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CHAPITRE QUATORZIÈME

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Progrès : du latin " progressus ", amélioration, développement

des connaissances, des capacités de quelqu'un, ou changement

graduel de quelque chose, d'une situation, par amélioration ou

dégradation


PROGRÈS

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" Les portes des Abysses furent forgées par Héphaïstos lui-même, sur ordre de Zeus,

tandis que Poséidon creusait le Gouffre des Abysses et y jetait les unes après les autres toutes

les créatures marines ayant défiée l'autorité du maître de l'Olympe. Le métal ayant

servi à la fabrication des portes, réputé pour être le plus solide de tous, était connu sous

le nom de Kleidarium, du grec "κλειδαριά " (prononcé " kleidariá " et signifiant " enfermer "). Outre cette protection, les

portes étaient maintenues closes par un cadenas composé de tous les métaux connus jusqu'à lors,

forgé lui aussi par Héphaïstos et scellé définitivement par la foudre de Zeus. Si la clé

possédée par Écamété permettait de l'ouvrir, le Gouffre des Abysses ne pouvait réellement

devenir accessible qu'à condition que les inscriptions gravées sur les portes aient été déchiffrées

avant le passage de la clé dans le cadenas. Si ces étapes n'étaient pas effectuées dans l'ordre et

correctement, une Lamia était alors lâchée et dévorait quiconque avait tenté d'ouvrir les Portes, avant de

retourner dans son état de veille silencieuse. "

Extrait des Cataclysmes de la Mythologie Grecque, de William Fauster


30 mars 2008, 15h08, Quartier Général de L, Londres, Angleterre.

L'homme s'appelait Raphaël Gethsem et aurait du avoir vingt huit ans le 29 septembre 2008. Matt se mit à rire lorsque Mello souligna le fait que l'homme "aurait du", car l'individu en question était aussi mort que pouvait l'être quiconque ayant été brûlé vif, et il y avait dans l''accentuation verbale du russe au sujet de l'anniversaire de la victime - et donc, par extension, de son décès - un constat étrangement hilarant, si ce n'était, sous certains aspects, un peu inquiétant. Near, lui, ne partagea pas l'hilarité de Matt, davantage sans doute par manque d'humour noir que parce qu'il ressentait de la compassion à l'égard de la nouvelle Jeanne d'Arc. Il posa brièvement les yeux sur lui quand son rire se déclencha et les ôta avec une lenteur qui sous-entendait un jugement implacable. Mais Matt se fichait pas mal de l'opinion que Near pouvait avoir construit à l'instant sur son niveau d'humour. Il avait juste envie de rire et, même si la remarque du russe n'avait franchement rien de bien extraordinaire, elle était suffisante.

Depuis que Mello et son rival évoluaient dans un périmètre commun, il avait l'impression d'être une petite mouche se promenant dangereusement auprès de deux bombes nucléaires dont l'explosion menaçait tous les quarts d'heure (car objectivement, depuis que Mello et lui avaient emménagé au QG, celui-ci n'avait de cesse de tempêter pour tout et rien, surtout quand Near se trouvait dans les parages). Le caractère de Mello était volcanique par essence, mais d'ordinaire tenu plutôt tranquille dans la mesure où tous les événements se déroulaient comme il le souhaitait, et plus particulièrement à condition qu'on ne lui colle pas sous le nez le moindre individu capable de booster son complexe d'infériorité. Leur vie aux États-Unis était parfaite dans le sens où elle permettait à Mello de s'épanouir librement dans un domaine où il savait qu'il ne risquait pas spécialement de concurrence, car la Mafia, si elle était bien composée de quelques individus aux QI potentiellement remarquables, se caractérisait avant tout par une population de l'ordre du néant intellectuel, bonne à obéir aux ordres sans trop se poser de questions d'ordre moral. Et c'était parfaitement ce qu'il fallait, autrement l'organisation aurait sombré dans l'oubli en moins de quelques années.

Mello était prompt à la blague cynique quand il était de bonne humeur et ne se privait jamais d'en placer une quand l'occasion lui était donnée, entendre par là en cas d'assassinat. Actuellement, le stress et la tension accumulés par son retour à une vie commune avec Near bouffait les neurones de son cerveau réservés à la rigolade. Il devenait un monsieur Scrooge moderne, si tant était que le personnage pouvait être associé aux pantalons de cuir moulants et au carré blond.

L'homme qui devait fêter ses vingt huit ans en septembre (et qui ne les fêterait jamais, donc) avait été rôti comme une dinde de Noël la veille, le 29 mars, dans le courant de la nuit. Le corps, bien que carbonisé, était froid quand il avait été découvert par le pèlerin dans l'Église du Saint Sépulcre vers 4h du matin, accroché à une sorte de croix de bois dans une représentation parodique du Christ crucifié. Les prêtres avaient hurlé à la profanation, à l'horreur absolue, à l'apocalypse, tandis que les gardes couraient dans tous les sens, d'un côté interdisant l'accès aux visiteurs, et de l'autre cherchant à joindre la Police et le Gouvernement.

- Et le Pape, ajouta Mello après avoir tourné la première page du dossier.

Matt s'apprêtait à reformuler la chose de manière interrogative presque par réflexe, car il trouvait l'idée des forces de polices israéliennes téléphonant de toute urgence à Benoît XVI, pour l'avertir qu'un barbecue avait eu lieu sans son consentement à deux pas du tombeau du Christ, somme toute comique, mais se ravisa lorsque l'évidence lui sauta aux yeux. C'était le Saint-Sépulcre. Tout ce qui concernait le Saint-Sépulcre et l'Anastasis, de près ou de loin, à mille kilomètres comme à moins d'un centimètre, concernait aussi le Pape, le Vatican, et plus largement tout le clergé et la communauté croyante dans le monde entier.

Les nouveaux éléments du dossier avaient été transmis dans un premier temps à Interpol par le gouvernement israélien, puis à Roger, qui à son tour leur avait fait parvenir l'intégralité des documents. D'ordinaire, l'ensemble des informations parvenaient directement à Watari puis à L, mais ce dernier, sachant qu'il était question du premier véritable cas international de ses héritiers sous leurs propres alias, avait joué la carte de prudence au maximum. Leur mentor, conformément à ce qu'il avait promis à Mello, avait signalé à l'Israël que l'enquête serait assurée du début jusqu'à la fin par trois détectives ayant fait leurs preuves auprès de lui. Il les avait présenté comme possédant une intelligence aussi aiguisée que la sienne et comme ayant suivi un cursus scolaire équivalent au sien, mais n'avait pas donné leurs initiales, préférant attendre la résolution définitive de l'affaire avant de les introduire dans la cour des grands. L'Israël, si elle avait pris ombrage de cette relégation de leur problème à des individus dont elle n'avait jamais entendu parler auparavant et pour lesquels elle ne possédait en conséquence aucun moyen objectif (autre que l'avis de L) de jauger de leur efficacité, n'en avait soufflé mot et avait accepté gracieusement de leur fournir les éléments antérieurs de l'enquête ainsi que les plus récents.

Il y avait déjà eu un brûlé au cours du mois de mars, plus exactement le 26. Il avait été identifié sous le nom de Noam Tayed et était âgé de trente deux ans au moment de sa mort, survenue à l'instar du décès de Raphaël Gethsem au cours de la nuit du 26 mars au 27. Cependant, Tayed n'était pas mort brûlé vif : il avait été tué avant, poignardé à plusieurs reprises dans le ventre et le torse.

- Il n'a brûlé qu'après, intervint Near alors que Matt et Mello échangeaient sur les similitudes existant entre les deux victimes. Gethsem a pris feu alors qu'il était bien vivant.

Si tous les trois s'accordaient sur le fait que le responsable des assassinat des deux hommes et du faux Christ était le même, car le lieu de ces derniers ne changeait pas et les moyens utilisés étaient en lien avec des techniques issues du christianisme, ils penchaient cependant vers des explications disparates pour les deux derniers meurtres. Mello pensait que le responsable se cherchait, tentait de se définir un style en propre et innovait donc en terme de technique. Near penchait davantage vers une théorie de discrétion : le meurtre de Tayed avait été probablement prévu comme celui de Gethsem, mais un événement avait du empêcher qu'il se déroule comme le tueur l'avait souhaité, l'obligeant à écourter les réjouissances pour un procédé plus modéré lui assurant la sécurité et lui permettant de signer malgré tout son forfait par la suite. Le meurtre de Gethsem avait eu lieu ensuite en guise de représailles, afin de combler la frustration du premier crime non accompli pleinement.

Matt, quand à lui, avait avancé la possibilité que le tueur ait subi un level-up en terme de sadisme, expression qui lui avait valu un regard incrédule de la part de ses camarades.

- Le premier meurtre a été très sanglant, leur accorda t-il, mais presque miséricordieux. Tayed est mort rapidement de ses blessures, et le meurtrier n'y a mis le feu qu'une fois sa mort survenue. Gethsem est devenu une torche humaine alors qu'il était encore vivant et capable de tout sentir. Pour Tayed, je crois qu'il s'agissait simplement d'une volonté de purification, de détruire ce qui serait considéré comme impur, soit un cadavre, mais pour Gethsem, on dirait qu'il y avait une envie de voir et de faire souffrir.

Le regard que Near posa sur lui dura bien une minute complète. Mello, en revanche, caressa son menton, pensif, mais ne lui accorda pas son attention visuelle, trop occupé qu'il était à jauger l'hypothèse de Matt.

- Admettons que ce soit vrai, lui accorda Mello. Le type est un sadique. Dans ce cas, pourquoi ne pas s'être acharné sur Gethsem avant de le faire brûler ? Ça aurait été plus drôle.

- J'y ai pensé, admit Matt. J'ai quatre hypothèses : primo, le tueur n'est pas encore arrivé à ce stade, deuzio, il a manqué de matériel, tertio, il voulait éviter d'attirer l'attention, et quarto, ça ne l'intéressait pas.

- Tu peux développer, Matty ?

- Quelle hypothèse ? Enchaîna l'autre du tac-au-tac.

- La quatrième.

