennivrées – il fallait dire que dans pareil état, elles n'étaient pas bien crédibles. Marilla avait bien évidement pris la responsabilité de cette affaire ; c'était elle après tout qui mal étiqueté la bouteille. Malgré cela, elle prévoyait tout de même de faire un petit sermon à Anne lorsqu'elle serait réveillée, juste histoire de lui rappeler que dès qu'elle sentait que quelque chose n'était pas habituel, il valait mieux le laisser de côté plutôt que de répondre à l'appel de l'aventure et de la découverte. Elle tâcherait d'être le plus sérieuse possible, de rester dans son rôle de mère froide et intransigeante.
Toutefois, au fond d'elle même, Marilla souriait en voyant les tasses renversées et le vin sur le sol. Bien sûr, elle n'était pas heureuse que deux jeunes filles aient goûtées à de l'alcool. Mais elle était heureuse que sa protégée ait une amie avec qui elle puisse faire quelques bêtises, qu'elle profite de son adolescence pour enfreindre quelques règles, en être punie tout en sachant que l'outrage serait vite oublié. Marilla n'avait jamais eu l'occasion de vivre de tels souvenirs avec une meilleure amie, pour la bonne raison qu'elle n'en avait jamais eu. Mais Anne avait su créer des liens avec Diana.
Alors oui, le lendemain, elle ferai la moral à Anne, en ne pensant que la moitié des mots qu'elle dirait. Parce qu'elle voulait qu'Anne ait ce qu'elle n'avait pas eu ; sa vie serait parfaite. Il le fallait. Et c'était à elle, en tant que mère, d'y veiller.
Ces résolutions prises, Marilla retourna à son ménage d'après-goûter désastreux.
