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Eh oui, encore une Chronique rattachée au même chapitre, vous avez droit à une double-dose de bonus ;)

Chronique tirée du premier tome, écrit par Drew Karpyshyn et traduit par Fabrice Joly.


18 – Retourner sa veste

Cycle I – Tome 3 : Dessel (#7)
Rattachée au chapitre n°46 : Conflit de méthodes


Sirak se déplaçait avec précaution. Il avait passé les dernières trente-six heures dans une cuve de bacta, et même s'il était maintenant complètement guéri, son corps réagissait encore instinctivement aux blessures que lui avaient infligées le sabre de Bane. Il ramassa lentement ses effets personnels, pressé de retrouver l'environnement familier de sa chambre et de quitter la solitude du centre médical.

Un droïde médical s'approcha de lui et lui remit un pantalon, une chemise et une robe noire d'apprenti. Les vêtements étaient imprégnés d'une odeur de désinfectant, l'usage voulant que tous les objets soient stérilisés avant de pénétrer dans le centre médical. Les vêtements avaient beau être à sa taille, il sut qu'ils étaient neufs en les enfilant.

À l'exception des droïdes médicaux, il n'avait vu personne depuis qu'il avait été introduit, inconscient, au centre après sa défaite dans le cercle. Personne n'était venu prendre de ses nouvelles pendant qu'il flottait dans le liquide de cicatrisation – ni Qordis ni Kas'im, ni même Llokay ou Yevra. Il ne leur reprochait pas.

Les Sith méprisaient la faiblesse et l'échec. À chaque fois que quelqu'un essuyait une défaite dans le cercle, il était rejeté avec la honte comme seule compagnie, jusqu'à ce qu'il soit suffisamment fort pour reprendre ses études. Cela arrivait tôt ou tard à chacun des apprentis... sauf que cela n'était jamais arrivé à Sirak auparavant.

Il avait été invincible, intouchable. Il était le meilleur apprenti dans chaque discipline. Il connaissait les rumeurs à son sujet. Ils l'appelaient le Sith'ari, l'être parfait – sauf que plus personne ne le nommerait ainsi désormais, pas après ce que Bane lui avait infligé.

Il poussa la porte et découvrit Githany qui l'attendait dans le couloir.

- Que veux-tu ? lui demanda-t-il avec méfiance.

Il savait qui elle était, mais il ne lui avait jamais parlé. Lors de son arrivée à l'Académie, il l'avait considérée comme une menace potentielle. Il l'avait observée, et il avait vu qu'elle en faisait autant, chacun mesurant et jaugeant l'autre afin de déterminer ses atouts et ses faiblesses. Sirak se méfiait de tous ses rivaux potentiels – ou du moins, le croyait-il, car l'élève qu'il craignait le moins l'avait finalement vaincu.

- Je suis là pour te parler, répondit-elle. À propos de Bane.

Il se contracta involontairement à la mention de son nom, puis s'en voulut aussitôt d'avoir réagi de la sorte. Si Githany l'avait remarqué, elle ne laissa rien paraître.

- J'aimerais connaître tes plans. Comment vas-tu gérer la situation ?

Sirak se força à invoquer son arrogance passée, et y parvint en lui adressant un sourire méprisant.

- Mes plans ne regardent que moi.

- Tu vas te venger ? le pressa-t-elle.

- C'est une possibilité, reconnut-il.

- Je peux t'aider.

Elle s'avança d'un pas. Sirak vit dans ce simple mouvement que Githany se déplaçait avec la sensualité d'une danseuse Zeltronne.

- Pourquoi ? demanda-t-il en plissant les yeux.

- J'ai aidé Bane à te vaincre, avoua-t-elle. Dès que je l'ai vu, j'ai réalisé son potentiel. Comme Qordis et les autres Maîtres s'étaient détournés de lui, je lui ai enseigné secrètement leurs leçons. Je savais que le Côté Obscur était puissant en lui, plus puissant qu'en moi ou qu'en toi, et peut-être même qu'en n'importe lequel de nos Maîtres.

