Bonjour à toutes et à tous ! On se retrouve aujourd'hui pour le quatre-vingt-quatrième chapitre de SAMLP !
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brigitte26 : Ravie que tu aies aimé ce chapitre ! =)
Sarah MAES : Contente que ce chapitre t'ait plu ! Severus, le sauveur des élèves de Poudlard XD Ah, le stress, ça peut avoir de sérieuses conséquences… Pour les exams, réponse à venir dans les prochains chapitres ! À dans deux semaines pour le chapitre suivant :D
mimibou : Ça a été, bien que mouvementé, j'espère que tu as passé deux bonnes semaines aussi !
Ah non, pas du tout, il n'y avait pas de comparaison avec Filius ! C'était juste une remarque visant à rassurer Sirius :) Filius semble effectivement être un très bon prof, je n'ai aucun grief contre lui XD Et ce devait être un très bon directeur de maison, aussi ! Beaucoup plus humain que ne l'étaient Severus (avant) ou McGonagall…
Oui, les questions des examens sont sorties tout droit de mon imagination, et c'était un peu stressant d'avoir des retours là-dessus car je ne suis pas du tout prof XD Mais soulagée que ça ait plu, du coup ! Oui, je confirme qu'en ayant eu les cours tels que je les imagine, ces examens étaient à la portée de tous :)
Ouh là, le système de notation est complètement différent entre le Québec et la France XD Avoir la moyenne, en France, c'est avoir un 10/20, mais il y avait deux examens dans ma première licence où on était notés en fonction des résultats des autres étudiants, ça se rapprocherait plus du système du Québec, pour le coup :)
Oui, pour moi, un chapitre de 20 000 mots, c'est court XD Car il y a certains chapitres qui font 25 000, 26 000 ou 27 000 mots XD Oui, qu'ils fassent 20 000 ou 25 000 mots, c'est clair que ça reste long, mais comme les POV font entre 5 00 et 10 000 mots, ça me ferait bizarre de proposer des chapitres de 15 000 mots avec juste 2 POV XD
Alors en fait, les BUSE vont être divisées en 3 ou 4 parties, je ne sais pas encore, car ça se déroule sur une dizaine de jours et c'est impossible pour moi de faire ça en 2 chapitres XD À dans deux semaines pour le prochain chapitre :D
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Merci à vous trois vos reviews, et merci à tous ceux qui, arrivés au quatre-vingt-troisième chapitre (quatre-vingt-quatrième avec celui-là), sont encore là pour suivre assidûment les aventures de tous ces personnages ! Je vous laisse avec ce nouveau chapitre et je vous souhaite une agréable lecture !
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84 – Week-end de transition
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(samedi 15/06) POV Tonks
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- Aaaah, je me suis brûlée ! Quelle idée aussi de préparer le repas du midi à huit heures du matin… Enfin bon, ce n'est pas comme si j'avais le choix…
Tonks soigna son doigt du mieux qu'elle put. La goutte d'huile qui avait bondi sur son index avait au moins eu un effet positif : celui de l'avoir pleinement réveillée. Depuis qu'elle était debout, elle bâillait à s'en décrocher la mâchoire. «À quoi bon prendre un jour de congés si c'est pour se lever à sept heures du mat' ?» Tonks pestait, mais elle était de mauvaise foi : elle n'avait pas pris ce jour de repos pour se la couler douce, mais pour deux autres raisons : d'une, pour aller voir sa mère afin de tenir les promesses qu'elle avait faites à Severus, et de deux, pour le déjeuner qui était censé avoir lieu la semaine précédente mais qui avait été repoussé. C'était un déjeuner très important, car c'était le premier repas qu'elle allait partager avec Severus et Draco. Pour elle, ça sonnait presque comme des présentations officielles. Draco avait eu du mal, au début, à accepter la relation que son parrain entretenait avec Tonks, et même s'il avait fini par changer d'avis, Tonks était tout de même un peu stressée à l'idée de manger tous ensemble. Elle craignait de faire une bourde, ou que l'atmosphère soit un peu tendue, ou que le repas ne plaise pas à Draco… Comme une idiote, elle avait oublié de demander à Severus quels étaient les plats préférés de Draco. Et elle ne se voyait pas lui envoyer un Patronus pour lui poser la question… Du coup, elle avait dû faire au feeling. Elle avait opté pour du poulet rôti et des pommes de terre accompagnées d'une sauce typiquement anglaise. Pour le dessert, elle en avait choisi deux, au cas où Draco n'aimerait pas l'un d'entre eux : un gâteau aux pommes et une tarte à la mélasse. Elle les avait déjà faits la veille au soir, sachant qu'elle n'aurait pas assez de la matinée pour tout faire. Pour que les desserts ne perdent pas de leur saveur et de leur texture, elle les avait placés sous sort de fraîcheur et de conservation. Cela l'avait accaparée toute la soirée mais, au moins, c'était une partie du déjeuner qu'elle n'avait pas à faire ce matin-là. Elle termina le plat à neuf heures cinquante et elle eut dix minutes pour passer d'un look de chef cuistot à un look plus… normal. Elle enleva également les odeurs de cuisine grâce à des sorts neutralisants et lorsqu'elle fut prête, elle se dirigea vers la cheminée, prit une pincée de poudre de Cheminette et la jeta dans l'âtre après avoir prononcé l'adresse de ses parents. Une gerbe de flammes vertes jaillit et elle fut aspirée dans un tourbillon dans lequel elle vit toutes sortes de cheminées défiler avant d'atterrir dans celle de ses parents. Elle fut accueillie par sa mère, son père étant au travail.
- Dora ! Comment vas-tu ? s'exclama Andromeda tandis que Tonks époussetait ses vêtements.
- Bien, et toi ?
- Un peu fatiguée, la semaine a été rude.
- Vous êtes en plein dans l'organisation des vacances ? devina Tonks en s'asseyant.
- C'est ça, nous avons pour objectif de ne refuser aucun enfant, mais je sens qu'il va quand-même y avoir des restrictions… L'objectif serait réalisable si nous étions un peu plus nombreux, mais nous ne sommes qu'une dizaine, et nous n'avons pas tous pour rôle de s'occuper des activités…
Tonks dut se retenir pour ne pas sauter sur l'occasion de parler à sa mère de l'élève de Severus qui cherchait un stage dans une structure dédiée aux enfants. Ce serait pour plus tard, car elle préférait aborder en premier le cas Forester.
- Vous n'embauchez personne, pendant les vacances ?
- Ah mais ce n'est pas l'envie qui nous manque ! Mais ça ne se bouscule pas au portillon… Ce n'est pourtant pas faute de faire des offres d'emploi… Mais ce sont peut-être les horaires qui effraient les gens… Oh, pardon, je t'embête avec l'association…
- Non, pas du tout ! Au contraire, si j'avais besoin de te voir urgemment, c'était pour deux choses, et ces deux choses concernent l'association.
- Ouh là, tu me fais peur… C'est pour ça que tu m'as dit que ce n'était pas vraiment Dora qui allait me rendre visite, mais plutôt l'Auror Tonks ?
- Exactement.
- Bon eh bien je t'écoute.
- Est-ce que, parmi les enfants et les ados de l'asso, il y en a qui ont consulté une psychomage ?
- Oui, beaucoup de ces enfants et ados ont subi des choses terribles, que ce soit du harcèlement, des violences physiques, des violences morales… Et la plupart d'entre eux sont suivis par quelqu'un.
- Est-ce que tu as le nom des psychomages ?
- J'ai le dossier de chaque enfant et de chaque ado, et si psychomage il y a, le nom y figure, en effet. Mais je ne les ai pas tous en tête…
- Si je te dis Forester, est-ce que ça t'évoque quelque chose ?
- Oui, j'ai croisé ce nom plusieurs fois. Pourquoi ? Vous enquêtez sur elle, au Ministère ?
- Juste moi, pour l'instant. J'attends d'avoir des infos pour remonter l'affaire à mes collègues.
- Dora, fais attention, tu es une jeune recrue, tu vas avoir des ennuis si tes supérieurs découvrent que tu investigues seule de ton côté…
- Je suis prudente, maman, et j'essaie simplement d'avoir des renseignements pour que l'affaire soit prise au sérieux quand j'en référerai à mes collègues.
- D'accord, je te fais confiance. Et qu'est-ce qu'elle aurait fait, cette psychomage Forester ?
- Elle enfoncerait ses patients au lieu de les aider. C'est ce qu'elle a fait avec deux patients, et on la soupçonne d'en avoir fait autant avec un troisième, et probablement avec d'autres ados.
Le choc se lut sur le visage d'Andromeda.
- Mais quelle horreur… Comment peut-elle exercer si elle fait l'inverse de ce qu'elle doit faire ?
- Car ses patients sont trop traumatisés pour se confier à leurs parents à propos de leurs séances avec Forester. C'est même courant qu'ils en fassent un déni.
- Mais il faut remédier à cela…
- C'est ce que je fais actuellement, dit Tonks en souriant.
- Tu voudrais que j'aille voir dans quels dossiers de l'association le nom de Forester apparaît ?
- Si ça ne te dérange pas, oui.
- Bien, j'y vais. Une chance que ce soit moi qui les aie, fit remarquer Andromeda en se levant.
- En même temps, c'est toi qui as fondé cette association, avec l'une de tes amies… Mais c'est vrai que les dossiers auraient pu être chez ton amie.
- Je suis plus ordonnée qu'elle, et il y a plus de place ici que chez elle. Ah, les voilà, je les ai.
Andromeda revint s'asseoir avec un tas de parchemins dans les mains qu'elle posa sur la table. Elle les feuilleta un à un et mit de côté tous ceux qui contenaient le nom «Forester».
- Mmmh, ce ne sont que des enfants qui sont bien dans leur tête, qui sont parfaitement intégrés dans l'association, et qui y sont entrés pour reprendre contact avec le lien social… Parmi ceux qui ont eu Forester comme psychomage, il y en a qui étaient encore en thérapie avec elle quand ils sont arrivés dans l'association, qui étaient assez fragiles, et je les ai vus aller de mieux en mieux au fil des mois et se transformer en enfants heureux, épanouis et pleins d'énergie. Ah, par contre, là, j'ai une ado un peu plus âgée qui a également eu Forester, et c'est le jour et la nuit avec les enfants que je viens de mentionner… Cette adolescente est très réservée et elle a récemment interrompu sa thérapie car elle estimait qu'elle ne servait à rien, mais elle n'a rien voulu dire de plus.
- Étrange, murmura Tonks. On a deux types de profils complètement différents… Mais comme par hasard, avec les jeunes enfants, ça semble s'être très bien passé, alors qu'avec l'ado, visiblement, ça ne s'est pas bien passé du tout…
- Oui, c'est suspect, jugea Andromeda. Mais ça ne peut être justement qu'un hasard.
- Oui, une exception au milieu de quatre ou cinq cas, ce n'est clairement pas suffisant pour en faire une piste… Tu as d'autres ados qui ont été suivis par Forester ?
Andromeda vérifia quelques dossiers avant d'en pointer un du doigt :
- Oui, là, j'ai un ado qui l'a eu comme psychomage, et il est dans la même configuration que l'ado précédente… Lui aussi a du mal à s'ouvrir aux autres, il est sans cesse dans son coin, et il a mis fin à sa thérapie peu avant d'avoir rejoint l'association.
- Non, ça fait trop de coïncidences, là…
- Cette psychomage aurait donc un problème avec les adolescents ?
- Apparemment, oui. Mais ça n'explique pas pourquoi elle les martyrise…
- C'est ce qu'il faudra lui faire avouer.
- Bon, avec les deux témoignages que j'ai déjà, plus un autre que je vais peut-être avoir, et ces deux profils troublants, j'ai de quoi faire part de tout cela à Bart et à Kingsley. Il n'y a qu'eux deux que je mettrai dans la confidence. Ils ne me dénonceront pas pour avoir enquêté sans autorisation. Ils vont me disputer, oui, mais c'est tout. Et ce seront eux qui décideront si cela doit devenir l'affaire de tous les Aurors ou s'il faut laisser tomber.
- Espérons qu'ils fassent le bon choix. Mais il y a quelque chose qui m'intrigue. Comment en es-tu venue à t'intéresser à cette psychomage ?
- Ah… En fait, ce n'est pas moi qui suis à l'origine de tout ça. C'est Severus. Il y a six mois, il a dû soigner et prendre en thérapie un élève qui était en pleine souffrance mentale, et c'était en partie dû à l'unique séance qu'il avait eue pendant l'été avec Forester qui l'avait mis plus que bas que terre. Grâce à cet élève, Severus a pu s'entretenir avec une autre élève qui s'est avérée être elle aussi une victime de Forester. Severus a alors craint que ces deux élèves ne soient pas les seules victimes et il n'a pas pu rester sans rien faire. Il a fait de Forester sa bête noire, ne supportant pas l'idée qu'elle ait pu faire tant de mal à des ados sans défense qui venaient vers elle pour être écoutés, et non pas pour être rabroués comme ils l'ont été. La haine que Severus nourrissait à l'égard de Forester l'a poussé à se fixer comme objectif de tout faire pour la coincer et la radier de ses fonctions, et il s'y est attelé avec détermination. Il souhaitait avoir d'autres ados qui avaient vécu la même désillusion avec cette folle, mais il a galéré. C'était loin d'être facile. Il pense néanmoins en avoir déniché un, et il va s'en assurer prochainement en allant le voir. C'est quand il m'a parlé de toute cette histoire et qu'il m'a dit qu'il cherchait une structure dédiée aux enfants que je lui ai annoncé que tu étais à la tête d'une association de ce genre. Normalement, c'était lui qui était censé venir te rencontrer pour discuter de tout ça avec toi, et il avait prévu d'en profiter pour te faire une autre requête importante, mais après une mission qui aurait dû apporter un troisième témoignage et qui a échoué, il a réalisé qu'il avait eu tort de se lancer tout seul dans cette traque, que Forester était bien plus coriace qu'il ne le croyait et qu'il serait plus raisonnable de filer le dossier aux Aurors. Et c'est ce qu'il a fait en me le mettant entre les mains. Voilà, tu sais tout, maintenant.
Andromeda demeura silencieuse quelques instants.
- Il n'est plus du tout le même homme qu'avant, finit-elle par constater. Peu de personnes auraient mis autant d'énergie que lui à tenter de récolter des preuves de la dangerosité de cette femme…
- C'est quand il s'est retrouvé à devoir s'occuper d'un garçon qu'il avait longtemps haï et à exercer son métier de médicomage pour la première fois depuis huit ans qu'il a radicalement changé. C'est le fait d'avoir été forcé à enseigner à Poudlard alors qu'il ne désirait pas du tout être professeur qui l'a rendu aussi aigri et taciturne. Quant à son passé de Mangemort, il n'a jamais eu réellement envie de rejoindre les rangs de Tu-Sais-Qui. Lors de sa septième année, il était seul, son unique amie lui avait tourné le dos un an auparavant à cause d'une insulte impardonnable qu'il lui a lancée et qu'il a amèrement regrettée par la suite, Tu-Sais-Qui l'a approché, et il n'a pas lui résister, car Tu-Sais-Qui a des méthodes bien à lui pour faire plier les gens qu'il veut dans son cercle. Ça n'excuse pas tout, mais il était jeune, et les circonstances ne l'ont pas aidé à prendre la bonne décision. Et aujourd'hui, il ne referait pas la même erreur.