- Ce sont des meurtres à connotation religieuse, plus précisément chrétienne, expliqua alors Matt. Le faux Christ, la croix en bois, le Saint-Sépulcre, tout est là pour le prouver. On nous a expliqué pendant les cours de catéchisme que le feu a toujours joué un rôle important dans le christianisme, que ce soit en terme de symbole puisqu'il correspond au Saint-Esprit et à l'Enfer, mais aussi en terme de méthode étant donné qu'il a été largement utilisé sous prétexte de " purifier " des individus qui ne rentraient pas dans les cases du système. Si le tueur est bien un fanatique, la boucherie n'a pas vraiment d'intérêt pour lui : il veut faire souffrir, mais avec les méthodes ancestrales et réputées sacrées du christianisme.

- Matty, tu oublies quelque chose, intervint Mello, les yeux rivés sur le dossier qu'il avait jeté sur la table basse du salon.

Ils avaient repris place dans le salon immédiatement après leur repas de midi, qu'ils avaient pris ensembles et non chacun dans leurs chambres respectives comme de coutume. Bien que le silence eût été un peu pesant, la présence de Near n'avait, pour une fois, pas semblé déranger Mello, ce que Matt voyait comme une conséquence de leur conversation sur le balcon et de son affirmation relative aux sentiments de Near pour son rival. Le manque de conversation général découlait pour sa part des nouveaux éléments leur étant parvenus au sujet de l'enquête, et sur lesquels ils s'étaient tous concentrés individuellement avant mettre en commun leurs conclusions.

- Éclaire donc ma lanterne, M, je t'en prie.

La blague, en dépit de toute sa subtilité et de la bonne volonté de Matt, ne passa pas aussi bien qu'il ne l'avait souhaité. Mello lui octroya un regard plus noir encore que ses vêtements et Near, qui construisait jusqu'ici une tour de briques de legos blancs, interrompit brièvement l'ascension de cette dernière, signalant par là-même sa contrariété.

- Si tu en sors une autre de ce style, je me fais un chapelet avec tes boyaux, sans déconner, l'avertit Mello.

- Et tu pourras l'envoyer en gage d'amitié éternelle au taré du Saint-Sépulcre avant de me faire brûler en place publique pour humour de merde, ironisa Matt, qui avait largement pris l'habitude des menaces perpétuelles - et régulièrement en l'air - de son camarade. Qu'est-ce que tu voulais me dire ?

Il n'en fallut pas davantage à Mello pour ré-embrayer sur le sujet principal.

- La Question, pour commencer.

- Quelle question ? Fit Matt, qui n'avait bien entendu pas perçu le Q majuscule dans la réponse de Mello.

- Tu détestes tes intestins à ce point ?

- Non. Mais tu m'excuseras si je ne vois pas de quoi tu parles. C'est toi l'expert des religions, pas moi.

- La Question, intervint Near, était la pratique de la torture sous l'Inquisition. Mais si je me souviens bien, continua t-il en s'adressant clairement à Mello, le feu était compris dans les méthodes, et les inquisiteurs avaient interdiction de verser du sang. On en revient à la théorie de Matt.

- J'ai dit " pour commencer ", N, répliqua sèchement Mello. Tu pourrais me laisser parler avant de ramener ta science du monde ecclésiastique.

Near ne répondit pas.

- La torture durant l'Inquisition a été codifiée, mais il y a toujours eu des abus, ne serait-ce qu'avec les étaux ou le berceau de Judas, rappela Mello. Le but n'était pas de faire avouer aux gens des choses qu'ils avaient faites, mais des choses qu'on voulait qu'ils aient commises. C'est plus facile de forcer quelqu'un à confesser n'importe quoi en utilisant des procédés non divulgués par l'Église et donc beaucoup plus inquiétants qu'en se limitant aux moyens officiellement disponibles, connus et pour lesquels les accusés pouvaient possiblement avoir développé des parades. Il y a toujours eu de la cruauté dans les religions, du point de vue des méthodes comme du point de vue des textes. Le Nouveau Testament est tellement violent que les réalisateurs des Saw pourraient en tirer un bon film. Si le tueur correspond au profil que Matt suspecte, il finira sans doute par en arriver à ce genre d'extrémité.

- Pas s'il n'en a pas les moyens, lança Matt. Imaginons qu'il vive dans un petit appartement, de la même manière que la quasi totalité de la population israélienne, qu'il ait un loyer à payer, des charges, ses courses, une bagnole, le tout avec un petit salaire. Il ne pourrait pas investir dans du matos de torture professionnelle.

- Tu pars dans de grandes suppositions, Matty, lui reprocha Mello.

- Pourquoi pas ? Ça limiterait le champs de recherche à un salarié possédant de faibles revenus et un petit logement, de préférence proche de la vieille ville pour lui éviter des déplacements compliqués et trop coûteux vers le Saint-Sépulcre, d'autant plus si c'est un fanatique qui aura voulu être aussi près que possible de son lieu de culte.

- Même si ça reste une hypothèse plausible, fit Near, nous n'avons pas assez de preuves pour la valider. Il faut la mettre de côté pour l'instant jusqu'à ce que de nouvelles données apparaissent.

- Ou alors, le mec a appris de ses erreurs, continua pensivement Mello. Il a tué une première fois avec du sang, mais a trouvé que ce n'était pas suffisamment pratique pour ce qu'il essaie d'accomplir, parce que trop salissant probablement, et a banni le meurtre-boucherie à partir de Tayed pour adopter le barbecue, qui évite de devoir nettoyer derrière et par la même occasion rend plus difficile l'identification de la victime, donc du tueur.

- Si les victimes sont tuées au Saint-Sépulcre, c'est une idée qui se tient, admit Matt. Mais si jamais il commettait les meurtres directement chez lui ?

- Il faudrait qu'il les déplace ensuite jusque dans l'église, mais ça me paraît trop compliqué, déclara Mello. Si, comme tu le crois, le mec a un petit budget, il ne va pas s'amuser à trimballer des cadavres en voiture pour des déplacements qui, dans le cas où les victimes s'accumuleraient, finiraient par lui coûter la peau des fesses. D'autant que, si mes informations sont toujours d'actualité, l'entrée des véhicules dans la vieille ville est très limitée, si ce n'est interdite. Le tueur ne se serait pas pointé à pieds avec un corps au Saint-Sépulcre.

L'image sordide d'un homme habillé en moine, le crâne partiellement rasé, un sourire immense aux dents parfaitement blanches sur le visage, et tenant dans ses bras un autre homme ensanglanté, traversa l'esprit de Matt et y resta fermement ancrée tout au long de l'après-midi, avant que la capture d'un Arceus niveau 80, peu avant le dîner, ne la jette dans les confins les plus profonds de sa mémoire.

- Étant donné qu'il échappe aux flics depuis 2005, ce serait étonnant, concéda t-il.

- Et ça impliquerait qu'on recherche un abruti fini, conclut Mello. Ou alors que les flics soient des abrutis finis.

- Et peut-être aussi que les touristes et tout ceux qui vont et viennent dans et en dehors de la vieille ville soient des abrutis finis.

- Qu'en somme toute la population soit composée d'abrutis finis, renchérit Mello.

- Donc, il les tue au Saint-Sépulcre, conclut Matt, qui, bien que trouvant le raisonnement les ayant mené à cette affirmation définitive quelque peu bancal pour leur quotient intellectuel, se plut à lui donner du crédit pour son aspect original.

Ils se tournèrent vers Near (Matt, principalement), cherchant à connaître son opinion. Celui-ci, tandis que durait leur réflexion sur le lieu où étaient commis les crimes, avait entrepris de construire un petit cube de legos dont la couleur n'était cette fois pas blanche mais d'un rose plutôt tendre.

- Je suis d'accord avec l'hypothèse selon laquelle les meurtres sont perpétrés au Saint-Sépulcre, annonça t-il. C'est la plus logique, je ne vois aucune autre manière pouvant expliquer que les cadavres aient pu être placés dans l'église. Je penche également pour la théorie de Matt sur le statut financier, mais je doute que nous puissions la confirmer dès maintenant auprès des autorités israéliennes, principalement en raison d'une absence de preuves matérielles. Nous devrions la conserver et continuer d'envisager d'autres possibilités jusqu'à ce que nous ayons plus d'informations. En revanche, j'ai deux questions, et la première concerne le responsable des assassinats.

Near posa près de lui le cube de legos roses. Il saisit ensuite un personnage lego, vêtu d'un t-shirt rouge et d'un pantalon bleu, qu'il fit tourner entre ses longs doigts blancs. De sa deuxième main, libre, il entrepris d'atteindre ses cheveux pour jouer avec une boucle de ses cheveux. Matt repensa à la première fois que lui et Mello l'avaient revu depuis leur départ de la Wammy's, tout frêle et recroquevillé dans cet appartement aux couleurs crème écœurantes, et se souvint avoir seulement remarqué que ses cheveux avaient poussés. Il se rappelait également avoir pensé que Near n'avait pas changé et ne devait jamais subir la moindre modification au cours de sa vie, sous prétexte qu'il était, à l'image de L, un élément immuable, mais, comme il attendait sa question, il se rendit compte que son analyse ne tenait pas complètement debout. Car les cheveux de Near avaient poussés, et il aurait du les couper s'il avait vraiment été cette allégorie inaltérable que Matt avait cru voir en lui pendant très longtemps. Mais il avait déchiffré, du moins en partie car rien n'était vraiment simple avec les héritiers de L, ce que Near éprouvait vis-à-vis de Mello, et soudainement les longues boucles blanches du garçon trouvèrent leur explication.

Mello était le changement, la tempête et l'Apocalypse sous un certain sens, tandis que Near représentait la constance, l'accalmie et la Doctrine Originelle. Ils étaient deux éléments interdépendants. Lorsque Mello avait quitté l'orphelinat, il avait emmené avec lui une partie du mécanisme, et pour compenser, Near en avait développé certains traits sans que ceux-ci ne deviennent trop proéminents, de sorte à ce qu'il puisse maintenir un équilibre.