Sirak ne comprenait pas où elle voulait en venir.

- Tu n'as pas répondu à ma question. Tu as obtenu ce que tu désirais de Bane. Pourquoi m'aider maintenant ?

- Je me suis trompée au sujet de Bane, dit-elle en secouant la tête. Je croyais qu'en l'aidant à accroître ses pouvoirs, il embrasserait le Côté Obscur. J'aurais pu alors apprendre à ses côtés, et gagner moi aussi en puissance, mais il est incapable de céder complètement. Tout le monde pense que sa victoire sur toi est un triomphe. Moi, j'y vois son échec.

Githany jouait avec Sirak, elle se moquait de lui – et il n'aimait pas ça.

- Personne ne m'avait jamais battu dans le cercle avant Bane ! lança-t-il d'un ton cassant. Comment peux-tu appeler ça un échec ?

- Tu es toujours en vie, répondit-elle simplement. Lorsque le moment était venu de t'abattre et de mettre fin à tes jours, il a hésité. Il ne pouvait pas se résoudre à le faire. Il a été faible.

Intrigué, Sirak se tut et attendit qu'elle poursuive.

- Il a comploté et travaillé des mois durant pour prendre sa revanche, lui expliqua-t-elle. Sa haine lui a donné la force de te surpasser... mais au dernier moment, il s'est montré miséricordieux et t'a laissé vivre.

- Je l'avais moi aussi épargné à la fin de notre premier duel, rétorqua Sirak.

- Mais il ne s'agissait pas de commisération te concernant, c'était du mépris, car tu pensais l'avoir complètement détruit. Si tu avais su qu'un jour il te défierait à nouveau, tu l'aurais tué, et cela, malgré les règles de l'Académie. Tu l'as sous-estimé, une erreur que tu ne commettras pas une seconde fois. Bane, lui, ne te sous-estime pas. Il sait que tu es suffisamment fort pour représenter une menace. Il t'a cependant laissé en vie, en sachant qu'un jour, tu chercherais à te venger. Il est soit faible, soit idiot, conclut-elle, et je ne veux pas être liée à un tel individu.

Bien que son discours soit en partie exact, Sirak ne semblait pas convaincu.

- Tu as tendance à changer de camp bien rapidement, Githany, même pour une Sith.

Elle demeura silencieuse un long moment pour trouver la réponse adéquate. Elle baissa subitement le regard, puis releva la tête un instant plus tard, la honte et l'humiliation visibles dans ses yeux.

- C'est Bane qui a mis fin à notre union, pas moi, admit-elle en s'étranglant presque. Il m'a abandonnée, poursuivit-elle en ne cachant pas son amertume. Il a quitté l'Académie. Il ne m'a pas expliqué pourquoi, et il est parti sans même me dire au revoir.

Sirak comprit tout à coup la présence de Githany dans l'aile médicale. Il comprit son désir soudain de se joindre à lui pour faire tomber son ancien allié. Githany avait l'habitude de contrôler le cours de son existence, de maîtriser son environnement, et de décider de mettre fin aux choses. Elle n'aimait pas du tout se retrouver de l'autre côté.

Comme le disait si bien la vieille expression corellienne : Craignez la colère d'une femme trompée.

- Où est-il parti ? demanda Sirak.

- Les apprentis racontent que Qordis l'aurait envoyé dans la Vallée des Seigneurs Noirs.

Sirak faillit s'exclamer « Alors, il est déjà mort ! », mais il se souvint de suivre le conseil de Githany et de ne jamais plus sous-estimer Bane.

- Tu penses qu'il va revenir.

- J'en suis certaine.

- Alors, nous serons prêts, lui promit Sirak. Lorsqu'il reviendra, nous le détruirons.