[RàR]
Surion1243 : Not going to lie… An english review on this fanfic wasn't something I expected. What a pleasant surprise! :)
Thank you for your kind words and for taking the time to leave a comment. It's nice to know the politic side of the story as well as Eyrin and Lilith relationship are appreciated.
I hope you'll enjoy the next chapters!
[NdA]
J'ai modifié l'organisation des chapitres précédents pour qu'ils soient plus agréables à lire pour celles et ceux qui commencent la lecture plus tardivement (et aussi, parce que ça commençait à me faire bizarre d'avoir 60+ chapitres). J'en ai profité pour corriger certaines fautes (mais il en reste encore, haha). Mais vu que la publication par petits bouts semblait plaire, je continuerai pour les chapitres récents à publier scène par scène quand le chapitre le permet.
J'essayerai de revenir de temps en temps sur les scènes publiées pour faire le ménage et les agglomérer en un seul chapitre. C'est quand même plus agréable de lire quelque chose qui a un peu de structure (enfin, je trouve).
Chapitre 25
Première semaine de janvier
Si les vacances avaient permis à la majorité des élèves de relâcher un peu la pression, tout le monde n'avait pas semblé profiter de cette pause. Depuis la reprise des cours, l'atmosphère au sein du château était plus légère sans, paradoxalement, que les relations entre élèves aient réellement évoluées ; certains Gryffondors étaient toujours étranges, même s'ils étaient beaucoup moins nombreux à faire bande à part – ils n'étaient plus qu'une quinzaine toutes années confondues, et il était difficile d'avoir un avis tranché sur les Deuxièmes Années.
Ces derniers étaient bien plus discrets – les rondes autour de leurs salles de classes avaient été relativement calmes et leurs altercations moins nombreuses, mais il y avait toujours quelque chose dans l'air, comme une certaine tension, particulièrement palpable autour d'eux. Ils jetaient un regard curieux à leur environnement avant d'agir, ou même parfois avant de se glisser des mots à l'oreille, comme s'ils vérifiaient constamment que nous n'étions pas dans les environs. Ce genre de monitoring n'était jamais bon signe.
Si, depuis la rentrée, les Septièmes Années étaient extrêmement discrets, presque invisibles en réalité, certains s'étaient ouverts depuis l'annonce de l'arrivée des psychiatres ; alors même que les Moldus avaient, pour le moment, restreint leurs interactions sociales aux préfets et professeurs. Depuis les fêtes de fin d'année, les Septièmes Années étaient bien plus nombreux à se mélanger avec des élèves d'autres années. Evidemment, ce n'était pas le cas de tous ; et notamment de celles et ceux qui avaient quitté la Grande Salle sous l'influence de Lewis. Ceux-là n'avaient pas semblé être particulièrement influencés par la présence des psychiatres et n'avaient pas changé d'attitude ; ou alors, comme Lewis, étaient dans une confrontation et une colère bien plus manifeste, eux qui étaient pourtant très pudiques depuis le début de l'année.
À ce sujet, si notre batteur semblait toujours être en colère contre Peter et moi à en croire les regards qu'il nous laissait parfois lorsque nous nous préparions pour nos rondes avant de quitter notre Salle Commune, il avait pour autant fait l'effort de ne pas le montrer lors de nos entraînements de Quidditch. Malheureusement, la prestation de Poufsouffle et le retour de Weasley à Gryffondor avait tout autant paniqué qu'excité Tyler et Lewis ; les entraînements avaient repris sans qu'aucun des deux n'ait de pitié pour nos corps pourtant bien ramollis par les fêtes.
Lors d'un dîner, McGonagall avait d'ailleurs précisé à tous les élèves que les psychiatres risquaient d'« errer » dans les couloirs et de nous poser quelques questions sur le fonctionnement de la magie ou de l'école ; autant pour le Ministère qui souhaitait que nous limitions les informations que nous véhiculions aux Moldus sur la magie. Je n'avais toujours pas osé voir le psychiatre qui connaissait ma mère ; ne serait-ce que passer devant le bureau qui lui avait été attribué me barbouillait l'estomac, mais j'avais le temps, après tout. En tout cas, c'était ce qu'Alice m'avait répété tout au long du début de semaine.
