Résumé des chapitres précédents
Après avoir prit la folle décision de retourner de 25 ans dans le passé, Harry se retrouve pourchassé par les aurors pendant toute une semaine. Mais grâce à l'une d'entre eux, une jeune femme nommée Marlène McKinnon, il parvint à fuir l'Angleterre pour se réfugier chez un certain Dearborn, en Amérique du Nord.
Pendant quatre ans, Harry étudie toutes sortes de magies, jusqu'à finalement rentrer dans son pays natal sous une nouvelle identité, celle de Caradoc Dearborn... Futur professeur de Défense contre les Forces du Mal à Poudlard.
3 Juillet 1976
Poudlard.
Elle était là, devant lui. Elle se dressait de toute sa hauteur, de toute sa puissante, de toute sa magnificence, défiant le ciel de sa simple existence. Ses tours caressaient le ciel avec majesté. Sa porte close lui faisait face avec fermeté. Sa magie chatouillait la sienne, en un mélange hétéroclite d'origine. Il sentait la vigilance d'un aigle, la fierté d'un lion, l'ingéniosité d'un blaireau, la prudence d'un serpent… Et toute cette puissance que les élèves laissaient derrière eux à chaque fois qu'ils quittaient l'enceinte du château magique.
Pour Harry, Poudlard avait toujours été une amie. Une confidente. Une maison qui l'accueillait, qui le protégeait, qui le nourrissait. Elle prenait soin de lui, l'entourait d'un étrange amour qu'il n'avait pas toujours pu saisir et comprendre. Il était autrefois un habitant de Poudlard. L'avait considéré comme son foyer, son refuge, son chez-lui.
Mais après quatre ans, il se présentait de nouveau face ces pierres, ces drapeaux, ces grilles. Il retournait sur le seuil de cet immense château, avec le poids de ses décisions, de son vécu, de ses nouvelles connaissances. Et maintenant, Harry savait qu'il n'avait plus rien d'un habitant de Poudlard.
L'enfant était devenu un homme. Un sorcier accompli. Un adulte ayant fait des choix, ayant vécu des choses en dehors de ces murs protecteurs. Il avait appris des matières jamais enseignées ici, avait fait des rencontres impossibles à faire en sein. Il avait construit une maison, avait choisi sa propre voie, indépendamment de ce que Poudlard aurait sans doute souhaité pour lui…
Harry n'était plus l'habitant d'un château magique…
… Mais il était resté l'un de ses nombreux enfants. Un fils à qui elle avait appris, un fils qu'elle avait élevé, un fils qu'elle avait aimé et qui l'avait aimé en retour.
Poudlard était une mère, bienveillante, protectrice. Harry se présentait devant elle avec la nervosité d'un enfant qui voulait juste être accepté par celle qui avait tant prit soin de lui à l'époque. Même s'il savait que le château ne pouvait pas le reconnaitre, qu'il ne l'avait pas encore vu grandir.
Et pourtant, la magie de Poudlard perçut le profond désir d'Harry. Elle se présenta à lui, l'entoura de toute sa présence. Elle l'étudia, se connecta à lui et, bientôt, fut chaleureuse, accueillante, aimante. C'était comme une main tendue, une caresse délicate, qui accueillait son retour et qui acceptait son futur sans concession.
- Mr Dearborn.
Harry sursauta violemment à la soudaine intonation. Il quitta la douce étreinte de la magie de Poudlard pour se tourner vers le nouvel arrivant, et un étrange sourire naquit sur ses lèvres en reconnaissant le possesseur de cette longue barbe blanche, de cette tenue colorée, de ces yeux pétillants de malices.
Dumbledore.
A quel point pouvait-il ressembler à son alter-égo, qu'Harry avait vu tomber de la Tour d'Astronomie ? Et à quel point pouvait-il être différent de celui qu'il avait vu disparaitre sous terre… ?
Le mage avait les mêmes rides, les mêmes lunettes, les mêmes cheveux, les mêmes gouts vestimentaires que le plus jeune lui avait toujours connu. Il avait toujours le même sourire, les mêmes yeux pétillants, la même manie de joindre ses mains…
Pourtant, son regard ne brillait pas de sagesse et d'acceptation. Ses mains étaient toutes deux pleines de vitalité et d'agilité, prête à sauter sur sa baguette. Sa posture se prêtait plus à l'attaque qu'à l'écoute.
