Disclaimer : Tout appartient à JK Rowling, sauf ce que j'ai inventé !

Note de l'auteur : Je viens de terminer ma première fanfiction sur Harry Potter (commencée il y a douze ans !) et alors que je pensais qu'il s'agirait de ma seule et unique histoire, j'ai ressenti le besoin d'écrire à nouveau dès que j'ai écrit le mot de la fin. Je vous propose donc une nouvelle aventure basée sur la série de romans Harry Potter, et toujours concentrée sur la relation « familiale » entre Severus Snape et Harry Potter (et un peu de Draco Malefoy, aussi !). Pour vous situer un peu : l'histoire commence à la toute fin du tome 6. Harry voit Draco menacer de tuer Dumbledore mais c'est par la main de Snape que le vieux sorcier meurt. Jusque-là, rien de nouveau sous le soleil. Sauf que Snape a décidé de faire autrement que ce qui était prévu : accompagné de Harry et de Draco, il transplane vers un lieu inconnu où le bien et le mal ne sont pas si opposés.

In the moonlight

Chapitre 1 : La mort de Dumbledore

« Expelliarmus ! » s'écria Draco, au sommet de la tour d'astronomie.

Harry vit la baguette de Dumbledore s'envoler jusqu'au jeune Serpentard et se sentit soudainement paralysé, immobilisé contre le mur de pierres.

Harry ne comprit pas immédiatement la raison de son immobilité, ce n'était pourtant pas un sort de blocage que Malefoy avait lancé. Il réalisa alors que le sortilège contre lui avait été lancé par Dumbledore lui-même, silencieusement. Le vieux sorcier avait rendu l'adolescent terriblement impuissant, incapable de bouger le moindre petit doigt. Raidi, Harry ne pouvait qu'observer la scène absurde qui se déroulait sous ses yeux.

Draco, cet adolescent au menton fier, menaçait Dumbledore de sa main tremblante. Le jeune homme semblait tiraillé entre la peur et la détermination. Déterminé à tuer mais effrayé par ce même geste. Malefoy n'était jamais apparu aussi vulnérable qu'en ce moment précis. Il avait l'air d'un petit garçon qu'on aurait déguisé en adulte. Mais cette faiblesse serait-elle suffisante pour éviter le meurtre de Dumbledore ?

Le Directeur avait confié une mission à Harry, juste avant que le Serpentard ne les interrompe. Dumbledore lui avait dit d'aller chercher Snape. Si seulement il avait eu le temps de retrouver son professeur dans les cachots, peut-être que rien de tout cela ne serait arrivé. Alors qu'il ruminait, un espoir jaillit soudain ! Et si les quelques leçons d'occlumencie que Harry avait passé avec Snape lui permettaient de rentrer en communication mentale avec lui ? Sachant qu'il n'avait aucun autre moyen de se sortir de cette situation, le jeune Gryffondor s'obligea à vider son esprit et à rendre muettes les voix de Dumbledore et de Draco. Il se concentra sur le visage de Snape, sa voix, son odeur, le bruit de ses pas. Il n'avait qu'un seul désir, que Snape entende sa supplique, que Snape mette fin à cette affreuse confrontation, que Snape les sauve de cet enfer. Harry pouvait sentir son coeur battre dans ses tempes, concentré comme il ne l'avait jamais été auparavant. Il avait la sensation de n'avoir jamais espéré si vivement, si sincèrement.

« Dumbledore va mourir, venez l'aider ! Nous sommes en haut de la tour d'astronomie. » hurlait son cerveau à l'intention du maître des potions.

Après plusieurs minutes de cette litanie, Harry entendit enfin la voix de Snape résonner à ses oreilles. Mais ce n'était pas la seule. Hypnotisé par sa propre prière, l'adolescent n'avait pas remarqué les trois mangemorts apparaître sur la scène. Lorsque Harry ouvrit enfin les yeux et les oreilles, il remarqua que les trois mangemorts étaient en plein débat : devait-il laisser Draco tuer Dumbledore ou devaient-ils prendre en charge cette mission que le jeune garçon ne semblait pas capable d'assumer ?

« Vous ne toucherez pas un cheveu de ce vieil homme, m'avez-vous bien compris ? » s'écria Snape, grondant.

Harry aurait juré que le maître des potions venait de jeter un regard dans sa direction. Mais bien vite, l'homme concentra toute son attention sur les mangemorts et sur Draco Malefoy.

