— Legilimens


A peine l'incantation eut-elle franchi le seuil de ses lèvres, que le jeune homme se trouva plongé dans un flot de souvenirs incessants. Se concentrant pour mettre de l'ordre dans les pensées de la jeune femme, il inspira profondémment et s'enfonca dans une scène semblant se dérouler à Square Grimmauld.

Horrifiée, Hermione ne put qu'observer tandis que le souvenir se jouait dans son esprit, incapable de faire quoi que ce soit pour stopper Regulus.

"Je vois que tu as eu le temps de te changer, princesse." Commenta-t-il un sourire en coin en observant Hermione.

Un bruit de poêle heurtant lourdement le sol se fit alors entendre dans la cuisine de la maison Black.

Georges, la bouche grande ouverte, regardait alternativement son amie et le vieux Maraudeur. Tandis que Ginny haussait les sourcils, l'air curieux.

"Vous nous expliquez ?" S'impatienta la rouquine.

Hermione qui, le visage en feu, n'avait toujours pas prononcé un mot, reprit ses esprits.

"C'est pas ce que vous vous imaginez !"

"Ah, et qu'est-ce qu'ils imaginent ?" Demanda-t-il, un air taquin sur son visage.

"Tu le sais très bien." Répliqua-t-elle les dents serrées.

"Bah non justement, j'aimerais bien que tu m'expliques, chaton."

"S.i.r.i.u.s" gronda la jeune femme.

La Gryffondor sentit ses joues la brûler tandis qu'elle observait la scène. Il fallait absolument qu'elle trouve un moyen de sortir le Serpentard de son esprit. Il en avait déjà beaucoup trop vu, et il était hors de question qu'elle le laisse farfouiller à sa guise dans ses souvenirs, sans se défendre. Toutefois, avant qu'elle ne puisse faire la moindre tentative pour chasser Regulus, un nouveau souvenir se joua devant elle. Cette fois-ci, elle se trouvait dans la bibliothèque de Grimmauld Place, avec Sirius. La brune ne put s'empêcher de remarquer que le Serpentard semblait sélectionner uniquement les souvenirs dans lesquels son frère était présent.

"Mais soit, se reprit-il. Écoute, tu peux rester dans sa chambre si vraiment tu le souhaites. C'est juste que je veux que tu sois prudente, d'accord ? Je ne sais absolument pas ce qui se trouve là-dedans, il aurait pu y cacher des artefacts de magie noire."

A la mention d'artefacts cachés, la lionne se mordit la lèvre inférieure. Elle hésita, devait-elle lui parler du carnet ?

"Sirius, commença-t-elle. À ce sujet, je ne sais pas si je devais t'en parler mais, j'ai trouvé quelque chose ce matin."

Le sorcier carra les épaules. Il lui fit signe de continuer.

"Il s'agissait d'un carnet à vrai dire. Il était à l'intérieur de son oreiller, j'ai lu la première page et il s'agit visiblement de son journal intime, donc je me disais que, peut-être, tu voudrais le lire..."

Elle s'interrompit en remarquant la grimace qui s'était formée sur le visage de son interlocuteur.

"Sirius, tout va bien ? Je sais que cela fait beaucoup à digérer…mais, je pense vraiment que tu devrais le lire."

Un rire sombre s'échappa des lèvres de ce dernier.

"Non merci, Hermione. Tu peux en faire ce que tu veux, le brûler même, je m'en fiche."

Choquée, elle ouvrit de grands yeux.

"Mais, Sirius, c'était à ton frère..."

"A mon mangemort de frère." Ricanna-t-il.

Brusquement, Hermione sentit la pression sur son crâne se faire beaucoup plus forte, la poussant à fermer les yeux jusqu'à ce que cette dernière ne se dissipe quelques secondes plus tard. Rouvrant les paupières, elle vit le visage du jeune Black devant elle et comprit que l'effet du sort était terminé. Dans un geste de défense, elle croisa les bras sur sa poitrine, et darda l'homme d'un regard noir, ne pouvant s'empecher de se sentir abusée face à cet assaut mental.

— Satisfait ? siffla-t-elle.

Ce dernier se releva doucement, sans un mot. Il se tint devant elle, la surplombant de toute sa hauteur, avant de lui tourner le dos, retournant vers le feu. La jeune femme fut surprise par cette réaction. Elle s'était pourtant préparée à plusieurs éventualités, mais certainement pas à ce silence. Elle observa son dos tandis qu'il ajoutait des brindilles dans le feu, et poussant un soupir résigné, elle se résolut à l'interpeller.