- Ça, c'est sûr… J'étais encore assez réticente à lui accorder une chance, mais avec ce que tu viens de me dire, il l'a clairement méritée, cette chance. Et je vais la lui donner en accédant à sa requête si c'est dans mes cordes. De quoi s'agit-il ?
- Eh bien, il a une élève qui rêve de travailler avec les enfants plus tard, elle est en cinquième année et c'est dès cet été qu'elle peut faire son premier stage. Est-ce que tu serais d'accord pour qu'elle le fasse dans ton association ? Tu me disais tout à l'heure que vous étiez en manque d'effectif…
- Tu ne perds pas le nord, toi, s'amusa Andromeda. Mais ça pourrait être une bonne idée. Comment s'appelle cette élève ?
- Pansy Parkinson.
- Oh, je croise souvent ses parents lors des rares soirées auxquelles j'assiste, et ils emmènent parfois leur fille avec eux pendant les vacances. Elle a l'air très dynamique, bien qu'elle se tienne de façon tout à fait correcte en société. Mais je l'ai vue aller très facilement vers les autres, avoir de longues conversations avec les adultes et être très à l'aise avec les jeunes enfants des invités. Je ne suis pas du tout étonnée qu'elle veuille en faire son métier. Et tu peux dire à ton cher et tendre que son élève a d'ores et déjà un stage et qu'elle est libre de l'effectuer n'importe quand durant l'été.
Tonks fut touchée par les mots de sa mère. C'était Severus qui allait être content, et encore plus son élève…
- Merci, maman, dit-elle sincèrement. Je l'annoncerai à Severus ce midi, on doit déjeuner ensemble avec son filleul.
- Mais que fais-tu chez ta vieille mère, alors ?!
Tonks éclata de rire.
- C'est bon, je ne suis pas à la minute près ! Je ne les attends pas avant midi, et j'ai tout préparé hier soir ainsi que ce matin avant de venir.
- Oh, te voilà bien organisée… L'amour ne change pas que les hommes.
- Je veux juste que tout soit parfait. C'est notre premier repas à trois, c'est là que tout se joue…
- N'exagère pas, protesta gentiment Andromeda. Tu te mets un peu trop la pression, il faut que tu te détendes. Ce n'est pas grave s'il y a des couacs. Le plus important, c'est que tu sois toi-même. C'est comme ça que tu as plu à Severus, et c'est comme ça que son filleul devra t'accepter.
Tonks dut admettre le bien-fondé des paroles de sa mère.
- Tu as raison, et les petits ratés, c'est ce qui fait le charme d'un convivial déjeuner. J'ai fait exprès, pour la rime.
Andromeda secoua la tête, l'air de se demander qui lui avait pondu une fille pareille.
- Bon, je vais quand-même y aller, déclara Tonks. J'ai trop chaud avec ce pantalon et ce tee-shirt, je vais enfiler autre chose en rentrant.
- Si j'étais toi, j'éviterais une tenue trop classe. J'avais voulu épater ton père avec une sublime robe lors de notre premier dîner en tête-à-tête, on était dans un restaurant, mais le souci, c'est qu'il n'y a pas que ton père qui a apprécié la robe… Le serveur a été aussi subjugué, il ne regardait pas ce qu'il faisait et il a renversé l'assiette qui m'était destinée sur moi. Et ça a fait rire ton crétin de père. Il a fait de son mieux pour le cacher, mais il se retenait pour ne pas partir dans un grand fou rire. Mais il a été gentleman et il a nettoyé ma robe avec des sorts qu'il maîtrisait mieux que moi. D'autres sorts que ceux qu'on apprend à Poudlard.
- En même temps, c'est son domaine, les sortilèges, rappela Tonks, mutine. Il n'y a pas qu'en sorts liés aux maisons qu'il s'y connaît… Et c'était une bonne chose pour toi, pour le coup. Mais ne t'en fais pas, il n'y aura pas de serveur, chez moi, il n'y aura que Severus et Draco.
- Tu crois que Draco serait capable de te salir ?
Tonks fit les gros yeux.
- Arrête, je vais avoir cette idée dans la tête et je vais redouter qu'il le fasse ! Non mais en vrai, il ne le fera pas, ce ne serait pas un comportement très aristocratique, et Severus m'a dit que les bonnes manières, c'était sacré pour lui.
- Oui, mais il reste un adolescent…
L'angoisse commença à envahir Tonks, mais elle redescendit net quand elle vit le sourire en coin de sa mère.
- Tu te fiches de moi, grommela-t-elle.
- Tu devrais y être habituée, se moqua Andromeda. N'oublie pas que je suis une Serpentard…
- Ça, c'est sûr que tu n'aurais pas pu aller à Poufsouffle… Bon, j'y vais pour de bon, merci pour les infos que tu m'as fournies et pour le stage de la petite Parkinson. J'essaierai de manger avec papa et toi lors de mes prochains congés.
- Tu seras toujours la bienvenue, dit chaleureusement Andromeda. Profite bien de ce déjeuner avec ceux qui seront ta future petite famille.
- On n'en est pas là, réfuta Tonks en rougissant. Mais je vais en profiter, oui.
- Il y a intérêt, prévint Andromeda avec un ton faussement menaçant.
Tonks leva les yeux au ciel tout en souriant, souhaita une bonne journée à sa mère et s'avança vers la cheminée. Elle prit de la poudre, prononça cette fois son adresse et jeta la poudre dans l'âtre. Elle fut de nouveau entraînée dans un tourbillon, aperçut les mêmes cheminées qu'une heure plus tôt et atterrit rudement dans sa propre cheminée. Elle s'en extirpa et se rendit aussitôt à sa salle de bain où elle troqua sa tenue contre une robe verte mi-longue qui était aussi pâle que le rose de ses cheveux. Habituellement, ils étaient d'un rose assez criard, mais elle l'avait ajusté en fonction du ton clair de sa robe. Satisfaite de son look, elle retourna dans son salon afin de mettre la table. Elle se dépêcha, car avec tout ça, il était presque midi et elle n'avait plus que quelques minutes avant d'accueillir ses invités !
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Tout était prêt. Tonks s'apprêta à aller sortir les pichets de jus de citrouille, de sirop et d'eau dans la cuisine, mais elle fut retenue par un bruit de transplanage. Elle alla ouvrir et sourit en voyant Severus et Draco.
- Tu as un radar ou quoi ? plaisanta Severus. Tu viens à notre rencontre alors que ça ne fait que dix secondes qu'on est arrivés…
- Oh mais si j'avais su que tu réagirais comme ça, je vous aurais fait poireauter cinq minutes dehors, rétorqua Tonks avec humour.
- Hé, je n'ai rien dit, moi, s'offusqua Draco.
- Ah oui, pardon. Eh bien tu aurais poireauté tout seul, Severus. Non, plus sérieusement, je suis tout simplement polie, alors j'évite de faire patienter les gens. Allez, venez, on sera mieux à l'intérieur.
Severus et Draco ne se firent pas prier et suivirent Tonks qui les conduisit jusqu'au salon. Pendant que ses deux invités s'installaient, Tonks alla chercher dans la cuisine les boissons ainsi que la petite salade composée qu'elle avait faite en tout premier le matin-même, juste avant de s'attaquer au plat. Elle revint au salon et posa sur la table tout ce qu'elle avait dans les bras et dans les mains.
- Tu n'as rien renversé ? s'étonna Severus.
- Non, et je m'épate moi-même, pouffa Tonks. Mais c'est parce que j'ai fait très attention. J'ai des invités, il faut bien que j'assure… Je vais d'ailleurs vous servir, en bon hôte que je suis.
Tonks joignit le geste à la parole et remplit les assiettes de chacun.
- En tout cas, je suis bien contente de vous avoir avec moi, dit-elle alors qu'ils entamaient l'entrée. C'est toujours vide, ici, ça fait donc du bien, un peu de compagnie ! Et ces quelques heures loin de Poudlard vont te faire du bien aussi, Draco. Ça va t'aérer l'esprit.
- Vous dites ça à cause des BUSE ?
- Oui, je suis passée par-là et c'était très éprouvant…
- Ça aurait été plus gérable si tu avais eu moins de matières, signala Severus.
Cette remarque interpella Draco :
- Moins de matières ? Vous aviez plus d'options que les autres ?
- Draco, par pitié, tutoie-moi, je ne suis pas si vieille ! Et puis on… Non, rien.
Draco dut deviner ce qu'allait dire Tonks car il soupira :
- Non mais c'est bon, je me suis fait à l'idée que mon parrain sortait avec ma cousine… Et j'avoue que vu comme ça, c'est bizarre, ce vouvoiement. Je vais faire un effort.
- Merci, car là, j'ai vraiment l'impression d'avoir l'âge de ton parrain, rigola Tonks.
Severus adressa un regard indigné à Tonks, ce qui la fit éclater de rire, tout comme Draco.
- C'est moi ou depuis que je suis là, j'en prends plein la tronche ? s'offusqua Severus.
- Oh mais c'était une vanne, je ne le pensais pas une seconde, tu as encore une quarantaine d'années devant toi avant que je ne te trouve vieux ! Sinon, pour te répondre, Draco, j'avais quatre options : la divination, l'arithmancie, les runes et les soins aux créatures magiques.
- Ah ouais, quand-même… C'est bizarre, je t'aurais imaginée avoir fait en sorte d'avoir le moins de matières possible…
- Oui, les gens croient souvent ça car je faisais pas mal de bêtises quand j'étais à Poudlard, mais ça ne m'empêchait pas d'être attentive en cours…
- Mais pourquoi avoir pris autant d'options ?
- Parce que je voulais être Auror, que les places sont très limitées et que j'étais persuadée que mon dossier pèserait plus lourd si j'avais un max d'ASPIC… Ce qui était complètement faux puisque la divination et l'arithmancie ne sont pas du tout comptabilisées. Aucune option n'est censée l'être, en fait, mais ça, c'est sur le papier. Car on s'aperçoit que les candidats qui ont leur ASPIC en runes ont tout de même tendance à être plus facilement admis dans la formation. Avoir des connaissances en runes, c'est un bonus pour les Aurors. Il y a des enquêtes où les pièces à conviction sont des textes écrits en runes, et c'est bien utile d'avoir des Aurors qui sachent déchiffrer ce genre de textes…
- Tu as déjà été réquisitionnée pour cette tâche ?
- Oui, trois ou quatre fois au cours de ma formation, et deux fois depuis que je suis diplômée. Sans être courantes, les enquêtes qui requièrent une maîtrise en runes ne sont pas rares non plus. Il y en a environ quatre à cinq par an et ça fait quatre ans que je suis au Ministère, donc c'était obligé que je sois confrontée à cet exercice.
- Et tu as toujours réussi à les traduire, ces textes ?
- Oui, même s'il y en a un qui m'a donné du fil à retordre. Mais je n'aurais jamais dû avoir à m'en occuper. C'était un texte beaucoup trop dur pour une jeune Auror fraîchement diplômée. J'étais sous les ordres de mon ancien supérieur qui détestait les femmes et qui faisait tout pour me décrédibiliser et pour me pousser à démissionner. Évidemment, je n'aurais pas été virée si j'avais été incapable de traduire ce texte, mais mon mentor aurait clamé haut et fort que j'avais des lacunes en runes et que je n'étais pas un si bon élément que ça.
Draco fit les yeux ronds.
- Non mais c'est quoi, ce mentor ?!
Tonks jeta un coup d'oeil à Severus, soudain gênée. Elle était habituée à adopter un ton badin quand elle racontait des anecdotes qui incluaient son ancien mentor, car c'était une manière pour elle de se détacher de toute la souffrance qu'elle avait endurée sous son tutorat. Mais elle oubliait que pour un ado comme Draco, cela pouvait être assez choquant. Elle pesta intérieurement contre elle-même en réalisant qu'elle venait de faire sa première bourde alors que cela faisait à peine vingt minutes que Severus et Draco étaient là. Elle avait peur d'avoir tout gâché, aussi fut-elle surprise en voyant que Severus n'avait pas l'air embarrassé le moins du monde, lui.
- Tu peux continuer, l'encouragea-t-il. Je n'ai jamais caché la réalité de la vie à Draco. Il doit savoir qu'il n'y a pas que des personnes gentilles sur Terre. Lui aussi aura un mentor quand il intégrera sa formation, et bien que je ne l'espère pas, il peut tomber sur un mentor à l'image du tien…
- Si c'est le cas, Draco, n'hésite surtout pas à le dénoncer, conseilla Tonks. Il a fallu que mon ancien supérieur me mette sur une opération dangereuse pour que ses agissements soient enfin découverts, parce que je n'avais rien osé dire jusque-là.
- Qu'est-ce qui s'est passé ?
Tonks relata la mission périlleuse sur laquelle elle avait été envoyée un an plus tôt, sans chercher à amoindrir la gravité des faits comme elle serait tentée de le faire, mais en apportant une bonne dose d'humour à son récit afin de le rendre un peu plus léger. Il ne s'agissait pas de plomber l'ambiance du déjeuner ! Ce fut avec cet humour qu'elle fit rire Draco, notamment en évoquant le coup de pied accidentel qu'elle avait administré dans le nez de son agresseur.
- Du coup, il y a eu un conseil disciplinaire qui s'est tenu il y a trois mois, Brenston a été démis de ses fonctions et il n'a plus le droit d'encadrer qui que ce soit.
- Bien fait, asséna Draco. C'est tout ce qu'il a mérité. Franchement, je croise les doigts pour ne pas avoir un mentor comme lui…
- Ce sera au petit bonheur la chance, il y a des bons mentors et des mauvais mentors dans toutes les formations. Tu te destines à être potionniste, c'est ça ? Dans quel genre de potionnerie souhaiterais-tu travailler ?
- Dans une potionnerie humanitaire.
- Oooh, c'est un beau projet, ça. C'est un très beau métier, mais il faut avoir les épaules solides.
- C'est ça qui me fait un peu peur. J'ai toujours vécu dans l'opulence et la richesse, je n'ai jamais vu la pauvreté, mais si je n'arrive pas à supporter la détresse des gens, je me ferai embaucher dans une potionnerie uniquement commerciale.
- C'est une bonne alternative. Mais n'abandonne pas trop vite quand-même, laisse-toi du temps, ce sera forcément dur au début, mais tu t'y feras peut-être avec de la patience, de la persévérance, et de l'expérience. Mais si c'est vraiment insoutenable, en effet, il vaudra mieux ne pas insister.
- C'est comme le métier d'Auror, je suppose ? Tu sais de quoi tu parles.
- Ces deux métiers se ressemblent dans le sens où pour les exercer, il faut posséder un sacré mental, oui. Mais pour ce qui est des potionneries humanitaires, Severus pourra t'en dire plus que moi.
- Oui, tu as fait quelques voyages, il me semble ? s'enquit Draco en regardant son parrain.