Harry sentit un profond soupir de soulagement quitter ses lèvres paralysées. Snape l'avait entendu, Dumbledore était sauvé.

« Ce n'est pas à vous de tuer Dumbledore, c'est à Draco que le Seigneur des Ténèbres a confié cette mission. Oseriez-vous aller contre ses ordres ? » déclara Snape, sévère.

Harry aperçut alors les mangemorts reculer. L'autorité de Snape les rendit tout à coup silencieux, soumis et dociles. Mais c'était une feinte, n'était-ce pas ? Snape ne pouvait pas être de leur côté, après la confiance que Dumbledore avait toujours eu en lui ?

« Severus… » supplia Dumbledore.

« Draco, viens ici. » ordonna sèchement Snape.

Allait-il vraiment obliger Draco à exécuter Dumbledore ? Ce n'était pas possible. Pas alors que Harry venait d'assister à la plus humiliante et la plus triste des scènes : Dumbledore suppliait. Tout son corps suppliait. Jamais on n'avait vu le Directeur de Poudlard si petit et si fragile. Le vieil homme était courbé, les yeux embués et sa voix, aux accents enfantins, implorait.

« Severus, s'il te plaît… » poursuivit Dumbledore.

La rapidité des événements qui suivirent déstabilisèrent complètement Harry. En un instant, Snape jeta le sort mortel sur Dumbledore. Mais à la seconde où la lumière verte emplissait l'air, Harry se sentit tiré par une main de fer. Pendant quelques secondes, qui semblèrent des minutes, le jeune Gryffondor aperçut le monde autour de lui tourbillonner dans un ouragan d'images abstraites et inaccessibles. Il essaya de se détacher de l'étreinte qui enserrait fermement son poignet mais la force de l'emprise était trop forte. Il comprit alors qu'il était en train de transplaner.

Lorsque Harry sentit de nouveau le sol sous ses pieds, il ne put empêcher un haut le coeur de le traverser. Il vomissait ses tripes sur une pelouse généreuse. L'air autour de lui était frais, malgré le mois de juin. Il mit plusieurs secondes à réaliser qu'il n'était plus à Poudlard, peut-être même plus en Angleterre. Relevant les yeux, il aperçut de sa vue brouillée par le malaise, Draco, affalé sur le sol, à quelques mètres de lui. Enfin, il remarqua Snape, dos à lui, debout, en train de réciter des incantations, sa baguette visant l'horizon.

« Vous… » commença Harry, abasourdi. « Vous avez tué Dumbledore ! » hurla-t-il après un instant. La colère était soudainement en train de le submerger. Il venait de tout saisir ! Snape avait tué Albus Dumbledore ! Le seul sorcier vivant qui ait jamais cru en lui ! Comment cet homme avait-il pu trahir son mentor ? Comment avait-il pu assassiner le plus grand sorcier du monde ?

Harry se releva, prêt à venger son vieil ami. Il sentait ses muscles se raidir, sa mâchoire se serrer, ses larmes couler. Il avait cru en Snape, il avait cru qu'il venait les sauver. Il avait cru qu'il serait l'homme qui les libèrerait du mal. Comment Dumbledore avait-il pu être si naïf ? Harry avait toujours su que Snape n'était qu'un mangemort parmi tant d'autres, un homme prêt à tout pour son précieux Seigneur des Ténèbres. Toute l'année, Harry avait essayé de convaincre son Directeur de cette affreuse vérité : Snape était un traitre. Pourquoi ne l'avait-il pas écouté ? Pourquoi avait-il rejeté avec tant de confiance un fait inaliénable : Snape était un putain de mangemort qui ne voulait que le mal.

« Il croyait en vous ! Immonde mangemort ! Comment avez-vous pu assassiner l'homme qui vous a fait confiance toutes ces années ? » hurlait Harry, les poings serrés.

Snape ignorait ostensiblement les cris derrière lui, continuant ses incantations, sans même sembler entendre l'adolescent en furie.

Harry se rappela alors qua sa baguette était rangée dans sa poche. Il se précipita dessus. Pour la première fois de sa vie, il se sentait assez cruel pour invoquer un sort impardonnable. Snape lui inspirait assez de mal pour faire l'impardonnable, pour tuer. Ce soir, Snape venait de briser le monde. Non pas seulement le monde de Harry mais le monde sorcier tout entier. Cela faisait six années que Harry et Dumbledore essayaient à tout prix de s'opposer à Voldemort. Cela faisait six années que Harry avait un seul et unique rôle : ramener la paix. Cela faisait six années que Harry essayait de se sortir de l'enfer. En un instant, Snape venait de tout réduire à néant. Il venait de le réduire à néant.