À l'exception que Mello était comme un virus. Le côtoyer un peu trop, c'était petit à petit lui ressembler, se laisser gagner par son comportement, ses manières et ses moments de folie destructrice. Matt s'était vu relativement protégé de l'infection en raison de son indifférence vis-à-vis du reste du monde et du classement, mais surtout parce que sa personnalité était, étonnamment, quelque chose de suffisamment établi pour qu'elle ne subisse pas d'énormes dommages collatéraux. En faisant le bilan, il constatait ne pas avoir pris grand chose de Mello, si ce n'était le goût du risque et une dégradation considérable de sa conduite automobile (en plus d'une connaissance avancée du dialecte russe).

Near, malgré son génie, était une page Word blanche sur laquelle n'importe qui pouvait écrire n'importe quoi. Le cerveau de Near suivait les directives du premier individu entré en possession du clavier. L s'en étant emparé avant les autres, il avait eu la priorité et avait pu focaliser les neurones de Near sur la résolution d'enquêtes, mais utiliser Mello en guise de fuel était un mouvement risqué qui, petit à petit, commençait à se retourner contre lui. Avec son départ, Mello avait obligé Near à cultiver cette tendance aux variations qui le caractérisait si bien, au point que celle-ci était en train de passer en dehors du contrôle de son rival, à l'instar des sentiments que ce dernier ressentait pour Mello, apparus probablement sans qu'il ne s'en rende vraiment compte et gagnant peu à peu en ampleur jusqu'au point de non-retour. Les longues boucles neiges allaient dans le sens de sa théorie. Si celle-ci se vérifiait définitivement, alors il y avait de fortes chances pour que le système, finalement déséquilibré, ne se casse pour toujours.

Et L aura foiré

Mais L n'avait jamais inclus de relations sociales dans son engrenage, pour la simple et bonne raison que ce n'était pas son domaine. Il n'y avait jamais accordé la moindre importance, et, de ce point de vue, son erreur se comprenait, devenait logique, et, plus que tout, inévitable.

- Pourquoi un homme ? Demanda Near.

Matt comme Mello s'en trouvèrent pris au dépourvu.

- Comment ça ? Fit le second d'un ton froid.

- Je vous demande quels sont les critères qui vont portent à croire que le responsable des meurtres soit un homme, reprit tranquillement Near.

Matt perçut très nettement la difficulté, sentit la colère de Mello comme s'il était lui-même sur le point de piquer une crise de nerfs.

- On a aucun indice qui pourrait sous-entendre que c'est une femme, tenta t-il, même s'il se doutât que sa réponse était franchement maladroite.

- Mais nous n'en avons pas plus pour dire que c'est un homme.

Le " nous " se révéla profitable. En s'incluant, Near rejetait la faute sur sa propre personne, et le fait qu'il puisse être lui aussi à l'origine d'une erreur - ce qui bien sûr n'était pas le cas présentement - sembla détendre Mello. Il n'avait jamais aimé se retrouver en position de faiblesse face à son rival, une situation qui s'était produite à de nombreuses reprises du temps où ils étaient tous à la Wammy's House et qu'il supportait difficilement de revivre, si ce n'était pas du tout. L'autocritique indirecte formulée par Near était bénéfique au sens où elle était en mesure de les remettre au même niveau, et donc de rendre à Mello sa condition plus acceptable.

- Et qu'est-ce que tu penses, toi ? Demanda t-il à Near.

Ce dernier déposa doucement la figurine lego sur le tapis, et Matt en aperçut une autre tout à côté. Il s'agissait cette fois d'une fille, à en juger par la robe qu'elle portait. Mello, pour sa part, était allé récupérer une tablette de chocolat dans un des placards de la cuisine et l'entamait à belles dents.

- Je pense qu'il nous faut éviter les conclusions hâtives, déclara t-il. Nous manquons d'indices dans un cas comme dans un autre, et je crois pas qu'il soit prudent de nous référer à des stéréotypes pour établir un profil de criminel. De plus, l'affaire Kira a démontré que nous ne pouvions pas toujours nous fier à ce que nous voyons.

- Maintenant qu'on en parle, intervint Matt, vous avez des nouvelles de L ?

- Ne me dit pas que tu ne reçois rien, grinça Mello.

- Moins que vous. C'est vous qui aviez 20 de moyenne.

- Tu avais 19.9, répliqua Mello.

- C'était suffisamment différent pour L. Alors ?

Mello mordit furieusement dans son chocolat. Des trois, il était celui qui communiquait le plus avec leur mentor, ou plus exactement Watari, depuis qu'ils étaient de retour à Londres. Son attitude pouvait être surprenante au premier abord quand on connaissait l'hostilité qu'il avait progressivement accumulée à l'égard du détective, puis devenant parfaitement rationnelle compte tenue de la présence récente de Light Yagami sur Terre, sous forme de dieu de la mort et armé d'un Death Note, de la menace persistante que celui-ci représentait pour les héritiers de L et, de manière générale, tout ceux qui l'avaient côtoyé et avaient pu jouer un rôle dans sa chute. Matt, s'il avait conscience du risque, ne s'en trouvait pas plus bouleversé que d'habitude, et s'il comprenait les angoisses de Mello, il n'estimait cependant pas nécessaire d'échanger lui aussi avec Watari à ce propos, la preuve étant que son camarade pouvait lui fournir directement les dernières informations. Quand à Near, il n'avait jamais été particulièrement bavard avec L ou Watari, en dépit de sa première place au classement, et il devait se douter que Mello aurait été le premier à prendre des nouvelles en raison de leur situation potentiellement instable, aussi avait-il probablement agi à la manière de Matt, attendant d'obtenir des renseignements en provenance de son rival.

Il y avait également quelque chose qui faisait que Mello avait toujours été un plus proche de L que Near ou lui, car il était au courant d'histoires et d'événements que seul leur mentor aurait pu lui divulguer, mais Matt n'avait pas encore réussi à en expliquer la raison, et n'était pas certain qu'il puisse le faire un jour.

- Watari m'a envoyé que Light Yagami ne bouge toujours pas, mais il continue de se méfier, les informa t-il. Il a aussi l'impression que L devient distant.

- L a toujours été distant, remarqua Matt. Y a rien de nouveau.

- Pas comme ça. C'est autre chose.

Near posa alors les yeux sur lui pour la première fois depuis qu'ils commencé à discuter de l'enquête.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? L'interrogea t-il.

Mello leva les yeux à son tour. Ils partagèrent un regard d'une telle intensité que Matt en éprouva un peu de jalousie, comme lorsque Mello avait demandé à Near de venir avec eux, le soir où ils avaient quitté l'orphelinat.

- Je ne suis pas complètement sûr, avoua Mello, après avoir visiblement pesé le pour et le contre de cette déclaration. Ce n'est pas la première fois que Watari m'en parle.

- L a déjà agi de cette façon ? S'étonna Matt.

La fixité du visage de Near indiquait de toute évidence sa curiosité pour le sujet, mais également sa surprise.

- Une fois, continua Mello. Pendant l'affaire Kira, en fait. Watari me disait que L s'était un peu refermé.

- Ce n'était pas après Kira, justement ? Demanda Matt.

- Le phénomène s'est accentué après Kira, le corrigea Mello. Mais c'était déjà présent avant, Watari en est convaincu.

- Il n'était pas comme d'habitude ?

- Oui. Watari a senti qu'il s'était un peu éloigné.

- De l'affaire ?

- Non. De lui.

- Comment ça ?

- Watari a toujours été son confident, qu'on soit d'accord là dessus. Mais pendant l'affaire Kira, il a eut l'impression que L ne faisait plus appel à lui que pour du pratique, et lui parlait beaucoup moins, un peu comme s'il avait estimé que Watari n'était plus digne de confiance ou qu'il lui cachait quelque chose.

- Tu rigoles ? L n'a jamais vraiment rien dit sur lui. Un secret de plus ou de moins, quelle importance ?

- Pour nous, soit. Mais pas pour Watari. Il sait tout à propos de L, vraiment tout. D'où il vient, l'ampleur de son Q.I, sa manière de fonctionner. On a appris le nom de famille de L par l'intermédiaire de BB, mais Watari l'a su parce que L le lui a dit. Vous comprenez où je veux en venir ? Il s'est passé quelque chose pendant l'affaire Kira, quelque chose qui a érigé une espèce mur entre L et Watari et qui l'a fait retomber une fois le cas classé.

- Quelque chose qui pourrait être apparu entre L et Light Yagami ? Proposa soudainement Near, resté silencieux jusqu'à ce point de la conversation.

- Possible, lui concéda Mello. C'est ce à quoi pensait Watari. Et ce que je pense aussi.

- Une sorte d'amitié ? Insinua Matt.

- Peut-être. Quelque chose. Quelque chose de suffisamment important pour creuser un fossé entre L et la personne à qui il avait toujours fait confiance auparavant, et qui recommence.

- Sur quoi se base Watari pour affirmer que le phénomène est en train de se reproduire ? Lui demanda Near.

Il avait abandonné les deux figurines legos sur la moquette, près de sa tour blanche, et avait ouvert une petite mallette noire dans laquelle se trouvait un faux revoler R-101, admirablement contrefait, ainsi qu'une dizaine de petites marionnettes à doigts. Contre toute attente, Matt se reconnu parmi les imitations miniatures. Il repéra également Mello, dont la marionnette était sans conteste la plus réussie, L, Watari, et Near.

- Les messages de L, répondit Mello. D'ordinaire, après lui avoir fait un débriefing sur l'enquête des bateaux, il donnait à Watari des indications sur les mouvements de Light Yagami, mais ça fait deux fois qu'il n'en parle pas. Watari trouve que c'est inquiétant.

- Peut-être qu'il oublie.

- Matty, on parle de L. Le terme même " d'oublier " a été proscrit de son vocabulaire depuis qu'il a appris à parler.

- J'applique la méthode de raisonnement par élimination, se défendit Matt. Après tout, on en sait rien, sa situation est peut-être tellement délicate qu'il en zappe certains détails dans ses mails.

- Non. Même s'il était à moitié crevé, L serait encore capable de te décrire précisément tout ce qui se passe autour de lui sans omettre quoi que ce soit, surtout s'il est en danger.

- Donc tu penses qu'il n'en parle pas volontairement ? Ça a encore moins de sens que mon hypothèse, M, excuse-moi.