- Oui, sauf que je n'ai pas réellement travaillé dans une potionnerie humanitaire… Les voyages, je les faisais en solo. J'avais une réputation à garder, mon engagement devait rester secret. Je n'aurais pas pu collaborer avec une potionnerie de ce genre, de toute façon. Je ne faisais des expéditions que quand j'en avais le temps, et c'était très rare. C'est pour ça que je n'ai fait que trois voyages. J'avais mes études de médicomagie, puis mon travail de médicomage ainsi que mon poste de professeur en simultané… Je n'aurais pas pu être dispo en même temps que les employés de la potionnerie. Mais je t'interdis de faire comme moi, Draco. C'est hyper risqué de mener des expéditions tout seul. Les populations à secourir sont situées dans des zones tellement isolées qu'il ne faut même pas songer à y transplaner. Cela provoque des ondes magiques beaucoup trop fortes pour ces zones très sensibles à la magie. C'est pourquoi on transplane loin de ces zones et on fait le reste du chemin à pied. C'est long, très long, et très dangereux, car les zones sont très difficiles d'accès. La question, ce n'est pas «Quand est-ce qu'on reviendra ?», mais «Est-ce qu'on reviendra ?». C'est pour ça qu'il faut y aller à plusieurs. On assure bien plus sa sécurité. On se défend plus efficacement contre un ennemi et on peut se faire aider quand on est coincé.
- Je n'avais pas l'intention d'y aller seul, je suis trop trouillard pour ça, s'amusa Draco.
- Ton filleul est plus raisonnable que toi, lança Tonks à Severus. Je te croyais plus prudent que ça.
- C'était il y a dix ans, et j'ai changé, depuis, certifia Severus. Et je ne le ferais plus, aujourd'hui, car j'ai une compagne et un filleul que j'aime, et j'ai aussi des amis, ce que je n'avais pas avant.
- Merci de penser à nous, ironisa gentiment Draco. Et fais-en autant, ajouta-t-il en se tournant vers Tonks. Ce serait bien que tu évites de trop te mettre en danger sur le terrain, je ne tiens pas à ce que mon parrain soit triste en perdant la femme qu'il aime. Et je ne veux pas non plus perdre ce qui est censé être ma nouvelle famille. Je mets les choses au clair tout de suite, hein.
Tonks ne s'attendait pas du tout à cela, mais elle fut touchée par les mots de Draco. Ce qu'il venait de dire signifiait qu'il acceptait pleinement la relation que Severus et Tonks entretenaient, et que ce déjeuner n'était qu'une formalité pour lui.
- Ne t'en fais pas, Draco, j'ai beau être une vraie casse-cou, je ne prends jamais de risques inutiles, affirma Tonks en souriant. Bon, et si on passait au plat principal ? enchaîna-t-elle.
Severus et Draco approuvèrent vigoureusement. Tonks débarrassa les assiettes qu'elle alla déposer dans l'évier de sa cuisine, en prit d'autres ainsi que le plat de poulet et de pommes de terre, et revint au salon où elle servit tout le monde. Quelques bouchées furent suffisantes pour que Tonks reçoive des compliments de la part de ses deux invités. Ils se remirent à discuter tout en mangeant, abordant pas moins de quatre sujets différents, et cela les amena jusqu'au dessert que Tonks alla chercher sur les coups de quatorze heures.
- J'ai préparé deux desserts, au cas où il y en aurait un que tu n'aimes pas, Draco, indiqua-t-elle. Il y a donc du gâteau aux pommes et de la tarte à la mélasse.
Severus fronça les sourcils.
- Est-ce qu'il y a des amandes, ou n'importe quelle sorte de noix dans ces desserts ?
- Euh… oui, j'ai mis des amandes dans le gâteau aux pommes, pourquoi ?
- Parce que Draco est allergique aux fruits à coque. Je suis désolé, j'aurais dû te le dire avant…
- Non, c'est moi qui aurais dû me renseigner avant de commencer la cuisine… C'est une chance que l'entrée et le plat ne contenaient rien de dangereux pour Draco, même si ce sont les desserts qui sont le plus susceptibles d'en avoir…
- Tu as eu la bonne idée de faire deux desserts, dont un complètement inoffensif, donc tout va bien, relativisa Severus.
Tonks voulut argumenter, mais une exclamation de Draco la coupa :
- Zut, je me suis taché ! Est-ce que je peux emprunter la salle de bain ? Les sorts de nettoyage, c'est bien sympa, mais ça n'enlève pas les odeurs…
- Il y a des sorts pour les neutraliser, si tu veux…
- C'est gentil, mais je préfère enlever les traces avec quelque chose qui sent bon.
- Bien, dans ce cas, la salle de bain est au fond, à droite.
Draco remercia Tonks et s'éclipsa. Tonks soupira.
- Je ne pouvais pas faire pire comme bourde…
- Tu n'exagères pas un peu ? se moqua Severus.
- J'ai failli empoisonner ton filleul ! s'écria Tonks.
Severus leva les yeux au ciel.
- Tu dramatises trop les choses… Si Draco avait eu une réaction allergique, j'étais là pour le sauver. J'ai déjà eu à le faire, je connais Draco par coeur, je connais les symptômes de son allergie, j'aurais donc su que ça n'allait pas dès le premier signe. Tout était sous contrôle.
- Et si ça s'était produit à Poudlard, dans la salle commune de Draco ou dans son dortoir ? Non mais tout ça, ça prouve que j'ignore tout de Draco… Tout ce que je crains, là, c'est qu'il me compare à sa mère en disant qu'elle n'aurait jamais fait cette erreur, elle…
- Il ne t'aurait pas dit ça, car c'est entièrement faux, rétorqua calmement Severus. Une fois, Draco a fait une crise d'allergie car Narcissa avait oublié de préciser à l'elfe de maison de ne pas mettre un certain aliment dans le repas du midi. Elle m'a aussitôt envoyé un Patronus en me sommant de venir au plus vite. C'était la première fois que je l'entendais être autant affolée. J'ai débarqué illico presto au Manoir et j'ai pu soigner à temps Draco.
Ces mots rassurèrent un peu Tonks. Au fond, elle était bien consciente qu'elle n'avait pas à se sentir coupable, mais c'était plus fort qu'elle. Severus dut voir qu'il ne l'avait pas totalement convaincue, car il insista :
- Je ne t'avais rien dit, tu ne pouvais pas deviner, et on ne peut pas penser à tout. Surtout quand on est méga stressé par un déjeuner important et qu'on a tout un repas à préparer… Tu étais sûrement focalisée là-dessus, tu n'avais pas de place dans ton esprit pour des questions du genre «Est-ce que le filleul de mon compagnon est allergique à quoi que ce soit ?»…
- C'est vrai, admit Tonks.
- Et, au moins, tu le sauras pour les prochaines fois, renchérit Severus.
- Oui, je ne referai pas la même bêtise…
- Je te donnerai la liste de tous les fruits à coque, promit Severus. Ah, le revoilà, avec une chemise toute propre…
Tonks tourna la tête et vit effectivement Draco entrer dans le salon, le bas de sa chemise dépourvu de la tâche de jus de citrouille qu'il y avait dix minutes plus tôt. Alors qu'il se rasseyait, Tonks se fit une réflexion qui la fit éclater de rire. Severus et Draco la dévisagèrent comme si elle était devenue folle.
- Excusez-moi, je suis allée chez ma mère, ce matin, et elle m'a remémoré une anecdote sur son tout premier rendez-vous amoureux avec mon père… Elle avait mis sa plus belle robe pour épater mon père, et ça a marché, mais le truc, c'est qu'il n'y a pas qu'à lui que la robe a plu… Elle a aussi eu du succès auprès du serveur, et il appréciait tellement la robe qu'il ne faisait pas du tout attention à ce qu'il faisait, si bien qu'il a fini par renverser l'assiette de ma mère sur le haut de sa robe… Ma mère était verte. Je lui ai dit que j'étais tranquille car ici, il n'y aurait pas de serveur, et elle m'a taquinée en me demandant si, d'après moi, tu serais capable de me salir, Draco… Elle eu le nez creux, mais pas pour la bonne personne !
- Je n'aurais jamais fait ça, voyons ! Et puis bon, c'était plus simple de me salir moi-même… Et il fallait bien que quelque chose comme ça arrive à l'un d'entre nous ! Un repas ne serait pas un vrai repas sans un couac…
- C'est exactement ce que j'ai dit à ma mère ! Mais bon, tu n'étais pas obligé d'illustrer ces propos en sacrifiant ta pauvre chemise…
- Je n'en ai pas fait exprès, prétendit Draco. Mais ce qui est bien, c'est que ça m'a rouvert l'appétit. Avant cet incident, je n'avais plus très faim.
- Eh bien je t'en prie, sers-toi, s'exclama Tonks en tendant le plat de tarte à la mélasse à Draco.
Tandis que celui-ci prenait une portion de tarte, Tonks échangea un regard complice avec Severus. Ils n'étaient pas dupes et ils avaient très bien compris que contrairement à ce qu'il avançait, Draco avait volontairement versé du jus de citrouille sur sa chemise afin d'être autorisé à s'absenter et que Severus puisse en profiter pour apaiser Tonks au sujet du gâteau aux pommes qui avait manqué de causer du tort à Draco. Mais ni l'un, ni l'autre ne relevèrent le mensonge de Draco. D'abord, il n'y avait rien de grave dans ce dernier, ensuite, Draco avait bien fait de permettre à Severus et à Tonks d'être seuls un moment, et enfin, il leur en avait offert l'occasion de façon très délicate. Ils n'avaient donc rien à lui reprocher.
- Au fait, est-ce que c'était une simple visite de courtoisie, ce matin, chez ta mère, ou… ?
Severus laissa la question en suspens, mais Tonks saisit le sens de celle-ci.
- Non, c'était pour m'entretenir avec elle sur ce dont je t'avais promis de lui parler.
- Tu peux t'exprimer librement, déclara Severus. Draco est au courant de toute l'histoire à propos de Forester et de la piste qu'on avait avec l'association de ta mère, alors à quoi bon le tenir à l'écart ? Il n'y a pas de danger tant qu'il ne répète rien à personne, sauf à Harry, et je sais qu'il ne le fera pas.
Draco hocha la tête, comme pour appuyer les dires de Severus. Tonks était autant soulagée qu'elle était d'accord avec Severus : cela ne servait à rien d'exclure Draco de cette conversation. Il avait été au plus proche de l'affaire en allant se confronter à Forester en tant que patient pour essayer d'avoir un autre témoignage de l'incompétence de la psychomage, il avait donc bien le droit d'entendre ce que Tonks avait à dire sur la discussion qu'elle avait eue avec sa mère ! Elle en fit d'ailleurs le récit, écoutée attentivement par Severus et Draco.
- Ainsi, elle aurait un problème avec les adolescents, résuma Severus, pensif.
- C'est ce qui semble se dégager des constatations que ma mère et moi avons faites en lisant tous les dossiers, oui, souligna Tonks.
- C'est très intéressant, comme piste. Jusque-là, la seule hypothèse que j'avais, c'était que l'attitude de Forester soit due au fait qu'elle en ait marre de son métier, et qu'elle rejette son ras-le-bol sur ses patients, mais là, on peut éliminer cette probabilité… Elle ne ferait pas une telle différence entre les enfants et les adolescents, même en ayant un poil d'empathie envers les enfants… Pour moi, il s'est clairement passé quelque chose dans la vie de Forester qui a eu un fort impact sur la relation qu'elle a avec ses patients adolescents…
- Ça me paraît évident aussi, indiqua Tonks.
- Mais qu'est-ce que ça peut bien être, ce quelque chose ? s'interrogea Draco.
- Ça, c'est ce qu'on voudrait tous savoir…
- Si tu veux enquêter là-dessus, ça ne va pas être simple, prévint Severus. Elle a longtemps travaillé en Allemagne, ce quelque chose a pu se produire là-bas…
- Super… Comme si ce n'était pas déjà assez compliqué comme ça… Bon, je réfléchirai à tout ça à tête reposée. Sinon, j'ai également parlé à ma mère de ton élève qui souhaite un stage en lien avec les enfants. C'est elle qui m'a tendu la perche en me disant que ses collègues et elles recrutaient tout au long de l'année et qu'elles commençaient à sérieusement désespérer car ça ne se bousculait pas au portillon, malgré tout ce qu'elles mettaient en œuvre pour attirer de potentiels candidats. Quand je lui ai parlé de ton élève, elle a donc été aussitôt intéressée. Et elle l'a été encore plus quand elle a su le nom de ton élève. Elle n'a pas eu besoin de plus pour accepter d'office de la prendre en stage. Elle connaît un peu ses parents qui vont aux mêmes soirées mondaines qu'elle, et les Parkinson sont les rares seules personnes que ma mère apprécie dans le milieu des Sang-Pur. Ils ont exactement les mêmes valeurs, et tout comme ma mère, ils évitent au maximum d'avoir des contacts avec les Sang-Pur qui ne jurent que par la supposée supériorité de leur sang…
- Ça, c'est vrai, souligna Draco. Ils ne font pas grand cas de leur sang, même s'ils n'en sont pas au point des Weasley qui, eux, s'en fichent royalement d'être des Sang-Pur… Ce que je ne comprenais pas avant mais que je peux comprendre maintenant. Du coup, c'est officiel, Pansy a un stage ?
- Oui, et elle est libre de choisir la période de l'été où elle effectuera son stage. Si l'association était au complet, ma mère et ses collègues n'auraient pas pu accueillir aussi aisément quelqu'un en stage à tout moment, mais vu que c'est tout l'inverse, elles sont prêtes à accueillir n'importe quand toute âme volontaire. Il faudra juste que ma mère s'entretienne avec les parents de la jeune fille, ou qu'ils communiquent par lettres, mais un entretien face à face serait quand-même préférable.
- Le truc, c'est que la mère de Pansy doit bientôt accoucher, elle sera admise d'ici trois semaines à Sainte-Mangouste, donc ça risque d'être difficile pour elle de se déplacer…
- Ah oui, quelle tête de linotte, Severus me l'avait dit… Bon, ma mère contactera les parents de ton amie et ils verront cela ensemble. Ils trouveront bien une solution.
- D'accord. En tout cas, merci, c'est grâce à toi si Pansy va avoir un stage, elle va être trop heureuse quand elle le saura…
- Mais de rien, j'étais en mesure de l'aider, et à part du temps, ça ne me coûtait rien de le faire, alors je l'ai fait… Et puis ça arrange aussi bien ma mère que ton amie, cette histoire.
- Par contre, pas un mot à Pansy, intima Severus à Draco. Je la convoquerai pour le lui annoncer. Ça me permettra de traiter quelques détails avec elle, dont le moyen qu'elle utilisera pour se rendre là où se tiendra son stage, par exemple.
- Bien, je ne lui en toucherai pas un mot, promit Draco.
- À présent que ceci est réglé, qui veut une autre part de tarte ?
- Moi, répondirent en choeur Severus et Draco.
- Bande d'affamés, plaisanta Tonks.
