Auteur : Nebelhime
Sujet : Dir en Grey
Disclaimer : Bien entendu, ces jeunes appartiennent à eux-même.
Déclaration de l'auteur : Eh bien euh chapitre quatre En espérant que ça vous plaira. Merci à Kaorulabelle et Naera Ishikawa pour leurs reviews :)
Chapitre 4.
Shinya contemplait le ciel grisâtre avec appréhension. La neige ne cessait de tomber depuis plusieurs jours, et il faisait à présent assez froid pour qu'elle s'amasse, et étende son long manteau sournois, qui emprisonne les sens, et enferme les hommes … Ne sachant ce qu'il devait faire, il prit le téléphone et composa le numéro de Kaoru, puis de Die, sans succès. Il se rabattit sur Toshiya. Après quelques sonnerie, il entendit avec soulagement la voix du bassiste lui répondre.
- Oui, Toshiya, commença-t-il, je voulais te demander, c'est à propos de la répète de cet après-midi …
- Oui, quoi ? Demanda l'intéressé d'une voix encore endormie.
- Vu le temps qu'il fait dehors, elle est toujours maintenue ?
- Le temps ? Fit Toshiya, incrédule.
- Lève toi et regarde à ta fenêtre, lança Shinya d'un ton amusé.
Il imaginait parfaitement le bassiste se lever péniblement, encore dans la pénombre de la chambre, rejeter les draps complètement défaits, et marcher en traînant les pieds jusqu'à sa fenêtre, les cheveux ébouriffés, les bras ballants. Ecarter sans force les rideaux qui masquaient au dehors et …
- Oh là là ! Oui, tu fais bien de demander ! Je vais appeler Kaoru tout de suite et …
- Tu peux essayer, il n'a pas répondu, pour moi.
- Ah mince … Les lignes n'ont quand même pas été coupées … ? Dans ce cas, bien sûr, la répète serait annulée mais …
- Oui …
- Bah écoute, fit Toshiya, essaie de contacter Kyo, moi je réessaie du côté de Kaoru ou Die. Je te rappelle après si j'ai des nouvelles ou si tu en as pour moi.
- D'accord …
Il raccrocha, pensif. Il aurait préféré ne pas avoir à contacter Kyo, ne pas avoir à lui parler. Il ne voulait pas trop savoir pourquoi. A contrecœur, il commença à composer le numéro du jeune homme, et attendit qu'il décroche, le cœur battant. Il n'aimait pas cette attente, à chaque appel lancé, l'angoisse pendant que cela sonnait, les secondes narquoises qui vous saisissaient les mains, vous empêchaient de raccrocher alors que vous auriez tout fait pour … Puis la voix de l'autre, lointaine, toujours un peu inquisitrice. On bafouillait, on ne savait pas quoi dire. On préfèrerait voir les yeux, le visage de l'interlocuteur, on maudissait sa propre voix.
- Hum … Allô ?
Shinya sursauta.
- Oui Kyo ? C'est Shinya …
- Ah, bonjour …
Etait-ce lui, ou la voix s'était faite un peu plus nonchalante … Beaucoup plus froide ?
- Je voulais te demander, la répète tient toujours ? Vu le temps qu'il fait dehors ?
Il entendit le souffle d'un soupir.
- Bien sûr, crois-tu que Kaoru allait l'annuler pour quelques flocons ? Même sous un blizzard nous irions répéter ! Je l'ai appelé voilà une heure.
- D'accord, merci Kyo … A tout à l'heure …
Il raccrocha et resta quelques instants un peu interdit.
- C'est bon les gars, on a bien travaillé ! Lança Kaoru en posant sa guitare. Vous pouvez partir, ne tardez pas trop, on sait jamais, avec la neige …
- Oh je crois que ça s'est arrêté, lança Die en empoignant sa bouteille d'eau.
- Très bien, alors je vais rester ici, j'ai quelques paroles à bosser … Marmonna Kyo.
Shinya se mordit la lèvre. Lui aussi comptait rester un peu, afin de s'imprégner du calme ambiant de la pièce déserte sans aucune présence humaine ou animale aux alentours. Il voulait peut-être composer un peu, même s'il le garderait pour lui. Ça lui faisait du bien, d'aligner des notes sur ses impressions et ses sentiments.
Les autres disparurent rapidement. Le silence régnait dans la pièce, lourd, pesant. Après un temps, Shinya demanda d'une voix mal assurée :
- ça ne te dérange pas, Kyo, que je sois là ? ça ne te gêne pas pour composer ?
Ils n'avaient plus été seuls face à face depuis cette nuit ou, nimbé d'alcool, le chanteur s'était jeté à son coup et l'avait tendrement embrassé. Depuis le matin où, fou de colère et de gêne, il était parti, et où lui, paisible batteur aux regards impassibles avait décidé d'avoir le moins de contact possible avec lui.
