Avant de partir, Nick avait demandé à Charlie s'il pouvait prévenir le Paris Squad de son hospitalisation. Il lui paraissait important qu'au moins leurs amis proches soient au courant. Embarassé, le brun avait donné son accord, ne voulant pas en plus imposer ce secret à son petit-ami. Ce dernier en était soulagé car il ressentait tout de même le besoin de partager son inquiétude avec ses amis. Cela l'étonnait souvent de voir à quel point les amis de Charlie étaient devenus les siens. Il se sentait beaucoup plus proche d'eux que de ceux qu'il avait considérés comme ses amis au lycée. La preuve en était il ne fréquentait plus aucun d'entre eux alors qu'il chattait encore régulièrement sur le groupe "Paris Squad" qu'avait créé Darcy plusieurs années auparavant. Bien sûr, il s'était fait de nouveaux amis à la fac. Même s'il n'avait jamais eu de difficultés à se faire des amis, il se sentait aujourd'hui plus libre d'être lui-même et ses nouvelles amitiés étaient plus sincères, car il ne cachait plus qui il était.
Aussitôt sorti de l'hôpital, Nick avait donc envoyé un message au groupe et les réponses n'avaient pas tardé à arriver. Tao semblait sous le choc mais Elle et Aled s'organisaient déjà pour rendre visite à Charlie. Darcy et Tara, qui étaient revenues de la fac, promirent de passer également et de lui apporter de quoi lui changer les idées. Et surtout, ils vinrent discuter avec Nick en privé pour s'assurer qu'il allait bien et lui rappeler qu'ils étaient là pour lui aussi.
Ces quelques échanges lui firent du bien et le jeune homme passa le reste de l'après-midi à organiser l'été une fois que Charlie serait rentré à la maison.
Il retourna à l'hôpital le lendemain matin après avoir récupéré le téléphone de Charlie auprès de Tori qui devait passer l'après-midi même.
Quand il ouvrit la porte de la chambre du brun, il la trouva vide et son sang se glaça. Il sentit sa respiration s'accélérer et commença à paniquer quand il constata qu'il n'était pas non plus dans la salle de bain. Il était déjà en train d'imaginer le pire, que Charlie avait refait une tentative et qu'il ne s'était pas raté cette fois, qu'il avait été envoyé en chirurgie ou pire à la morgue.
Il ressortit en titubant, tremblant et partit à la recherche d'une infirmière mais il se sentait si mal qu'il finit par s'appuyer sur un mur, haletant.
- Nick ?
Ce dernier releva la tête au son de cette voix et eut presque l'impression d'halluciner lorsque Charlie s'approcha, l'air inquiet.
Sans dire un mot, Nick l'attira contre lui et enfoui son visage dans son cou en le serrant avec force, ne pouvant retenir les sanglots de soulagement qui lui étreignaient la poitrine.
- Mais… Nick…qu'est-ce qu… ? Demanda Charlie sous le choc en frottant maladroitement le dos de son petit ami.
Mais ce dernier était incapable de parler alors il s'aggripa avec plus de force encore et attendit que la peur reflue enfin et que son calme revienne un peu. Cela ne dura surement qu'une poignée de minutes mais lui sembla interminable.
- Je suis désolé, dit-il en essuyant ses joues du revers de la main, lui-même perturbé par sa propre réaction.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? S'inquiéta Charlie.
- Rien, c'est rien, ça va.
Charlie lui lança un regard qui en disait long sur la véracité qu'il accordait à cette affirmation et le prit par le bras.
- Viens, retournons dans ma chambre.
Il le fit s'asseoir sur un fauteuil, lui servit un verre d'eau et répéta :
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Nick plongea son regard dans le sien et secoua la tête :
- Rien c'est stupide, tu n'étais pas dans ta chambre et je… j'ai…
Il ne termina pas sa phrase mais s'en voulu quand la compréhension éclaira le visage de son petit-ami très vite remplacée par de la culpabilité.
- Je suis désolé. J'avais rendez-vous avec la psy. Je ne pensais pas que…
- C'est rien, c'est moi, c'était stupide.
- Ce n'est pas rien et ce n'est pas stupide.
- Laisse tomber, Char', s'il te plaît. S'agaça Nick qui n'avait aucune envie de reparler de tout ça.
L'interessé eut un mouvement de recul avant d'acquiescer, penaud.
- D'accord…
Nick se radoucit devant l'air désolé du brun et soupira avant de demander:
- Ca été ta séance ?
- Oui, oui, très bien.
- Tu vas continuer à voir Geoffrey ?