Dumbledore n'était pas le mentor, le professeur et le stratège d'Harry. Face à lui, le vieux mage se dressait en chef de guerre, en combattant, en chevalier au service de la Lumière. Il lui faisait face telle une menace silencieuse, tel un avertissement de puissance et de sa dangerosité.
Alors pourquoi Harry ne pouvait voir en lui que cet homme qui lui confiait autrefois, sur un ton complice, les étranges mots de passe qui menaient à son bureau ? Pourquoi reconnaissait-il l'homme qui l'avait veillé après sa première confrontation contre Voldemort ? Celui qui l'avait cru quand il avait accusé Lucius Malfoy d'avoir lâché le Basilic sur Poudlard ? Celui qui lui avait donné la chance de sauver son parrain un sombre soir de juin ?
… Celui qui ne l'avait pas préservé du Tournois des trois sorciers. Celui qui l'avait ignoré pendant une année. Celui qui lui avait caché la prophétie, qui l'avait obligé à vivre un enfer avec Rogue. Celui qui avait refusé d'entendre ses craintes sur Drago Malfoy, celui qui l'avait stupéfixié alors qu'il savait que l'horrible chauve souris allait le tuer de sang-froid….
Harry ferma les yeux un moment. Prit une inspiration discrète. Non. Ce Dumbledore n'était pas l'homme qu'il avait toujours connu. Il n'était pas ce mentor, cette figure familiale distante qui jouait avec sa vie comme l'on jouait avec une pièce d'échec.
Il ne l'était pas encore… Et ne le serait plus jamais. Dans les bons comme dans les mauvais moments.
- C'est bien moi, Mr Dumbledore, répondit Harry en saluant respectueusement le directeur. Je ne m'attendais pas à ce que vous veniez me chercher en personne à l'entrée même de Poudlard. C'est un honneur de faire votre rencontre.
- En ces temps troublés, je préfère veiller personnellement sur les personnes qui traversent ce portail, reprit Dumbledore sur un ton serein, malgré la prudence de ses mots et leur menace sous-jacente. Mais l'honneur est partagé, Mr Deaborn.
Le professeur l'invita à entrer et le jeune homme suivit le geste. Ils passèrent le portail, traversèrent le parc de Poudlard, montèrent le long de la pente pour rejoindre les portes du château. Harry se laissa entrainer, sans pour autant empêcher son regard de dériver sur ce paysage qu'il connaissait si bien et qu'il chérissait si fort.
Près du lac, il y avait cet arbre sous lequel il s'asseyait souvent, avec Ron, Hermione et, avant de partir, Ginny. La dernière fois qu'il avait embrassé sa petite amie, c'était ici même.
Au loin, il y avait la cabane d'Hagrid et son potager. Pour Harry, c'était le gout des caramels durs comme des cailloux, l'odeur de chien mouillé de Crocdur, la chaleureuse écoute du géant. C'était les Acromentules, les hippogriffes, leur cachette quand les Serpentards devenaient trop insupportables.
C'était aussi le feu qui avait consumé le toit de chaume lors de la fuite des Mangemorts…
La forêt interdite s'élevait en une barrière infranchissable et dangereuse. Harry n'y avait connu que du danger à l'intérieur. Des dragons, des licornes mourantes, des sombrals… Il l'avait pensé suffisamment dangereuse pour protéger Poudlard, à une époque… Mais elle avait cessé de lui paraitre comme un mur protecteur quand Rogue avait prit la fuite grâce à elle.
La porte de la Grande Salle lui rappelait les banquets interminables, les répartitions, les lettres de Sirius, l'enterrement de Dumbledore.
Les couloirs étaient un souvenir de ses longues journées de cours, de ses courtes sorties nocturnes à esquiver les professeurs, de la rage ardente qui l'avait poussé à chasser Malfoy.
Les statues étaient le symbole de leurs escapades, de la protection du château, des passages secrets.
Le bureau de Dumbledore était… trop de choses pour être résumé. Comme un mélange de confiance, de fierté, d'affection, mêlé à du devoir, de la déception et de la tristesse. C'était les rendez vous qui signaient la fin de l'année et de ses aventures. C'était les confidences de deux guerriers trop souvent au combat. C'était les cours du soir d'un vieil homme qui transmettait son fardeau à son héritier…
C'était la destinée immuable d'Harry, et les dernières recommandations d'un homme trépassé…
Pourtant, il y avait aussi une part de nouveauté dans ces images presque tirées du passé. Des petites choses qu'Harry n'avaient jusque là jamais vues, mais qui ressortaient d'autant plus avec son regard d'adulte.