Elle servit ses deux invités ainsi qu'elle-même – la tarte plaisant décidément à tout le monde – et ce fut en discutant de tout autre chose qu'ils se remirent à manger. Une demie-heure plus tard, Severus et Draco durent s'en aller, Severus ayant un rendez-vous à seize heures et un autre à dix-huit heures. Ils remercièrent Tonks pour ce repas et ces quelques heures très agréables, et ils décrétèrent que ce serait à elle de venir chez eux la fois suivante, arguant que Severus était un très bon cuisinier. Tonks les raccompagna dehors et elle sentit son coeur se serrer un peu en les voyant transplaner. Mais elle se réconforta en songeant au dîner qui aurait lieu pendant les vacances. Il était même prévu qu'elle séjourne quelques jours chez Severus. Elle avait hâte, tout en ayant un léger stress. Mais ce n'était pas pour tout de suite. Elle avait le temps de s'y préparer. Quoi qu'il en soit, elle était plus que ravie de ce déjeuner. Tout s'était bien passé, et elle pouvait désormais le dire : elle était acceptée dans la petite famille que formaient Severus et Draco…
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POV Severus
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Sitôt après avoir ramené Draco à Poudlard, Severus repartit afin d'aller à Sainte-Mangouste, où il devait avoir une entrevue avec M. Pucey. Lorsqu'il arriva, il dévoila la raison de sa venue à la réceptionniste qui lui indiqua le numéro de la chambre du patient. Il y monta, et une fois devant la porte, il eut quelques secondes d'hésitations. Il n'avait pas vu M. Pucey depuis sept mois, et il allait débarquer comme une fleur pour le convaincre de tenter une thérapie avec une autre psychomage et, avec un peu de chance, avoir la confirmation que M. Pucey avait bel et bien été suivi par Forester… «Si je réussis à avoir tout ça, je vais douter de la fidélité de Tonks pour avoir un bol pareil» ironisa-t-il intérieurement. Il n'en pensait pas un mot, faisant simplement référence à une expression aussi bien moldue que sorcière. Il inspira profondément et frappa quelques coups à la porte. Un «Entrez» lui parvint. Il ouvrit et vit M. Pucey, allongé sur le dos, les yeux rivés vers le plafond. En entendant Severus, il tourna la tête et la surprise se lut sur son visage.
- Professeur ? Euh… bonjour, que faites-vous là ? s'étonna-t-il en se redressant.
- Je suis ici pour remplir ce qui peut être considéré comme mon rôle. J'aurais aimé le faire plus tôt, mais c'était impossible à cause d'un manque de disponibilité. J'espère que je ne vous dérange pas ?
- Non, je ne faisais rien de particulier.
- C'est ce que j'ai cru comprendre. Bon, tout d'abord, comment allez-vous ?
- Bien.
M. Pucey avait prononcé si vite ce mot que Severus le soupçonna de répondre systématiquement la même chose à chaque fois que cette question lui était posée… Et il doutait fortement que ce soit la vérité. C'était le «bien» ou le «ça va» que tout le monde sortait pour avoir la paix. Un automatisme qui trahissait un mensonge.
- En êtes-vous sûr ? insista Severus.
M. Pucey fronça les sourcils.
- Sûr de quoi ?
- Êtes-vous sûr d'aller bien ?
- Je viens de vous le dire, lâcha M. Pucey. Je sais encore ce que je dis… Si vous vous méfiez de ma sincérité, sachez que c'est réciproque. Je ne suis pas certain que vous soyez vraiment le professeur Snape…
Les propos de M. Pucey décontenancèrent Severus.
- Pourquoi cela ? interrogea-t-il, intrigué.
- Parce qu'en sept ans, jamais mon directeur de maison ne s'est montré soucieux de savoir comment j'allais.
Severus accusa le coup. Ça faisait mal. Mais c'était entièrement vrai, et cela, Severus ne pouvait le nier. Si, à l'heure qu'il était, il se préoccupait énormément du bien-être à la fois physique et mental des élèves, sept mois plus tôt, ce n'était pas du tout le cas. Cette réflexion lui fit soudain réaliser que s'il s'était davantage intéressé aux élèves de Serpentard comme un directeur de maison était censé le faire, il aurait vu que quelque chose n'allait pas chez M. Pucey… À l'infirmerie, celui-ci lui avait avoué que cela faisait deux ans, à ce moment-là, qu'il avait commencé à se droguer. Et connaissant malgré tout un minimum son élève, Severus avait deviné qu'il s'était passé quelque chose de grave dans la vie de M. Pucey pour qu'il en vienne à consommer des substances illicites. Et en deux ans, Severus ne s'était aperçu de rien, si ce n'était une baisse modérée dans les notes de M. Pucey qui ne l'avait pas tant inquiété que ça, étant donné qu'une chute de moyenne était courante entre les BUSE et les ASPIC, avec la difficulté croissante des cours et des devoirs… Il se ressaisit néanmoins en se disant que si même les meilleurs amis de M. Pucey n'avaient rien vu, c'était que le Serpentard avait bien caché son jeu… Et l'heure n'était pas à l'auto-flagellation. Mais il était tout de même en tort, et la moindre des choses, c'était de s'excuser. De plus, cela l'aiderait à gagner la confiance de l'ancien élève. Mais même sans cela, il l'aurait fait, car c'était important pour lui :
- Je suis conscient d'avoir failli à mon rôle, et je vous demande pardon pour cela. Le fait d'avoir été obligé de devenir professeur et directeur de maison, puis d'abandonner mon métier de médicomage a eu raison de mon humanité, et croyez-moi, si j'avais la possibilité de revenir en arrière et de tout changer, je le ferais. J'ai fait beaucoup d'erreurs dans ma vie, dont celle d'avoir cru en la mauvaise personne, et c'est la première que j'éviterais de refaire. Mais je ne suis plus le même professeur que celui que j'étais quand vous étiez à Poudlard, je ne suis même presque plus professeur étant donné que j'ai délégué quasiment tous mes cours à un collègue de potions. Je dédie désormais la majorité de mon temps à tous les élèves qui ont besoin d'un suivi psychologique. Et c'est pourquoi je suis ici actuellement, même si je ne pourrai en aucun cas être votre psychomage.
- Ça tombe bien, puisque je n'en veux pas, répliqua M. Pucey. Oh mais… attendez…
La fureur se dessina d'un coup sur les traits de M. Pucey :
- C'est pour ça que vous êtes là ? accusa-t-il. Pour me convaincre de reprendre une thérapie ? C'est mon médicomage qui vous envoie ?!
- Non, c'est même tout l'inverse, c'est moi qui ai écrit à Sainte-Mangouste afin d'obtenir le droit de vous rendre visite. Et je souhaitais effectivement avoir une conversation avec vous au sujet de votre santé mentale. Au vu de votre situation, il est essentiel que vous ayez accès à une thérapie avec un ou une psychomage. C'est bien ce que l'on vous a imposé ?
- Oui, dit M. Pucey du bout des lèvres.
- Mais vous avez interrompu la thérapie que vous aviez débutée ?
- En quoi ça vous regarde ? rétorqua sèchement le jeune homme.
- Pourquoi est-ce que vous vous emportez ?
- Parce que j'ai l'impression que vous me faites subir un interrogatoire ! Mais ici, je n'ai rien fait de mal ! Oui, j'ai interrompu ma thérapie, et alors ? J'étais parfaitement dans mon droit !
- Je ne dis pas le contraire, tempéra Severus. Mais pourquoi avez-vous mis fin à votre thérapie ? Ce n'est pas un reproche, j'essaie juste de comprendre.
- Il n'y a rien à comprendre. Cette thérapie ne servait à rien, voilà tout.
- Pourquoi ?
M. Pucey ne répondit pas.
- Les résultats n'ont pas été à la hauteur de vos attentes ?
Severus n'eut pas plus de succès avec cette question. Il en tenta une autre, cette fois-ci plus directe, en espérant que cela ferait réagir le jeune homme :
- Est-ce contre la thérapie que vous en avez, ou contre la personne qui vous a reçu ?
M. Pucey se crispa. Cela encouragea Severus à continuer :
- Pour qu'une thérapie se passe bien, il faut de la coopération de la part du patient, de l'écoute de la part du thérapeute, mais aussi une bonne relation entre le patient et le thérapeute, et il se peut que ce ne soit pas toujours le cas. Mais l'erreur à ne pas faire, c'est de rester sur un échec et renoncer à se faire suivre.
- C'est facile pour vous de dire ça, lança vertement M. Pucey. Ce n'est pas vous qui avez eu affaire à une incompétente !
- Non, mais ça ne m'empêche pas de me mettre à votre place. Si j'avais jugé que la psychomage en face de moi était incompétente, comme vous dites, j'aurais sûrement fait comme vous. À quoi bon enchaîner les séances si elles n'apportent rien de bon ? Après, le mot «incompétente» est peut-être un peu trop fort…
- Non, je mesure bien mes mots, professeur. Elle a dû payer pour avoir son diplôme.
- Mais de qui s'agit-il ?
M. Pucey se referma comme une huître.
- Vous n'avez pas à avoir peur, son nom n'est pas tabou comme l'était celui de Vous-Savez-Qui.
M. Pucey demeura silencieux.
- Je vous le répète : vous n'avez rien à craindre. Vous avez bien le nom de votre psychomage ?
- Oui.
- Mais vous ne voulez pas me le donner ?
- Ce n'est pas ça. Je ne veux plus y penser, ni en parler, d'accord ?
Severus retint un soupir. La situation s'annonçait plus compliquée qu'il ne l'aurait cru. Son ancien élève faisait de toute évidence un véritable blocage, et cela allait pousser Severus à faire appel à ses aptitudes de psychomage, chose qu'il avait souhaité éviter à tout prix.
- Ce n'est pas un bon calcul, M. Pucey, avertit-il. Les problèmes ne se règlent pas tout seuls. Sinon ça se saurait. Ce n'est pas en les ignorant qu'ils disparaissent. Loin de là. Plus tard vous traiterez les vôtres, plus ils prendront de l'ampleur. Et vous regretterez de ne pas vous y être mis plus tôt. Et en vous taisant, vous rendez service à cette psychomage que vous détestez tant. Je vais vous poser une question et si vous me dites non, je vous laisserai tranquille. Mais dites-moi non uniquement si c'est la vérité. Je le verrai, de toute façon, si vous mentez.
Severus marqua une pause, puis il reprit :
- Est-ce que votre psychomage était Mrs Forester ?
M. Pucey, qui fixait le mur, braqua brusquement son regard sur Severus.
- Pourquoi avez-vous tout de suite pensé à elle ?!
- Dois-je en déduire que c'est oui ?
- Ce n'est pas ce que j'ai dit, rétorqua le jeune homme. Vous tirez des conclusions trop hâtives.
- Donc ce n'est pas elle ?
- Je n'ai pas dit ça non plus.
- Donc c'est ni oui, ni non ? C'est embêtant.
M. Pucey se replongea dans la contemplation du mur en face de lui.
- Je suis pratiquement sûr que c'est bel et bien Mrs Forester qui vous a suivi. Si ce n'était pas elle, vous me l'auriez dit franchement et j'aurais bien vu que vous étiez sincère. Or, vous vous obstinez à entretenir le flou à ce sujet. Vous ne feriez pourtant que confirmer ce que je sais déjà. Alors je vous le redemande : est-ce Mrs Forester qui a été votre psychomage ?
À l'expression faciale de M. Pucey, Severus sut qu'il serrait les dents.
- C'est horrible, ce que vous faites. Vous me piégez honteusement pour me forcer à dire ce que vous voulez entendre.
- Parce que c'est important. Je ne vous ennuierais pas avec ça en utilisant des méthodes sournoises pour vous faire cracher le morceau si ça ne m'avancerait à rien de savoir que vous avez été suivi par Mrs Forester. Je vais être honnête avec vous, et je prends des risques en faisant ça, même si je doute que vous iriez me dénoncer à celle qui vous effraie tant : j'enquête sur Mrs Forester. Deux élèves à Poudlard ont eu une thérapie avec elle, et ils en sont sortis traumatisés. Il n'a fallu qu'une séance à un de ces élèves pour qu'il touche le fond, tellement il a été rabaissé durant cette entrevue. Et si cela peut vous aider à vous délier la langue, cet élève, c'est Harry. Il m'a autorisé à vous fournir son nom si cela s'avérait nécessaire.
Les mots de Severus figèrent M. Pucey qui sembla être en état de choc. Severus jugea cela normal au premier abord, avant de commencer à s'inquiéter au bout de deux minutes. Mais ce fut pile à ce moment-là que M. Pucey revint à lui. Il tourna lentement la tête vers Severus.
- Harry a eu Forester comme psychomage ? demanda-t-il faiblement.
- Oui. Et ça ne lui a pas du tout réussi. Tout comme une autre élève. Et tout comme vous. N'est-ce pas ?
M. Pucey baissa les yeux. Severus crut qu'il allait une nouvelle fois se murer dans le silence, mais il le détrompa :
- Oui, dit-il dans un murmure. J'ai effectivement eu quelques séances avec cette femme, et j'aurais préféré ne jamais les avoir eues. Je me serais bien mieux porté sans.
- Elle a eu des propos inadéquats ?
- C'est ça. Elle m'a enfoncé au lieu de m'aider. Dès qu'elle a su ce que j'avais fait, elle s'est fait un avis sur moi et elle n'a pas voulu en démordre. Elle me faisait la morale, elle me critiquait, elle me balançait des commentaires désobligeants… C'était l'enfer, ces séances. C'est pour ça que je les ai vite arrêtées, ma santé mentale en dépendait. Mais je me dis parfois que je méritais tout ça…
- Non, c'est entièrement faux, décréta fermement Severus. Je veux que vous vous sortiez cette idée de l'esprit. On ne fait pas payer quelqu'un pour ce qu'il a fait en se comportant ainsi avec lui. Et je crois que vous êtes déjà assez puni depuis sept mois en étant isolé de tout, même si ce n'est pas une sanction à la base. Mais cela agit un peu comme tel.
- Oui, car des fois, c'est vraiment dur à supporter, avoua M. Pucey. Je vois toujours les mêmes têtes, et ce sont des personnes que je ne connais pas. Mais j'ai quand-même la chance d'avoir eu la visite de Graham à deux reprises.
- Il n'y a que les siennes qui vous ont fait plaisir ?
- Ce sont surtout les seules que j'ai eues.
Severus ne put cacher le dépit qu'il ressentit face à cet aveu. Il avait bien été informé que M. Pucey ne recevait quasiment personne, mais il ne pensait pas que c'était à ce point…
- C'est pour ça que j'ai hâte de quitter cet endroit. Pour retrouver un minimum de lien social. Mais je me heurte sans cesse au refus des médicomages…
- Vous n'aurez l'autorisation que lorsque vous aurez décidé de vous faire suivre. C'est la condition sine qua non.
- Oui eh bien je ne désespère pas de les faire plier sans avoir à céder à ce chantage.
- Ce n'est pas un chantage, c'est pour votre bien, plaida Severus. Vous savez que vous avez besoin d'une thérapie. Vous ne pouvez pas vous remettre tout seul d'un sevrage, vous ne pouvez pas vous réintégrer dans la société après sept mois passés à Sainte-Mangouste sans vous faire accompagner, ce sera beaucoup trop dur. Vous allez devoir vous réhabituer à tout, et il se peut que vous ayez des difficultés à vous réadapter à votre environnement et à tout ce qu'il y a autour de vous, mais aussi à faire quelque chose d'aussi simple que de parler aux gens. Et puis, il faut que vous vous confiez sur ce qui vous a poussé à vous lancer dans la consommation de potions droguées. Cela ne va pas être facile non plus, mais ça doit être fait. C'est primordial. Il n'y a que comme ça que vous irez mieux et que vous pourrez aller de l'avant.
- Mais je ne veux pas subir la même désillusion que quand je suis arrivé ici, marmonna M. Pucey.
- Ce ne sera pas le cas, assura Severus.
- Comment le savez-vous ? Comment en êtes-vous aussi sûr ?