« Je vais vous tuer pour ce que vous avez fait ! » vociféra Harry avant de lever sa baguette. « Ava… » commença-t-il.

Mais avant même qu'il put achever le premier mot du sortilège mortel, Harry se sentit violemment repoussé en arrière, laissé pantelant sur le sol. Avant qu'il ne le réalise, sa baguette était déjà dans les mains de Snape. L'homme en noir s'approcha de Harry à pas lents, menaçants. L'adolescent ne lui avait jamais vu un air aussi effrayant. Ses yeux étaient réduits à deux fentes, son long corps dominait l'atmosphère et il semblait avancer au rythme de l'orage qui s'abattait sur eux. Harry crut un instant qu'il vivait sa dernière heure sur terre.

« La prochaine fois qu'il vous vient à l'idée de tuer, Potter, je vous conseille de ne pas prévenir votre ennemi. » gronda-t-il, dominant Harry de toute sa hauteur. « Pauvre imbécile, vous ne comprenez rien. » cracha Snape, méprisant.

Harry se sentait trembler de tout son corps, tiraillé par la peur et la colère immense qui l'habitaient. Sans le réaliser, il se rétracta, recroquevillé, tel un petit tas de chiffons. Visiblement, c'était la peur qui gagnait le combat à l'intérieur de lui.

« Cet endroit est protégé, vous ne pourrez pas aller au-delà des frontières que j'ai moi-même délimitées. Mais pour que celles-ci soient efficaces et que vous n'attiriez pas le Seigneur des Ténèbres sur nous par vos cris incessants, vous devez me laisser terminer d'appliquer ce sortilège de protection. Je vous suggère donc de vous taire et de rester assis sans bouger, Potter, si vous ne voulez pas m'obliger à vous réduire moi-même au silence. » siffla-t-il, les lèvres blanchies.

Sans comprendre comment cet homme pouvait avoir un tel pouvoir sur lui, Harry ne su qu'obéir. Il s'était confronté à des créatures bien plus dangereuses que son professeur de potions, avait connu des situations absolument tétanisantes, avait engagé un combat avec Voldemort lui-même l'été passé, mais Snape le réduisait à une soumission absolue.

Harry n'osait bouger, ni parler, mais son cerveau s'activait avec rapidité. Il ne comprenait plus rien. Que faisait-il ici, avec Snape et Draco Malefoy ? Snape aurait dû le livrer à Voldemort. Pourtant, le maître des cachots venait clairement de dire qu'il cherchait à les protéger de sa venue. Mais il avait tué Dumbledore ! Que voulait Snape, à la fin ? S'assurer qu'il aurait la victoire pour lui tout seul ? Détrôner Voldemort pour prendre sa place ? Mais, si c'était le cas, pourquoi ne pas avoir déjà tué Harry Potter, le symbole du bien ? Se pouvait-il que Dumbledore ne soit pas mort, finalement ? Harry voulait croire à une ruse de la part de Snape. Il voulait croire, encore ce soir, que Snape était de leur côté. Mais Harry ne pouvait effacer de sa tête l'horrible couleur verte qui avait empli l'air juste avant qu'ils ne transplanent.

Après de longues secondes d'interrogation, Harry s'autorisa à jeter un coup d'oeil autour de lui. Derrière lui se trouvait une maison, faite de bois et de vieilles pierres. S'il avait été amené ici dans d'autres circonstances, il l'aurait trouvé jolie, chaleureuse même. Il pouvait discerner, derrière la bâtisse, un lac sur lequel se reflétait la lune. Tout autour de lui, une forêt immense les isolait du reste du monde. On aurait dit un monde à part.

Il croisa enfin le regard de Draco, qui reprenait conscience, incrédule. Le garçon blond jeta des regards paniqués autour de lui. Il chercha sa baguette, inquiet de voir Harry Potter, son ennemi juré, si proche. Il recula lorsqu'il remarqua que sa baguette avait disparu. Enfin, le jeune Serpentard découvrit son directeur de maison.

« Severus ! Où sommes-nous ? Où sont les autres ? » demanda-t-il, affolé.