Ici, des mécanismes pour faire tourner les escaliers comme on le désirait. Là, des cercles de runes habillement dissimulées dans la paume des statues. Des pierres précieuses incrustées ça et là pour alimenter la magie des protections. Et des artefacts plein le bureau de Dumbledore.
Harry n'eut aucun mal à reconnaitre la plupart des objets, contrairement à son lui plus jeune. Il percevait des amplificateurs de magie, des protecteurs de l'esprit, des détecteurs de magies noires dont l'un brillait d'un pâle oranger. Il devinait des fioles pour préserver la clarté de l'esprit, des statues pour inciter l'invité à dire la vérité, des sphères pour avoir un œil sur tout le château.
- Installez-vous, reprit Dumbledore en interrompant la contemplation d'Harry.
Ce dernier détourna les yeux de la foule d'artefacts et prit place sur le siège des invités, face au directeur. Celui-ci le regardait à présent avec clairvoyance et cherchait le contact de ses yeux pour exercer sa magie de l'esprit. Harry savait qu'il faisait ça pour percevoir les vibrations de mensonges dans les pensées immédiates, comme les Legilimens le faisaient souvent. Cependant, le jeune homme n'avait pas l'intention de se laisser faire, et choisis plutôt de regarder fixement le nez de l'homme pour ne pas lui offrir le plaisir de lire en lui comme un livre ouvert.
- Vous postulez donc pour le poste de Défense contre les forces du mal… résuma Dumbledore tout en sortant le parchemin de son profil. Vous n'êtes pas sans savoir que c'est un poste qui demande des compétences particulières, et que je me dois de rester prudent quant à mes professeurs.
Harry pensa brièvement à Quirrell, à Lockhart, à Croupton Junior et à Rogue lui-même. La phrase de son professeur lui semblait bien ironique, compte tenu de ses propres connaissances du futur.
- Posez-moi toutes vos questions, Monsieur Dumbledore. Je ferais au mieux pour y répondre, proposa Harry en joignant ses mains sur le bureau tout en continuant de regarder le nez de son ancien mentor.
- Je vais être franc puisque vous me le permettez, Monsieur Dearborn : Pourquoi quitter votre Amérique natale pour vous rendre en Angleterre, alors que nous sommes en pleine guerre ?
Puisque l'identité actuelle d'Harry, Caradoc Dearborn, était originaire d'Amérique du Nord, il n'était pas étonnant que sa présence ici soit la première question posée par Dumbledore. Surtout dans le contexte dans lequel se trouvait son pays d'origine…
Même après quatre ans, Harry n'avait jamais cessé de se renseigner sur l'état du monde sorcier anglais... Et quelle ne fut pas sa douleur de constater, jours après jours, mois après mois, de l'influence grandissante des Mangemorts, de la puissance et de la dangerosité croissante de leur maitre… Le conflit et la corruption s'étaient aggravés dans tous les aspects du monde magique britannique, au point que même la Gazette des Sorciers peinait à décrire l'entièreté de l'horreur des évènements qui secouaient l'île.
Moins d'un an après son départ, une brigade spéciale d'Aurors avait été formée pour tenter de parer les attaques éclairs des Mangemorts. Si, au début, elle s'était avérée efficace, les forces de Voldemort avait rapidement prit le pli de court-circuiter ses interventions grâce à de faux témoignages, de faux appels et des lourdeurs administratives. Harry avait même suspecté la présence plusieurs rituels sur place pour empêcher les victimes de Voldemort d'appeler de l'aide… Mais si c'était le cas, les Mangemorts comptaient dans leur rang de très bons nettoyeurs, car aucune trace d'un tel sort n'avait été trouvée sur les lieux.
En 1973, le terme de « Vous savez-qui » avait couramment remplacé le nom de Voldemort parmi les sorciers anglais. Harry avait toujours pensé que l'expression s'était imposée suite à un Tabou posé sur le nom de son ennemi, mais il avait eu la mauvaise surprise de découvrir que la peur du nom avait été initiée par les Mangemorts eux-mêmes : Durant leur raids, ces derniers interdisaient à leurs victimes de prononcer le nom de leur Seigneur, en leur promettant milles souffrances pour respecter leur autorité. Les rares survivants avaient tôt fait de transmettre leur volonté, et la peur avait poussé le commun des mortels à les imiter.