Évidemment, Peter – enfin « Mark » pour Alice, lui avait fait un compte-rendu détaillé de la réunion avec les psychiatres, bien qu'elle ne s'était pas privée de se plaindre parce qu'il n'avait pas mes années d'expérience en la matière ; je savais quels détails l'intéressaient et lesquels ne méritaient pas son attention. Je n'avais cependant pas grande crainte à ce sujet ; il était certain que les occasions seraient nombreuses dans les semaines à venir pour que Peter puisse s'entraîner à la très sérieuse tâche que constituait le compte-rendu d'une réunion ou d'un évènement à Alice.
Je prenais d'ailleurs sur moi de ne pas l'embêter au sujet du préfet ; j'imaginais que sous-entendre qu'ils faisaient plus que discuter sous prétexte que je les voyais souvent ensemble ces derniers temps n'était pas la meilleure des choses à faire lorsqu'Alice était en train d'apprendre qu'elle pouvait tout à fait ne pas sexualiser ses relations avec les garçons. Nous nous contentions avec Emily de tenter de ne pas sourire ou sous-entendre quoique ce soit dès que le préfet était mentionné au cours de la conversation ; chose d'autant plus difficile que Peter avait pris l'habitude de rester avec nous dans la Salle Commune, lui qui, d'ordinaire, passait plutôt son temps avec Tyler et Campbell.
Cela dit, Emily avait suffisamment de théories au sujet des « nombreuses coïncidences » de ces derniers mois – elle était remontée jusqu'à la crise d'Anna dans les escaliers, pour nous tenir occupés – et surtout Alice, sur un sujet qui n'impliquait aucunement de mentionner Peter ; ou même Lilith, car Alice essayait depuis trois jours de découvrir où pouvait bien se trouver son jardin secret. J'avais soigneusement mémorisé chacun des endroits que la blonde avait mentionné afin de m'assurer de ne jamais m'y retrouver lorsqu'elle était avec un garçon ; le fait qu'elle ait cité les cuisines m'interpellait encore à ce jour, mais je préférais de ne pas trop penser à l'hypothétique spectacle offert aux Elfes de Maison.
La situation vis-à-vis des Gryffondors se décanta cependant très rapidement lorsque, avec les filles, nous nous translations du cours de botanique à celui de métamorphoses et qu'une voix cria mon nom derrière nous.
Je me retournai ; Weasley arrivait d'une démarche particulièrement déterminée qui ne présageait rien de bon. Alice me lança un regard interrogateur et j'haussai les épaules ; je n'avais pas grande idée de ce qui pouvait bien motiver Weasley à m'apostropher comme cela.
— Est-ce qu'on peut parler ? reprit-elle en arrivant à ma hauteur. Je veux dire, salut. Augen, Stevens, ajouta-t-elle rapidement en saluant les filles d'un geste de la tête.
J'acquiesçai et elle se décala de quelques mètres dans un couloir moins bondé. Je la suivis, quelque peu dépassée et abasourdie par l'urgence qui semblait l'animer.
— Mhm, commença-t-elle en se retournant vers moi alors que j'arrivai à sa hauteur, je ne sais pas trop comment dire ça donc je vais juste le dire, d'accord ?
— Ok…
— Cela fait à peine quelques jours que je suis de retour à Poudlard et j'ai eu le droit à une longue conversation à ton sujet. En fait, plutôt un avertissement.
Bien que je n'eus aucune idée de ce dont elle parlait, mon ventre sembla déjà, lui, prendre la juste mesure de la situation ; sous l'appréhension, il se serra et j'eus un soudain coup de chaud.
— Je ne suis pas sûre de comprendre.
— Certains de tes collègues de sixième année m'ont mise en garde contre toi, sous différents prétextes. Ça m'a fait très… bizarre. Déjà, leur démarche était étrange. Je veux dire, ils sont arrivés et m'ont simplement prise à part dans le Poudlard Express et dans la Salle Commune, plus tard, pour me dire que tu défendais les « lanceurs d'endoloris ».
Je dus me reprendre plusieurs fois pour tenter de continuer à l'écouter ; mon sang s'était glacé et mon corps me laissait une sensation telle que je n'aurai eu aucun mal à croire que quelqu'un m'avait discrètement lancé un petrificus totalus. Il y avait quelque chose de particulièrement humiliant dans l'idée d'être prise pour cible au point de devoir nécessiter, aux yeux de ces élèves, un avertissement en bonne et due forme ; alors même qu'ils ne me connaissaient pas.