- Parce qu'une psychomage qui a travaillé à Sainte-Mangouste est prête à revenir ici rien que pour vous. Elle ne ferait pas cet effort si son but était de vous anéantir, ce serait complètement stupide et incohérent… Je sais que c'est compliqué de faire confiance à nouveau, mais si deux personnes plus jeunes que vous l'ont fait, alors vous êtes capable de le faire aussi. Vous êtes fort, et vous avez de la ressource, M. Pucey. Le succès qu'a été votre sevrage le prouve. Et dites-vous que Harry partait de très loin, avec moi. J'étais l'une des personnes qu'il détestait le plus au monde à cause de l'attitude que j'avais envers lui depuis sa première année, et ça ne l'a pas empêché d'accepter la main que je lui tendais. Ce n'était pas gagné, mais une relation saine s'est instaurée entre nous et cela a permis à la thérapie de se dérouler sans accroc. L'avantage que vous aurez, c'est que votre psychomage sera une inconnue, pour vous, et ce sera réciproque. Il n'y aura pas d'à priori d'un côté ou de l'autre. Un bon psychomage ne se fait pas une idée préconçue de son patient comme l'a fait Mrs Forester. Et la psychomage qui vous suivra est une bonne psychomage, je peux vous le promettre. Il n'appartient qu'à vous de vous guérir des maux qui hantent votre esprit. Mais pour cela, il faut que vous fassiez le bon choix.
Severus se tut sur ces mots. Il avait vu M. Pucey l'écouter attentivement, mais l'avait-il convaincu ? Rien n'était moins sûr. Mais il le fallait, car il n'avait plus rien dans sa besace pour raisonner la tête de mule qu'était son ancien élève. Celui-ci garda un long moment les yeux rivés sur sa couverture, visiblement en proie à une intense réflexion, avant de lever la tête vers Severus, un air déterminé sur le visage. Severus retint son souffle. M. Pucey ancra son regard dans le sien, et au bout de quelques secondes qui parurent être une éternité pour Severus, il déclara :
- C'est d'accord, je veux bien rencontrer cette psychomage. Et pas uniquement pour être autorisé à sortir d'ici. Mais aussi pour aller mieux.
Un immense soulagement envahit Severus. Il avait réussi. Il avait fait changer d'avis M. Pucey qui allait enfin se reprendre en main en consultant une autre psychomage.
- Merci, professeur, ajouta le jeune homme. Merci pour votre patience et votre dévouement. Je sais, vous allez me dire que c'est votre rôle, mais vous avez quand-même usé de votre temps pour tenter d'aider celui qui a fait du mal à un de vos patients…
- Rien de tout cela ne se serait produit sans cette plaie que vous avez en vous et qui vous a incité à chercher une échappatoire dans les potions droguées. Vous souffriez autant que Harry et vous avez dû gérer cela tout seul car personne ne s'est aperçu de votre mal-être intérieur. Et je suis encore une fois sincèrement désolé pour cela.
- Je ne vous en veux pas, professeur, affirma M. Pucey. Je n'en veux à personne, sauf à celui qui est à l'origine de mon traumatisme. J'ignore comment je vais faire pour en parler, car ça va réveiller de douloureux souvenirs et faire resurgir dans mes cauchemars de terribles images que je voudrais tant oublier… J'attends beaucoup de ces séances que j'aurai avec cette psychomage.
- Et vous avez raison. Mais elles ne feront pas tout le travail. Il faudra aussi faire avec le temps.
- Oui, bien sûr… Ça ne se fera pas en un claquement de doigts… Je suppose que vous allez bientôt vous en aller, mais avant que vous ne rentriez, j'ai une question à vous poser…
- Oui ?
M. Pucey sembla hésiter, puis il demanda :
- Comment va Harry ?
- Oh… Il va bien, compte tenu de tout ce qu'il a traversé cette année, et je ne fais pas référence qu'à ce qu'il y a eu avec vous. Il a eu plein de problèmes, mais il était bien entouré et grâce à cela, il a pu surmonter tous les obstacles qui se sont dressés sur son chemin. Il est heureux, actuellement, et il va probablement avoir la plupart de ses BUSE haut la main.
- Je l'espère pour lui… Je suis content qu'il aille bien, qu'il ait su reconstruire et qu'il ait du monde autour de lui.
- Désirez-vous lui faire passer un message ?
M. Pucey parut surpris.
- Il n'est peut-être pas prêt à vous voir, mais cela lui fera plaisir d'avoir un petit message de vous. Il ne vous en veut plus et tout comme vous pour lui, il espère que vous alliez mieux.
L'émotion se lut sur les traits de l'ancien Serpentard.
- Eh bien… Dites-lui que je pense souvent à lui, que je lui demande pardon pour le mal que je lui ai fait, qu'il doit profiter à fond de ses deux années à venir à Poudlard, et que je ne lui souhaite que du bonheur.
- Bien, je lui transmettrai ceci. Bon, je vais y aller, j'ai un autre rendez-vous à dix-huit heures et si je suis en retard, je vais fragiliser mes chances d'obtenir ce pour quoi j'ai voulu cette entrevue.
- Oh, bonne chance, alors. Et encore merci pour tout.
Severus sourit, salua M. Pucey et prit congé de lui. Il était largement satisfait lorsqu'il quitta Sainte-Mangouste. Sa première mission était plus que validée. Il en avait une seconde, et il priait Merlin et toutes les divinités existantes pour qu'elle ait le même succès !
.
Severus avait convenu avec Mrs Powell de se rejoindre aux Trois Balais qui était un endroit agréable et qui leur était familier autant à l'un qu'à l'autre. Lorsqu'il entra dans le pub, Severus jeta un coup d'oeil circulaire et vit Mrs Powell installée dans un coin, un livre à la couverture verte à la main et un verre de sirop de cerise agrémenté d'un quart de citron posé devant elle. C'était grâce à ces deux éléments que Severus sut qu'il s'agissait bien de sa potentielle future collègue, celle-ci lui ayant indiqué dans sa seconde lettre la boisson assez particulière qu'elle commanderait ainsi que la couleur du livre qu'elle emmènerait avec elle. Il y avait peu de chances pour qu'une autre cliente ait exactement les mêmes singularités… Severus s'avança vers la table de Mrs Powell et s'assit en face d'elle. La psychomage leva la tête et sourit.
- M. Snape ?
- C'est moi, confirma Severus.
- Enchantée, Dorothy Powell, psychomage libérale pour enfants et adolescents, même s'il m'arrive parfois de recevoir des adultes. Mais je ne vous apprends rien, je crois, vu que c'est parce que nous exerçons le même métier que vous m'avez contactée…
- Oui, et je vous remercie de m'avoir accordé cet entretien malgré le fait que je vous aie fourni très peu d'informations quant à l'objet de ma requête…
- Ce qu'il y avait dans votre lettre a suffi à me faire sentir que vous étiez dans une situation délicate, que c'était sérieux et urgent, et que j'étais peut-être en mesure de vous aider.
- Vous êtes en mesure, oui, mais encore faut-il que vous soyez intéressée…
- Expliquez-moi.
Severus prit une inspiration mentale et se lança :
- Cela fait sept mois que je m'occupe de la thérapie d'un élève. Il devait être mon seul patient, à la base, mais j'ai dû suivre une jeune fille qui avait un traumatisme en commun avec ce même élève. De fil en aiguille, j'ai découvert qu'il y avait une multitude d'élèves qui avaient des problèmes qui nécessitaient un suivi, et je me suis retrouvé avec trois, puis quatre, puis cinq, puis six patients, j'ai dû déléguer la quasi-totalité de mes cours à un collègue pour être en capacité de me consacrer à mes patients, mais le souci, c'est que je ne suis pas seulement professeur et psychomage, mais également potionniste, j'ai des obligations vis-à-vis des établissements avec qui j'ai des contrats, et je ne peux pas m'y soustraire aussi facilement que je ne l'ai fait avec mes obligations en tant que professeur… J'ai tout de même été forcé de suspendre provisoirement mon partenariat avec une des institutions que je fournis, ayant été à deux doigts de faire un burn-out, et ça m'a fait réaliser que ça ne pouvait plus durer ainsi, que j'avais bien trop de responsabilités, et qu'il m'était impossible de gérer tous les ados qui avaient besoin d'un suivi psychologique… J'avais déjà, depuis environ quatre mois, l'idée de faire appel à une consœur afin de se partager les élèves, j'en avais fait part au directeur qui avait approuvé ce projet et qui avait fait des recherches pour dénicher la personne qu'il nous fallait, mais cela n'a abouti à rien. Entre-temps, j'ai eu votre fils en thérapie suite au harcèlement qu'il a subi, et deux autres de mes patients ont entendu un échange entre lui et plusieurs camarades de sa maison. Au cours de cette conversation, mes deux patients ont appris que votre fils avait une mère qui était psychomage, et étant au courant que le directeur et moi essayions de trouver une autre psychomage, l'un de ces deux patients est venu me voir pour m'annoncer l'information qu'il avait eue quelques jours plus tôt. J'ai gardé cette piste en tête, mais ce n'est qu'après avoir manqué de faire ce burn-out que je me suis décidé à vous contacter. Voilà donc pourquoi je vous ai écrit. Vous avez certainement deviné la requête que je souhaite vous faire…
- En effet, confirma Mrs Powell. Vous aimeriez que je vous seconde à votre poste de psychomage ?
- C'est cela. Je sais qu'avant de devenir libérale, vous étiez psychomage à Sainte-Mangouste et que vous avez quitté votre emploi car vous étiez épuisée, tant vous étiez débordée de travail, mais vous serez beaucoup plus libre à Poudlard, car nous nous arrangerons pour que vos horaires ne soient pas trop contraignantes… Il faudra cependant aussi tenir compte des disponibilités des élèves que vous aurez, ce qui implique que vos séances avec eux auront souvent lieu le week-end et le soir, après les cours… Mais si vous préférez continuer à exercer uniquement dans votre cabinet, je comprendrais parfaitement.
Mrs Powell sembla faire face à un dilemme. Cela étonna Severus. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle hésite aussi vite dans leur entretien…
- Écoutez, je ne vais pas vous le cacher : depuis que je suis libérale, il y a eu des périodes où j'avais bien plus de patients que je n'en ai actuellement… Lorsque j'ai ouvert mon cabinet, je n'ai pas eu à patienter bien longtemps avant d'avoir une longue liste de patients… Il n'y avait rien de surprenant là-dedans : j'étais l'une des premières psychomages, à l'époque, à avoir démissionné de mon poste à Sainte-Mangouste pour m'établir en tant que psychomage libérale. J'avais donc plus de créneaux vacants que n'en avait Sainte-Mangouste, et les parents qui tentaient d'avoir un ou une psychomage pour leurs enfants se sont rués sur mes créneaux. Mais je n'en proposais que jusqu'à dix-sept heures ou dix-huit heures selon les jours, ce qui fait que j'avais des journées bien moins remplies que celles que j'avais à Sainte-Mangouste. Mais cela fait maintenant deux ou trois ans que de plus en plus de psychomages désertent Sainte-Mangouste pour travailler dans leur propre cabinet. À tel point que je crois qu'il y a désormais plus de psychomages libéraux que de psychomages à Sainte-Mangouste… Et en-dehors de cela, il y a de plus en plus de psychomages tout court, dont près de trente pour cent sont spécialisés auprès des enfants et adolescents. Il y a le même pourcentage pour les adultes, et les quarante pour cent restants sont des psychomages qui accueillent à la fois des adultes, des enfants et des adolescents. Donc autant dire qu'avec soixante-dix pour cent des psychomages qui prennent des enfants comme patients alors qu'avant, il n'y en avait que quarante pour cent, force est de constater que j'ai de moins de nouveaux patients qui débarquent dans mon cabinet… Certes, je suis partie de Sainte-Mangouste parce que j'étais fatiguée d'avoir douze heures de travail par jour, cinq à six jours sur sept, sans pause déjeuner la plupart du temps, et de ne voir mes enfants que le soir, mais j'étais loin d'imaginer que quelques années plus tard, il y aurait une vague de psychomages qui suivraient mon exemple, et que je verrais diminuer petit à petit le nombre de mes patients… Car la plupart ont des thérapies temporaires, et avant, j'avais autant de thérapies qui se finissaient que de thérapies qui commençaient, et là, j'en ai plus qui se terminent que de nouvelles qui débutent… Je ne m'en plains pas, j'ai plus de temps à dédier à mes enfants, et ça, c'est super, mais à ce rythme, quand ils seront tous à Poudlard, je n'aurai plus beaucoup de patients et ça me déprimera… J'ai déjà l'impression de ne plus servir à grand-chose, j'ai toujours eu vocation à faire ce métier pour aider les enfants et les adolescents à surmonter leur mal-être et leurs traumatismes, et je n'en ai plus autant l'occasion que des années auparavant… C'est une bonne chose, d'un sens, car ça signifie que même s'il y a plein d'enfants et d'ados en souffrance, leur nombre demeure relativement stable. Sinon, je n'aurais pas de baisse de patients, même avec les nouveaux psychomages. Enfin bref, tout ça pour dire que je ne suis pas autant opposée que vous ne le croyez à l'idée de venir exercer à Poudlard. Mais je ne peux pas vous donner une réponse claire pour le moment, c'est un peu trop brusque, un peu trop soudain, il faut que j'y réfléchisse…
- Oui, bien sûr, je ne pensais pas avoir une décision immédiate, j'ai conscience que si vous finissez par accepter, cela va bousculer tout un tas de choses pour vous… Vous allez devoir vous réorganiser et il faut que vous vous y prépariez en amont… Et cela ne se fait pas en un claquement de doigts… Prenez le temps qu'il vous faudra, je poursuivrai mes recherches au cas où, précisa Severus.
- Ce sera plus prudent, oui, renchérit Mrs Powell. Mais si, au bout du compte, ma réponse est non, je vais vous écrire une liste de noms de psychomages qui pourraient être potentiellement intéressés. Je ferai cela ce soir et je vous la transmettrai par hibou.
- Oh, c'est adorable de votre part… Je ne les contacterai que si vous venez à refuser. Merci, en tout cas. Cette liste me sera très utile…
- Nous pratiquons le même métier, M. Snape. Je ne peux que soutenir votre noble démarche de faire en sorte que tout élève qui ne se sente pas bien puisse avoir accès à un suivi psychologique, même si mon soutien ne se fait que par le biais d'une feuille de parchemin… J'espère de tout coeur avoir la possibilité de vous offrir un retour positif quant à votre proposition. Bien que vous m'intimiez à ne pas me presser, y a-t-il une date butoir pour que je vous adresse ma réponse ?
- Avant fin juillet, ce serait bien, afin qu'on ait le temps d'examiner tous les détails ensemble, et que la cheminée de votre bureau soit reliée à celle de votre maison avant la rentrée… Cela vous évitera d'avoir à aller jusqu'aux grilles de Poudlard pour transplaner, vu qu'il n'y a pas moyen de le faire à l'intérieur de l'école…
Mrs Powell parut touchée.
- C'est une très gentille attention… Vous avez déjà songé à tout… C'est bon à savoir que, si je viens exercer à Poudlard, mon futur collègue sera quelqu'un de très sérieux et de très ordonné… Et que je n'aurai pas à marcher pendant dix minutes pour transplaner et regagner mes pénates… Ma maison et ma salle de consultation n'étaient pas reliées par le réseau de cheminées, à Sainte-Mangouste, et le point commun entre Poudlard et Sainte-Mangouste, c'est qu'on ne peut pas transplaner au sein de l'établissement. J'avais donc un bon bout de chemin à faire pour sortir de Sainte-Mangouste, mais j'y étais habituée.
- À Poudlard, vos conditions de travail seront bien plus agréables que celles que vous avez connues à Sainte-Mangouste, assura doucement Severus.