En 1974, au milieu de l'été, les raids Mangemorts sur les moldus étaient devenus de plus en plus violents. Fini les attaques ciblés sur des petites villes comme celle qu'Harry avait visitée peu après son arrivée dans sa nouvelle époque. A présent, de véritables frappes guerrières touchaient les moldus, au point de surcharger le travail des oubliators. De plus, les attaques n'épargnaient maintenant plus le peuple sorcier, que ce soit les cracmols ou les nés-moldus. Plus personne ne se sentait vraiment à l'abri des Mangemorts.
C'était d'ailleurs pour cette raison qu'en 1975, la ministre Eugénia Jenkins avait été forcée de quitter son poste pour le laisser à un certain Harold Minchum. Harry avait lu dans les journaux que cet homme était un guerrier dans l'âme, que l'on disait « capable de faire face à la monté en puissance du Seigneur des Ténèbres». Cela lui avait rappelé Scrimgeour, que le jeune homme n'avait que peu connu. A l'époque, on lui avait dépeint l'homme comme étant inflexible… Mais dans les faits, il n'avait fait que cacher la misère sous le tapi.
Donc oui, la Grande Bretagne était bel et bien en guerre pour Harry, même si celle ci était invisible, corruptive, rampante comme un poison. La peur chassait tous les ressortissants étrangers ou les potentiels touristes, et même les riches familles anglaises, celles qui n'étaient pas engagées dans le conflit, préféraient se réfugier ailleurs en Europe.
Il fallait être fou pour venir ici de son plein gré alors qu'un tel danger rodait partout.
- Monsieur Dumbledore… reprit finalement Harry en tournant les yeux vers le directeur de Poudlard. Je suis entièrement d'accord avec vous. La Grande Bretagne est en guerre, et il n'y a pas d'autres mots pour définir la situation de ce pays… Et c'est précisément dans des moments comme ceux là que les enfants ont le plus besoin de professeurs compétents, qui peuvent leur enseigner comment survivre dans des temps aussi troublés. S'ils doivent se défendre, s'ils doivent protéger les personnes qui leur sont chères, il faut qu'ils aient le bagage magique pour le faire.
Harry songea à Hermione, à Ron, à Neville, à Luna et à tous les membres de l'Armée de Dumbledore. Ses motivations actuelles avaient beau s'inscrire dans un plan plus large pour vaincre Voldemort, il continuait néanmoins à penser qu'il fallait apprendre aux plus jeunes à se défendre : Dean était peut-être né parce que son père sorcier avait réussit à se protéger contre les Mangemorts ? Peut-être que Lily avait réussit à protéger son fils parce qu'elle avait eu un bon professeur, capable de lui enseigner la magie comme il le fallait ?
Harry voulait être ce professeur. Il voulait, par ses leçons, permettre à de jeunes gens de survivre à la guerre. Leur permettre un avenir, une famille, une vie loin des batailles meurtrières de Voldemort.
- Vous saviez donc, pour la guerre, nota Dumbledore, sans surprise manifeste. Peu de gens osent appeler ces temps troublés ainsi. Ca leur rappelle de mauvais souvenirs. Pourtant, vous êtes là.
- Je suis un professionnel de la lutte contre la magie noire. Je sais toujours ce qui m'attend lorsque je me déplace quelque part, et je sais dans quoi je m'engage aujourd'hui. Vous pouvez penser ce que vous voulez de moi, mais sachez que je partage la même motivation que mon père : Je souhaite transmettre mon savoir et assurer la survie de mes pairs.
Le regard du vieux sage se dirigea vers la droite, vers ses artefacts plus précisément. Harry savait qu'il vérifiait son honnêteté grâce aux détecteurs de mensonges présents dans la pièce. Puisque le plus jeune refusait toujours de le regarder dans les yeux, le professeur ne pouvait que se reposer sur ses outils pour démêler le vrai du faux dans les mots d'Harry. Mais ce dernier restait parfaitement détendu : il n'avait dit que la vérité.