Bien sûr, c'était une évidence que notre relation se dégradait avec Griffin et qu'il nous fallait nécessairement aborder ce problème. Mais je ne me serai jamais attendue à ce que la situation soit si grave et étendue qu'elle finisse par concerner d'autres personnes que le préfet ; que sa paranoïa à mon égard soit réellement partagée par d'autres.
Il n'était pas nécessaire de s'amuser avec des feuilles de thé au fond d'une tasse pour comprendre qu'il y avait des « clans » chez les Gryffondors ; après tout, Taylor elle-même s'était adressée à son collègue comme s'ils ne partageaient pas le même vécu de leur Salle Commune, et les Gryffondors avaient été particulièrement ambivalents avant les vacances. La honte de leur déplorable prestation collective lors du match et l'image prestigieuse de leur maison qui s'effondrait avaient poussé certains au retrait quand d'autres, tout aussi peu nombreux qu'ils avaient été, avaient continué de vivre parmi nous. Cela dit, je n'avais pas pensé que ces clans concernaient une autre thématique que les vieilles querelles entre Gryffondor et Serpentard ou la relative incapacité de certains à faire le deuil de l'année passée. Or, si plusieurs élèves avaient tenté d'« avertir » Weasley à mon sujet, il était évident que Griffin avait la main sur toute une partie d'entre eux - y compris pour ce qui concernait son entêtement à me prendre comme bouc-émissaire. Ce n'était pas juste un problème personnel exacerbé par ce qu'il se passait chez les Gryffondors comme je l'avais d'abord pensé. À bien y réfléchir, peut-être cela était-il déjà le cas depuis le début d'année. Après tout, il y avait eu l'incident avec Carter.
— Je n'ai pas trop compris de quoi ils parlaient, reprit Weasley tandis que je tentais péniblement de suivre ce qu'elle disait. Ils ne faisaient que de dire que tu n'étais pas quelqu'un de méchante, mais que tu étais… influencée ? hasarda-t-elle. Ou parfois, que c'était la Guerre qui t'avait changée. Je ne sais pas, c'était étrange et ils avaient une attitude très ambivalente. Tu n'étais pas méchante, mais, quand même, ils me mettaient en garde contre toi. Ça n'avait pas grand sens.
Évidemment ; autant essayer de passer pour les gentils qui ne faisaient que prévenir. Être trop négatif à mon égard aurait nécessairement lever des soupçons. Au moins, Weasley semblait avoir vu clair dans leur jeu.
— Et puis, ce qu'ils disaient ne correspondait pas à ce que je sais de toi. Je veux dire, l'année dernière… Disons que j'ai eu l'impression qu'ils me décrivaient une autre personne. J'ai fini par comprendre en parlant avec notre préfète que c'était surtout une personne en particulier qui semblait t'avoir prise comme bouc-émissaire et qui… entraînait les autres en revenant encore et encore dessus constamment.
— Griffin ?
— Oui.
— Influencée par… Parker, j'imagine ?
— … Oui. Ce n'était pas aussi explicite quand ils m'en ont parlé. En fait, rien n'était vraiment explicite pour être honnête. Ils disaient les choses sans jamais les dire.
Ce n'était pas si surprenant. Puisque Griffin ne pouvait prétendre que mes intentions étaient réellement mauvaises – il n'avait après tout que l'incident des Têtes Chercheuses de Traitres et celui de la réunion entre préfets à mettre sous les dents de ses camarades de maison, il utilisait le fait que Lilith soit à Serpentard. Nous voir dans le Poudlard Express était arrivé à point nommé pour le préfet ; il avait l'habitude agaçante de réécrire constamment la réalité et je ne doutais pas une seule seconde que Griffin ait utilisé Lilith pour réécrire mon rôle dans ses mythes entre Gryffondor et Serpentard. C'était pratique, je restais à la fois un problème qui nécessitait un avertissement tout en devenant, à présent, une victime des influences néfastes des Serpentards. C'était tout à fait humiliant ; tant pour Lilith, que pour moi, ou pour nous. L'idée-même de considérer qu'elle pourrait être une influence négative avait quelque chose de proprement dégradant et me laissait tout autant en colère que complètement sonnée.
