Salut tout le monde et bienvenue sur cette histoire !
Contrairement à ce que pourrait présager le titre, elle n'est pas très sanglante ni violente, c'est un demi-UA d'âmes-sœurs. J'ai repris le système que j'avais inventé pour Juste des veines bleues en le modifiant un peu pour que ça corresponde mieux à ce que j'avais en tête pour skk ; et voilà le résultat !
Si jamais vous trouvez que certains aspects du système (ou de l'histoire) sont pas clairs, n'hésitez pas à me faire savoir et je répondrai à toutes vos questions.
Cette histoire se divisera en trois parties, j'espère que ça vous plaira ;
Bonne lecture !
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LE SANG SUR NOS MAINS
I
On s'en lavera les mains
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Chuuya rentre rarement de mission avec les mains blanches. Parfois, elles sont plus difficiles à laver que d'autres. Peut-être que le sang est incrusté sous ses ongles et dans les plis de sa peau, peut-être qu'il est trop sec, peut-être qu'il revient dès qu'on l'enlève parce qu'il vient de ses propres blessures. Tout un tas de raisons pourraient rendre la tâche difficile, mais ce soir en particulier, Chuuya a beau frotter et frotter, à presque s'écorcher, rien n'y fait. Les lignes rouges persistent et le narguent.
...
Ce n'est pas du sang, sur ses mains.
« Tu sais, les gens ne font pas confiance à ceux qui ne montrent pas leurs mains. C'est un signe de respect.
- Bah ça tombe bien alors, parce que je leur fais pas confiance non plus.
- C'est pas seulement une question de respect d'ailleurs, mais plus tu montres de peau et plus ils ont l'impression que tu es honnête. C'est un mécanisme un peu débile du cerveau humain, mais ce serait bête de ne pas en profiter, tu trouves pas ?
- Non.
- C'est dommage, j'aimais bien tes mains. »
Chuuya - qui ne croit pas une miette de ce que raconte Dazai - pousse un soupir à fendre l'âme, et c'est assez inhabituel parce que d'ordinaire il est plutôt sang chaud.
« Fous-moi la paix, j'en ai juste marre de me salir les mains, ok ? »
Au jeu du menteur, Chuuya n'est pas mauvais, mais contre Dazai il n'a pas la moindre chance, et ils le savent tous les deux.
« Ce n'est pas de porter des gants qui va te les laver.
- À chaque cas désespéré ses méthodes futiles. Certains portent des gants, et certains projettent leurs espoirs d'humanité dans une infatuation à sens unique pour des modèles moraux. Une sorte de rédemption par procuration, j'me trompe ? »
C'est un coup-bas de ramener Odasaku sur le plateau, mais au moins c'est efficace. Pendant quelques secondes.
« Je suis sûr que c'est parce qu'elles sont rouges. De loin c'est vrai que ça peut ressembler à du sang, non ?
- Tch, pourquoi ça t'intéresse tout-à-coup, je pensais que tu croyais pas à toutes ces conneries de veines ?
- Ouais, je crois pas aux âmes sœurs parce que c'est débile et sans intérêt. Ça me tue - enfin, figurativement - que des gens puissent foutre leur vie en l'air pour une simple réaction chimique dans leur cerveau qui a fait changer la couleur des veines sur leurs mains... Cependant, ce que je ne peux pas nier, c'est La Phrase. Alors, est-ce que quelqu'un a dit la tienne, de la bonne manière ? »
Chuuya se grille tout seul quand il resserre instinctivement ses poings l'un dans l'autre, le juron qui suit ne fait que confirmer les certitudes de son partenaire, au mieux. La subtilité, ça n'a jamais été son grand fort, mais il va se faire violence pour que Dazai en découvre le moins possible.
« Alors ? Qui c'est qui l'a dite ? Et ça disait quoi ? Pfft, te connaissant c'était sûrement un truc grossier genre "Va te faire foutre connard !", ça m'étonnerait pas que ce genre de dirty-talking excite ton petit cerveau de chien-chien ! »
Il se baisse à temps pour esquiver un coup de pied rotatif qui visait son crâne. Chuuya est peut être petit - il mesure bien deux têtes de moins que Dazai - mais il est assez flexible pour faire ça, ouais. Et Dazai peut bénir ses excellents réflexes parce qu'avec un partenaire aussi redoutable, c'est pas pour des raisons esthétiques qu'il aurait eu besoin de bandages.