« Pas maintenant, Draco. » répondit sèchement Snape en continuant ses incantations.

« Mais qu'est-ce qu'il fait ici ? Pourquoi n'est-il pas attaché ? » hurla Draco, en s'approchant de Snape, complètement paniqué.

« Il n'est pas attaché parce qu'il n'est pas mon prisonnier, Draco. » répondit Snape, sèchement.

« Mais… Je ne comprends pas. On doit l'amener au Seigneur des Ténèbres ! » poursuivit Draco, une note d'angoisse dans la voix.

« Nous ne ferons rien de tel, Draco. » siffla Snape, en regardant son filleul dans les yeux. « Le moment des explications n'est pas encore arrivé, alors va t'asseoir. » ordonna-t-il.

« Mais… »

« J'ai dit 'Va t'asseoir', Draco. » gronda l'homme, menaçant.

Harry remarqua que Snape avait le même effet sur lui que sur Draco. Interdit, le jeune Serpentard recula et s'assit à l'opposé de Harry. En observant son ennemi, Harry eut presque pitié de lui. Le blond avait l'air si incertain, si perdu. Il devait se poser exactement la même question que Harry, en ce moment même : qui était Snape ?

Après quelques minutes d'un silence d'une lourdeur insupportable, Snape se dirigea finalement vers la maison.

« Vous pouvez décider de rester dehors ou de rentrer dans la maison, cela m'est bien égal. Mais sachez que vous ne pourrez pas sortir à vingt mètres d'où vous vous tenez et que vous ne pouvez pas communiquer avec l'extérieur. » annonça Snape, froidement avant de pénétrer dans la bâtisse.

Harry et Draco se lancèrent un regard. Le blond se leva précipitamment et suivit le maître des potions à l'intérieur.

Harry ne parvenait pas à bouger. Son monde venait littéralement de s'effondrer. Enfin seul, il s'autorisa à laisser aller ses larmes. Malgré la fraicheur de la nuit et le besoin de comprendre, il n'arrivait à se résoudre à rentrer dans cette maison. Il ne pouvait se résoudre à regarder dans les yeux celui qui venait de le détruire. Il venait de perdre Dumbledore, son pilier, le seul et l'unique. Il lança un regard plein d'envie au lac, derrière lui. Et s'il se noyait physiquement dans ce lac comme il se sentait mentalement noyé dans son chagrin ?

Avant que ces pensées noires n'aient le temps de se former avec conviction, il entendit Snape l'appeler depuis la porte d'entrée de la maison.

« Potter ! Malefoy veut des explications et je ne vais pas perdre de temps à me répéter. Entrez dans cette maison. » ordonna-t-il, froid.

« Je vous emmerde ! Je n'en veux pas de vos explications ! Vous avez tué Dumbledore ! » hurla Harry entre deux sanglots. Il avait beau savoir qu'il n'avait aucune échappatoire, l'adolescent ne pouvait calmer sa colère.

« Que vous souhaitiez ou non ces explications, vous allez devoir les entendre, Potter. Vous vous croyez si supérieur et si arrogant que vous pensez tout savoir. Mais la vérité, Potter, c'est que vous ne savez rien. Vous vous croyez important dans votre petit monde, persuadé que vous êtes un héros et que le bien triomphe toujours. Mais vous n'êtes pas un héros ! Vous n'êtes qu'un sale gamin qui n'a rien compris ! » Répliqua Snape, haussant le ton. « Vous voulez que le bien triomphe ? Alors vous feriez mieux de venir écouter l'horreur qu'est vraiment le bien. » acheva-t-il en retournant à l'intérieur.

Harry ne put empêcher un cri de rage de quitter ses lèvres, une fois Snape retourné. Il devait admettre que Snape avait raison : il ne comprenait plus rien. Il pensait naïvement que le bien et le mal étaient deux concepts fondamentalement opposés. Dumbledore avait été son image absolue du bien et Snape son image parfaite du mal. Pourtant, ce soir, alors que Snape venait de tuer Dumbledore et qu'il l'avait amené lui, Harry Potter, dans un endroit loin de Voldemort, ces deux concepts se mélangeaient amèrement.