- Pourquoi pas ? Grinça Mello, de toute évidence vexé par le peu de considération de Matt pour sa théorie. On a pas eu beaucoup d'infos sur l'affaire Kira, au cas où tu aurais zappé. L nous a juste donné les noms et la méthode, pas plus. Même Watari et Roger ont trouvé ça glauque.

- C'est la première affaire qui lui ait pris autant de temps, remarqua Matt. Et qui lui ait entaché à ce point l'ego. Ça se comprend qu'il n'ait pas spécialement eu envie de nous en parler en détails.

- Tu délires ? C'était l'affaire du siècle. Elle a repoussé toutes les limites de la logique humaine, et ce serait normal que L nous fasse un récap' de deux lignes ?

- Je suis d'accord avec Mello, avoua Near. L s'est comporté de manière étrange au cours et à la suite de Kira, que ça ait été dans sa manière de l'évoquer auprès de nous et de Watari comme de tourner la page. Et si Watari a l'impression que son attitude change de nouveau, c'est mauvais signe. D'après ce qu'il nous a raconté, L s'entendait bien avec Light Yagami, même s'il savait qu'il était Kira. Ses deux changements de comportements ont eu lieu en sa présence, et je n'exclue pas qu'il en soit à l'origine, que ce soit en amenant progressivement L à envisager les choses comme lui ou en le forçant d'une manière ou d'une autre.

- Bon, je m'incline, fit Matt, très nettement vaincu par une réflexion de concert entre Near et son rival. Le problème, c'est qu'on a personne à bord du Svetlana pour nous confirmer que L pique une nouvelle crise.

- Je vais voir ça avec Watari, décida Mello. On ne peut pas envoyer de taupe à bord sans que ça paraisse suspect aux yeux de L, sachant aussi qu'il y a déjà peut-être un type qui balance des nouvelles aux médias, et ce serait risqué de demander à un membre de l'équipage d'espionner pour nous, d'autant plus qu'aucun d'eux ne le connaît vraiment et ne pourrait nous dire clairement si son attitude est inhabituelle. Par contre, Watari peut repérer des changements trop importants dans sa manière de communiquer avec lui, et s'il y a le moindre problème, il le sentira.

Matt songea alors que, suite à sa rencontre avec L, soigneusement dissimulé sous le maquillage nominatif de l'assistant Ryûzaki, l'équipage devait certainement avoir déjà formé une opinion corsée sur celui-ci, et donc sur le détective de manière beaucoup plus large. Il n'y avait qu'avec des gosses de la Wammy's que sa singularité s'évaporait aux yeux du public, pour la simple et bonne raison qu'elle se trouvait noyée au milieu de la bizarrerie propre aux enfants de l'orphelinat.

- Et qu'est-ce qu'on fait si L pète vraiment les plombs ? Demanda t-il.

L'expression en elle-même jurait avec le personnage du détective, néanmoins elle était la seule qui collait à ce point avec ce qu'il cherchait à exprimer. Une déviation, bien que minime, du comportement de leur mentor pouvait prendre des allures de cataclysme nucléaire, en particulier s'il était accompagné d'un tueur en série mégalomane et que Watari était mis sur la touche.

- Qu'est-ce que tu entends exactement par " péter les plombs ", Matty ? Rejoindre Kira ?

- Ça se rapproche de cette éventualité. Et on sait que Kira comme L sont des égoïstes : ils n'accepteront jamais de se partager le pouvoir, donc je pense aussi à la possibilité que L vire définitivement psychopathe une fois convaincu par Kira que les criminels doivent disparaître de la surface de la planète.

- Si on se fie à la définition stricte, L est loin du psychopathe, objecta Near.

- Pour l'instant, répliqua Matt. Il en a toujours eu le potentiel.

- Il est moralement très ambigu, intervint Mello. Comme nous tous. On est pas des psychopathes pour autant.

- Mais on pourrait l'être. Surtout toi et Near. Ne le prenez pas mal, les gars, mais L a fait de vous ses héritiers, beaucoup plus que moi, parce que vous lui ressemblez. Je n'ai que deux ou trois traits, vous les accumulez. Si on vous fusionnait, continua t-il, ignorant la grimace de Mello à cette perspective, vous seriez quasiment des jumeaux avec lui.

Mais vous n'êtes pas une seule et même personne, garda t-il pour lui, et donc le transfert a foiré, vous êtes sauvés

- Il y a toujours un truc avec L, poursuivit-il, qui fait qu'il a constamment l'air de balancer entre le bien et le mal, pour peu qu'on puisse définir précisément ce qu'est l'un et l'autre. Il s'est auto-proclamé symbole vivant de la Justice et il applique ses méthodes en outrepassant largement les lois. Il cherche à obtenir ce qu'il veut quels que soient les moyens. Si on regarde sans trop chipoter, ça se rapproche vaguement de Kira, qui croyait débarrasser le monde des méchants en commettant un génocide. Globalement, parce que vous êtes amenés à reprendre le flambeau un de ces quatre, vous raisonnez d'une façon similaire.

- L ne commettra jamais de génocide, affirma Mello. Surtout sur des criminels. Il n'y que les enquêtes qui l'intéressent : il sombrerait dans l'ennui s'il n'y avait plus le moindre délinquant, et on sait qu'il déteste l'ennui plus que tout le reste.

- Pas sûr. On le sait parce qu'on nous l'a présenté comme ça, mais qui sait vraiment ce qu'il y a dans la tête de L ? Rien ne nous dit qu'il ne pourrait pas se rallier un temps à Kira ou emprunter ses idées et les diriger contre d'autres, pour finir sur une ambiance de dictature. Après tout, si là encore on regarde sans entrer dans les détails, la Wammy's fonctionne presque comme une Napola.

Cette fois, Mello le regarda avec un effarement mêlé d'admiration.

- Ne fais pas cette tête-là, M, tu le savais. Near aussi.

- Franchement, je ne pensais pas que tu aurais les couilles de le dire à voix haute un jour, avoua Mello, qui, la surprise passée, repris la dégustation de sa tablette de chocolat quasi terminée.

- Tu me sous-estimes beaucoup, Blondie.

Néanmoins, il savait qu'il n'avait rien formulé de véritablement novateur, et la consternation de Mello relevait davantage du fait que c'était lui qui avait pointé la ressemblance de l'orphelinat avec les internats de la jeunesse hitlérienne, plutôt que du contenu de la remarque en tant que tel. La Wammy's formait les héritiers du L comme une Napola avait conditionné les garçons et les filles sous le règne du führer, tant sur le point de vue intellectuel que physique, bien qu'en cela les Napolas aient comporté un enseignement beaucoup plus dense et violent que l'orphelinat pour génies d'Angleterre. Mais il y avait la même volonté de formater la pensée vers un but précis, de la modeler jusqu'à ce qu'elle soit suffisamment intégrée pour être considérée comme une maxime. L était aussi idolâtré par les enfants de la Wammy's qu'Hitler ou Kim Jong-il dans les écoles de Corée du Nord, et il y avait fort à parier qu'un revirement de ses principes atteindrait en premier lieu l'orphelinat avant de s'étendre au reste du monde.

- Pour l'instant, on est sûrs de rien, reprit Mello. Je vais contacter Watari, lui dire qu'on en a parlé entre nous, et qu'on souhaiterait avoir des nouvelles aussi régulièrement que possible sur le comportement de L. Au moindre pet de travers, je vous propose qu'on suggère à Watari de vider la Wammy's avec Roger et de dispatcher les gosses aux quatre coins du monde. L n'a pas la liste complète, seulement celle du top 10 puisque c'est la seule qui ait vraiment de l'intérêt, donc on pourrait réussir à en mettre quelques uns à l'abri.

- Et pour nous ? Si L s'associe momentanément à Kira et nous trouve sur sa route, il nous éliminera sans difficulté en lui filant nos vrais noms.

- J'ai pas encore réfléchi à cette éventualité, Matty. Très honnêtement, à chaud, je te dirai bien qu'on y passera sans possibilité de nous défendre. Light Yagami est déjà mort, et L déteste qu'on lui barre la route. S'il a rejoint Kira ou même s'il décide de faire cavalier seul, en parallèle de Kira ou après s'en être débarrassé, autant vous dire qu'on est cuits.

- Si les enfants de l'orphelinat sont placés en sécurité, il y a une chance pour qu'ensembles, ils puissent mettre L hors d'état de nuire, leur assura Near. La probabilité est très faible, mais elle reste existante et non-négligeable. Il n'y a qu'un seul registre des noms à la Wammy's, détenu par Roger et Watari, et s'ils le détruisent avant que L ne parvienne à mettre la main dessus, il lui faudra un certain temps avant de pouvoir retrouver tous les enfants.

- Soit autant de temps pour eux de se regrouper et de monter un plan de secours, renchérit Mello.

- Je ne garantis pas l'efficacité absolue de notre propre plan, dit Near. Le nombre d'enfants risque de connaître une diminution drastique dès le début : certains d'entre eux pourraient ne pas vouloir se joindre au mouvement par peur. De plus, même si nous parlons de génies, ils sont toujours moins doués que nous, L ou Kira. S'il veulent abattre L, ils doivent travailler ensembles, c'est une condition indispensable. Pour finir, il faut prendre en compte d'autres éventualités, comme le fait que certains se feront tuer ou corrompre par L avant d'avoir pu constituer le réseau, si ce n'est par le reste du monde à la demande de L, qui mettra probablement tout en œuvre pour les traquer et les éliminer avant qu'ils ne deviennent une menace potentielle. Leur chance de réussite n'excède pas les 10 %.

Mello jugea bon également de leur rappeler la présence de Kira dans l'équation, et la possibilité que ce dernier constitue lui aussi une menace sérieuse pour les enfants comme pour L. Trop aveuglé par son propre égocentrisme et sa vision du monde, il refuserait sans aucun doute possible la moindre coopération, à l'image du détective, et reprendrait sa croisade contre la criminalité avec la certitude que l'humanité ne pourrait rien face à lui.

- On va droit vers un scénario d'apocalypse, là, nota Matt. Autant conclure que toute la planète va sombrer dans le chaos, ça irait plus vite.