« Occupe-toi de tes affaires et arrête de me faire chier pour des putain de gants ! »
Dazai ricane mais au fond, il est sincèrement curieux. Alors comme ça, Chuuya a trouvé son âme-sœur ? Enfin. Une personne assez compatible qui ait dit Sa Phrase devant lui de telle sorte à faire rougir les veines de ses mains - c'est ce que la société aime appeler des âmes-sœurs même si Dazai n'y croit pas une seconde.
Soyons clairs un instant. Dazai ne nie pas les faits de ce qu'il se produit parfois entre deux personnes. Il ne nie pas non plus le fait que chaque personne ait une phrase, La Phrase - différente pour chacun - écrite quelque part dans les veines au dos de ses mains et que l'entendre prononcée - ou la lire parfois - peut procurer des sensations assez extrêmes. Trop de gens en ont témoigné pour que ce soit un mythe : des papillons dans le ventre aux larmes, en passant par les vomissement ou le choc pur et simple ; Dazai n'a aucune idée de ce que pourrait être sa propre phrase cela dit, et il s'en fout totalement. Parce que à part pour déstabiliser un peu des adversaires, ou peut-être qu'au pieu ça pourrait être marrant - il est assez vieux pour regarder du porno maintenant, merci bien - enfin non pas encore assez techniquement, mais à son âge tous les ados le font, non ? - La Phrase ne sert à rien.
Alors oui, les romantiques - dont Dazai est certain, Chuuya fait secrètement partie - vous diront que c'est grâce à elle qu'on peut dénicher son "âme-sœur", une personne avec qui on a une compatibilité optimale et transcendante, si intime que quand elle dit La Phrase, la votre avec sa voix, ça ne crée pas seulement des émotions fortes dans votre cerveau : ça fait carrément sursauter votre système nerveux tout entier, et ça fait rougir les veines au dos de vos mains, comme si ça les... Déverrouillait. Le dos des mains, où réside La Phrase.
Il n'y a rien de surnaturel dans ce phénomène, c'est chimique. Entièrement chimique, et si ça à l'air si intense, c'est parce que ça ne peut arriver qu'une fois, un peu comme... Perdre sa virginité ? Ou se faire opérer de l'appendice. Ou perdre un membre. Mourir. De nombreuses personnes ont fait rougir les veines de gens qui n'ont jamais prononcé leur phrase en retour. Certains font rougir celles de plusieurs personnes ! Ça déprouve donc bien la théorie des âme-sœur, qui était débile pour commencer. CQFD.
Comme si le monde entier pouvait être divisé en paires de partis faits l'un pour l'autre ; c'est simplement ridicule.
D'un autre côté, Chuuya croit aux âmes-sœurs. Il a très envie d'y croire alors c'est comme s'il y croyait vraiment. C'est peut-être ridicule de s'imaginer que quelque part sur cette terre, il existe une personne et une seule, pour qui on serait le seul et unique... Mais ça fait rêver, et ils ont bien besoin de ça parfois.
Ce dont Chuuya n'avait pas besoin en revanche, c'est de voir rougir les veines sur ses mains si tôt ! Non mais quelle merde. C'est de la faute de Dazai, aussi, il pourrait faire attention à ce qu'il raconte. Maintenant, si jamais Chuuya rencontre son âme-sœur - la vraie, pas un maquereau puant - il risque de ne pas s'en rendre compte ! Parce que ce crétin les a dit pendant leur dernière mission ; et bon, c'était l'adrénaline ok ? Peut-être que le pouvoir d'Arahabaki contre celui de Dazai a aidé aussi, La Déchéance d'Un Homme lui laisse toujours des picotements sous la peau. Bref, maintenant Chuuya se retrouve avec des veines rouges - on dirait du sang sur ses mains, pourtant elles sont propres - à cause de l'autre abruti, et apparemment c'est irréversible.