— Tu n'as rien à dire ? Pas de question, pas de remarque ?

S'il l'entendit, le bougre n'en montra aucun signe, à son plus grand agacement. Il continua à s'affairer, sans même lui adresser un regard. Hermione se leva, et tapa du pied sur le sol, et posant les mains sur hanches, elle s'exclama :

— Tu pourrais au moins me répondre ! Après tout, tu viens de violer mon esprit, et de regarder des souvenirs qui m'appartiennent, alors des excuses seraient la moindre des choses.

Se retournant brusquement vers elle, il lui adressa un regard furieux, avant de dire d'un ton doucereux :

— Des excuses ? Moi, je te dois des excuses ? C'est la meilleure…Dis-moi, Hermione , la façon dont il cracha son prénom la faisant grimacer, pour quelqu'un qui disait ne pas connaitre mon frère, allant jusqu'à me dire qu'il était mort, tu semblais pourtant bien proche de lui dans les souvenirs que je viens de voir.

Hermione détourna le regard, incapable de soutenir le sien. Elle n'était pas fière d'avoir menti, mais ce n'était pas comme si elle avait le choix, pensa-t-elle en tentant de se déculpabiliser. Certes, elle n'aurait peut-être pas dû dire que Sirius était mort, mais il fallait bien qu'elle trouve une explication.

Elle put entendre le Serpentard renifler.

— Au moins, j'imagine que tu ne m'as pas menti sur tout la ligne…Il semble que je sois bel et bien mort à ton époque, si j'en crois le fait que tu sembles dormir dans ma chambre.

Elle déglutit nerveusement, ne sachant que répondre à cela.

— Je suis désolée…souffla-t-elle

— De quoi ? Argua Regulus. De ma mort ? Ou bien du fait de m'avoir menti quant à l'époque d'où tu viens, et de tes liens avec mon frère ?

Il avait terminé sa tirade d'un air écoeuré, comme si l'idée qu'elle puisse être liée à Sirius d'une quelconque façon était une erreur impardonnable.

— Pour tout, j'imagine…Mais, j'étais sincère quand j'ai dis vouloir t'aider dans ta quête pour détruire Voldemort. C'est notre but à nous aussi.

— Le "nous" incluant Sirius et toi, j'imagine ? demanda-t-il d'un air sarcastique.

— Quoi ?

Hermione fronça les sourcils, incertaine de la signification de ses paroles. Elle fut toutefois révulsée lorsque le Serpentard expliqua :

— Il semble que tu sois dans une sorte de relation avec mon frère, si j'en crois ce que j'ai vu…Révoltant vraiment, il avait l'air si vieux dans ton souvenir. Ça ne te dérange pas de passer tes nuits avec une antiquité ?

Hermione n'eut conscience de son geste qu'une fois l'empreinte de ses doigts visibles sur la joue du jeune Black. Furieuse, elle avait traversé la distance qui les séparait en quelques pas rapides, et sans même réfléchir, lui avait collé une gifle monumentale. A la brûlure qu'elle ressentait dans sa main, elle fut certaine de ne pas y avoir été de main morte, et si elle en doutait, la façon dont le jeune homme se tenait la joue, la mâchoire serrée et ses yeux lançant des éclairs, étaient une parfaite indication.

— Qu'est-ce que tu viens de faire ?

La voix dangereusement basse qu'il avait utilisée ne rassura pas vraiment la brune, qui fit un pas en arrière dans un réflexe pour se protéger. Ce dernier referma aussitôt l'écart en avançant de deux pas vers elle. Respirant rapidement, elle plaça ses mains devant elle dans un signe de paix, et s'écria :

— Attends ! C'était un accident, je ne sais pas ce qu'il m'a pris.

Regulus haussa un sourcil, montrant très clairement qu'il n'accordait aucun crédit à son excuse. Elle-même était d'ailleurs consciente que cela ne tenait pas debout, on ne giflait pas quelqu'un par accident, cela revenait à dire qu'on avait jeté un sort sur quelqu'un involontairement, alors qu'on avait sa baguette sous la gorge de la personne.

— Ah ? Lâcha simplement le jeune Black.

Il ne semblait plus furieux, réalisa la brune, mais pas spécialement heureux, non plus. Reprenant peu à peu son calme, elle expliqua d'une voix douce :

— Je n'aurais pas dû te gifler, c'est juste que t'entendre suggérer que Sirius et moi puissions entretenir une relation plus que cordiale, m'a mise hors de moi. Je t'assure qu'il n'y a rien du tout entre lui et moi. Il est juste une connaissance, d'autant que comme tu l'as dis, je dors dans ta chambre, donc il est impossible que l'on passe nos nuits ensemble.