- Je n'en doute pas, sourit Mrs Powell. Avant de nous quitter, je tenais à vous remercier pour l'aide que vous avez apportée à mon fils. Lorsque vous m'avez écrit pour me relater ce qui s'était passé, je me suis sentie coupable de ne rien avoir deviné dans ses lettres… Il m'en envoyait autant qu'avant, il n'y avait rien de suspect dans celles qu'il avait rédigées durant la période où il se faisait harceler, et il ne m'avait strictement rien dit… Mais il devait y avoir des indices que je n'ai pas su lire…
- Non, vous n'avez rien à vous reprocher, affirma Severus. Vous êtes psychomage spécialisée auprès des enfants, vous êtes encore mieux placée que moi pour savoir que les enfants sont très forts pour mentir, non pas par insolence, mais parce qu'ils ont honte et qu'ils ne veulent surtout pas inquiéter leurs parents… Et c'est très difficile de se rendre compte de quoi que ce soit quand il s'agit de son propre enfant. Je suis responsable d'un ado de seize ans depuis l'été dernier, et je n'ai pas toujours su voir quand il n'allait pas bien. On fait tous des erreurs, aucun parent n'est parfait. Et votre fils ne vous en veut pas, il sait que vous l'aimez, il vous aime aussi et il vous admire beaucoup. Et le plus important, c'est qu'il aille mieux à l'heure qu'il est, et qu'il sache qu'il doit se confier quand il a des problèmes.
Mrs Powell acquiesça.
- Quand je pense qu'au début de l'année, il me disait dans ses lettres que vous lui faisiez peur… À présent, vous êtes comme son sauveur, pour lui. Et il est loin d'être le seul à avoir changé d'avis sur vous. Ma fille, qui est en septième année, me dit que ses camarades de maison de cinquième année, qui sont les seuls à vous avoir en cours, sont beaucoup plus détendus en allant en potions qu'ils ne l'étaient huit mois plus tôt. Ce doit être une opinion partagée par tous les élèves de Poudlard…
- Oui, et si c'est le cas, je crains que ça ne me soit préjudiciable lorsque j'enseignerai de nouveau à la moitié des classes et que je n'aurai plus aucune autorité sur les élèves…
- Oh, vous n'en êtes pas là ! Et puis, vous n'êtes pas le même homme en tant que psychomage qu'en tant que professeur… Même si vous êtes moins rigide que vous ne l'étiez avant de prendre en main la santé mentale des élèves… Vous êtes simplement plus pédagogue et vous ne sanctionnez plus de manière injustifiée. Après, si vous avez une petite appréhension à l'idée de refaire cours aux classes que vous allez récupérer, rien ne vous empêche d'en parler avec vos collègues professeurs…
- C'est étrange comme j'ai l'impression d'entendre la voix d'une psychomage, ironisa Severus avec humour.
- Pardon, déformation professionnelle, s'excusa Mrs Powell sur le même ton. Même si vous êtes un adulte et que je suis censée ne m'occuper que des enfants et adolescents…
- Je retiens tout de même votre conseil, que je vais peut-être suivre.
Severus lança un Tempus afin d'avoir l'heure.
- Je dois y aller, il se fait tard et j'ai des devoirs qui m'appellent à Poudlard…
- Et moi, des enfants à aller chercher chez leurs grands-parents, indiqua Mrs Powell.
- Merci de m'avoir accordé un peu de votre temps, je sais combien il est précieux pour une mère de famille qui a un métier assez prenant, bien que vous soyez dans une période plutôt calme… Je vais guetter votre réponse, en priant Merlin pour qu'elle soit positive, déclara Severus.
Il se leva, très vite imité par Mrs Powell. Ils quittèrent les Trois Balais, se saluèrent en se souhaitant une bonne fin de journée, puis ils se séparèrent. Mais à peine Severus eut-il fait quelques mètres que Mrs Powell le héla :
- M. Snape ?
Severus se retourna, intrigué. Il fut troublé par l'expression déterminée qui se lisait sur le visage de la psychomage et qui avait remplacé l'hésitation qui s'y reflétait encore cinq minutes auparavant.
- Oui ?
- C'est oui, annonça de but en blanc Mrs Powell. J'ignore comment je vais faire pour m'organiser, mais les élèves de Poudlard ont besoin d'une autre psychomage, votre proposition survient pile au moment où je me mets sérieusement à m'interroger quant à mon avenir de psychomage libérale, et je suis sûre que nous nous entendrons très bien sur le plan professionnel.
- Êtes vous certaine que vous réussirez à…
- Je me débrouillerai, coupa Mrs Powell. Je ne veux pas passer à côté de cette occasion qui s'offre à moi. Il faut savoir sortir de sa zone de confort, parfois, même si ça chamboule tout l'équilibre qu'on était parvenu à instaurer. Je suis tout à fait consciente que ce sera dur de concilier mon travail libéral et mon emploi à Poudlard, je me tiendrai prête à faire un choix si ça s'impose, et si tel est le cas, ce choix, ce sera évidemment de conserver mon poste à Poudlard. J'ai pris des risques, il y a quelques années, en démissionnant de Sainte-Mangouste, car outre le fait que j'exerçais dans des conditions de travail très difficiles, j'avais une situation financière stable. En m'en allant de Sainte-Mangouste, je n'avais aucune garantie que ça marcherait d'ouvrir mon propre cabinet. Donc autant dire que me lancer dans l'inconnu, ça ne me fait pas peur. Je l'ai déjà fait et c'est l'une des meilleures décisions que j'ai prises. Et je suis certaine que m'établir à Poudlard en sera une autre.
Il y avait une telle conviction dans le ton de Mrs Powell que Severus fut tenté d'y croire, lui aussi. Et ce fut ce qu'il fit.
- Il n'y a pas de raison pour que cette décision soit une exception, approuva-t-il. Mais à mon tour de vous remercier, ajouta-t-il avec sincérité. Je vous recontacterai pour que nous convenions d'une date afin que nous réglions ensemble les détails que j'ai évoqués au cours de cette entrevue.
- Très bien, je vous dirai si je serai disponible à l'une d'entre elles, et si je ne le suis pas, eh bien je ferai en sorte de l'être.
Severus hocha la tête en souriant. Mrs Powell et lui se saluèrent pour de bon cette fois-ci et partirent chacun de leur côté. Severus était plus que satisfait de l'issue de cet entretien. C'était allé au-delà de ses espérances. Jamais il n'aurait cru persuader aussi facilement Mrs Powell de le seconder au poste de psychomage à Poudlard. Il avait eu énormément de chance lors de ses deux rendez-vous, que ce soit avec M. Pucey ou avec Mrs Powell, et sans se l'expliquer, il sentait que sa journée allait se finir sur une note beaucoup moins agréable… Un léger malaise l'envahit à cette idée, mais il s'était déjà dissipé lorsque Severus arriva au château. Il rejoignit ses appartements et se servit aussitôt un verre d'eau pour se rafraîchir, les températures avoisinant les trente degrés à l'extérieur. Il venait de boire sa dernière gorgée lorsque des coups furent frappés à la porte. «On ne peut même plus se désaltérer tranquille, c'est fou» songea-t-il. Il alla ouvrir et découvrit que sa visiteuse n'était autre que Poppy.
- Bonjour, Severus, excusez-moi de vous déranger, mais c'est urgent, exposa-t-elle sans détour.
L'air grave de Poppy fit resurgir en Severus l'angoisse qui l'avait gagné sur le chemin de Poudlard. Que se passait-il ?
- Y a-t-il eu un afflux d'élèves à l'infirmerie ? supposa-t-il.
- Non, il me faut juste une potion.
Severus fronça les sourcils.
- Mais… je vous ai réapprovisionnée en tous genres de potions il y a quelques jours, et en quantités suffisantes pour que ça vous fasse jusqu'à la fin de l'année, dit-il, perplexe.
- Ce n'est pas une potion que je sors souvent des placards, si bien que ça fait deux mois que je n'ai plus vérifié si le stock était toujours bon, et là que je vais peut-être devoir fournir cette potion, celles qui me restaient sont périmées…
- Quelle est cette potion ?
Il y eut quelques secondes de silence avant que Poppy ne réponde :
- La potion abortive.
Severus ferma les yeux. C'était donc cela, la chute de la journée qu'il avait pressentie en rentrant de Pré-au-Lard… Ce n'était jamais une bonne nouvelle lorsque Poppy le missionnait de préparer cette potion. Car cela signifiait qu'il y avait une grossesse non désirée, et cela pouvait être très mal vécu par l'élève enceinte. Qui était-ce, au fait ? Ce fut la question qu'il posa :
- Quelle est l'élève concernée ?
- Miss Turpin. Sa grossesse aurait pu être diagnostiquée plus tôt, avec les deux fois où je l'ai reçue à l'infirmerie, même si c'est vous qui vous êtes occupé d'elle la dernière fois, mais elle avait trop peu de symptômes pour instiller le doute dans mon esprit…
- Pareil de mon côté, avoua Severus. Qu'est-ce qui vous a mise sur la piste ?
- Deux de ses camarades l'ont emmenée à l'infirmerie car elle n'avait pas l'air bien du tout. C'était la troisième fois, j'ai commencé à m'inquiéter face à cette récurrence et à me demander si elle nous avait bien tout dit les deux fois précédentes, si elle ne nous avait pas caché quelque chose, si elle ne se droguait pas avec des coupe-faim, ce qui aurait justifié son état global, son manque d'appétit, le fait qu'elle ait déserté plusieurs fois la Grande Salle, ses malaises à répétition… Je me suis promise de tirer les choses au clair là-dessus, mais tandis que je prenais ses constantes, elle a rejeté son dîner par terre. C'est là que j'ai enfin soupçonné une éventuelle grossesse. Je lui ai demandé si elle avait des nausées, elle m'a dit oui sur le bout des lèvres, je lui ai demandé si elle avait du retard, elle s'est montrée évasive à ce sujet, je lui ai demandé s'il y avait des odeurs ou de la nourriture qu'elle avait du mal à supporter, elle a confirmé en me livrant des exemples sans se douter que ça alimentait mon hypothèse, et pour ce qui est des autres symptômes, elle n'en avait pas. Mais ceux qu'elle avait ont suffi à me faire aller chercher un test urinaire que je lui ai tendu. Elle a tout de suite deviné de quoi il s'agissait et elle m'a direct redonné le test. J'ai alors compris qu'au fond d'elle, elle savait qu'elle était sûrement enceinte, mais qu'elle refusait de l'admettre et d'en avoir la preuve. J'ai dû batailler pour la raisonner et ce n'est qu'après un bon quart d'heure qu'elle a finalement bien voulu effectuer le test. Il s'est révélé positif et ça a été un gros choc pour elle. J'ai su que ça ne servirait à rien de lui parler de potion abortive et d'examens à Sainte-Mangouste, au vu de l'état dans lequel elle était, je l'ai juste informée qu'il allait être urgent d'aller faire une échographie afin d'avoir le stade précis de sa grossesse, elle a acquiescé et elle est partie de l'infirmerie.
Severus soupira.
- Cette année ne nous aura donc fait aucun cadeau, constata-t-il. Mais dans l'histoire, c'est elle qui est la plus à plaindre. Vous avez bien fait de lui avoir épargné tous les détails. Mais pourquoi est-ce si urgent qu'elle fasse une échographie ?
- Car elle ne se souvient pas précisément de la date de son dernier cycle, ce qui est très gênant pour déterminer si elle est dans les temps pour avoir recours à la potion abortive… Et pour être tout à fait franche, je crains qu'il ne soit trop tard pour elle, j'en suis même quasiment sûre.
- Elle aussi ? Je sais que dans le cas de Miss Parker, le test était négatif, mais son petit-ami m'a dit qu'elle n'aurait pas pu avorter car elle aurait dépassé le délai, selon elle…
- Oui, nous avions traité ensemble ce qui avait causé son retard, qui était de six à sept semaines, et elle croyait que la potion abortive était à prendre jusqu'à la fin de la sixième semaine, alors qu'elle peut être prise jusqu'à la fin de la septième semaine en cas d'incertitude, comme c'était le cas pour elle. Six semaines est préférable, mais sept semaines est autorisé. Pas plus, sinon ça devient illégal et dangereux. Et elle m'a bien dit qu'elle n'avait pas plus de sept semaines de retard, que ça devait être un peu moins, donc si elle avait été enceinte, elle aurait pu avorter par le biais de la potion. Cela n'a pas été nécessaire, heureusement. Mais pour ce qui est de Miss Turpin, ce qui m'interroge, c'est que la potion a rapidement viré au vert quand j'ai plongé la bandelette dedans. Il y a tout de même eu le petit temps de latence habituel, mais il était bien moins long que lorsque le résultat est négatif ou que l'élève n'en est qu'au tout début de la grossesse…
Severus grimaça.
- En effet, j'ai bien peur comme vous que Miss Turpin ne soit plus dans les temps pour avorter… Et c'est terrible, parce que si cela s'avère exact, elle n'aura même pas eu le droit de décider… Bon, le seul moyen d'être fixés, c'est de prendre un rendez-vous pour une échographie à Sainte-Mangouste. Je verrai cela au plus vite avec Sirius, le directeur de maison de Miss Turpin. Il tenait à ce que je le tienne au courant lorsque je saurais de quoi souffre son élève, eh bien il va déchanter quand je vais le lui annoncer… C'est sa première année d'enseignement, et il a déjà une élève enceinte, soit l'un des cas que redoutent le plus les professeurs…
- Il aura eu une année chaotique jusqu'au bout, conclut Poppy avec empathie. Mais il va réellement falloir réintégrer des heures d'éducation sexuelle dans les emplois du temps des élèves. Il y a vingt ans, j'avais beaucoup moins d'élèves enceintes ! Aujourd'hui, plus de la moitié des élèves de quinze ans ignorent la formule du sort de protection, il y en a même qui ignorent son existence, les filles ne sont absolument pas au point sur leurs cycles, bon nombre d'entre elles ne prennent pas la potion de contraception car elles n'en ont jamais entendu parler… Bon, parmi tous ces élèves, il y a un assez gros pourcentage de nés-moldus et de Sang-Mêlés dont le sang sorcier n'est que très récent dans la famille, ce qui explique ces lacunes. Ce qui nous amène à un autre problème : le manque flagrant de connaissances de ces catégories d'élèves sur le monde sorcier… Ça vaut pour le sort de protection et la potion contraceptive sorcière, mais pas que. Je reçois pas mal d'élèves de cinquième, sixième et septième année qui sont angoissés car ils n'ont aucune idée de ce qu'ils vont faire plus tard, et ça me désole car ça pourrait être facilement évité en les éclairant sur les métiers du monde sorcier dès la deuxième ou troisième année… J'ai cru apprendre que vous aviez soulevé ces problèmes et bien d'autres encore, et je vous en remercie.
- Cela me désole autant que vous, il m'était inconcevable de laisser les choses traîner ainsi alors que j'étais en mesure d'y remédier… C'est ce que j'ai fait et je peux vous assurer que les élèves seront bien mieux informés dès la prochaine rentrée.
- Ça, c'est une bonne chose. Je ne vais pas vous embêter plus longtemps, je vous ai donné du travail avec cette potion abortive à concocter, et j'en suis navrée, j'aurais préféré ne pas avoir à le faire et à vous ennuyer avec ça, mais…
- Vous ne m'ennuyez pas du tout, cela doit être fait, et je vais m'y mettre dans les plus brefs délais, affirma Severus.