- Ce serait donner beaucoup de pouvoirs à Kira. Et à L. D'ailleurs, il m'a assuré que Light Yagami n'avait aucun droit d'écrire dans son Death Note le nom des personnes qu'il avait côtoyé de son vivant, se souvint Mello.

- Ça change la donne pour L, pas pour nous ou les enfants, répliqua Near. De plus, nous sommes d'accord sur le fait que les lois n'ont jamais empêché Kira de faire quoi que ce soit. Si tel était le cas, Watari ne demanderait rien à L sur le sujet. Mais s'il y a effectivement punition pour ce cas de figure, je dirais qu'il jouerait en notre faveur : se défaire d'un dictateur potentiel sur deux, qui plus est l'immortel, facilitera la chute de L. En outre, puisque nous ré-abordons le sujet, la probabilité que L accède véritablement à une emprise mondiale reste également très faible. Il lui faudrait déjouer les autorités internationales tout en passant outre la résistance supplémentaire de Kira et la nôtre. Il n'y a rien de mal à être prévoyant, mais pour le moment, restons-en à l'enquête des bateaux et aux indications de Watari. Nous mettrons en place un dispositif de défense uniquement si Watari estime que cela devient nécessaire ou si notre suspicion en vient à le concerner lui aussi.

Il rangea une à une les marionnettes à doigts dans leur mallette noire tandis que Mello et Matt, silencieux, attendaient sa conclusion définitive, car ils avaient à l'esprit la seconde remarque que Near avait prévu de leur soumettre au sujet de l'affaire en Israël, et qui avait été perdue de vue à mesure que le débat à propos de leur mentor et de l'hypothèse que ce dernier n'évolue à son tour en Kira sous les bons conseils du premier s'étiolait. Mais Near ferma la mallette, et ne reprit pas les legos, contrairement à ce qu'ils espéraient. Il se contenta de tourner la tête vers son ordinateur portable, allumé mais inutilisé, sur la table basse du salon où il reposait depuis le début de leur conversation.

- Si vous le permettez, j'aimerai que nous fassions une pause, lâcha t-il.

Même Matt ne put dissimuler sa confusion.

- T'es fatigué, N ? Demanda t-il.

- T'en as ras-le-bol de nous voir ? Proposa finement Mello, un sourire sarcastique lui peignant le visage de chaque côté des joues.

- Pas du tout. Mais si vous êtes d'accord, je souhaiterai envoyer un mail à Roger pour lui faire également part de nos inquiétudes à propos de L, et lui soumettre des consignes à suivre en cas de danger pour mettre les enfants à l'abri le plus rapidement possible.

Un instant, Matt crut que Mello allait refuser le marché simplement par volonté de conserver son monopole sur le problème, mais celui-ci, après avoir réduit en boule l'aluminium de sa tablette de chocolat réduite au néant, hocha la tête.

- Pas trop prudent, mais prudent quand même, hein ? Se railla t-il. Écoute, puisque je m'occupe de Watari et L, d'accord pour que tu te concentres sur Roger et la Wammy's, ça me paraît équitable, mais tu as intérêt à nous mettre au courant de la marche à suivre une fois que tu l'auras transmises à Roger.

- Cela va sans dire, lui confirma son rival.

- Et moi, je peux aider à quelque chose ou vous préférez que je fasse le mouton, comme d'habitude ? Ironisa Matt.

- Fais le mouton, Matty, ça te va tellement bien, on dirait que c'est inné.

Il choisit d'ignorer la remarque de Mello concernant directement ses origines irlandaises ainsi que la réputation du pays en question vis-à-vis de la population laineuse, et écouta Near lui recommander de faire des recherches sur les endroits les plus aptes à accueillir des enfants surdoués sans qu'ils soient trop faciles à envisager pour L ou Kira. Il lui demanda par la même occasion de se renseigner sur la possibilité de créer un réseau commun et suffisamment discret pour les mettre en communication rapidement une fois que serait aboutie leur installation sur les sites retenus. Dès l'instant où la répartition des tâches fut achevée, Mello annonça sans cérémonie qu'il profitait de la pause pour aller prendre l'air et faire un tour dehors.

- Puisque tu vas te racheter des clopes, Blondie, ça t'embêterait de me prendre le dernier Discover ?

- Et ton WIRED ?

- Fini.

- Matty, je ne suis pas ta bonne. Tu ne peux pas aller te l'acheter toi-même, ton magazine ? T'as deux jambes et un porte-monnaie, que je sache.

- C'est toi qui sors, répliqua Matt, imperturbable.

La règle à propos des sorties avait été mise en place par L et copieusement dispensée par Roger : il leur était déconseillé de quitter le logement tous les trois ensembles, au risque d'être repéré. Mello répondit avec un de ces nombreux soupirs de diva agacée, signalant par là-même que Matt avait gagné leur échange et son magazine.

- N ? Appela ensuite Mello. Tant qu'on y est, tu veux aussi quelque chose ?

Near abandonna son ordinateur portable et tourna lentement la tête vers lui, sondant son visage comme s'il essayait de jauger la fiabilité de la proposition de son rival. Matt ne s'étonna pas outre mesure. Leur conversation du balcon trottait dans sa tête inlassablement, comme un engrenage sans fin.

Il est amoureux de toi

- Non, merci Mello, dit-il finalement, mais d'un ton pouvant suggérer qu'il avait hésité sur la réponse à donner.

Comme ce dernier se dirigeait vers la porte, Matt lança soudainement :

- Hé, Blondie ?

- Quoi encore ? Grinça Mello, la main sur la poignée de porte et les yeux brûlant dangereusement d'irritation contenue.

- Tant qu'on y est, t'aurais pas embarqué une Bible avec toi, à tout hasard ?


" PÉCHEURS, REPENTEZ-VOUS ! "

" Les gouvernements mondiaux se fourvoient et nous aveuglent ! Les disparitions de bateaux agitant notre quotidien ne peuvent trouver leur

explication que dans une seule chose qui aura été, cela va sans dire, intuitivement devinée par les fidèles : ce sont les péchés

de l'humanité qui, se prenant pour Dieu, ont réveillé la colère divine et engendré une série de catastrophe dont les récents événements

ne constituent qu'un avant-goût. Loin de là l'idée de remettre en cause le travail admirable accompli par le monde scientifique, dont les trouvailles

nous auront permis de tirer quelques conclusions relatives aux disparitions, mais ces dernières sont erronées et ces drames découlent en réalité

non d'un caprice de la nature, mais bel et bien de la désobéissance à notre Seigneur par ses sujets, que la science aura cherché à attiser par tous les

moyens. La science, complice des États parjures, ne peut que nous détourner du chemin de la vérité et du pardon en nous présentant des hypothèses

mensongères, au service de la cupidité.

x

Il nous faut nous repentir et prier tant que nous le pouvons pour nos âmes noircies par les multiples transgressions aux lois de Dieu. Prions

ensembles, fidèles, pour notre salut et celui des autres. Soyons soumis à Dieu, le seul et l'unique,car après la mer viendront la terre, les cieux

et le feu, la famine, la guerre, la peste et la mort, dans un boucan d'apocalypse, et les bêtes des eaux rugiront, tel que nous ne pourrons pas combattre.

x

Je confesse à Dieu tout puissant, je reconnais devant mes frères que j'ai péché en pensée, en parole par action et par omission ; oui j'ai vraiment péché. C'est pourquoi je

supplie la Vierge Marie, les anges, tous les saints et vous aussi, mes frères, de prier pour moi le Seigneur notre Dieu. "

The Penitence, hebdomadaire israëlien


30 mars 2008, 16 heures, détroit de Magellan, Cabo Cooper Key.

Le calme n'avait guère duré. Peu après 15h, les membres de l'équipage du Svetlana s'étaient transformés en touristes et avaient commencé à affluer les uns après les autres dans le laboratoire du navire, avec pour unique but de contempler - et éventuellement de toucher, ce que pour le moment les chercheurs étaient parvenus à éviter par de multiples exhortations verbales et, dans le cas de Deville, gestuelles – la pierre et l'écaille ramenés à la surface deux heures auparavant. Bien qu'en ayant eu un bref aperçu lors du retour du Vladimir sur le pont, l'équipage n'avait pas encore véritablement approché les deux nouveaux éléments et en avait donc profité pour construire une théorie proche du sacrilège, consistant à affirmer que l'œuf – ils n'envisageaient même plus la possibilité qu'il s'agisse d'une simple pierre - était issu d'un croisement fort subtil entre une baleine à bosse, dont un cadavre avait été découvert par le sous-marin au cours de son exploration, et Moby Dick, la créature prétendument cauchemardesque à l'origine des disparitions de navires. L'écaille, quand à elle, avait été mystérieusement passée à la trappe, car elle paraissait ne pas contenir assez de mystère pour permettre à l'équipage d'élaborer à son propos la moindre hypothèse loufoque. Van Lunet, ne comprenant pas bien le renouvellement de l'agitation de l'équipage et apprenant ensuite par la bouche de Seashell ce que pensaient ses camarades, avait rajusté trois fois ses binocles, puis froncé les sourcils, secoué la tête, froncé les sourcils de nouveau, avant de finalement se servir un autre tube à essai de vin sous les yeux pleins d'espoir naïf du lieutenant.

La bouteille, très vite entamée, se trouva tout aussi rapidement hors d'état de nuire en moins de trois quart d'heure. Sans grande surprise, Deville se chargea en grande partie de sa liquidation, et proposa même généreusement à Light et L de finir leurs propres tubes à essai qu'ils n'avaient, pour leur part, pas touché. À Newton qui s'inquiétait de sa consommation un rien excessive, il répondit tenir admirablement l'alcool et avoir déjà été parfaitement conscient en dépit de l'enchaînement de plusieurs shots d'absinthe couplés à de la Poliakov en quelques minutes. Sa résistance mise en avant auprès de tous, il s'excusa et quitta les lieux, une main sur la bouche, prétextant une crise d'herpès des plus fulgurantes. Pierre - ou Lellou, cette histoire devenait impossible - , qui passait par là, fit un détour par l'infirmerie puis la cuisine et leur ramena gentiment deux plaquettes d'ibuprofène, une grande bouteille d'eau, ainsi que des tartines de pain grillé avec du miel, ces dernières ayant été vivement conseillées par Pronto, émergeant de sa sieste et préparant ses casseroles pour le repas du soir, pour le traitement de la gueule de bois. Il les informa au passage que le menu du dîner serait revu en conséquence, afin de favoriser le rétablissement de Deville dans les meilleurs délais. Celui-ci ne revint pas suite à son départ brutal du laboratoire, mais fit savoir à ses confrères qu'il était effectivement souffrant et qu'il lui serait dans l'incapacité physique de reparaître avant au moins 20h. Comme Newton et Van Lunet priaient Pierre - ou Lellou - de lui transmettre leurs encouragements, Al Qasim s'irrita ouvertement contre lui et attribua son état à son imprudence vis-à-vis de sa ténacité quand à la bouteille de bordeaux.

- J'espère que ça lui servira de leçon, maugréa t-il. Être saoul, pourquoi pas, mais le nier, ça revient à admettre qu'on est un gros crétin !

Van Lunet esquissa la possibilité que la leçon ne soit pas apprise par Deville car il ne voulait pas la retenir, et que le fait d'être saoul impliquait souvent un déni de la part de l'individu ayant abusé de l'alcool, mais ses arguments furent somptueusement ignorés par Al-Qasim, trop occupé à pester contre Deville pour faire attention à autre chose. Le débat parut s'arrêter là, L et Light ne souhaitant pas y ajouter de commentaire.

Sous les yeux du shinigami, les chiffres de l'espérance de vie de l'œuf, tout du moins de ce qu'il y avait à l'intérieur, n'avaient plus subi le moindre changement depuis qu'il avait remarqué leur chute brutale et inexpliquée. L'utilisation du dialecte japonais pour le signaler à L lui avait au moins permis de l'avertir, mais Lameloise, qui ne le maîtrisait pas, n'avait pas compris et avait levé vers lui un visage interrogateur à l'instant même où il apostrophait le détective.

- L'œuf. J'ai cru qu'il avait bougé, avait mentit Light. Comme dans le sous-marin.

- Vous avez cru ? Reprit Lameloise, perplexe. Vous voulez dire qu'en fait, il n'a pas bougé ?

- Non. C'était juste la lumière.

- C'était choquant au point que vous en fassiez la remarque à votre collègue ? Insista Lameloise, sans méchanceté mais avec une pointe d'ironie assez désagréable.

- Ce n'était pas pour ça, c'était une remarque privée.

Cependant, l'expression figée de Lameloise lui indiqua aussi clairement que s'il avait parlé combien son excuse manquait de conviction. De plus, leur conversation à propos de l'œuf avait démontré à Light que l'aide-cuisinier utilisait bien plus ses neurones qu'il ne le laissait présager, et bien qu'il ait apprécié leur précédent échange, sans aucun doute le plus éclairé qu'il ait eut avec un membre de l'équipage du Svetlana, le shinigami sentit monter en lui l'effluve de la méfiance. De bonne compagnie, Lameloise et son cerveau se transformèrent en guêpier, car, bien que n'affichant pas la moindre ambition, celui-ci exhalait une sorte d'aura qui rappelait étrangement à Light la sienne, chaque fois qu'il avait affirmé à L ne pas être un tueur en série.

Tu as essayé de - oh, pitié, ça suffit

Il ruminait sans pouvoir s'en empêcher, comme il ressassait quelques années auparavant, et même quelques jours auparavant, les souvenirs de sa défaite. De manière générale, tout ce qui sortait de sa logique habituelle, qu'il s'agisse de situations ou de ses propres comportements, l'avait toujours amené au rabâchage intellectuel. L, qui examinait l'œuf en face de lui, était aussi impénétrable qu'à l'accoutumée, et Light n'avait par conséquent aucun moyen de savoir si sa tentative de l'embrasser, soldée par un échec prévisible, l'avait atteint. Il avait levé le menton pour se laisser faire, et Light avait vu ses yeux noirs se fermer, mais rien ne lui assurait qu'il ne s'agissait pas là d'un pur réflexe. Il ne savait que peu de choses sur le détective, mais était certain que ce dernier était aussi cérébral que lui, et que ses sentiments jouaient un rôle extrêmement mineur en comparaison à sa logique. Il n'était même pas sûr que L ne les comprenne, mais cela dit, lui-même avait du reconnaître, après avoir passé les deux dernières heures à plancher dessus avec la rage d'un condamné à mort, qu'il ne parvenait pas non les saisir, qu'il soit question de ses propres émotions ou de celles de L. Car s'il savait qu'il haïssait le détective, depuis toujours, du premier jour où ils s'étaient rencontrés jusqu'à maintenant, et que la fondation de ce ressenti résidait principalement dans le fait que L était tout ce que Light aurait voulu être (et ne serait jamais) en terme de symboles vivants et de pouvoirs, il avait aussi conscience d'autre chose, de plus diffus et nébuleux, présent depuis peut-être moins longtemps mais qui l'avait accompagné jusque dans le Cathare et jusqu'ici, sur le Svetlana, et qui avait accentué sa rancœur lorsque L avait entraîné sa chute.

J'imagine que, dans un sens, je ne m'attendais pas à toi non plus

Pourquoi es-tu monté à bord, L ? C'est plus que par ennui. Qu'est-ce qu'il y a dans ta tête, à quoi tu penses ?

L, s'il ne l'avait pas montré, était tout aussi perdu que Light face à la diminution de la durée de vie de l'œuf. Après l'annonce du shinigami, ils en avaient discuté, profitant de l'inattention de Lameloise, alors apostrophé par Van Lunet au sujet des gâteaux présents à bord et dont l'ordre de passage souhaitait être définitivement confirmé par le chercheur.

- Tu n'as rien vu d'anormal ? Lui avait demandé L. Pas de mouvement ?

- Non, lui avait répondu Light. Personne ne l'a fait tomber, personne n'y a touché, et je ne l'ai pas quitté des yeux depuis qu'il a été installé ici. Je ne comprends pas plus que toi.

Ils n'avaient encore rien signalé aux scientifiques, préférant d'abord se mettre en accord sur une cause commune et plausible du dépérissement de ce qui grandissait dans l'œuf. Mais comme ils ne trouvaient rien de concluant, les chiffres dégringolèrent à nouveau, bien qu'un peu moins cette fois, sous les yeux de Light.

- Ça recommence, indiqua t-il au détective.

Mais il avait légèrement reculé sous la surprise tandis que L s'était penché en avant pour inspecter l'œuf, et Lameloise s'en était aperçu.

- Encore la lumière ? Proposa t-il.

La remarqua agaça Light plus qu'il ne l'aurait cru. Quand à L, il posa sur Lameloise un regard incisif, de sorte que le shinigami pu presque voir dans sa tête le pourcentage de défiance que le détective instaurait à l'égard de l'aide-cuisinier.

- Non, grinça t-il, abandonnant ce mensonge pour un autre plus dynamique. Je l'ai vu bouger, j'en suis sûr.

Il n'eut pas besoin de se répéter. L'intégralité des chercheurs, ayant surpris leur conversation, déferla vers eux dans le même temps que Tailcoat et le second mécanicien Spider, venus tous deux prendre des nouvelles des découvertes à la suite de leurs camarades. L, n'ayant pas la moindre envie de se retrouver coincé entre deux experts, fit prudemment le tour de la paillasse et revint se placer aux côtés de Light.

- Vous dîtes qu'il a bougé de nouveau ? S'émerveilla Van Lunet, l'index et le pouce serrés nerveusement autour d'une branche de ses binocles.

- Et vous l'avez vu ? Renchérit Newton.

- Oui, dit Light. Ce n'était pas flagrant, mais la coquille s'est soulevée, j'en suis certain.

Van Lunet, se dégageant souplement de ses compagnons, entreprit alors de poser très doucement ses mains sur l'œuf, et en palpa tout aussi paisiblement la surface pendant quelques secondes. Il le souleva ensuite, de très peu et en le tenant fermement, puis le reposa sur son coussin, et ses mains volèrent à nouveau vers ses lunettes.

- Messieurs, je m'en doutais déjà, mais la coquille de cet œuf est remarquablement épaisse, déclara t-il. Sans pouvoir la mesurer précisément, je dirais qu'il s'agit là de la plus massive qu'il m'ait été donné d'observer jusqu'à maintenant. À vue d'œil, je dirais que nous sommes au delà du centimètre d'épaisseur, peut-être même de cinq. Pour comparaison, chers amis, rajouta t-il en s'adressant à Tailcoat, Spider, et Lameloise, la coquille des œufs de poule ne dépasse pas 0.3 millimètres, et celle des œufs d'autruche, trois millimètres. Quand à la membrane, qui protège en plus ce qui se développe à l'intérieur de l'œuf, je n'ose y songer. Ces éléments vont dans le sens votre théorie, cher collègue, dit-il, se tournant vers Al-Qasim. Bien que nous manquions de preuves visuelles d'un spécimen, il est définitivement question d'une nouvelle espèce.

Al-Qasim émit une sorte de reniflement triomphant.

- Le problème du spécimen ne va pas se poser longtemps, Van Lunet, assura t-il. À en croire Light, l'éclosion est pour bientôt. Il a vu l'œuf bouger plusieurs fois au cours de cette journée.

- Je ne serai pas aussi optimiste, répliqua pensivement Van Lunet. Avec une coquille de cette taille, l'éclosion pourrait prendre plusieurs jours, si ce n'est plusieurs semaines. Le phénomène chez une poule peut durer jusqu'à vingt quatre heures, c'est suffisant pour imaginer la durée d'une éclosion d'un tel œuf, même si celle-ci a l'air d'être déjà enclenchée si nous nous fions aux observations de Light. Cela va dépendre, je pense, de ce qui percera cette coquille, et du niveau auquel se trouvait l'éclosion avant que nous ne trouvions l'œuf. J'avoue également avoir peur que notre intervention n'ait interrompu le processus, ou du moins l'ait retardé.

