[RàR]

Kipoki : Je te remercie beaucoup pour ton retour! Je suis vraiment contente de savoir que cela plait :)

L'idée en effet est de pouvoir conclure la trilogie donc la troisième partie aura normalement une fin (l'intrigue de la troisième partie sera cependant massivement modifiée pour être plus crédible).


Chapitre 5

Fin octobre/début novembre


Libellule avait apporté la réponse de mon père dès le lendemain matin – je m'en voulais un peu de l'avoir probablement réveillé en pleine nuit, mais je préférais lire la lettre seule et au calme dans la salle commune. Je l'avais donc rangé dans ma poche en attendant un meilleur moment.

J'étais épuisée, n'ayant que peu fermer l'œil de la nuit, mais je tenais au moins sur mes deux jambes. Alice était si fatiguée qu'elle essayait de se tenir à tout ce qu'elle pouvait pour ne pas laisser son corps s'affaler sur la table – ou le sol. C'était à la fois triste et drôle à voir. Pour ne rien arranger, nous avions cours de Défense contre les Forces du Mal. Un cours qui demandait tellement d'attention et de vigilance que je n'avais aucune idée de la façon dont nous pourrions réellement y participer. Nous étions cependant extrêmement nombreux à préparer le cours pour nos A.S.P.I.C.S et j'espérais que Clakdant ait la bonne intuition de faire participer d'autres que nous aux exercices pratiques. Nous devions nous entraîner dans les enchainements informulés – se protéger, désarmer, contre-attaquer sans un mot qui indiquerait notre prochain mouvement à l'adversaire.

- Gray, murmurer dans cet exercice est l'équivalent de tricher, tonna Clakdant.

C'était le troisième élève de suite qui tentait de murmurer les sortilèges plutôt que de ne pas les formuler. Puis, évidemment, Clakdant prononça mon nom.

- Jonsson et Carter.

Je retins un soupir et m'avançai. Je préférais sérieusement les entrainements de la salle sur demande ; au moins, je n'avais pas eu besoin de me donner en spectacle. Les pratiques pédagogiques n'avaient pas franchement évoluées après la guerre mais au moins nous avions le droit à des situations plus réalistes – comme des « duels » impliquant trois sorciers et non uniquement deux. Les élèves étaient plus attentifs ; à ce cours, en tout cas.

- J'attaque Carter, dit le professeur. Carter se protège. Elle désarme Jonsson. Et ensuite elle m'oppose une contre-attaque.

Au moins, j'avais un rôle particulièrement secondaire. Rester plantée au milieu de la salle était quelque chose dont j'étais tout à fait capable, même dans l'état dans lequel je me trouvais.

Le professeur vérifia que nous étions toutes les deux prêtes avant de lancer son attaque contre Carter. Le protego de la Gryffondor fut efficace contre Clakdant mais je ne vis pas l'expelliarmus censé me désarmer. À la place, un rayon rouge s'abattit juste au-dessus de moi. Stupefix. Une des étagères de l'armoire derrière moi s'écroula et je m'écartai rapidement du point d'impact, le cœur soudainement aux abois. Je ne comprenais pas bien ce qu'il se passait mais mon corps, lui, avait réagi ; couvert par les rires de quelques Gryffondors.

- Il y a quelque chose dans le terme de « désarmer » qui est difficile à comprendre, jeune fille ? gronda le professeur en se tournant vers Carter. Si je vous ai demandé de désarmer les élèves et de me contre-attaquer, moi, insista-t-il, ce n'est pas pour rien. Ce que vous faites est complètement irresponsable. Miss Jonsson aurait pu finir la tête contre l'armoire si votre sortilège avait touché sa cible. Vous étiez à deux doigts de la catastrophe, Miss Carter, vous pouvez remercier Miss Parker.

Alors que je reprenais tant bien que mal ma respiration – et mes émotions, celle-ci s'arrêta à nouveau. Je détachai mes yeux des Gryffondors qui gloussaient toujours pour les poser sur la Serpentard. Il était vrai qu'elle avait sa baguette en main.

Je sentis la main d'Alice sur mon épaule.

- Ca va ?

- Ouais, répondis-je les yeux toujours fixés sur la Serpentard.

Parker rangea sa baguette à l'intérieur de sa cape sans même un regard pour la scène qui se jouait face à elle. Ni Carter, ni Clakdant, ni moi n'avions son attention. On aurait presque dit qu'elle fuyait les regards de ses camarades ; ses yeux s'étaient posés sur une vieille table au fond de la classe pour ne plus bouger.

- Ta copine de potions vient de t'éviter un sacré mal de crâne, grimaça Alice.

- Ouais, répétai-je.