Cela dit, Dumbledore avait une raison de rester sur ses gardes avec Harry et ce dernier comprenait la source de son inquiétude : le détecteur de magie noire émettait toujours une faible mais inquiétante lueur orangé. Le jeune sorcier ne pouvait évidemment pas expliquer pourquoi les traces d'une magie sombres se trouvaient sur lui… Alors il ne pouvait que sourire en réponse au questionnement silencieux du vieux sage.
- Si mes sources sont bonnes, votre père enseigne la défense contre la Magie Sombre et les Mages noirs à l'Académie de Défense contre les Forces du Mal ? Reprit le directeur.
Harry hocha la tête. Un sourire tranquille naquit sur ses lèvres au rappel de ce professeur qui lui avait tout appris, de cet homme qui l'avait prit sous son aile et qui lui avait donné sa première maison, sa première place dans ce nouveau monde.
- Il m'a tout enseigné : comment me défendre, comment voir le monde de manière juste, comment protéger les plus faibles face aux attaques ennemis… Nous partageons aussi la fibre professorale. Nous avons estimé tous les deux que ma place était ici, malgré les dangers.
Néanmoins, Harry soupira à la fin de sa phrase et prit un air grave.
-Je préfère être franc avec vous, ceci dit : Si je suis pris sur ce poste, je ne resterais ici qu'un an.
Dumbledore fronça les sourcils à cette mise en garde mais aucune surprise ne teintait son regard, comme s'il connaissait déjà l'étrange malédiction qui pesait sur le poste de professeur de Défense contre les Forces du Mal. Cela dit, Harry n'aurait pas du la connaitre… Et la méfiance s'installa de nouveau entre eux. .
- Y-a-t-il une raison à cette décision ? Si vous restiez plus longtemps à Poudlard, vous pourriez aider plus de vos élèves.
Harry était bien d'accord sur ce fait. Rester professeur à Poudlard était une perspective qui le tentait beaucoup… Mais, malheureusement, il avait connu trop de fin d'année scolaire tragique pour prendre le risque de rester plus longtemps. Le sort de Quirrell, Lockhart, Croupton ou Ombrage était un avertissement suffisant pour lui.
- C'est vrai, répondit-il, mais j'ai d'autres missions qui m'attendent ailleurs.
Harry restait évasif et Dumbledore le regarda intensément, comme pour percer les pensées que le jeune homme cachait derrière ses yeux. Néanmoins, ce dernier ne lui donna pas satisfaction et continua d'esquiver son regard, forçant le vieux sage à se concentrer une nouvelle fois sur le parchemin qu'il avait devant ses yeux.
- Vous êtes assez jeune pour enseigner. Je vois ici que vous n'avez que 32 ans.
Harry eut un sourire tranquille à cette remarque. Des exemples de personnes plus jeunes que lui, il y en avait eu beaucoup à Poudlard. Lockhart et Rogue notamment, puisque l'un avait fêté ses 29 ans en cours d'année et l'autre avait prit le poste à seulement 21 ans. Dans les faits, Harry était aussi jeune que le Severus Rogue de l'époque… Il avait juste choisi d'aborder l'âge de la personne dont il avait prit l'identité pour plus de simplicités administratives, même si cela lui demandait de prendre régulièrement une potion de vieillissement de longue durée.
- Je suis peut-être jeune, mais je suis compétent, et vous le savez, Monsieur Dumbledore. J'ai déjà fait face aux Forces du Mal de nombreuses fois, par le passé. Je suis capable de protéger les jeunes enfants tout en leur apprenant à se prémunir du danger. Je peux aussi déceler ceux qui peuvent être tentés par la magie noire, et les guider là où ils trouveront de l'aide et du soutien. Et je sais que, par les temps qui courent, peu de gens se risqueraient à prendre ce poste et à endosser ces responsabilités.
Harry n'avait peut-être pas été très diplomate, mais il savait qu'il avait fait mouche : Même en temps de paix, Dumbledore avait toujours eu du mal à trouver des sorciers adéquats pour le poste de professeurs contre les Forces du Mal. Alors en temps de guerre ? Une personne comme Harry représentait une perle rare. Dumbledore ne pouvait pas passer à coté, et ils le savaient tous les deux.
Mais bien sur, le vieux professeur ne croyait toujours pas aux nobles motivations d'Harry, malgré ses mots, malgré ses artefacts… Et il avait raison de le faire. Accorder sa confiance à un inconnu était une erreur qu'Harry avait faite de nombreuses fois, une erreur qu'il ne voulait plus jamais refaire maintenant qu'il en connaissait les risques. Alors, il ne pouvait pas en vouloir à son ancien mentor de garder un œil sur lui.
