Réponse à la review :

Merci pour ton adorable rewiew L.S.

Si ta proposition est sérieuse, je serais ravie de faire connaissance par MP. Je n'ai aucun moyen de te contacter.

- Ecole des sorciers

la chambre des secrets

Le prisonnier d'Azkaban

La coupe de feu

l'ordre du phénix

Le prince au sang mêlé

Les reliques de la mort


Compass cottage

Guernesey

mars 1992

Chère Sophie,

J'ai suivi (bien involontairement) tes conseils et ai réussi à discuter avec le ténébreux professeur d'autre chose que de plantes ou potions.

Suite à une incompréhension, il est repassé à mon cottage un jour de fermeture pour me déposer des réactifs en vue d'une distillation. Sauf que je ne l'attendais pas du tout. J'étais avachie dans mon fauteuil le plus confortable lisant, tricotant et mangeant une pomme en même temps. Il semble que les trois activités soient tout à fait incompatibles, ou alors il faudrait trois mains supplémentaires, mais ça ne m'empêchera pas d'essayer jusqu'à la fin de ma vie, elles sont faites pour aller ensemble.

Malheureusement, je dois admettre que mon attitude et ma position n'étaient pas des plus dignes. Je crois même que ma jupe était remontée et qu'on pouvait, ne t'évanouie pas, voir mes jambes (ces anglais sont vraiment des chochottes). Je ne sais pas si le professeur a jugé ça inconvenant, mais quand je me suis enfin aperçu de sa présence à la porte (vitrée, pour mon malheur), et que j'ai remis en place précipitamment mes jupes (trop tard pour les apparences, adieu ma crédibilité), j'aurai juré lire un sourire amusé et un regard incrédule avant qu'il ne se reprenne.

Je l'ai naturellement invité à s'installer et à prendre un chocolat chaud ou un tricot. Il a refusé le chocolat mais a avancé mon tricot de quelques rangs. Cet homme est vraiment plein de surprises. Il a même, Merlin m'en soit témoin, plaisanté sur le thème de mon livre (il s'agit d'un roman divertissant, le professeur ne doit pas connaître ce genre de lecture). Je n'aurait pas cru que Severus Rogue sache sourire et être, ma foi disons le mot, d'agréable compagnie. Je me suis trompée.

C'était une agréable surprise et je passais un agréable moment, alors j'en ai profité pour l'entraîner dans une visite de l'île.

Ma théorie, c'est que pour cet homme blafard qui passe sa vie dans un cachot écossais au milieu des effluves de potions ratées, la lumière de l'île et l'air iodé ont des effets euphorisants, tout à fait bénéfiques à sa constitution sans aucun doute.

Je vais l'encourager à venir biner mon jardin, il a besoin de plus d'activité en extérieur, et j'ai besoin de main d'œuvre non rémunérée et de compagnie stimulante et sympathique.

Bien à toi,

Hellebore


Prevel apothecary

Chemin de traverse

avril 1992

Chère Sophie,

Merci pour vos vœux d'anniversaire, embrasse fort Sophinette pour sa jolie carte.

Ta carte me disait de profiter de la journée, de porter "la" fameuse nouvelle robe et de ne pas laisser les idées noires m'assaillir. Tu me connais tellement bien, ma Sophie.

Le cafard a commencé en fin de matinée, et maintenant, à l'heure du déjeuner, je n'ai plus que l'énergie de verrouiller la porte de la boutique et aller broyer du noir dans ma serre. J'ai même délaissé ma correspondance avec le professeur. Rogue m'envoie plusieurs hiboux par jour quand nous avons des expériences en cours pour m'abreuver de conseils (souvent non nécessaires mais toujours intelligents). Nos tentatives pour améliorer le tue-loup avancent mollement, je dois te dire.

À force de questions, je l'ai amené progressivement à me raconter des choses plus personnelles. Il me raconte ses cours, ses élèves et leurs âneries. Ce n'est jamais gentil ni bienveillant, mais c'est souvent drôle. Parfois amer.

Au début, j'avais pitié de ses malheureux élèves. Maintenant, j'ai pitié de lui, enfermé avec ces maladroits. Tu sais comme je rêve d'avoir un bébé à moi à dorloter, pourtant je ne crois pas que je pourrais enseigner à des enfants.

J'ai dû aller faire un tour après ma dernière phrase pour noyer mon cafard. Je reprends seulement cette lettre.

Pour essayer de faire passer les idées noires, j'ai suivi ton conseil et sorti "la" splendide robe, relevé mes cheveux du mieux que je pouvais, j'ai même essayé de camoufler mes yeux rougis avec quelques sorts. J'allais sortir et un vertige m'a pris au moment de passer la porte. Sans même comprendre comment, je suis retournée dans ma serre à pleurer sur mes semis en robe de cocktail.

Ces derniers temps, je ne peux pas vivre un moment ridicule sans que Severus Rogue en soit témoin involontairement. Quand j'ai relevé la tête de mes plants, il était sur le seuil, à me regarder très étonné. Il a bafouillé qu'il s'était inquiété de voir le magasin fermé et de ne pas recevoir de réponse à ses hiboux de la journée.

Merlin, il n'a pas imaginé que je puisse avoir une vie. Et à raison, je n'en est effectivement pas.

Je n'envisageais évidemment pas de vider mon sac devant lui, mais que veux-tu, il était là, avait l'air sincèrement inquiet et j'avais besoin de compagnie. Il a poliment écouté, assis sur un baril de tourbe. Il m'a tendu un mouchoir, s'est débattu mentalement pour trouver quelque chose de réconfortant à dire, puis a abandonné et a eu soudain une idée. "Puisque vous êtes si en beauté et que c'est votre anniversaire, pourquoi ne sortirions-nous pas ? " m'a-t-il proposé.

Il a paru aussi étonné que moi de ses paroles. J'ai répété bêtement "si en beauté", j'étais vraiment surprise que, lui, le dise.

Il s'est raclé la gorge, très mal à l'aise. S'est empêtré dans des explications alambiquées sur le fait que j'étais bien sûr toujours très en beauté, mais que bien sûr, ce n'était pas pour ça qu'il m'appréciait. A creusé encore plus en essayant de se rattraper, précisant qu'il voulait juste dire que ma nature solaire était plus importante que ma plastique. Est devenu complètement écarlate. A précisé qu'il n'y avait rien à redire sur ma plastique et a finalement conclu, désespéré, que cette robe était tout à fait adéquate à mon intelligence.

J'ai abrégé ses souffrances. Je crois que j'ai éclaté de rire et lui ai proposé une pelle pour finir de s'enliser complètement, et je lui ai même touché le bras pour le rassurer. Il ne paraissait pas m'entendre, rouge pivoine, il regardait ma main sur son avant-bras. Bien sûr, il ne doit pas souvent subir un contact physique humain. J'ai retiré rapidement ma main, et pour dissiper la gêne mutuelle, je lui ai demandé où sortait-on.

Il n'est vraiment pas expert des soirées londoniennes, je me demande même s'il a déjà passé de semblables soirées. Nous avons visité une exposition. Le calme de la galerie était bienvenu après la tornade d'émotions qui m'a secouée dans la journée. Je sentais son regard à la dérobade par moment, mais nous sommes restés relativement silencieux dans les couloirs. Puis nous avons trouvé un petit restaurant où dîner, où il s'est fait violence pour mener une conversation propre à me remonter le moral.

C'était très maladroit, mais très gentil. Et vraiment, on parle du professeur de potion de Poudlard, personne n'a jamais dû être témoin de sa gentillesse depuis le jour (je l'invente mais il est probablement arrivé) où on lui a écrasé son hamster quand il avait trois ans, le transformant en bloc de glace recouvert de sarcasme et de méchanceté cruelle.

Il a mené la conversation, ponctuée d'anecdotes amusantes sur ses cornichons d'élèves, et d'autres intéressantes sur les potions et les plantes. Au bout d'un moment et peut-être le vin blanc aidant, il ne se forçait même plus et parlait avec naturel. Après le restaurant, peu pressés de rentrer, nous avons déambulé le long de la Tamise, nous avons fini par aborder des sujets plus personnels.

Il a évoqué une femme (rousse, évidement, ça explique ses réactions bizarres quand il croise des gens dont la couleur de cheveux est seulement VAGUEMENT rousse) qu'il croyait aimer, qu'il a déçu, qui lui a brisé le cœur et dont il a causé bien involontairement la mort.