Elle avait prononcé ses derniers mots d'une voix malicieuse, provoquant un grognement chez le Serpentard. Il valait mieux, oui. L'idée même que son frère puisse faire des cochonneries avec une fille aussi jeune, dans son propre lit qui plus est, lui donnait envie de vomir. Chassant cela de son esprit, une autre pensée lui vint en tête. Qu'aurait dit sa mère, songea-t-il, si elle apprenait que dans le futur, une née Moldue vivait désormais dans la chambre de l'héritier de la famille Black. Elle aurait probablement fait un véritable scandale, criant à l'infamie, et aurait probablement jeté Hermione dehors à grand coup de balai. De son coté, il avait également un peu de mal à l'idée que la jeune femme qui se tenait devant lui, dormait toutes les nuits dans son lit, et utilisait sa salle de bain pour se laver. A cette pensée, il sentit ses joues rosir légèrement. Voilà qui était inapproprié, se dit-il. Et, cherchant à refouler la vision de la jeune femme dans sa baignoire, il se racla la gorge et décida de changer de sujet.

— Tu disais vouloir m'aider, commença-t-il, captant automatiquement l'attention de la brune.

Hermione hocha vivement de la tête

— Donc, j'imagine que tu as déjà mené tes recherches sur les Horcruxes, continua-t-il, comme s'il s'agissait d'une évidence, avant de se stopper en notant l'air perplexe de la brune.

Il lui agrippa le bras fermement, et souffla :

— Rassures-moi, tu sais ce qu'est un Horcruxe, n'est-ce pas ?

Il vit la jeune femme déglutir, puis secouer la tete lentement. Par merlin, se lamenta-t-il, comment avait-il pu se retrouver coincé avec elle. Passant la main dans ses cheveux, comme il en avait l'habitude à chaque fois qu'il était nerveux, il ne put se retenir de gémir.

— Mais pourquoi est-ce que tu es venue m'aider, alors ?

— Je suis arrivée ici par accident, tu te souviens, grinça la brune entre ses dents. Je voulais en savoir plus sur cette découverte qui pourrait détruire Voldemort, c'est pour cela que je t'ai écris la lettre.

Le Serpentard plaça son visage entre ses mains. Prenant une grande inspiration, il chuchota :

— Le Seigneur des Ténèbres a créé un Horcruxe, et je l'ai volé…mais je n'arrive pas à le détruire.

— Et, commença Hermione, qu'est-ce qu'un Horcruxe.

Il esquissa une grimace de dégoût avant de répondre :

— C'est une sorte de magie noire, très très noire. Le sorcier qui le crée décide de séparer son âme en deux et d'en placer une moitié dans un objet ou dans un être. En faisant cela, il devient immortel.

Il entendit la jeune femme déglutir, et relevant la tete, il put voir l'air horrifié qui se peignait sur ses traits delicats. Elle entrouvrit la bouche, comme sur le point de prendre la parole, mais rien n'en sortit. Regulus ne comprenait que trop bien sa réaction, il avait eu plus ou moins la même lorsqu'il avait découvert l'étendue de la folie du Seigneur des Ténèbres.

— Tu…tu veux dire…que Voldemort a créé une de ces choses, souffla-t-elle ayant plus ou moins repris ses moyens.

Il opina.

— Et, tu l'as volé ?

Il opina à nouveau. La brune resta silencieuse pendant quelques minutes. Si ce cinglé avait également créé une de ces choses, se dit-elle, cela pourrait expliquer pourquoi il était revenu d'entre les morts plusieurs fois déjà. Mais, d'un autre côté, si Regulus Black avait volé l'objet comme il le disait, ce dernier était-il parvenu à le détruire ? Etait-il mort à cause de cela ? Et si c'était le cas, dans ce cas, comment Voldemort était-il toujours en vie à son époque ?
Hermione réfléchit à toute vitesse, tentant de trouver une explication plausible à tout cela, lorsqu'une idée terrifiante la saisit. Reportant son regard sur le Serpentard, elle l'observa pendant quelques secondes avant d'oser formuler son hypothèse.

— Est-ce que…est-ce que tu penses qu'il aurait pu en créer plusieurs ?

N'ayant jamais envisagé cette éventualité, le jeune Black sentit ses mains se mettre à trembler.

— Qui ferait une chose pareille ? S'étrangla-t-il.