Le vieux mage finit par soupirer en arrivant aux mêmes conclusions qu'Harry et jeta un dernier coup d'œil discret à ses artefacts. Puis, d'un signe de main, il invoqua un service à thé.
- Voulez vous une tasse ? proposa-t-il gentiment.
- Je ne préfère pas, merci, répondit poliment Harry. Pour ceux qui combattent les Forces du Mal, il n'est jamais bon d'accepter quoi que ce soit d'inconnus.
Cette remarque fit étonnamment rire Dumbledore. Il se servit d'une belle tasse de thé et souffla doucement dessus pour en chasser la fumée.
- J'ai un ami qui est ainsi, répondit paisiblement le mage. Il refuserait même de boire l'eau de Poudlard.
Maugrey. Harry avait déjà vu l'imposteur préférer sa flasque à n'importe quelle tasse et il supposait, à raison surement, qu'il justifiait cette manie du véritable Auror.
- Il existe tout de même des sorts de vérification efficace, reprit le jeune homme. Je les emploie naturellement sur tout ce qui est destiné à être consommé. Ce n'est jamais sain de se cantonner à ses propres ressources, la paranoia ne s'arrêterait jamais sinon.
- Pourtant, les potions et les poisons placés sur la nourriture peuvent évoluer au-delà de ceux couverts par les sorts de vérifications, souleva justement Dumbledore et Harry eut un sourire amusé à cette remarque.
- Pourquoi se cantonner aux sorts que d'autres développent pour assurer sa propre sécurité ?
Dumbledore eut un regard pétillant à cette question et regarda longuement Harry. Ce dernier sut que, par cette phrase, le vieux sage avait comprit quel genre de sorcier il était. Quel genre de sorcier il pourrait être pour lui.
En sortant, Harry savait qu'il avait déjà le poste de professeur.
5 septembre 1976
Lorsqu'Harry se réveilla ce matin là, il faisait agréablement chaud. Le soleil passait par la fenêtre et jouait avec les rideaux de sa chambre, comme pour le tirer gentiment du sommeil. Un petit vent filtrait par la vitre entrouverte et chatouillait sa joue. Sur le rebord, Hedwige le regardait avec attention, et hulula doucement lorsqu'elle vit son sorcier la regarder.
- Bonjour ma belle, murmura ce dernier avant de se relever lentement du lit.
Il lui tendit quelques friandises et caressa ses plumes avant de la laisser aller se reposer sur son perchoir. Sur la commode, le journal l'attendait patiemment, preuve que son adorable chouette avait encore chassé le porteur du quotidien pour rester la seule et l'unique dans le cœur de son sorcier. Harry gloussa de l'attention et attrapa le journal et ses lunettes avant de descendre dans sa cuisine pour déjeuner.
Les nouvelles de ce jour n'étaient ni bonnes, ni mauvaises… pour un contexte de guerre, bien sur. Les attaques sur les moldus étaient malheureusement monnaies courantes dans les pages de la Gazette du Sorcier depuis trois ans… Et c'était terrible qu'Harry puisse s'habituer à lire de telles horreurs chaque jour.
Mais malheureusement, le journal ne pouvait pas faire état de la véritable guerre qui se déroulait dans l'ombre. Harry était conscient de la corruption qui gangrénait peu à peu le monde sorcier anglais. Etait conscient de ces batailles d'idées entre Voldemort et Dumbledore. Mais hélas, sans espion infiltré, il était impossible pour le jeune homme d'en comprendre toute l'ampleur. Les rares brides d'informations qu'il obtenait venaient de McKinnon, par l'intermédiaire de Dearborn, et même elle ne semblait pas dépeindre toute la vérité.
A la fin du journal, Harry soupira et rangea le numéro dans une bibliothèque dédiée. Il remonta ensuite dans la salle de bain et y remplit une grande bassine d'eau froide. Après une grande inspiration, il plongea son visage dans l'eau et expulsa tout l'air de ses poumons. La sensation fut saisissante, suffisamment pour chasser la lourdeur de la fatigue, pour lui éclaircir les idées, pour calmer le stress qui le menaçait. Et c'était dans ces moments de calme qu'il pouvait se souvenir de son plan, qu'il pouvait retrouver la patience d'attendre au lieu d'intervenir frontalement dans tout ce gâchis de vies et d'avenirs que détruisait Voldemort.