Harry se releva avec difficulté et se dirigea lourdement vers la maison. Lorsqu'il entra, il découvrit une grande pièce lumineuse. Un feu de cheminée grondait dans l'âtre face à lui. Malefoy était assis sur un canapé vert olive et se réchauffaient les mains auprès des braises. Deux fauteuils dépareillés entouraient le canapé. Sur la table basse en bois, au centre, se trouvaient quelques bougies et un livre de potions. De l'autre côté de la pièce, une très longue et large table en bois brut trônait, sur un tapis persan. Des petites lampes aux couleurs diverses illuminaient la pièce en différents endroits. Harry songea que l'ambiance de la pièce entrait en complète contradiction avec la discussion à venir. Malgré la douceur de l'endroit, Harry se sentait nerveux, raide, et infiniment désarmé sans sa baguette.

« Asseyez-vous, Potter. Je suis fatigué et je n'ai pas de temps à perdre. » ordonna sèchement Snape.

Harry le regarda d'un air de défi et s'adossa au mur, près de la cheminée. Il ne pouvait supporter l'idée d'être assis à côté de ce misérable Malefoy et encore moins face à la hauteur menaçante de Snape. Il croisa les bras sur son torse, dans un attitude de franche confrontation.

« A votre guise. » concéda Snape en se servant un whisky.

« Tu ne vas même pas partager, après cette horrible nuit ? » aboya Malefoy à l'adresse de son parrain.

Snape sembla réfléchir un instant puis fit apparaître deux nouveaux verres qu'il remplit allègrement.

« Peut-être que l'ivresse saura vous rendre dociles. » admit-il avant de poser les verres sur la table. Les deux adolescents ne se firent pas prier et se précipitèrent dessus.

Harry n'avait jamais bu de whisky mais ce soir semblait être le meilleur moment pour commencer. Dès qu'il avala sa première gorgée, il ressentit plusieurs sensations simultanées qui le décontenancèrent. D'abord une intense brûlure dans la gorge. Ensuite, une sensation de chaleur agréable dans son estomac. Enfin, un flot de douceur qui apaisait ses muscles. Harry se laissa alors aller dans un fauteuil, opposé à Malefoy et à Snape. Ses nerfs se détendant enfin, il sentait la fatigue lui tomber dessus.

« Ce que vous avait vu ce soir faisait parti du plan. » commença-t-il. « Du moins en parti. » ajouta-t-il, mystérieux.

« Le plan de qui ? Pourquoi ne sommes-nous pas avec le Seigneur des Ténèbres ? » coupa Malefoy en faisant violemment retomber son verre sur la table.

« C'est le plan de Dumbledore que je suis. » admit Snape en plongeant ses prunelles noires dans celles de Malefoy.

« Quoi ? » s'écria Malefoy en se levant immédiatement. « Tu… Tu es un traitre ! » hurla-t-il. Il y avait de l'étonnement dans ses yeux, mais aussi de la colère. Et, ce qui n'échappa pas à Snape, une sorte de soulagement.

« Je suis un espion, plus précisément. » poursuivit Snape, calme. « Je suis un espion depuis très longtemps. Depuis quinze ans, exactement. » précisa-t-il.

« Personne ne croira plus ce mensonge, Snape. Vous venez de tuer celui pour qui vous espionnez depuis des années. Vous venez de tuer le seul qui vous faisait vraiment confiance. » dit Harry, amer, se relevant pour faire les cent pas.

« Cela faisait parti du plan. » expliqua de nouveau Snape, calme.

« Mais de quel plan tu parles ? Qu'est-ce que je fais ici, avec toi ? Je ne suis pas un traitre ! » interrompit Malefoy, hors de lui.

« Tu n'es rien, Draco. Tu n'es qu'un enfant que le Seigneur des Ténèbres n'hésitera pas à tuer une fois qu'il saura que tu n'as pas réussi à accomplir ta mission. » répondit Snape, grave.

« Mais si tu m'avais laissé faire, j'aurais tué ce vieux Dumbledore ! J'aurais pu être quelqu'un de très important si tu n'étais pas intervenu ! » hurla Malefoy.

« Tu n'aurais rien fait du tout, Draco. Tu n'aurais rien pu faire parce que tu étais mort de peur. » rétorqua calmement Snape.

« C'est faux ! Je n'avais pas peur ! J'étais prêt ! ». Les yeux de Malefoy semblaient lancer des éclairs. Harry ne l'avait jamais vu aussi enragé.

« Tu n'es qu'un enfant, Draco. Comment aurais-tu pu être prêt à tuer un sorcier comme Dumbledore ? » demanda doucement Snape.