- Moins 30 points pour Gryffondor, reprit le professeur alors que j'essayais de faire sens de la situation. 20 points pour les actions complètement irréfléchies et inadmissibles de Miss Carter et 10 points pour l'approbation générale de vos collègues. Miss Parker, dit-il en se tournant à son tour vers la Serpentard qui ne réagit pas pour autant, très beau réflexe, c'est à s'en demander comment vous avez vu le coup venir. 10 points pour Serpentard pour avoir jugé bon d'intervenir et 10 points pour la maîtrise parfaite d'un désarmement informulé. Nous allons nous arrêter là pour aujourd'hui et si cela déplaît à certains d'entre vous, ajouta-t-il alors que des soupirs se firent entendre de part et d'autre de la salle, cela vous apprendra à faire n'importe quoi dans mon cours.

A peine eut-il fini sa phrase que je m'immisçai dans la foule d'élèves mécontents pour rejoindre la Serpentard seulement pour constater qu'avait déjà quitté la salle de classe.

- Je suis désolé Eyrin, dit soudainement James à mes côtés.

Je ne l'avais pas entendu.

- De quoi est-ce que tu parles ? demandai-je, la tête ailleurs.

- Pour Tala. Elle a dû être… jalouse de nous voir ensemble au lac. Ca lui ressemble assez, d'être un peu sanguine.

- Et moi qui croyait que c'était parce que j'avais empêché les Gryffondors d'humilier des élèves l'autre fois.

- Eh bien… Vu comment les Gryffondors ont ri, c'est probablement un mélange des deux. Je lui parlerai.

Je n'avais pas grand-chose à faire de Carter et ne comprenait pas réellement ce que James tentait de me dire. Je ne me souvenais pas d'une seule fois où Parker s'était interposée de cette manière - et des élèves qui faisaient n'importe quoi en Défense contre les Forces du Mal, il y en a toujours eu. C'était probablement l'adrénaline qui faisait toujours son effet, mais mon cœur tambourinait contre ma poitrine et je ne pouvais écouter un seul mot de ce que le Poufsouffle me disait à présent.

Encore un peu sonnée, je profitai de la demi-heure de libre que Clakdant nous avait indirectement octroyée pour rejoindre la salle commune. Une fois installée sur mon lit, j'entamai la lecture de la lettre de mon père. Au moins, il pouvait me calmer.

« Eyrin, ma chérie,

Libellule était effectivement de très mauvaise humeur, mais les céréales l'ont adoucie.

Tu as le droit d'être en colère, ma chérie. Il n'y a rien de mal à ça.

Dans ce genre de situations, chacun fait comme il peut. On en a déjà discuté. Vos professeurs ont essayé de vous protéger à leur manière. Tu ne sais pas ce qu'il s'est passé pour eux, les choix qu'ils ont dû faire ou non. Tu ne sais pas si les choses auraient pu être bien pires qu'elles ne l'ont étés. A posteriori, il est toujours facile de savoir ce qu'il aurait fallu faire. Mais sur le moment, ils ont peut-être cru qu'ils allaient empirer les choses pour vous s'ils avaient un rôle plus actif. Peut-être qu'ils avaient peur qu'en réagissant trop fortement contre les Carrows, ceux-ci les virent. Ils vous auraient laissé seuls, sans personne pour veiller sur vous, et ils auraient été remplacés par d'autres types du genre des Carrows.

Tu as le droit d'être en colère et ta colère est tout à fait légitime. Mais tu ne peux pas juger sans informations, ma chérie. La situation que tu as vécu n'est pas la même que celle que tes professeurs ont vécu. Tu ne sais pas tout.

Pour le reste, je pense que tu devrais parler à Flitwick et à McGonagall. Si tu penses vraiment que les choses risquent de dégringoler, il faut leur en parler. Vous n'avez pas à porter ce poids seuls et je ne pense pas que c'était ce qu'entendait McGonagall dans ses consignes. N'oublies pas : la communication est la clé. C'est quand on arrive plus à se faire confiance et à communiquer correctement que les choses atteignent un point de non-retour. Même si tu es en colère contre eux, tu peux toujours leur parler. Ils comprendront que tu sois en colère et ce n'est pas très important. Ce qui est important, c'est ce que tu leur dis.

Si malgré tout tu n'oses pas leur en parler, je peux prendre rendez-vous avec la Directrice pour lui parler de tout cela. Si les septièmes années ont des difficultés, elle doit être au courant. Ce n'est pas en taisant tout cela que les « adultes » vont pouvoir vous aider, ma chérie. Vous ne pouvez pas ne pas leur parler mais vous attendre tout de même à ce qu'ils vous aident. Ca ne fonctionne pas comme ça. Prendre ses responsabilités, c'est aussi accepter ses propres limites et demander de l'aide quand nécessaire.

Nous avons déjà discuté de la guerre, ma chérie. Je sais que tout cela est injuste et je sais que tu es en colère. Mais la réalité, c'est que c'est la guerre qui est injuste et tragique. Aucun adulte ne veut se voir obligé d'envoyer un enfant combattre, mais la guerre est ainsi faite que nous n'avons pas le choix. C'est bien pour cela que nous devrions tout faire pour ne jamais en arriver-là : pour que jamais vos parents ne soient obligés de vous demander quelque chose que l'on ne devrait pas vous demander. Ce qui s'est passé à Poudlard ne sera jamais juste pour qui que ce soit. Il va falloir que vous l'acceptiez.

En ce qui concerne le rôle des préfets, c'est également quelque chose dont tu devrais discuter avec la Directrice de Poudlard. Dans tous les cas, ce n'est pas pareil que la brigade inquisitrice, ma chérie. Les élèves qui y ont été savaient ce que la brigade voulait faire et savaient en faveur de quoi ils s'engageaient. Ce dont tu parles, c'est d'une situation où les ordres changent subitement de nature. Face à ce genre de situations, il y a des gens qui ont les ressources pour s'opposer, et d'autres qui ne les ont pas. Mais tu ne peux pas savoir si tu seras des uns ou des autres avant d'y être confrontée. Tes ressources sont influencées par le contexte et tu ne peux pas être sûre que tu les auras entières au moment où il te faudra dire non. C'est pour ça qu'il ne faut pas juger ceux qui n'ont pas eu les ressources à un moment donné, ma chérie. Le problème, c'est la guerre, le problème, c'est la tyrannie des Carrows sur Poudlard qui a empêché certains d'entre vous d'avoir accès à toutes leurs ressources. Pas les actions des uns et des autres.

De manière générale, c'est le risque qui vient avec toute responsabilité : que quelqu'un utilise ce pouvoir pour demander quelque chose qu'il ne devrait pas demander. Ce n'est pas parce que tu es un maillon de la chaîne et que tu as l'impression de devoir obéir que tu dois le faire aveuglément. Et pour t'avoir élever toutes ces années ma chérie, je pense qu'on sait tous les deux que tu n'es pas du genre à suivre le cadre qui t'est imposé sans réfléchir. Tu n'as pas de soucis à te faire de ce côté-là.

Si cela t'inquiètes, je peux me renseigner auprès des vieilles amies de maman. Avoir des informations au sujet de cette maladie moldue te rassurera peut-être,

Tu peux m'écrire quand tu veux, même si Libellule fait la tête,

Je suis vraiment fier de toi ma chérie,

Je t'aime. Ton Papa.

PS : pour ces vacances, tout est bon. J'ai déjà réservé des places pour la course annuelle de balais, Alice et Emily, sont, bien évidemment, invitées. ».

Mon père avait la fâcheuse habitude de pouvoir m'apaiser tout en m'agaçant dans le même temps. Il avait probablement raison ; il avait souvent raison, mais ce qu'il soulevait me paraissait pour le moment impliquer des décisions lourdes de sens et je n'étais pas tout à fait sûre de savoir quoi en faire. Les choses devaient décanter dans mon esprit. Néanmoins, je me sentais un peu plus légère et la colère latente s'était quelque peu réduite en tout cas, à l'égard de nos professeurs.

L'excitation d'Alice pour la course annuelle de balais n'eut d'égal que celle qui fut la sienne lorsque Tyler nous avait annoncé que le premier match de la saison – censé opposer Gryffondor à Serpentard, avait dû être annulé. Visiblement, l'équipe de Gryffondor comptaient trop de blessés parmi ses membres ; une histoire d'entrainements trop intensifs. En réalité, Tyler lui-même n'avait pas semblé très au clair sur les raisons de ces blessés. Quoiqu'il en soit, il avait été décidé que nous affronterions Serpentard à leur place. Ce qui m'avait bien évidemment fait paniquer et avait excité Alice au plus haut point.

Le reste de la semaine fut de fait rythmé par des entrainements plus collectifs que d'habitude et par l'absence de Parker des espaces collectifs du château. Depuis l'incident en Défense contre les Forces du Mal, j'avais l'impression qu'elle ne se montrait plus. Bien sûr, elle avait toujours été peu présente au sein du château – passant probablement la majeure partie de son temps dans la salle commune des Serpentards, mais depuis le début d'année, je l'apercevais ici et là ; dans la bibliothèque, dans la Grande Salle ou même dans le parc du château. Ces derniers jours, elle se montrait aux différents cours qu'elle suivait et aux heures du diner pour disparaître aussitôt. Peut-être n'était-ce qu'une impression.