- Merci, Severus. J'y vais, j'ai des patients qui m'attendent à l'infirmerie. Passez une bonne soirée.
Severus souhaita de même à Poppy qui s'en alla. Severus referma la porte et poussa un autre soupir. Il avait du pain sur la planche ! Aussi se rendit-il immédiatement à son laboratoire. Il allait sûrement préparer cette potion pour rien, mais il subsistait un espoir que Miss Turpin puisse encore avorter… Elle n'allait peut-être pas avoir envie de le faire, mais si c'était son choix, il fallait que Poppy ait la potion sous la main. En réalité, il y en avait deux à prendre, l'une après l'autre, avec un délai strict à respecter entre chacune d'entre elles. Mais tout cela serait expliqué en temps voulu à Miss Turpin, soit par Poppy, soit par Severus, en fonction de celui ou celle qui accueillerait la jeune fille. Severus s'attela à la fabrication de ces potions, et ce ne fut que lorsqu'elles furent prêtes qu'il s'aperçut qu'il n'avait pas dîné, ayant complètement occulté l'heure de son esprit. Ce fut son ventre affamé qui lui signala cet oubli, mais en voyant qu'il était plus de vingt-deux heures, Severus pensa qu'il aurait pu se manifester plus tôt… Il fut obligé d'aller aux cuisines, ce qu'il n'aimait pas faire du tout, mais là, c'était l'unique solution qu'il avait… Une fois dans l'antre des elfes, il reconnut celui qui s'avança vers lui et qui allait probablement le servir. C'était celui que Harry avait libéré trois ans auparavant et qui se démarquait de par ses tenues extravagantes et hautement colorées. Severus se vit offrir un repas plus que généreux et qui avait l'air succulent. Il s'y attaqua dès qu'il fut de nouveau dans ses appartements. Et il ne fut pas déçu. Il mangea avec appétit et profita de ce moment qui eut le mérite de le délasser de la journée très mouvementée qu'il avait eue…
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(dimanche 16/06) POV Justin
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Lorsque Justin descendit à sa salle commune ce matin-là, il eut la surprise de constater que Hannah et Susan étaient déjà debout :
- Ouah, vous avez été encore plus matinales que moi…
- Hé, ce n'est pas tous les jours que l'on revoit son meilleur ami après plus de deux mois d'absence, répliqua Hannah. Il était hors de question de le louper, et comme il sera là vers neuf heures, d'après ce qu'il a écrit dans la lettre que tu as reçue avant-hier, on s'est réveillées à sept heures et demie et on est aussitôt allées manger afin d'être sûres d'être là quand il arrivera. Ce qui risque de ne pas être ton cas si tu vas à la Grande Salle maintenant…
- Non, soit j'irai plus tard, soit je sauterai exceptionnellement le petit-déjeuner.
- Justin, qu'est-ce que t'a dit le professeur Snape ? gronda Hannah. De ne plus sauter aucun repas ! C'est comme ça que tu vas accueillir Ernie ? En replongeant dans tes vieux travers ?
Justin leva les yeux au ciel.
- Ne mélange pas tout, Hannah, ce n'est pas pour réviser ou pour perdre du poids que je veux sauter le p'tit dèj', mais pour ne pas manquer Ernie. Ça n'a rien à voir avec une quelconque obsession.
- Mmmh… Y a intérêt à ce que ce soit la seule fois jusqu'à ce qu'on quitte Poudlard.
- Oui, maman, singea Justin. Après, peut-être qu'Ernie n'aura pas mangé non plus ce matin et qu'il voudra aller à la Grande Salle…
- C'est possible, oui. On le saura dans un peu moins d'une demie-heure, signala Susan.
- J'ai hâte qu'il soit là, révéla Hannah. Ça fait trop longtemps que je ne l'ai pas vu… Vous me direz, ça ne fait que deux mois et demi, soit presque autant que lors des vacances d'été, mais…
- Ce n'est pas pareil, compléta Justin. Les vacances, c'est les vacances. Être loin d'un ami durant les vacances, c'est différent d'être loin d'un ami à Poudlard alors qu'on devrait être avec lui…
- Exactement, approuva Hannah. Surtout qu'on va le voir même pas deux semaines et qu'ensuite on sera de nouveau séparés pendant deux mois de lui…
- C'est pour ça qu'il faut profiter au maximum de ce temps qu'on aura avec lui, conseilla Justin. Ce sera plus faisable quand on aura eu les potions, l'histoire de la magie, nos examens d'options et nos épreuves pratiques, on sera relativement libres jusqu'à ce qu'on parte de Poudlard.
- Perso, pour ce qui est de la pratique, je n'ai plus que celle de sortilèges à passer, j'ai déjà eu celle de Défense Contre les Forces du Mal et de métamorphose, précisa Hannah.
- Idem pour moi, annonça Susan.
- La chance, j'ai encore tout à faire, soupira Justin. Mais oublions ça pour le moment. Sinon je vais stresser et je ne vais pas être dans les bonnes conditions quand Ernie sera là.
- Tu as raison. Franchement, c'est cool qu'il ait été autorisé à retourner à Poudlard.
- C'était sûrement ce qu'il y avait de mieux à faire pour son bien, estima Susan. S'il n'était revenu qu'à la rentrée, trop de temps se serait écoulé depuis son accident, il aurait pu être mal à l'aise en se retrouvant d'un coup au beau milieu de plus de deux cent cinquante élèves et il aurait pu avoir plus de difficultés à se réintégrer.
- C'est vrai, admit Hannah. Plus on attend, plus c'est dur, c'est bien connu… Mais j'ai l'impression que ça fait une éternité que je ne l'ai pas vu ! Qu'est-ce que ça doit être pour toi, Justin… Ah mais non, j'oubliais que tu étais allé lui rendre visite à Sainte-Mangouste ! J'aurais bien aimé y aller, moi aussi, mais tu étais prioritaire. Car c'est pour toi que c'est le plus compliqué, cette situation. Ernie, c'est notre meilleur ami à tous les trois, c'est notre camarade de classe et notre camarade de maison, mais pour toi, Justin, c'est également ton camarade de dortoir… Avant, tu étais littéralement vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec lui… C'est normal que ce soit toi qui ait eu l'opportunité d'aller à Sainte-Mangouste. C'était important, pour toi.
- Oui, parce que je n'avais pas eu l'occasion de me réconcilier avec lui avant ce maudit guet-apens, on aurait pu le faire juste après s'il n'avait pas été envoyé à l'hôpital par cet abruti de Milligan… Et puis tant que je n'avais pas eu de conversation sérieuse avec Ernie et que je n'avais pas eu la preuve visuelle qu'il allait bien, il m'était impossible de me concentrer pleinement sur mes études.
- Ouais, et résultat, quelques semaines plus tard, tu étais trop à fond dans tes études… C'est tout ou rien, avec toi, en fait, railla gentiment Hannah.
- La demie-mesure et moi, ça fait deux, plaisanta Justin. Oh là là, il commence à y avoir un peu trop de monde… On est dimanche, pourquoi ils se lèvent tous hyper tôt ?!
- Il est quand-même huit heures quarante-cinq, ce n'est pas si tôt que ça, même pour un dimanche, objecta Susan. Mais peu importe l'heure où ils se lèveront, ce sera trop tôt pour toi car tu préférerais qu'on soit seuls quand Ernie sera avec nous… Mais on ne peut pas empêcher les autres de flâner un peu dans la salle commune avant d'aller prendre leur petit-déjeuner…
- Mmmh, j'espère juste que l'apparition d'Ernie ne créera pas un mouvement de foule avec des cris et du bruit à outrance… Après tout, c'était l'ancien préfet, et il était très apprécié en tant que tel par les petits…
- On interviendra s'il y a trop d'agitation, tempéra Hannah.
- Oui, il faut penser avant tout à Ernie. S'il y a trop de bruit, ça risquerait de l'épuiser. Dans la toute première lettre qu'il t'a écrite, Justin, il disait que les médicomages lui avaient recommandé d'éviter les endroits trop bruyants, signala Susan.
- Oui, il avait tout un tas de consignes à respecter…
- Il disait aussi qu'il avait des exercices à faire pour regagner toute la mobilité de son côté droit, si je me souviens bien ? s'enquit Hannah.
- Oui, confirma Justin, d'une voix soudain tendue.
Ce changement ne passa pas inaperçu auprès de Susan :
- Qu'est-ce qu'il y a, Justin ? Ça ne va pas ?
- Si…
- Arrête, tu t'es crispé à l'instant, on l'a bien vu, protesta Hannah. Allez, dis-nous tout.
Justin soupira.
- Quand j'étais avec lui à Saint-Mangouste, il est resté à demi-assis sur son lit, et à part le fait qu'il était légèrement pâle et fatigué et qu'il avait perdu quelques kilos, c'était comme s'il n'avait aucune séquelle. Là, quand il va s'avancer vers nous, on ne pourra pas ignorer sa démarche boitillante… Et je ne me sens pas bien à cette idée. Je vais m'en vouloir, c'est sûr, alors que j'ai fait un gros travail avec le professeur Snape pour me débarrasser de cette culpabilité qui n'a pas lieu d'être…
- Ce ne sera qu'éphémère, ce sentiment de culpabilité, apaisa Susan. Il va vite s'en aller. Tu ne peux rien faire pour y échapper, de toute façon. Il va s'imposer à toi et tu devras faire avec. Mais il ne va pas rester très longtemps, parce qu'au fond de toi, tu sais que tu n'y es pour rien. Tu es une victime, comme Ernie.
Justin hocha la tête.
- Merci, Susan. Je suis bien conscient de tout ça, mais parfois, la négativité nous rattrape…
- Jette-lui un sort mental, à cette négativité, combats-la, conseilla Hannah avec force. Un bon petit sortilège d'expulsion et…
Hannah s'interrompit brusquement en braquant son regard sur la porte de la salle commune. Justin l'imita, croyant qu'Ernie était là, mais ce n'était qu'un élève de première ou deuxième année dont il n'avait pas le nom qui venait de pénétrer dans l'antre des Poufsouffle.
- Raté, ce n'est pas lui, s'amusa Justin.
- Ça aurait pu, se justifia Hannah. Il est bientôt neuf heures.
- Il ne sera peut-être pas là à neuf heures pile, prévint Justin.
- Ernie est quelqu'un de ponctuel, s'il a dit qu'il serait là à telle heure, il sera là à telle heure, attesta Hannah.
Selon Justin, il y avait plein de choses qui étaient susceptibles de mettre en retard la plus rigoureuse des personnes, mais il garda cette réflexion pour lui, ne désirant pas contrarier Hannah qui, de toute manière, n'était pas prête à entendre ses arguments. Il était cependant assez surpris par son attitude : elle avait toujours défendu ses amis, mais là, il semblait à Justin qu'elle serait capable de sauter à la gorge de quiconque prononcerait un mot de travers sur Ernie… Elle paraissait encore plus pressée que Justin de revoir leur meilleur ami, et ce n'était pas peu dire, Justin étant déjà impatient au point de se retenir de trépigner sur place ! Hannah avait-elle plus souffert de l'absence d'Ernie que Justin ne l'avait cru ? Cela ne l'étonnerait pas. Entre son traumatisme dû au guet-apens, la thérapie, Théo, les cours, la bande, et la fixette qu'il avait faite sur les révisions, il était fort probable qu'il n'ait pas remarqué le véritable état d'esprit de Hannah… Le fait qu'Ernie lui manquait n'avait pas dû l'aider à cesser de se droguer… La perte de son père lors des vacances de Pâques avait été le déclencheur qui l'avait poussée à engager le dialogue avec un dealer peu après la rentrée. À ce moment-là, cela faisait un peu plus d'une semaine qu'Ernie était à Sainte-Mangouste, et son absence qui se faisait de plus en plus ressentir chaque jour n'avait certainement pas arrangé les choses… Privée de son père et d'un de ses plus proches amis, Hannah avait traversé une période que Justin ne souhaitait même pas de vivre à son pire ennemi, et cela l'avait incitée à faire les mauvais choix. Mais tout cela était derrière elle, désormais, et c'était le principal. Elle allait de mieux en mieux grâce à ses séances de thérapie avec le professeur Snape et le retour d'Ernie allait contribuer à lui remonter le moral. Justin en était là dans ses pensées lorsque le tonneau qui permettait d'accéder à la salle commune s'ouvrit de nouveau. Trois paires d'yeux se portèrent aussitôt vers l'origine du bruit, et un même air radieux se dessina sur les traits des trois amis quand ils aperçurent Ernie dans l'entrée de la salle commune. Justin s'apprêta à le héler, mais il n'eut pas à le faire car Ernie les vit à son tour au bout de quelques secondes. Il sourit, visiblement ému, et rejoignit le trio. Comme Justin s'y était préparé, il clopinait, mais cela demeurait relativement discret. Des exclamations telles que «Oh, voilà Ernie !» ou «Mais c'est l'ancien préfet !» retentirent dans la salle, mais les personnes qui lancèrent ces phrases eurent la décence et le bon sens de ne pas se ruer vers Ernie. Mieux que ça : ils ne bougèrent pas d'un poil. Mais ils durent faire des signes à Ernie car celui-ci fit de même tandis qu'il se dirigeait vers Justin, Hannah et Susan. Une fois devant eux, il s'affala sur un fauteuil. Le trajet l'avait de toute évidence exténué.
- Pardon, on aurait dû s'asseoir plus près de l'entrée, s'excusa Hannah.
- Non, c'est très bien, les médicomages m'ont dit de me déplacer un maximum, il n'y a que comme ça que je ferai des progrès.
- Ah bah on va s'installer encore plus loin, alors ! suggéra Hannah en faisant mine de se lever.
- Non mais n'exagère pas, faut pas abuser non plus, pouffa Ernie. Je n'ai même pas mangé, donc si je fais trop d'efforts, je vais faire un malaise…
- Ça tombe bien, je suis comme toi, je n'ai pas déjeuné, renchérit Justin.
- Cool ! s'écria Ernie. On ira dans la Grande Salle d'ici trois quarts d'heure, si ça te va.
- C'est parfait, ça nous laisse le temps de faire le tour de tout ce qu'on a à se dire…
- Oui, à défaut de ne pas pouvoir faire le tour du château, plaisanta Ernie. Ça m'arrange, en vrai, ça me donne une bonne raison de rester ici…
- Oui, jusqu'à ce qu'on aille manger, rappela Justin.
- Ah oui, j'avais zappé ce détail, alors qu'on l'a mentionné à l'instant… Pourtant, ce n'est pas faute à mon ventre de crier famine ! Mais je n'ai pas envie d'y aller tout de suite, je veux d'abord papoter. Comment ça va, vous, d'ailleurs ? J'ai eu des nouvelles de vous trois par le biais de Justin, mais il y a pas mal de choses qu'on se cache par écrit…
- Si Justin ne te disait que «Susan va bien» dans ses lettres, c'est parce qu'il n'y avait rien d'autre à dire à mon sujet, il aurait été obligé de mentir ou d'inventer, sinon. C'est le néant total, chez moi, en termes de potins, informa Susan avec humour.
- À ce point ? s'intrigua Ernie.
- Oui, mes journées, avant les examens, c'était une routine qui se répétait chaque jour : cours, repas, séances de travail avec Ron, devoirs solo dans la salle commune, petites discussions avec Justin et Hannah, dodo, réveil, et on refaisait tout ce qu'on avait fait la veille… Le week-end, c'était pareil, sauf qu'il n'y avait pas les cours. Du coup, j'étais plus souvent dans la salle commune. Maintenant, avec les examens, c'est différent, les journées ne se ressemblent plus autant, mais ça, tu sais ce que c'est : les horaires qui varient, les révisions de dernière minute, les épreuves pratiques où il faut être devant la salle vingt minutes à l'avance alors que tu ne seras que dix minutes dans la salle… Il n'y avait donc rien de particulier à raconter sur moi. Mais à Poudlard, lorsqu'on n'est pas préfet, qu'on n'est pas membre de l'équipe de Quidditch de sa maison, et qu'on n'est pas en couple, il n'y a pas grand-chose à dire… Mais je ne me plains pas, hein. Ça a du bon, la routine. Ça a un côté rassurant. C'est juste que, parfois, je m'ennuie un peu. Je crois qu'il est temps que je cherche un petit-ami…
- Tu n'as toujours personne en vue ?
- Ben… si, mais il n'est pas libre…
Ernie parut hésiter avant de demander :
- C'est ton binôme ?
Susan acquiesça.
- Ouais, ton coeur n'a pas été très intelligent, il aurait pu choisir quelqu'un de célibataire…
- Oui, et tant qu'à faire, un autre garçon que mon binôme, ironisa Susan. Je suis d'accord avec toi, il a été très bête, pour le coup.
- Hélas, on ne contrôle pas cet organe au niveau des sentiments… Mais à part Ron, personne d'autre ne t'intéresse ? interrogea Ernie.
- Peut-être, mais… je ne suis pas sûre.
- Tu fais référence au même garçon que tu as évoqué lors de l'action vérité ? devina Hannah.
- Oui, comme tu dois t'en douter, je ne suis pas du genre à changer de coup de coeur toutes les deux semaines, souligna Susan. Et puis la situation est assez compliquée comme ça pour qu'un troisième garçon vienne s'ajouter dans l'histoire ! Je deviendrais folle, là…
- Mais c'est qui, ce garçon ? Je n'étais pas là, moi, lors de l'action vérité…
- C'est Seamus, indiqua Susan. J'avais sympathisé avec lui durant une fête à laquelle on était allés. Je ne suis pas autant éprise de lui que je ne le suis de Ron, mais on s'entend hyper bien, il me plaît physiquement, il est drôle, gentil, énergique, il a un avis sur tout, ce qui est super pour parler de tout et de n'importe quoi, ce que j'adore faire… Bref, ça collerait bien, entre nous.
- Eh bien tente ta chance avec lui, encouragea Ernie.
- Je n'oserai jamais, j'aurais trop peur de me prendre un vent, protesta Susan.
- Il t'en mettrait un, selon toi ?
Susan fit une moue. Mais ce ne fut pas elle qui répondit :
- Lors de l'action vérité, Harry a dit qu'il vous avait trouvés très proches, Seamus et toi, pendant la fête qui avait eu lieu quelques semaines plus tôt, et qu'il avait préféré ne pas vous déranger, comme s'il était sur le point d'y avoir quelque chose entre vous… Donc c'est sûrement réciproque, ce que tu ressens pour Seamus, estima Justin.
- Mmmh, je verrai, éluda Susan.
- Bon, et vous, comment ça va ? enchaîna Ernie en s'adressant à Justin et Hannah.
- Un peu comme Susan, déclara Hannah. Moi, ça va bien, je ne suis plus dans les potions droguées, ce que tu as su par Justin, et les séances de thérapie avec le professeur Snape m'aident beaucoup. Ce sont les seules infos que j'ai sous la main. Après, les anecdotes croustillantes, ce sont celles qui sont liées à l'action vérité, mais on te fera le récit plus tard, quand tu ne seras pas pressé par un truc aussi élémentaire qu'assouvir sa faim…
- Et moi, c'est comme Hannah et Susan. Rien de spécial à dire. Enfin, si, mais…
- Plus tard ? supposa Ernie.
- Voilà, confirma Justin.
- Bon, et les examens ? Vous vous en êtes bien sortis ?
Justin, Hannah et Susan partagèrent à tour de rôle leurs impressions sur les examens qu'ils avaient eus, le bilan s'avérant plutôt positif.
- Oh, vous vous êtes bien débrouillés, dans l'ensemble… Vous avez quoi encore, à passer ?
- La théorie de potions lundi matin, la pratique l'après-midi, l'histoire de la magie mardi matin, les options mercredi et jeudi, la pratique de sortilèges pour Susan et moi mardi en fin d'après-midi, et pour Justin, la pratique de Défense Contre les Forces du Mal et de métamorphose mardi après-midi, et la pratique de sortilèges jeudi matin, récita Hannah.
Justin la fixa, choqué.
- Comment ça se fait que tu connaisses autant mon emploi du temps ?!
- Je l'ai retenu en lisant tes convocations, expliqua simplement Hannah. C'est fou comme j'ai plus de mémoire depuis que…
- Oh mais c'est Ernie ! Les gars, y a Ernie dans la salle commune !
Un gros brouhaha suivit ces mots dans les escaliers menant aux dortoirs des garçons. Une dizaine d'élèves de première, deuxième et troisième année dévalèrent les marches et coururent vers la table où étaient assis Justin, Ernie, Hannah et Susan. Ernie eut un mouvement de recul dans son fauteuil quand les plus jeunes lui sautèrent littéralement dessus.
- Hé, oh, on baisse d'un volume, c'est quoi, ces manières, sérieux ?! intervint Hannah en haussant la voix. Laissez-lui de l'air, vous l'étouffez, là !
Un des élèves de deuxième année leva un regard méprisant vers Hannah.
- T'as pas à nous ordonner quoi que ce soit, toi, t'es plus préfète, cracha-t-il.
Justin vit la douleur dans les yeux de Hannah. Mais elle resta digne et, là où trois mois auparavant, elle aurait réagi de façon virulente, elle se maîtrisa et adopta un ton froid, mais égal :
- Oui sauf que là, ce n'est pas la préfète qui te parle, mais l'amie d'Ernie, répliqua-t-elle. Et l'amie d'Ernie sait ce qui est bon pour lui, et ce n'est certainement pas d'avoir dix gamins surexcités dans les pattes. Il est en convalescence, il a besoin de calme, vous allez le fatiguer en lui hurlant dans les oreilles comme ça… Vous avez le droit de manifester votre joie, mais sans lui détruire les tympans, et les nôtres par la même occasion…
- T'es sa mère ou son amie, au juste ? Il a seize ans, hein, si on le gêne, il est capable de se défendre tout seul, rétorqua l'élève de deuxième année.
- Bon, ça suffit, ou tu cesses de faire l'insolent envers Hannah, ou tu déguerpis de la salle commune, décréta Susan.
L'élève ouvrit la bouche, prêt à se rebiffer contre elle aussi, mais il dut se souvenir que c'était elle la suppléante, désormais, la nouvelle préfète étant Sophie, car il se ravisa :
- Pfff, les préfets, ce n'est plus ce que c'était avant… Vous faites pitié, franchement.
Et il s'éloigna sur ces mots.
- Non mais il dit ça comme si ça faisait cinq ans qu'il était là, souffla Ernie, éberlué.
- C'était pour donner l'illusion de ne pas avoir perdu la face, mais c'est raté… En tout cas, bravo à vous deux, les filles. On va manger, Ernie ?
- Oui, avant qu'il ne soit trop tard pour le service du petit-déjeuner ! Ça va être trop long d'attendre jusqu'à midi… Vous venez avec nous, les filles ? proposa Ernie.
- Non, on a mangé à sept heures et demie, nous, mais on remet ça à ce midi, promit Susan.
Justin acquiesça distraitement, ayant remarqué l'étrange silence de Hannah :
- Ça va, Hannah ? s'inquiéta-t-il.
Hannah sursauta légèrement.
- Hein ? Ah euh, oui, oui, j'étais plongée dans mes pensées… Bon, allez-y, les gars, sinon vous allez vraiment devoir patienter jusqu'au déjeuner.
- Oui, on y va, décida Justin.
Ernie et lui se levèrent et quittèrent la salle commune. Sur le chemin conduisant à la Grande Salle, Ernie fit part de sa surprise :
- Dis, elle a changé, Hannah, non ? Déjà, quand elle m'a vu, elle n'a pas bougé, alors qu'avant, elle se serait jetée sur moi à peine j'aurais mis un pied dans la salle… Et quand elle s'est faite alpaguer par l'élève de deuxième année, elle a été très correcte, alors qu'avant, elle aurait carrément insulté l'élève…
- Ce sont ses potions qui font ça, c'est comme un effet secondaire, elles la rendent plus sereine.
- Ok, je comprends mieux. Mais il n'y a pas que ça. Elle m'a aussi semblé plus… protectrice. Elle s'est excusée en premier pour le fait que vous vous soyez installés loin de l'entrée, ce qui n'était pas grave du tout, et elle s'est à moitié transformée en mon garde du corps quand tous les petits se sont précipités vers moi… Elle a toujours été prompte à nous défendre, Susan, toi et moi, mais là, c'est limite si elle sortait les crocs dès qu'on s'approchait un peu trop de moi…
- C'est exactement la réflexion que je me suis faite peu avant que tu n'arrives, j'avais insinué que tu serais peut-être en retard de quelques minutes, et elle a affirmé avec force que tu étais quelqu'un de très ponctuel… J'ai cru un instant que j'avais dit une horreur sur toi tellement elle a mis du coeur à te défendre…
- C'est bizarre, toutes ces facettes de son comportement…
- Oh, je crois juste que tu lui as beaucoup manqué…
- Mmmh, fit Ernie, rêveur.
Justin arqua un sourcil.
- Dis donc, ça n'a pas l'air de te déplaire, qu'elle se préoccupe autant de toi… Tu n'aurais pas trop pris l'habitude d'avoir des infirmières dévouées à tes côtés, par hasard ? se moqua-t-il gentiment.
- Moi ? Pas du tout, prétendit Ernie. Mais j'avoue que c'était bien agréable, à Sainte-Mangouste…
- Tu m'étonnes ! Bon, moi, ça ne m'aurait fait ni chaud ni froid, mais j'imagine que ça devait être cool…
- Oui, ils étaient tous hyper sympa : les infirmiers, les infirmières, les médicomages, les kinémages, les neuromages, ma psychomage…
- Ta psychomage ? répéta Justin.
- Oui, c'est inclus dans le parcours de soins, car ce n'est pas rien, ce qui s'est passé. J'ai dû venir en aide à mon meilleur ami avec qui j'étais fâché, j'ai dû me battre contre des septième année, j'ai été violemment attaqué par l'un d'entre eux qui aurait pu me faire bien plus de mal que je n'en ai eu en m'envoyant ainsi dans le mur, j'ai dû me faire opérer, je me suis réveillé avec des séquelles, même si elles sont bien moins lourdes qu'elles n'auraient pu l'être, j'ai de la rééducation à faire, ce qui est aussi dur physiquement que mentalement parlant, j'ai loupé deux mois et demi de cours, ce qui m'a tenu éloigné autant de temps de mes amis, je vais devoir aller aux rattrapages à cause de ça pour les BUSE, et quand je vais reprendre les cours, je vais devoir me refaire au fait d'avoir plein de monde autour de moi, ce qui va probablement me déboussoler et m'angoisser, et c'est ça qui va être le plus compliqué à gérer… Mais comme j'aurai déjà été suivi depuis quatre mois par une psychomage, je serai préparé, j'aborderai la rentrée avec plus de sérénité, et ce sera moins difficile que si ce n'était qu'à ce moment-là que je me serais résigné à consulter…
- Ça, c'est sûr, approuva Justin. Tu n'auras pas à chercher en urgence une psychomage… Et puis ça t'évitera d'avoir une thérapie avec le professeur Snape. Ça lui fait un potentiel patient en moins, et c'est une bonne chose. Il en a trop, il essaie désespérément de trouver une autre psychomage pour le seconder…
- Ravi de ne pas lui ajouter du travail en plus, s'amusa Ernie. Bon, l'avantage, c'est que j'aurais été sur place pour mes séances, mais ce n'est pas un problème que je doive aller une fois par semaine à Sainte-Mangouste. J'ai une super psychomage, là-bas, avec qui ça se passe super bien, et pour rien au monde je ne me tournerais vers un ou une autre psychomage.
- Tu as bien raison. Elle s'appelle comment, ta psychomage ?
- C'est la psychomage Sanders, révéla Ernie. Elle est spécialisée auprès des personnes qui ont subi un accident qui a laissé des séquelles physiques et mentales plus ou moins importantes. Ça peut être des adultes, comme des enfants, comme des adolescents. Elle travaille en étroite collaboration avec les équipes de soins. Les médicomages s'occupent du côté médical, elle, du côté psychologique.
- Oh, c'est pratique, ça… Elle est adaptée à la perfection à ton cas.
- Oui, et c'est pour ça, entre autres, que ça va tout seul avec elle. Mais c'est fou, car je suis un Sang-Pur et j'ignorais que ça existait, des psychomages comme ça.
- Comme quoi, on n'a jamais fini d'apprendre ! Mais ça me rassure, cette organisation. Tout est fait pour que ton retour à Poudlard se fasse dans les meilleures conditions qui soient. Et je suis heureux que tu sois là, tout simplement.
Ernie sourit, touché.
- Et moi je suis heureux de vous revoir, tous. Je ne suis pas revenu qu'à l'école, je suis revenu chez moi, dans ma seconde maison. Chaque chose que je vais refaire pour la première fois va être un pur régal. Là, par exemple, j'ai très hâte de boire un bon verre de jus de citrouille bien frais, provenant tout droit du potager de Poudlard !
Ce fut sur ces mots que Justin et Ernie pénétrèrent dans la Grande Salle. Ernie fut accueilli comme un roi à la table des Poufsouffle, et son émotion fut tellement expansive qu'elle contamina Justin. Il s'était rarement senti aussi bien. Il avait de nouveau tous ceux qu'il aimait autour de lui, et il avait bien l'intention de profiter de ce bonheur qui lui était offert…
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Voilà pour aujourd'hui ! J'espère que ce chapitre vous a plu ! Petite anecdote : on est en plein dans les BUSE, là, il y a carrément trois ou quatre chapitres qui sont centrés dessus, j'ai une longue liste de tout ce qui va être abordé durant les vacances d'été, eh bah j'ai réussi à oublier les résultats des BUSE ! Ça veut dire que vous êtes en train de lire les épreuves des BUSE et que vous n'aurez même pas le droit de savoir les résultats des élèves de la bande XD Non, en vrai, je m'en serais souvenue, mais ça m'était complètement sorti de l'esprit… En plus, j'ai déjà écrit dans un document les notes de chacun ! C'est ma sœur AliceCullen0027 qui m'a rappelé avant-hier que ce serait quand-même bien de mentionner les résultats des BUSE pendant les vacances… Parfois, je me demande si c'est bien moi l'auteure de ma fic XD (oui, c'est bien moi, nos styles d'écriture sont totalement différents XD) Bon, sur ce, je vous donne rendez-vous le dimanche 11 décembre pour le prochain chapitre intitulé «BUSE, deuxième partie». Comme pour la première partie, ça ne portera évidemment pas que sur les BUSE, il y aura quelques petits trucs à côté :) D'ici là, je vous souhaite de passer deux bonnes semaines, portez-vous bien, persévérez, peu importe où vous en êtes (oui, j'avais envie de vous envoyer de bonnes ondes *-*), je vous embrasse fort, et plein de bisous tout le monde !