Bien sûr, toute cette mascarade servait parfaitement les histoires gryffondoresques de Griffin. Je n'étais pas bien sûre de ce qui était conscient ou non dans ses faits et gestes, mais s'amuser à « prévenir » des personnes d'un danger qui n'en était pas un n'était définitivement pas un accident. Si cela n'était pas tombé sur Weasley – ou même si nous ne nous connaissions pas vaguement du fait d'avoir fait partie de la résistance l'année dernière, les élèves en question n'auraient probablement même pas essayé d'échanger avec moi pour confirmer ou infirmer les dire de leurs camarades de maison. Il devait cependant y avoir un détail qui me manquait ; lors de l'une de nos réunions, Griffin avait semblé redouter Lilith, je me demandai soudainement s'il oserait avoir le même discours en face à face.
— J'ai pensé que tu aimerais savoir, finit Weasley en me raccrochant définitivement à la réalité.
— Je… Mhm… Ouais, merci.
— Est-ce que ça… va ? Tu as l'air ailleurs depuis tout à l'heure.
— Oui, désolée, j'étais dans mes pensées. Merci d'être venue me le dire.
— Je n'ai juste pas envie de ce genre de dramas cette année, tout est suffisamment compliqué comme cela. C'est ce que je leur ai répondu, mais « non » ne semble pas être quelque chose qu'ils comprennent vraiment.
— Cette année, les choses sont un peu… particulières.
— Pour que des Gryffondors en viennent à parler de Serdaigles comme s'ils parlaient de Serpentards ? Je me doute, oui.
— Je croyais que j'étais la seule concernée.
— Oh, non, s'amusa-t-elle d'un faux sourire, tu es capable d'influencer les autres préfets d'après tes camarades. Les élèves de Serdaigle sont tellement excentriques et hors de la réalité qu'ils en viennent à défendre les Serpentards.
— Oh Merlin, soupirai-je.
— Voilà.
Aucun des mots prononcés par Griffin cette année n'avait été anodin ; si j'en avais pris la juste mesure plus tôt, peut-être les choses ne seraient-elles pas arrivées jusqu'à ce point de non-retour. Car une chose était sûre, il était hors de question que la prochaine réunion entre préfets se déroule comme si de rien était alors que, derrière mon dos, cet abruti s'amusait à colporter ce genre d'imbécilités. Griffin pouvait bien penser ce qu'il voulait de moi et me mettre dans une position qui l'arrangeait lui et ses problématiques personnelles, mais il n'avait pas à intégrer d'autres personnes dans la boucle parce qu'il avait besoin de validation – ou je ne sais trop pourquoi il faisait ce qu'il faisait. Mais cela expliquerait pourquoi il était allé voir O'Connell avant d'aller vers un autre professeur une fois remis à sa place par son propre directeur de maison ; la figure d'autorité n'avait pas joué le jeu de ses délires et monsieur avait besoin qu'on lui confirme qu'il avait raison.
Après le départ de Weasley, j'avais évidemment fait un retour très détaillé sur la situation aux filles. La colère chaude d'Alice eut l'avantage non-négligeable de m'empêcher moi-même une colère trop forte ; en réalité, de ne pas me planter devant le préfet de Gryffondor en plein milieu de la Grande Salle pour le métamorphoser aussitôt en mandragore. Alice avait été des plus productive quant aux façons de régler le problème et si une partie de moi hésitait encore entre le scénario où elle lui lançait un enchantement qui lui ferait pousser une pustule en plein milieu du visage dès qu'il mentionnait mon nom et celui où elle ferait boire un matin du veritaserum à toutes ses exes avant de les faire parler publiquement du préfet pendant la petit-déjeuner, je devais bien admettre qu'il nous fallait surtout discuter de tout cela avec Miller ; probablement avec O'Connell également.
La gêne avait été cependant suffisamment diffuse toute la journée pour que chaque rencontre avec des Gryffondors dans un couloir ou une salle de classe soit conclue par une rougeur particulièrement prononcée sur mes joues ; je ne pouvais m'empêcher de me demander ce qu'ils pouvaient bien dire à mon sujet. Cet idiot de Griffin allait finir par me rendre paranoïaque à mon tour.
Alors que nous nous apprêtions à rejoindre la bibliothèque pour finir nos parchemins d'Histoire de la Magie – à l'exception d'Emily qui travaillait sur la botanique, un cri aiguë retentit soudain dans les couloirs. Nous nous déplacions vers le bruit dans un mouvement réflexe ; la psychiatre était en présence de notre professeure de potions et venait de faire la connaissance de Peeves.