Light et L échangèrent un regard dubitatif. Eux seuls, de tout le navire, savaient que l'hypothèse de l'éclosion avait pour base un mensonge à visée protectrice de la vérité. La venue au monde d'un petit issu de la nouvelle espèce n'avait que peu de chances de se produire dans les prochains jours, car dans les faits, jamais le shinigami n'avait vu se soulever la coquille, et les chiffres de la durée de vie n'étaient pas plus capables de leur signaler que la chose à l'intérieur de l'œuf s'apprêtait à en sortir, puisque Light, s'il pouvait les lire, n'avait pas la moindre idée du total impliquant l'éclosion.

Il va falloir jouer serré, pensa Light, et les yeux de L semblaient dire exactement la même chose

- Souhaitez-vous que nous transmettions la nouvelle à nos camarades ? Demanda Tailcoat, les ramenant par cette interrogation à un problème déjà apparu au cours de l'exploration des fonds marins par le Vladimir, au travers de l'éclatante paranoïa de Langois.

Celle-ci, ayant déjà vu plus clairement que ses homologues les deux trouvailles, n'était pas venue en leur compagnie afin de mieux pouvoir les admirer. En effet, leur plongée à bord du Vladimir semblait avoir ravivé, avec justesse, ses alarmes relatives à la créature responsable des disparitions, et elle avait vraisemblablement entrepris d'éviter avec soin tout ce qui pouvait s'y rapporter au cours des prochaines heures. Smirnov avait bien tenté de la convaincre en lui suggérant d'imaginer l'œuf sous forme d'omelette aux champignons, mais le lieutenant avait vivement refusé l'assimilation culinaire, beuglant qu'elle ne consentirait jamais à se délecter d'une omelette capable de l'étriper pour en faire son plat du jour.

- Je ne crois pas que c'est une bonne idée, déclara L. Le lieutenant Langlois redoutait que l'œuf n'éclose pendant notre remontée, et savoir que le phénomène pourrait se produire à bord risque de l'effrayer, comme les autres membres de l'équipage. De plus, il y a une possibilité qu'il y ait une taupe à bord qui diffuse les informations aux médias pour son propre compte. Il serait plus prudent d'éviter la moindre fuite pour l'instant.

Les différents articles parus dans la presse internationale, couplée aux reportages sur les chaînes des quatre coins du monde, avaient renforcé la sensation qu'un mouchard traînait sur le pont du Svetlana, mais il ne s'agissait malheureusement pas de la seule personne susceptible d'avoir fait des confidences à des amis ou directement aux médias. Light avait rappelé à L, suite au visionnement du premier reportage sur le navire quatre jours auparavant, qu'il avait entendu deux chercheurs en discuter alors qu'il se trouvait encore à New-York. L avait immédiatement suspecté les scientifiques présents à bord, mais c'était Deville qui, lorsque le détective leur en avait parlé, s'était dénoncé de lui-même, accomplissant son premier acte véritablement courageux depuis qu'il était présent sur le bateau. Il avait raconté s'être vanté de son départ sur un navire océanographique auprès d'un collègue américain qui travaillait avec lui sur les fragments de navires disparus dans un entrepôt de Boston, et ce malgré la discrétion exigée de lui par les organisateurs. Il avait notamment insisté sur le fait qu'un assistant du grand L ferait partie de l'expédition, mais avait affirmé ne pas avoir donné plus de détails, car à l'époque les modalités du voyage étaient encore assez floues (L savait que c'était une stratégie volontaire de la part de Roughead, qui souhaitait limiter le nombre d'informations transmises aux chercheurs et à certains membres de l'équipage avant le départ pour éviter la moindre diffusion).

- Je lui avait dit de ne pas en parler aux médias, avait-il raconté. C'est un homme de confiance, je suis convaincu que ce n'est pas lui qui a vendu la mèche et qu'il aura enjoint aux autres collègues d'agir comme tel.

Cependant, il était question d'un pur ressenti de la part de Deville, et rien ne pouvait confirmer qu'un expert n'ait pas été tout raconter aux médias, car ces derniers, sentant probablement quelque chose de louche dans la passivité des gouvernements internationaux face aux disparitions, avaient du s'appliquer à interroger toute personne pouvant détenir des informations sur le sujet, les communautés marine et scientifique étant les premières visées par leur curiosité. La politique et le militaire étaient également ciblés, car bien que Roughead, Winter, Gates et le Président se soient assurés que le Svetlana passe aussi discrètement que possible, des personnes écoutant aux portes, ou même un instant de franchise mal accordé, pouvaient être la cause d'une transmission de données se terminant sur un plateau télé ou dans les lignes d'un article de presse.

- Mais il faudra bien leur dire à un moment ou un autre, surtout si l'œuf vient à éclore, objecta Light. Mais je serais d'avis pour qu'on leur donne des certitudes plutôt que des suppositions. Ce sera moins inquiétant.

- Avez-vous informé L de cette avancée ? S'enquit alors Newton.

- Oui, répondit L, anticipant la moindre remarque de Light. Je l'ai fait avant de revenir au labo, mais je n'ai pas vérifié si j'avais reçu la moindre réponse depuis. Cela dit, je sais qu'il voudra des preuves visuelles.

- Des photos ? Fit Van Lunet.

L hocha la tête.

- Et un rapport complet sur le contenu de l'œuf et de l'écaille, leurs structures, leurs origines, acheva t-il. La dernière fois que nous lui avons communiqué nos résultats, il s'est montré en accord avec la théorie de la nouvelle espèce et des sonars.

- Très bien, très bien, se réjouit Newton. Dans ce cas, permettez-moi d'avancer une proposition : messieurs Tailcoat, Spider et Lameloise vont dès maintenant retourner auprès de leurs condisciples, mais afin de ne pas entraîner la moindre panique, ils ne leur diront rien au sujet de nos hypothèses sur l'éclosion de l'œuf. Je les crois suffisamment discrets pour me fier à eux, et s'ils parlent, le fait qu'ils ne soient que trois réduit les possibilités d'accusation. Parallèlement, mes honorables collègues et moi-même, ainsi que les assistants de L, effectueront des analyses poussées sur l'œuf et l'écaille, bien que cette dernière soit plus accessible de part son statut moins instable, durant les prochaines heures. Lorsque nous disposerons de théories pertinentes à leur propos, nous les adresserons à L. Si par la suite, il nous donne son consentement, nous en ferons part à notre tour aux membres de l'équipage par le biais d'une réunion semblable à celle que nous avions organisé avant de gagner Cooper Key. Dans le cas contraire, nous continuerons de travailler jusqu'à ce que des éléments intéressants soient mis en évidence. Dans tous les cas, nous gagnons du temps pour essayer, en parallèle, de démasquer qui pourrait...disons, profiter de sa présence ici pour faire du profit en dévoilant nos progrès. Je ne dis pas que notre tentative se soldera par une victoire, car à ce stade, nous sommes tous suspects, mais mieux vaut cela que laisser couler, ne pensez-vous pas ?

- C'est un programme qui me paraît tout à fait raisonnable, mais vous omettez un détail, avança Al-Qasim. Si l'œuf éclos pendant nos examens, quelle procédure devrons-nous suivre ? Nous ne savons que très peu de choses sur la nouvelle espèce, et l'idéal serait de garder un spécimen vivant aussi longtemps que possible à bord de ce navire, tout en prenant garde à ce qu'il ne nous engloutisse pas tous les uns après les autres.

L'enthousiasme provoqué par la découverte de l'écaille et de l'œuf avait atténué chez beaucoup d'entre eux le fait qu'il s'agisse d'une espèce potentiellement agressive et mangeuse d'hommes, aussi le commentaire du médecin-légiste re-centralisa tous ceux présents dans le laboratoire sur cette éventualité, et un silence de plomb s'abattit instantanément.

- Je suis d'accord avec vous, cher confrère, admit Newton. Mais si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'aimerai que nous discutions de cette possibilité après le départ de nos trois compagnons.

- Dans ce cas, nous partons tout de suite, monsieur, dit alors Tailcoat en s'inclinant légèrement. Nous ne voudrions pas vous déranger davantage dans vos recherches, sachant que celles-ci ont un impact direct sur notre survie à tous, et qui plus est, j'étais aussi venu prévenir Lameloise que Pronto a besoin de lui pour commencer à préparer le repas de ce soir.

- Je vous suis, annonça le jeune homme en se levant avec un petit sourire poli.

Le visage du délicieux assistant de la cuisinière n'irradia pas de bonheur à la perspective de retourner sur son lieu de travail. Light, comme il le scrutait en biais, devina de la colère sous son sourire visiblement forcé, mais fut trop soulagé de le voir quitter le laboratoire, lui et son esprit récemment devenu nocif, pour se pencher davantage sur ses états d'âme.

Une fois assurés de n'être plus qu'entre chercheurs dans le laboratoire, Al-Qasim ayant même été vérifier par le judas qu'aucun membre de l'équipage n'était resté devant la porte, le débat reprit. Newton entreprit d'apporter l'un un tableau portatif et se posta devant, marqueur en main, prêt à écrire. Il commença par inscrire " Espèce I ", pour " Espèce Inconnue ", car ils ne s'étaient pas encore concertés pour lui donner un nom officiel, principalement par manque d'éléments, puis se tourna vers L, Light et ses collègues.

- Nous devrions commencer par répertorier les différentes caractéristiques de l'espèce que nous connaissons déjà, lança t-il. En ayant très peu, cela devrait aller vite, et nous pourrons rapidement en envisager d'autres grâce aux analyses effectuées sur l'œuf et l'écaille.

- En premier lieu, cher collègue, débuta Van Lunet, je dirais que pour percer cette coquille, notre spécimen doit avoir un bec, si ce n'est un diamant comme chez les reptiles, extrêmement imposant et solide, davantage que la coquille elle-même.

- Et très possiblement des branchies, car rappelons qu'il s'agit d'une espèce principalement marine et que nous avons trouvé cet œuf sous...

Mais il ne put continuer correctement sa phrase, car soudainement L s'était mis à s'agiter. D'un pas moins traînant que d'habitude, il se dirigea vers la pièce attenante au laboratoire qu'ils avaient souvent utilisée au cours des derniers jours, et en ressortit sous les yeux de tous les bras chargés d'une caisse de verre vide de forme cubique paraissant beaucoup trop grosse pour son gabarit, et que Van Lunet identifia sur le champs.