C'était lors de leur dernière mission, à l'issue d'un rude combat comme Double Noir n'en avait mené depuis longtemps. Libérer le potentiel de La Tristesse Souillée à travers la Contamination d'Arahabaki le laissait toujours désorienté, comme dans un état second, en particulier quand il devait s'en servir pendant une longue période de temps comme la dernière fois. Tous les muscles de son corps le lançaient, du bout des orteils au sommet du crâne, il était couvert de son propre sang mêlé à celui de son adversaire, son souffle était faible et ses jambes ne purent le porter plus de quelques secondes avant qu'il ne s'écroulât, embrassant totalement l'idée qu'il allait s'écraser au sol comme un vieux chiffon. Cependant, au lieu de ça sa chute fut amortie par une paire de bras, qui le déposèrent avec bien plus de douceur que l'aurait offert la gravité. Chuuya était éreinté, ses sens saturés par les vestiges de la contamination à travers son corps. Ses oreilles sifflaient, chaque parcelle de peau brûlait, le monde était flou et vif, beaucoup trop blanc. Malgré toute cette pagaille dans son cerveau, Chuuya entendit nettement les quelques mots de son partenaire avant de sombrer dans l'inconscience.
« Tout est fini maintenant, Chuuya. Tu peux te reposer, je veille sur toi. »
...
Depuis ce soir fatidique, Chuuya n'a pas réentendu ces mots prononcés par qui que ce fût. C'est vrai que Dazai murmurait toujours ce genre de trucs quand il annulait la Contamination d'Arahabaki, mais ça restait une arme de destruction massive qu'ils ne sortaient qu'en cas d'urgence. Il faudrait être fou à lier pour provoquer la Mafia Portuaire ou pire, Double-Noir ; alors les occasions de déchaîner la puissance du Dieu Destructeur étaient rares. Dazai n'avait encore eu l'occasion de répéter la Phrase de Chuuya, qu'il l'ait voulu ou non. Peut-être qu'il trouvait ça classe, Chuuya ne lui avait jamais avoué que le petit mot l'apaisait réellement donc son ami n'avait aucun moyen de le savoir. Ami. Définitivement pas le premier mot qui venait à l'esprit de Chuuya quand il pensait à Dazai. Mais de plus en plus, Chuuya se disait que, si son partenaire avait faire rougir les veines sur ses mains... Ce n'était peut-être pas si annodin.
Il s'était arrêté devant un stand au centre commercial, qui n'était pas là d'habitude. La vieille dame qui le tenait était occupée avec une cliente enjouée qui posait beaucoup de questions, et Chuuya profitait de sa curiosité pour hésiter encore un peu. Une fois que la cliente fut satisfaite et repartie, la vieille dame tourna toute son attention et son sourire bienveillant vers Chuuya :
« Ne sois pas timide mon garçon, je vois bien que mon stand t'intéresse. Que puis-je faire pour toi ? »
Chuuya n'était pas timide, mais méfiant. Il connaissait les charlatans et n'avait pas la moindre envie de se faire avoir, même s'il ne manquait plus de moyens depuis qu'il était dans la mafia.
« Vous savez lire dans les veines ?
- Jeune homme, c'est ma spécialité. »
Il pensa négocier le prix, mais la dame ne lui demanda pas un seul yen. Un peu étonné, Chuuya retira quand même ses gants pour lui montrer les motifs rouges au dos de ses mains.
« Regarde, les veines sont le langage du cœur. Au dos des mains, elles écrivent ce qu'on appelle La Phrase. Tu es censé tenir tes mains ainsi face à toi, les pouces l'un contre l'autre, et lire de bas en haut, et de gauche à droite. »
La vieille dame pose une paire de lunettes sur son nez et commence à masser le dos de ses mains. C'est bizarre. Chuuya n'est plus trop habitué à ce qu'elles soient si exposées, mais il prend sur lui.
« Elles sont déjà rouges je vois, tu as dû l'entendre déjà...
- Euh, oui. Je veux juste être sûr.
- ... Oui, je vois... C'est une belle phrase que tu as là. Tu vois ce petit nœud ? C'est le signe de la bienveillance. »
Chuuya suit avec attention. Elle lui explique que sa phrase se divise en trois déclarations, mais qu'ils ont un message profond similaire qui cherche à apaiser.