— Un fantôme ? fit la psychiatre. Évidemment, un fantôme.
Elle fut prise d'une crise de rire et Shadlakorn sembla perplexe quant à la démarche à adopter dans ce genre de cas ; Peeves, lui, avait enfin arrêter de faire des grimaces.
Alice s'assit sur le muret d'une arche ouverte, assez proche de l'action, et nous la rejoignîmes sans même vraiment y réfléchir ; du muret nous avions une vue tout à fait dégagée sur les trois protagonistes tout en étant assez éloignées pour ne pas paraître suspectes. Lorsque Peeves était impliqué dans quelque chose, deux certitudes émergeaient aussitôt ; il y allait avoir du chaos et du spectacle. Au moins, cela détournerait mon attention de l'autre idiot de Griffin. Avec un peu de chance, la blonde avait même des sucreries sur elle – ce ne serait pas la première fois.
— Esprit frappeur, corrigea Peeves qui tournait autour de la psychiatre d'un œil curieux.
Pour une fois, il donnait l'impression de ne pas savoir ce qu'il devait se permettre ; du moins, durant les quelques secondes qui le séparèrent d'une nouvelle grimace à un élève interloqué qui passait par là.
— C'est une distinction importante ?
— Comment ça ? reprit l'esprit frappeur en se reconcentrant sur la psychiatre. Vous croyez vraiment que le Moine Gras serait capable de faire ça, lui !? s'offusqua-t-il avant de mettre son pied au travers du passage d'un malheureux Serpentard qui avait pourtant eut la présence d'esprit de mettre quelques mètres de distance entre l'esprit frappeur et lui-même.
— Peeves ! gronda Shadlakorn tandis que l'intéressé éclatait d'un rire gras avant de disparaître par le plafond.
Le Serpentard se releva rapidement et disparut à son tour non sans insulter Peeves au passage. Quelque peu curieuses de la réaction de la moldue, nous ne bougeâmes pas d'un centimètre et restions assises sur le muret.
— Il y a quand même une chance sur deux que je sois en train de décompenser, reprit la psychiatre cette fois-ci beaucoup plus calme. Mais il faut tout de même que je vous demande… votre magie permet de tromper la mort ? demanda-t-elle alors que je pris machinalement ce que me tendit Alice.
Me doutant bien qu'il s'agissait de quelque chose de comestible, je le portai à ma bouche sans détacher les yeux de la scène qui se jouait face à nous. Une baguette à la réglisse ; je recrachai le tout par-dessus le muret dans un réflexe tout à fait animal. Cette chose immonde n'avait rien à faire dans ma bouche.
— Oh, non, répondit notre professeure de potions. Enfin, pas de manière conventionnelle, ajouta-t-elle rapidement. C'est un problème ?
— Désolée, s'empressa Alice, tiens, il me reste des patacitrouilles. On dit un ou une patacitrouille, d'ailleurs ?
— Un, répondit Emily.
— Une, répondis-je en récupérant les sucreries qu'Alice me tendait.
— Un problème ? continua la psychiatre. Non. C'est juste que nous ne pouvons déjà pas utiliser nos tests parce qu'ils ne sont pas échantillonnés sur des sorciers, il faut maintenant que nous revoyons la moitié de nos théories cliniques si même la limite entre la mort et la vie est perméable par chez vous.
— Mhm, une raison supplémentaire d'en manger plusieurs, enchérit Alice alors que j'engloutissai justement une patacitrouille.
— Je vous assure que nos morts sont bien morts, répondit Shadlakorn aussi fermement que lorsqu'elle remettait Clyde à sa place.
La psychiatre sembla soudain particulièrement mal à l'aise ; le silence fut si gênant que j'hésitai plusieurs fois à quitter le couloir. Nous n'entendions plus que les bruits de mastication des filles. Ces foutues baguettes à la réglisse, au-delà d'être proprement immondes, faisaient un bruit horrible dès que quelqu'un était doté de la rare capacité d'en supporter le goût en bouche.
— Je suis désolée, dit finalement notre professeure de potions.
— Non, c'est moi. Vous avez tous perdu des gens durant cette guerre. Je n'aurai pas dû mentionner la mort de cette manière. Votre… esprit frappeur m'a prise par surprise. Votre représentant n'a jamais parlé de ce genre de choses.