- J'avoue que la plupart du temps, j'écris seul, fit Kyo, l'air un peu gêné. Mais si tu veux rester, pas de problèmes …
- Non non, je vais te laisser. J'espère que tu trouveras l'inspiration, fit Shinya précipitamment, et il se dirigea vers la sortie.
Quand il ouvrit la porte, il se sentit presque défaillir. En quelques heures, la neige avait tout envahi, gelant tout déplacement, frigorifiant déjà ses pensées, tout subjugué qu'il était à contempler les lourds flocons incessants, dansant dans la brume glacée. Le vent s'engouffra dans le couloir, lui fouettant le visage, dispersant quelques minces particules de givre sur ses cils. Il cligna des yeux et ferma lentement la porte, un frisson lui parcourant l'échine. Puis revint vers la salle principale, miné. La nuit tombante, ils risquaient de se retrouver dans un douloureux face à face, et ce pour toute la soirée. Shinya ne voulait pas ressentir à nouveau la douleur du coup qu'on lui avait porté, le rejet de Kyo, qui risquait de le marteler de ses phrases assassines. Ou pire. De ses silences. Il contempla un instant le jeune homme écrire, ses mèches blondes retombant devant ses yeux.
- Kyo …
Il se releva d'un air semi-agacé et interrogateur.
- La neige a tout recouvert, je crois qu'on est coincés ici …
- Quoi !
Shinya courba le dos, fermant à demi les paupières, craignant d'être atteint par l'avalanche de cris qu'allait pousser le chanteur. Elle ne tarda pas à l'ensevelir.
- Mais c'est pas possible, tu te moques de moi ? Non mais je vais pas passer ma nuit dans cette foutue salle de répète alors que je la supporte plus ? Qu'on va attendre d'être délivrés que demain matin ? Les routes sont vraiment bloquées hein ? Ca t'arrangerait pas un peu, aussi ? T'en avais bien profité de la dernière nuit où on s'était retrouvés seuls, non ? Et tu comptes recommencer hein ? Me dis pas que t'allais sagement me regarder écrire avec un pauvre sourire absent comme tu sais si bien les faire ! Qu'est-ce qu'on va faire, maintenant ? Tu veux que je me remette à écrire comme si de rien n'était, ou que je te saute dessus, qu'on passe une nuit torride à faire ce genre de cochonneries, tu veux qu'on parle de l'avenir du groupe aussi, peut-être ? Alors qu'il éclatera d'ici peu, j'en suis certain ? Tu veux …
- Arrête … Murmura Shinya, en serrant les poings.
Cela sembla plus énerver Kyo encore.
- Tu veux que j'arrête ? Après m'avoir dit que je dois passer la nuit en ta compagnie et que …
- Parce que tu crois que je le voulais moi ? Demanda Shinya d'un ton presque inaudible.
Il savait bien que cela arriverait, il le pressentait depuis bien longtemps et redoutait chaque entrevue avec Kyo, craignant que la tension qui régnait entre eux ajoutée à celle flottant autour de Dir en Grey, nourrie par ses propres doutes, ses propres peurs ne fasse tout exploser. Qu'elle projette tout ses éclats de verre jusqu'à lui, pour le détruire un petit peu plus, lui.
- Kyo, je ne t'ai jamais rien fait … C'est toi qui …
- Ah non ! Ne va pas me dire que ça vient de moi ! Assume tes perversions, assume. Je voulais plus jamais t'avoir en face de moi. Peut-être même que je te hais, Shinya.
- Peut-être, soupira-t-il en baissant les yeux. Mais tu ne devrais pas … Je ne t'ai jamais voulu de mal.
Il tenta de chasse la boule de rancœur qui restait au fond de sa gorge. Tentait d'interdire à ses yeux d'exprimer toute la douleur qui lui tranchait le ventre. De figer les larmes qui perlaient au fin fond de son regard … Comme des cristaux de glace … Il ajouta d'une voix tremblante :
- Et cesse d'appeler ce genre de choses des perversions. Tu n'y comprends rien … Je n'ai jamais eu de pensées déplacées à ton sujet.
Il mentait. Tant pis. Tout plutôt que de l'entendre à nouveau.
- Si tu veux vérifier, va dehors, fais ce que tu veux, mais je n'irais pas crever de froid dans la neige pour te faire plaisir …
Il lança un dernier regard à Kyo, et partit se réfugier derrière le vieux piano un peu désaccordé caché dans un coin de la salle, puis se mit à jouer quelques notes. Il fit traîner ses longs doigts gelés sur les touches ivoires. Il préférait jouer de vieilles chansons d'enfant criblées de dièses et de bémols incongrus. Tout plutôt que de le regarder à nouveau, plutôt que de lui montrer sa souffrance. Il préférait faire semblant d'aimer les fautes innombrables qu'il osait faire, les notes qui se suivaient sans se reconnaître, les mélodies incohérentes, le ridicule de son geste … Tout plutôt que de pleurer devant lui.