Harry avait un plan. Il devait le suivre à la lettre. Il avait trop abandonné pour juste se jeter tête la première dans la bataille.
Une fois plus calme, le jeune homme releva finalement la tête hors de l'eau et reprit une grande inspiration. Il attrapa une serviette pour s'essuyer le visage avant de remettre ses lunettes. Son regard se posa immédiatement sur le reflet d'un homme âgé d'une trentaine d'année : De longs cheveux roux, un regard brun intense, un visage carré, une carrure finement musclée et une peau hâlée par le soleil. Son front était libéré de sa cicatrice, son poignet ne comportait aucune inscription. Il portait un bracelet de perles noires, une paire de lunettes plus ovale que ronde, une chaine autour du cou avec un pendentif rond plutôt épais et une petite montre à gousset qui se cachait dans les plis de la poche de sa robe.
- Je ne m'y habituerais jamais, marmonna Harry en détournant le regard du miroir.
Ce n'était définitivement pas son véritable lui… Mais c'était l'apparence qu'il avait choisi pour revenir en Angleterre. C'était l'apparence qu'il allait aborder sous le nom de Caradoc Dearborn. C'était sa couverture pour agir dans ce monde. Le nom d'une personne si chère à son cœur et sa baguette. L'apparence de ces parents qu'il n'avait jamais vraiment connus. La connaissance de ce vieux professeur qu'il avait laissé en Amérique.
Harry prit une nouvelle inspiration et quitta la salle de bain. Il se rendit dans sa chambre, ou trônait un capharnaüm de vêtements et de livres. Sur le lit, une valise ouverte était à faite à moitié, débordante d'artefacts, de carnets et d'ouvrages. En voyant le bazar, le jeune homme releva les yeux au ciel pour compter jusqu'à cinq.
- Au pire, je peux toujours rentrer à la maison quand j'en aurais besoin, murmura-t-il en retirant quelques livres de magies pour ne garder que ses lectures actuelles, ses ouvrages de cours et ses vêtements.
Une fois sa valise terminée, il donna un coup de baguette pour ranger la pièce et s'habilla finalement d'une tenue traditionnelle sorcière. Il noua sa cravate, rajusta ses chaussures en peau de dragon et attrapa sa valise pour dévaler les escaliers.
A l'entrée, l'horloge lui indiquait que Poudlard express avait déjà quitté Londres. Harry avait hésité à imiter Lupin et à rejoindre le train en même temps que les élèves… Mais en ces temps troublés par la guerre contre Voldemort, Dumbledore avait préféré affecter une équipe professorale en qui il avait confiance pour assurer la sécurité des élèves. Une décision que le jeune homme ne pouvait qu'approuver.
Il attrapa sa cape de voyage et se tourna vers la commode de l'entrée pour y déposer deux baguettes. Il eut un pincement au cœur en abandonnant ses deux précieuses amies, les deux baguettes qui l'avaient choisis lui, mais, hélas, Harry ne devait garder que l'étrange baguette de noyer de Caradoc Dearborn pour conserver sa couverture. Il peinait toujours à comprendre comment la tenir au vu de la forme originale des deux branches qui s'enroulaient l'une autour de l'autre au niveau du manche, peinait toujours à comprendre comment orienter les sorts pour qu'ils touchent leur cible mais… C'était sur elle qu'il devait compter dorénavant, s'il souhaitait conserver son identité secrète.
- Hedwige, rejoins moi à Poudlard, annonça Harry en ouvrant la porte d'entrée.
Le hululement de la chouette raisonna dans l'air et le jeune homme rit en l'entendant. Il serra sa valise d'une main et sa nouvelle baguette de l'autre, avant de fermer la porte. Sa maison se verrouilla magiquement, les volets se fermèrent gentiment et les protections s'activèrent une à une.
- Je reviendrais après cette année, murmura Harry en posant sa main sur la pierre blanche qui portait tous les sorts qui protégeait son foyer.
Il prit une grande inspiration et finit par transplaner jusqu'au portail de Poudlard.
Hey ! Un peu de retard pour sortir ce chapitre là, haha !
En tout cas, je suis enfin sorti de ma page blanche après ces trois mois. Je reprend donc la publication mensuelle. Installez vous bien, les embrouilles commencent à peine !