- Mais c'est un aquarium, dit-il doucement, comme s'il était en train de réaliser quelque chose.

Et Light, lui, compris d'un coup.

Une nouvelle espèce marine

Un monstre marin

Et très possiblement des branchies

Des branchies, bon dieu !

L avait amené l'aquarium sur la paillasse où se trouvaient l'œuf et l'écaille, soit celle de Light occupait depuis le début, et le remplissait d'eau directement à l'aide du robinet associé à la table. Van Lunet poussa une exclamation d'effroi, et alors seulement Newton et Al-Qasim parurent prendre conscience de ce qui se passait.

- Seigneur, et dire que nous l'avons laissé tout ce temps...bredouilla Van Lunet, véritablement affolé.

L'aquarium, de bonne contenance, était presque plein.

- Light l'a vu bouger, dit L. Il y a une chance pour que ce soit encore vivant, mais il faut faire vite.

Avec la vivacité d'un serpent, le shinigami saisit l'œuf entre ses mains. L'aquarium s'étant finalement rempli et L, aidé de Van Lunet, étant parvenu à le déposer sur la paillasse sans trop de dégâts, il entrepris de déposer l'œuf tout au fond de celui-ci, en prenant garde à ne pas l'abîmer. Une situation de ce genre ne risquait pas de produire compte tenu de la solidité de la coquille et du peu de distance entre la surface et le fond de l'aquarium, mais Light ne voulut pas tenter le diable.

- Bien sûr, c'est une espèce marine, lança Newton. Et vous venez, il désigna Al-Qasim, de dire qu'elle a sûrement des branchies...bon sang, je me sens complètement stupide !

Cependant, son observation ne contenait rien d'insultant, simplement du soulagement.

- À qui le dîtes-vous, renchérit le médecin-légiste, dont l'expression penaude traduisait l'embarras.

- Elle a besoin d'eau, voilà tout, résuma Van Lunet, regardant l'œuf dans son aquarium avec une certaine tendresse paternelle. Nous avons eu de la chance que Ryûzaki s'en rende compte, car nous étions bien partis pour omettre ce détail, et les conséquences auraient été catastrophiques.

- Ce n'est rien, intervint Light avant que L n'émette une réplique cinglante à l'égard de la négligence des chercheurs. L'après-midi a été mouvementée, une baisse de vigilance peut se comprendre. Le plus important est que nous l'ayons réalisé à temps.

- Tout de même, espérons que cela ne se reproduira plus, pria Van Lunet, puis, s'adressant à Ryûzaki, il lui sourit chaleureusement : mes félicitations pour votre clairvoyance, cher collègue. Sans vous, nous aurions laissé périr ce qui se trouve à l'intérieur de cet œuf sans même nous en rendre compte.

- Remercions aussi notre médecin-légiste, ajouta Newton non sans amusement. Sa remarque sur les branchies est à l'origine de cette découverte.

Les chercheurs, ainsi partis, se félicitèrent chaudement les uns les autres, se serrant la main autant qu'ils serrèrent celles de Light et de L tandis que s'apaisaient leur angoisse et qu'augmentaient leur exaltation. Al-Qasim proposa une nouvelle bouteille de champagne pour fêter l'événement, mais Newton et Van Lunet jugèrent plus prudent de se rabattre sur du jus de fruit ou du thé, car ils avaient en mémoire l'état déplorable et toujours actuel de Deville. Bien que maugréant un peu, de part son goût pour l'alcool presque aussi prononcé que celui de son collègue mais disposant néanmoins d'un foie plus résistant, le médecin-légiste se plia à l'opinion commune, et ils firent appel à Lellou - ou Pierre - qui leur rapporta docilement et sans comprendre un plateau de boudoirs joliment disposés en éventail et des tasses de thé Gyokuro. Dans le même temps, ils reprirent le tableau des caractéristiques.

- Les chiffres ont encore baissés ? S'enquit L en japonais, surveillant l'œuf depuis sa place aux côtés du shinigami.

- Non, répondit ce dernier. Ils sont comme avant, quand on l'a trouvé avec le sous-marin.

Sous ses yeux, les chiffres de la durée de vie de ce qui grandissait dans l'œuf, revenus à la normale, dansaient.


" L'heure de la fin des découvertes ne sonne jamais. "

Citation de Colette, femme de lettres française


Indications :

- Oui, Matt et les Pokémon, c'est une grande histoire d'amour qui reviendra dans les prochains chapitres (d'ailleurs, petit sondage à l'occasion de la sortie de Pokémon Go, quel est votre Pokémon préféré et pourquoi ? Pour ma part, je vénère Arceus sans aucune modestie, parce que j'adore son design : on dirait une licorne de films d'horreurs !)

- Monsieur Scrooge est le personnage principal du conte Un chant de Noël de Charles Dickens, et possède accessoirement une personnalité tellement joyeuse et dynamique qu'à côté, les zombies de Thriller, ce sont des rigolos.

- Ce chapitre est un peu un chapitre bilan puisqu'il fait un grand point récapitulatif sur l'enquête en Israël et revient sur des points importants de l'enquête des bateaux. Et c'est aussi un chapitre-dialogue (signe caractéristique du chapitre dialogue chez Negen : Matt et Mello).

- Napola est l'acronyme de Nationalpolitischen Erziehungsanstalten (à vos souhaits), et correspond aux écoles créés sous le Troisième Reich pour conditionner la jeunesse hitlérienne. Pour information, si vous vouliez être recruté, il fallait être de type " aryen ", avec de bonnes capacités physiques (surtout pour les garçons qui étaient formés à devenir soldats, et qui ont été envoyés en dernier recours à la guerre où ils sont presque tous morts), une personnalité "engagée" et un goût pour le commandement (si vous voulez en savoir plus, je vous recommande un bon milliard de fois le film allemand Napola de 2004, qui aborde très bien ce sujet avec une finesse que j'admire).

- Le Discover est un magazine de sciences américain lancé en 1980, presque aussi adapté aux goûts de Matt que le WIRED.

- La dernière partie de l'article publié par l'hebdomadaire israélien, qui commence par " je confesse " est une prière existante (prière de confession).

- Oui, Van Lunet est littéralement obsédé par les habitudes culinaires des membres de l'équipage ;).

- Au départ, je prévoyais de faire intervenir dans ce chapitre plus de membres de l'équipage nouveaux, mais je me suis rendue compte que ça allais être un peu compliqué. Il y a en tout 39 personnages sur le bateau (40 si on compte le spécial, que je vous présenterai dans les prochains chapitres, si ce n'est 41 avec THE OEUF), dont 33 membres d'équipages en comptant les techniciens, et vous en avez déjà rencontré 23, ce qui n'est pas mal, donc je vais y aller doucement pour que vous puissiez tous les retenir. Pour info, le petit nouveau s'appelle donc Spider (second mécanicien travaillant avec Wankel) = nom de la première voiture équipée avec le moteur Wankel (c'est ici que la référence à Spider-man tombe à...l'eau BA DUM TSSSS ! Oh, j'ai honte).

- Je vous avais dit que l'équipage voulait se faire une omelette avec l'œuf (et vu la taille, y a de quoi se faire une sacré omelette) : ce sont des dangers publics !

- Bienvenue dans une partie de Cluedo géante à bord du Svetlana, veuillez récupérer vos cartes dans le laboratoire :).

- Progrès, c'est pour les avancements effectués dans les deux enquêtes, que ce soit celle des bateaux avec l'œuf et l'écaille ou celle d'Israël avec le monsieur brûlé. Ça concerne aussi le vague progrès réalisé dans les relations entre Mello et Near, mais aussi entre Light et L, dans le sens où ils ont un peu calmé le jeu en comparaison aux premiers chapitres.


J'étais tellement contente d'avoir fini le chapitre plus tôt que prévu que je n'ai pas voulu vous faire attendre jusqu'au 31 juillet pour le lire : j'ai fait les corrections hier soir (j'ai bouclé la rédaction hier en fin d'après-midi, ce qui me laissait le temps de revenir dessus tranquillement), et le voilà, tout beau tout propre ! Je ne garantis pas avoir omis des fautes d'orthographe/de frappes, mais j'espère qu'elles seront minimes et que vous aurez apprécié ce chapitre !

Sans surprise, les prochaines chapitres vont beaucoup se concentrer sur l'œuf et son développement (un peu plus que sur l'écaille, pauvre petite), mais je voudrais également pouvoir revenir sur la relation entre Light et sa mère, et l'affaire Kira, puisqu'elle permettra d'expliquer pas mal de points sur ce " quelque chose " entre L et Light. Je prévoyais aussi, mais ça va dépendre de ma capacité de rédaction, de faire un bond dans le passé pour les M'N'M's, sur la façon dont ils vivaient avant la Wammy's et peut-être pendant. Et bien sûr, il y a Nenn qui arrive dans le monde des humains pour demander son rapport à Light ;).

Maintenant, je dois vous avouer que j'ai quelques appréhensions pour le chapitre quinze : pas pour le contenu ou la forme (j'ai mon fidèle petit plan avec les informations à mettre dedans), mais pour mon temps libre réservé à la rédaction. Si je suis mon délai actuel, je suis supposée vous le poster en décembre 2016, mais comme j'ai été acceptée en deuxième année de master (Recherche de Psychologie du Travail dans l'université que je voulais, un grand merci par ailleurs pour vos encouragements à propos de ma soutenance et de mon mémoire !) et que ça implique beaucoup plus de travail comparé à cette année (nouveau mémoire de recherche, cours avec horaires imposés et stage de 500h), j'ai peur que cela impacte ma capacité d'écriture (et vous me connaissez, je suis une boule de nerfs, tant vis-à-vis de mon écriture que de ma vie scolaire XD !). Je reste donc pour le moment sur fin décembre, et en cas de problème, je vous préviendrai tout de suite et vous tiendrai au courant d'un possible décalage (sans doute à janvier 2017, puisque c'est la période des vacances) :).

Mais pour le moment, je vous souhaite de très bonnes vacances d'été ensoleillées (mais pas trop, hein, parce que 40 degrés, on ne va pas se mentir, c'est violent :P), et j'espère pouvoir vous retrouver sans problème en décembre !

Negen