Par un ensemble de petits détails, j'ai soudainement compris qu'il avait sûrement était un mangemort pendant la guerre. Il m'a vu frissonner en le dévisageant, et a accusé le coup. "Je n'aurais pas dû parler autant" a-t-il dit en posant sa cape sur mes épaules. "Je comprendrais que vous ne souhaitiez plus jamais me revoir, comment pourrait-il en être autrement."

J'ai pris son bras qu'il ne m'offrait pas, pour me donner une contenance et aussi parce que ça m'a fendu le cœur d'entendre dans sa voix son dégoût de lui-même. Nous avons continué à marcher, lentement, lui me dévisageant, sur le qui-vive, attendant mon verdict. Et moi, le regard posé sur mes chaussures pour me laisser le temps de trouver ce que j'en pensais. "Vous avez tué des gens ?" lui ai-je demandé. Il a répondu un très froid, trop froid "oui". Douloureux à entendre et sûrement à dire.

"Volontairement ?" ai-je demandé encore. Il m'a répondu que non, mais que c'était néanmoins de sa faute.

Je me suis arrêtée. Il faisait nuit, mais la lune éclairait suffisamment pour que je puisse le dévisager.

"- Votre vie se poursuit, la société semble vous avoir pardonné, ce qui me fait dire que vous avez oublié des pans moins noirs de l'histoire, n'est-ce pas ?

- … Oui, mais ça ne suffit pas…

- Je n'ai pas l'impression que votre âme ait été brisée. Abîmée, sans doute, mais avec tout le remord que vous éprouvez, elle est sûrement en voie de guérison.

- Vous ne comprenez pas.

- Sans doute pas. Mais je compatis. Et tout ce que vous m'avez raconté ne change rien à l'estime et l'amitié que j'ai commencé à développer pour vous."

Il a paru surpris, mais ému. Puis nous avons continué à marcher en silence. Puis au moment de nous quitter, il m'a serré la main plus longuement que nécessaire.

"Merci." m'a-t-il simplement dit, à la porte de ma boutique avant de s'enfuir prestement. Ça aurait pourtant dû être à moi de le remercier.

Enfin, cette longue histoire sans chute pour te dire que l'un dans l'autre, mon anniversaire s'est moins mal passé que prévu. Enfin, je crois.

Merlin fasse que ma troisième décennie soit plus joyeuse que la deuxième. Je suis contente d'en voir la fin finalement.

Bien à toi,

Hellébore


Poudlard

Pré-au-lard,

Mai 1992

Ma très chère Lily,

Je comprends maintenant pourquoi elle me rappelle autant ta présence.

C'est parce qu'elle est toi.

Bien que anglaise, elle a fait ses études sur le continent et travaillé sur la côte Normande d'où l'on aperçoit Guernesey et son cottage. Et même étant de Guernesey, les sorciers de cette île ne vivent pas comme nous. La population sorcière y est très restreinte, et très intégrée aux moldus locaux, qui les prennent juste pour de doux originaux. J'ai entendu des guernesiais moldus parler de miss Prevel en l'appelant affectueusement "la sorcière". Ils ne croient pas en la magie mais la désignent comme ça parce que pour eux, elle connaît quelques plantes qui aident. C'est te dire à quel point cette île n'est pas le Royaume-Uni sorcier, qui l'ignore depuis toujours.

Elle n'a donc rien connu de la guerre. ça fait déjà dix ans, pourtant toutes les familles anglaises sont encore marquées par cette guerre. Miss Prevel n'a pas connu la peur de rentrer et de voir flotter une marque des ténèbres au-dessus de la maison, de voir sa famille se déchirer entre les deux camps ou d'enterrer un être aimé.

Elle a sûrement vécu des choses tristes ou difficiles, mais elle a encore foi en l'humanité. Comme tu l'avais ma Lily, avant. Avant que tout ne devienne fou, que les imbéciles arrogants ne deviennent des héros. Avant que je ne devienne un monstre. Elle arrive encore à s'intéresser à des inconnus, même les plus détestables, leur pardonner et les apprécier.

Si seulement tu avais pu naître sur cette île, tu serais peut-être encore vivante, raisonnablement joyeuse et heureuse.

Tien pour toujours,

Severus