- Ouaip.
- Et tu es déjà… sous traitement ?
- Aussi. Il paraît qu'il faut un peu de temps avant que ça fasse effet, mais je me sens déjà mieux.
- Tant mieux.
Ils restèrent silencieux quelques instants avant que Nick se souvienne :
- Au fait, je t'ai ramené ton smartphone, je me suis dit que ça devait te manquer. Dit-il en sortant l'appareil d'une poche et le chargeur d'une autre.
- Ho c'est pas vrai, tu es mon sauveur, Nick Nelson ! S'exclama Charlie d'un air excité en checkant immédiatement l'appareil après voir rapidement embrassé l'intéressé.
Un mince sourire se dessina sur ses lèvres avant de disparaître presque immédiatement. Il essayait de donner le change mais sa frayeur n'était pas entièrement retombée et ce n 'était pas normal. Sa réaction avait été totalement disproportionnée et cela l'inquiétait.
Ils papotèrent encore un peu mais Nick ne tarda pas à devoir s'éclipser pour se préparer à son premier jour de boulot.
- Je t'écris dès que je peux, d'accord ? Et je repasserai demain matin.
- J'attendrai tes messages comme le messi ! S'amusa Charlie en lui montrant son téléphone. Et je veux tout savoir sur ce travail qui te tient si éloigné de moi !
- Ca va être horrible et tu vas terriblement me manquer. Bouda Nick en serrant Charlie contre lui.
- Je sais, mais j'ai décidé d'être un homme entretenu alors il va bien falloir que tu bosses !
Ils rièrent et s'embrassèrent. Nick le serra un peu plus longtemps contre lui et eut du mal à s'arracher à ses bras.
- Je t'aime, Char'.
- Pas autant que moi je t'aime.
Cette petite phrase serra la poitrine du rugbyman et il réussit à partir avant de ne plus pouvoir cacher son trouble. Il savait que Charlie souffrait de dépression, que c'était une maladie grave, dont on ne guérissait parfois jamais. Mais une part de lui, sûrement bien trop naïve, avait espéré que leur amour pourrait l'aider à rester loin de toute cette obscurité. Il avait eu l'impression que les troubles de son petit-ami étaient sous contrôle et même s'il l'avait parfois vu rechuter, jamais il ne s'était imaginé un instant que cela pourrait empirer au point qu'il essaye de se tuer. Comment était-il censé croire que Charlie l'aimait tellement s'il était prêt à l'abandonner en mettant fin à ses jours ?
Se maudissant de penser comme ça, sachant que c'était injuste, inutile et beaucoup plus compliqué que ça, Nick prit la route pour rejoindre son nouveau boulot, n'arrivant pas à arrêter de se torturer l'esprit.
Heureusement, cette première journée chez le glacier fut si intense en informations qu'il n'eut pas le temps d'y repenser de l'après-midi. Il rencontra sa supérieure pour l'été, une jolie brunette à fossettes au rire mélodieux qui faisait ça depuis trois ans à chaque vacances. Elle allait faire équipe avec lui et lui apprendre toutes les ficelles du métier, lui avait-elle annoncé en lui tendant son tablier de travail. C'était une vraie pipelette ce qui fit qu'à la fin de la journée, en plus de tous les parfums de glace et de topping qu'il devait retenir, Nick connaissait déjà beaucoup trop de choses sur la vie personnelle de Rose Healing. Son charme opéra suffisamment pour tenir les idées noires de Nick à distance mais malheureusement, elles revinrent aussitôt qu'il se retrouva seul dans sa voiture.
- Alors, comment c'était ? Ca s'est bien passé ? Demanda sa mère lorsqu'il rentra à la maison.
- Oui très bien, c'était… chouette, ma collègue est sympa et le boulot n'a pas l'air trop compliqué.
- Ha c'est super, mon chéri, je suis contente pour toi.
Il lui sourit mais le coeur n'y était pas. Il repensait encore à sa réaction à l'hôpital dans la matinée, à cette panique viscérale qu'il avait ressentit quand il avait constaté l'absence de Charlie. Il l'avait cru mort. Alors ok, ça ne faisait que deux jours, mais il n'arrivait pas à s'enlever l'image de son petit-ami en sang sur le carrelage de sa salle de bain. Il était terrifié à l'idée de le perdre et cette peur le paralysait totalement. Il ne se sentait plus maître de lui-même et ça le terrorisait.
- M'man ? Dit-il soudain, incertain.
- Oui, mon coeur ?
- Je crois que j'ai besoin d'aide…