« La première déclaration annonce qu'une chose pénible vient de s'achever. Ça pourrait être "C'est enfin terminé" ou quelque chose de plus formel comme "Ton calvaire prend fin aujourd'hui.". »
« Tout est fini maintenant, Chuuya. » résonne la voix de Dazai dans sa mémoire.
« La deuxième déclaration signifie "Dors tranquille", c'est très doux, tu as dû être épuisé. Pour la troisième, c'est la sentinelle, ici. C'est un symbole assez courant, ça signifie "Je te surveille" ou "Je te protège", comme une sentinelle qui monte la garde. »
« Tu peux te reposer, je veille sur toi. » continue le souvenir, et Chuuya voudrait qu'il se taise.
« Comment être certain que j'ai rencontré mon âme sœur ? »
La vieille dame prend un petit moment pour réfléchir, duquel il profite pour remettre ses gants. C'est beaucoup mieux comme ça.
« Mêmes si tes veines ont déjà rougi, la Phrase ne disparaît pas, mon garçon. Il arrive que des proches ou des ennemis fassent rougir les veines des mains d'une personne, dans un moment fort en émotions... Mais quand tu rencontreras ton âme sœur et qu'elle la dira à son tour, crois-moi tu le sentiras. Ça pourrait être n'importe qui, peut-être que tu la connaît déjà et peut-être que tu ne la rencontreras jamais. Tout ce que je peux te dire sur elle, c'est qu'elle a à peu près ton âge, et qu'elle est sincère. »
Chuuya se serait presque plu à y croire.
...
« Sincère, mon cul ! » pensa-t-il en grognant quand il apprit la désertion de son, désormais ex-partenaire par le biais du Boss.
Il avait passé une journée de merde, d'accord ? Pour commencer, il était éreinté après une longue mission à l'étranger, où on l'avait plus ou moins baladé à droite à gauche comme si on voulait distraire un enfant à problèmes. Chuuya avait dû rester sur ses gardes h-24 alors qu'il se sentait surveillé de tous côtés par les gens qui étaient censés être sous ses ordres. En suite, il y avait eu des complications à l'aéroport et il avait dû voyager en seconde classe ; ce qui n'était peut-être pas la mort, mais d'un côté Chuuya s'était rapidement habitué au confort de la première - voire du privé - et d'un autre, son cerveau en ébullition depuis une semaine aurait bénéficié d'un peu d'intimité pour se reposer enfin. Mais non. Il fallait qu'un type louche soit installé derrière lui, des frères et sœurs turbulents devant lui, et un papi ronflant à sa droite. Il avait débarqué à l'aéroport de Yokohama six heures plus tard, sans avoir fermé l'œil. Quand Hirotsu vint le chercher pour couronner le tout, il ne trouva rien de mieux à lui annoncer que quelqu'un avait tout bonnement fait sauter sa plus belle bagnole ! Pas sa préférée heureusement, mais sans conteste la plus chère de sa grandissante collection. Et bien évidemment, aucune idée de quel vandale aurait pu commettre un tel acte.
Chuuya n'avait juste plus assez d'énergie pour réagir à la nouvelle de la trahison de Dazai. Il voulait juste s'enfermer dans son appartement, et s'assommer avec son meilleur vin. Il l'avait bien mérité, avec la journée qu'il venait de passer. Sa meilleure bouteille, et sa meilleure nuit depuis des mois. S'il avait pu rattraper l'horrible semaine qu'il venait de passer en dormant huit jours d'affilée, il n'aurait pas hésité une seconde.
Malheureusement le lendemain, il avait la pire gueule de bois et le pire des rapports à remplir. Et son dernier verre s'était renversé sur le tapis, histoire de finir en beauté.
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Voilà pour cette première partie ; au début je voulais écrire un one-shot avec deux parties mais bon. J'ai tendance à m'éterniser haha, et au final chaque partie est assez longue pour faire un chapitre en elle-même. Et la fin de la deuxième partie peut être coupée en une troisième so let's go pour une nouvelle trilogie haha !
J'espère que vous avez aimé, et que la suite vous plaira aussi !
Si ça peut vous rassurer, cette partie se finit sur une note assez mauvaise, mais ça va s'arranger entre eux, promis (:
