Chère Nantha-senpai,


Robin passa à grandes enjambées devant l'embrasure de la porte, pressé de partir à la rivière pour retrouver ses amis Pierre, Matthew, Henry et Thomas. Ils avaient grand envie de pêcher, même si, à chaque fois, Robin et Matthew, les deux plus impatients, finissaient immanquablement par en avoir assez d'attendre et commencer à se bagarrer.

En dépassant la pièce, le jeune noble entendit soudain un petit gazouillis s'en échapper. Il s'arrêta net, hésita, secoua la tête, faillit continuer, mais finalement, il rebroussa chemin et retourna à grandes enjambées vers la chambre. Un couffin était posé au milieu de la pièce, et une vieille femme dormait tout son soûl dans une chaise à bras juste à côté. Robin s'avança résolument vers le berceau et s'y pencha. Le bébé qui se trouvait couché à l'intérieur, tout blond comme lui, poussa un petit cri ravi en le voyant et tendit ses petites mains dans sa direction.

"Aujourd'hui, Gilles, je t'emmène pêcher, décréta sévèrement le jeune noble en saisissant le bébé pour le soulever hors du couffin."

L'enfant cria de nouveau, enchanté, et Robin se dépêcha de l'emporter hors de la pièce avant que quelqu'un le voie.

Il n'avait aucune envie qu'on pense qu'il s'attachait à son demi-frère. Ce bébé que son père avait eu en oubliant bien vite sa première épouse dans les bras d'une autre femme...

Le jeune noble sortit en coup de vent du château en tenant l'enfant qui riait aux éclats, puis qui cligna des yeux, surpris par la lumière du soleil.

"Ahhhh, babilla-t-il en essayant d'attraper l'astre qui brillait dans le ciel.

-Je sais, c'est pour ça que nous allons à la rivière, rétorqua Robin."

Ses amis n'étaient pas encore arrivés, alors il retroussa une partie des langes de l'enfant et lui fit tremper ses petits pieds dans le courant. Les rayons du soleil qui faisaient briller l'eau claire fascinèrent le petit garçon, qui observa son reflet avec de grands yeux surpris, puis sursauta lorsque de petits poissons filèrent à toute vitesse entre ses petites jambes.

"Ahhhh ! gazouilla-t-il en se tournant vers Robin pour les lui montrer de sa petite main.

-Non, ceux-là sont trop petits pour qu'on les pêche, lui répondit son frère en haussant les épaules.

-Ahhhh ?"

Bébé Gilles le dévisagea, intrigué, puis fourra ses petits doigts dans sa bouche. À ce moment-là, un bruit de chevaux se fit entendre, et Robin retira précipitamment l'enfant de la rivière. Il le déposa dans l'herbe à côté de lui, et quand Thomas lui demanda, hilare :

"Eh là, brave nourrisse, j'espère que l'on ne vous dérange pas !",

il répliqua, blasé :

"C'est Père qui m'y a obligé".

Ses amis éclatèrent de rire et lui tapèrent l'épaule, compatissants. Seul Pierre haussa un sourcil et se contenta de sourire. Et bébé Gilles passa la journée à essayer d'attraper les petits poissons qui passaient dans le courant, comme son grand frère.


Bisous,

Daisy.