« Mais j'étais prêt ! » poursuivit Draco, sans grande conviction. Snape put clairement discerner de légers tremblements sur le menton de son filleul. « Pourquoi tu m'as fait ça ? Tu as mis mes parents en danger ! » s'écria-t-il, une larme roulant sur sa joue.

« Je n'ai pas eu le choix, Draco. J'ai fait le serment à ta mère de te protéger. Je n'avais pas le choix, crois-moi : j'ai fait le serment inviolable. » dit Snape, dur.

Harry et Draco réprimèrent un cri de surprise.

« Mais pourquoi a-t-elle fait ça ? Mère a toujours suivi le Seigneur des Ténèbres ! » s'étonna le blond.

« Ta mère n'as pas d'autre choix que de le suivre, Draco. Mais elle sait depuis toujours qu'il est horriblement dangereux. Lorsqu'elle a compris que Voldemort s'intéressait à toi, elle m'a fait jurer de te protéger de tout, et surtout de lui. Ce soir, je n'ai fait que respecter mon serment : si je t'avais laissé en haut de la tour, nous serions tous les deux morts à l'heure qu'il est. » expliqua-t-il, amer.

« C'est impossible… Non, impossible… » murmura Malefoy, se rasseyant et plongeant la tête dans ses mains.

« Ta mère a eu raison, Draco. Elle devait te protéger, et c'était le seul moyen. Elle savait, depuis le début, que j'étais un espion pour Dumbledore et non l'inverse. Ta mère a toujours fait preuve de beaucoup de perspicacité. Contrairement à ton père. » insista Snape, placidement.

« Ne parle pas de mon père ! Comment oses-tu parler de mon père ? C'est ton meilleur ami et tu l'as trahi ! » s'éructa Draco en s'éjectant de nouveau de son siège et en empoignant le col de la robe de Snape.

Harry ne put s'empêcher un petit rire. Il n'y avait rien de drôle dans cette scène. Mais l'amertume qu'il ressentait face à ces révélations le rendait cruel. Tout était si absurde.

« Regardez, vous ne savez que vous faire des ennemis, Snape. Vous n'êtes qu'une ordure qui trahit ses amis. J'espère que vous mourrez lentement et douloureusement. » lâcha le Gryffondor, sentant l'alcool libérer ses barrières et lui donner du courage.

Un long silence s'abattit sur la pièce. L'air était électrique. Tous les trois s'attendaient à voir Snape se précipiter sur Harry, pour lui administrer une violente réprimande. Mais rien ne se passa.

« J'espère pour vous deux que ma mort n'arrivera pas trop tôt. Malheureusement pour vous et pour moi, je suis votre unique moyen de survie. » se contenta de rétorquer Snape en rejetant son filleul d'un coup d'épaule. « Vous avez eu votre lot de révélations pour ce soir. Nous parlerons demain du plan d'action, qui est dorénavant guidé par mes soins. A l'étage, vous trouverez vos chambres respectives. La salle de bains est au bout du couloir. » indiqua Snape froidement en fixant la lune à travers la fenêtre donnant sur le lac.

« Nous n'avons pas terminé ! Vous n'avez rien expliqué du tout ! Vous avez tué Dumbledore ! » s'écria Harry. Lorsque Snape ne réagit pas, l'adolescent lança son verre vide à travers la pièce, dans un accès de rage.

Le verre éclata dans un fracas dramatique. Se retournant enfin vers Harry, Snape lança à l'adolescent un regard plein de calme froid.

« Je ne répondrai pas à votre colère enfantine, Potter. Si vous voulez vraiment comprendre, vous obéirez. » gronda-t-il, menaçant.

Il y eut un instant durant lequel Harry se sentit l'audace de répliquer. Le whisky le faisait se sentir brave et déterminé. Pourtant, lorsqu'il ne parvint pas à soutenir le regard du sombre maître des potions, il sut qu'il ferait exactement ce qu'il lui ordonnait. Détachant son regard des prunelles sombres qui le tétanisaient, Harry se dirigea rageusement vers les escaliers. Lorsqu'il referma la porte sur laquelle était gravé son prénom, il entendit distinctement Snape ajouter « Toi aussi, Draco. Je ne me répéterai pas. ».

Les deux adolescents se savaient face à face, cette nuit. Leurs deux noms se regardaient enfin, dans le couloir de cette maison étrangère.