— Cela ne m'étonne pas, répondit Shadlakorn sur un ton bien plus doux. Si vous avez besoin de savoir ce genre de choses, nous avons une espérance de vie un peu plus élevée, c'est tout. Certaines formes de magie permettent d'autres… destins, mais c'est très rare, vient avec un prix très élevé, et aucun des élèves n'est concerné. Enfin, cela dit, Voldemort était un élève mais…
— Le Mage Noir qui a déclenché toute cette guerre ? coupa la psychiatre.
— Deux guerres, en réalité, corrigea notre professeure de potions.
— Oh.
— Nous le pensions mort mais il ne l'était pas. C'est de ce genre de détails dont vous parliez ?
— Oui, c'est un point important. J'aurai besoin de discuter avec vos élèves sur ces histoires de fantômes.
— Pourquoi ?
Shadlakorn avait l'air sincèrement confus et la psychiatre eut un léger sourire. J'en profitai pour avaler une autre patacitrouille.
— Eh bien, même si vous dites que ces formes de magie ne sont pas vraiment utilisées, j'imagine que vivre avec des fantômes, avoir eu un Mage noir qui est revenu d'entre les morts, et ce genre de choses influencent nécessairement votre rapport à la mort. Or, la mort risque d'être un sujet récurrent dans nos futurs échanges.
— Nous avons tous peur de mourir. Cela reste une constante universelle.
— J'entends bien, Delilah. Mais, normalement, la mort est une limite. Une fin. C'est en réalité la seule certitude que nous avons : nous allons mourir. Votre Mage noir en est revenu et, à l'inverse, certains semblent n'être jamais réellement partis sans pour autant être toujours… vivants. Ce ne serait pas surprenant que certains de vos élèves aient peur qu'il revienne ou que vos… mangemorts reviennent. Ce genre de « détails » est important pour comprendre leur façon de gérer les évènements. Un cauchemar où le « méchant » revient ne soulève pas les mêmes enjeux chez vous que chez nous. Nous devons prendre cela en compte.
— C'est un sujet délicat, soupira Shadlakorn non sans acquiescer aux propos de la psychiatre.
— C'est pour cette raison que j'allais vous demander si vous saviez quels préfets n'ont pas perdu de proches.
— Eh bien, commença notre professeur de potions en se tournant vers nous, peut-être que le trio infernal qui nous écoute depuis tout à l'heure pourrait répondre à cette question bien mieux que moi.
— Nous sommes très calmes en cours de potion, professeure, répliqua aussitôt Alice.
Je cachai les dernières patacitrouilles que j'avais en main dans la poche de ma cape dans un geste automatique, gênée d'être prise sur le fait.
— Parce que vous êtes divisées en binômes et que Miss Jonsson est trop occupée avec M… son propre binôme pour rire avec vous, Miss Stevens, se reprit notre professeure de potions en jetant un œil à la psychiatre. Mais ne croyez pas que j'ignore la manière dont vous vous comportez avec mes collègues. À ce sujet, ajouta-t-elle rapidement, Miss Jonsson, peut-être pourriez-vous informer votre binôme que nous nous retrouverons samedi matin dans les cachots pour une réunion avec les apprentis de Sainte-Mangouste. Vous verrez probablement votre binôme avant moi, s'amusa-t-elle alors que mes joues virèrent au rouge.
— Oh, Miss Parker, c'est ça ? fit la psychiatre tandis que Shadlakorn se retournait vers elle, surprise. Je ne pense pas que tant de précautions soient nécessaires, Delilah. Bien que les élèves se sont montrés particulièrement discrets pour se relayer le mot, je l'ai déjà entendu deux fois, ajouta-t-elle rapidement, visiblement toute aussi amusée par la situation que notre professeure de potions.
Je sentis Alice se retenir de rire à mes côtés et me renfrognai, il n'y avait vraiment rien de drôle et toute la scène était franchement inconfortable.
— J'ai toujours dit que les profs étaient les premiers à être au courant de tous les ragots, s'amusa Alice alors que je lui lançai un regard noir. Chez les préfets, il n'y a que Harper et Peter qui sont concernés, reprit-elle plus fortement en direction de Shadlakorn et de la psychiatre.
— Sur huit préfets, dit la moldue, seuls deux ne sont pas endeuillés ?
— Oui madame, répondit Alice.
[NdA] Voici pour le chapitre 25 :)
