Ciao mio caro commentatore italiano: spero che il resto della storia ti piaccia. Questa è la prima volta che mi vengono lasciati commenti in una lingua straniera!
Ignacius s'agitait dans son sommeil, transpirant et le souffle court sous l'effet de l'angoisse qui s'était emparée de lui dès cette fin de soirée.
A présent que le sommeil l'avait gagné, il lui semblait voir passer des heures et des heures de sa vie, ou plutôt il lui semblait les revivre et cela n'avait absolument rien d'agréable. Était-ce parce que l'angoisse des jours à venir le tenaillait ? Sûrement, même si cette idée n'avait rien de réconfortant.
Alors qu'il s'était assis sur le sol de la Forêt tout en surveillant Drago, le rêve changea si soudainement qu'Ignacius sursauta de surprise jusque dans son sommeil agité.
Le bruit, la lumière soudaine lui faisaient l'effet d'être devenu complètement aveugle, même si la scène qu'il revivait à présent avait eu lieu durant la nuit.
Et pour cause, il se trouvait à présent dans la tribune du match de finale de la Coupe du Monde de Quidditch, exactement à la même place que l'année précédente Lorsqu'il avait assisté à l'événement.
Ignacius était arrivé bien en avance, comme il le faisait souvent à chaque fois qu'il participait à un événement public depuis la mort de son épouse. En effet et au-delà de son désintérêt pour la vie mondaine, il suivait sa stratégie habituelle, qui consistait à prendre sa place tout en évitant la cohue autant que les regards appuyés des diverses familles et autres « bons partis ».
Aussi, il s'était assis tout au fond de la tribune, contre le mur qui la séparait des gradins et toujours de manière à pouvoir observer les lieux sans être au centre des regards.
Pour autant, et par souci de la politesse, il n'avait pas évité celui d'Arthur Weasley qui l'avait salué d'un simple hochement de tête auquel il avait répondu tout aussi sobrement.
Il faut dire que, contrairement à son frère, Ignacius ne détestait pas le père de famille, sans pour autant faire partie des gens qui l'auraient chaleureusement salué. Ils se croisaient régulièrement au Ministère et passaient le plus clair de leur temps à s'ignorer de manière tout à fait cordiale, travaillant et échangeant rarement ensemble.
Si, quand-même... Un an plus tôt Ignacius et Arthur Weasley s'étaient côtoyés dans le cadre d'une maison mise en vente qui appartenait à la famille Crabbe et qui avait été vendue en cachette à des moldus. Lucius étant définitivement grillé face au père Weasley, c'est Ignacius qui avait accompagné le vieux Louis Crabbe pour l'état des lieux, à la demande de ce dernier qui expliquait avoir besoin de quelqu'un à ses côtés.
Aucun incident majeur n'avait été à déplorer durant la visite et Crabbe avait seulement écopé d'une petite amende pour dissimulation. Ignacius savait qu'Arthur Weasley, s'il l'avait voulu, aurait pu se montrer beaucoup plus dur : par exemple en lançant une démarche d'annulation de vente qui se serait révélée ruineuse pour les Crabbe.
Il ne l'avait pas fait et c'était tout à son honneur, aussi Ignacius le respectait-il et admettait-il volontiers sa compétence.
Arthur Weasley était accompagné de nombre de jeunes gens ce jour-là, dont deux adolescents qui ne pouvaient être les siens et parmi lesquels Ignacius avait identifié sans mal un jeune homme bien particulier…
Sans faire mine d'y prendre garde, il avait donc jaugé du regard le jeune Potter, curieux de voir ce fameux jeune homme qui faisait tant râler Drago, mais sans que son examen ne lui apprenne grand-chose au final.
C'était, de prime abord, un garçon parfaitement ordinaire dont l'émerveillement face à l'événement qui se déroulait sous ses yeux avait quelque-chose d'attendrissant.
Armé d'une paire de multiplettes, il semblait bien déterminé à ne rien rater du match et fixait le stade avec fascination.
Il était flanqué de celui qui semblait être le plus jeune des fils Weasley et d'une jeune fille toute brune avec des cheveux ébouriffés, probablement sous l'effet de coups de brosse aussi abusifs qu'inutiles. Ah cette mode idiote qui poussait les femmes aux cheveux frisés à se déparer de leurs plus beaux attributs !
Cela en devenait même affligeant, avait-il songé. Cette gamine aurait pu avoir des cheveux splendides si seulement elle ne s'était pas tant acharnée dessus...
Ignacius avait fini par se caler au fond de son siège, profitant du tumulte pour se laisser bercer et oublier un peu ses propres états-d'âme grâce à l'observation d'autrui.
Autour d'eux en effet, la loge se remplissait peu à peu, accueillant des personnages parmi les plus éminents du monde magique, issus du monde entier mais surtout de l'Europe. De tous les côtés un flot intarissable de spectateurs se déversait également sur les gradins et cela se fit sans interruption au cours de la demi-heure qui suivit. C'était à se sentir totalement étourdi.
Loin devant Ignacius, tout au bord de la loge, Mr Weasley ne cessait de serrer la main de gens qui occupaient à l'évidence les plus hautes fonctions dans le monde de la sorcellerie anglais, et qui le saluaient de la manière la plus chaleureuse possible, preuve que son savoir-faire était bien plus reconnu que Lucius ne voulait bien l'admettre.
Chaque fois que quelqu'un venait à lui, un de ses fils qui le suivait comme son ombre se levait d'un bond, exactement comme s'il avait été assis sur une chaise à ressorts. Il semblait vouloir se montrer réactif et être remarqué par tous mais son attitude était tellement ridicule qu'on avait envie d'en rire.
Ignacius de son côté se faisait plus discret, et il engagea seulement la conversation avec le vieux Wladimir Krum lorsque celui-ci vint s'asseoir juste à côté de lui.
- Alors vous êtes finalement venu Ignacius ? Lui dit le vieil homme à voix basse après lui avoir chaleureusement serré la main. Je suis content de vous voir, même si je n'osais plus l'espérer après ce que m'en avait dit votre père.
- J'ai cédé à ses suppliques, répondit Ignacius en toute franchise. L'idée de voir jouer votre petit-neveu m'a également un peu aidé, je dois le reconnaître.
- Ah bon ?
- On dit que c'est un virtuose pour tout ce qui touche au vol, ajouta Ignacius sur un ton convaincu.
- Pour le Quidditch oui, répondit tristement Wladimir Krum. Mais pour bien d'autres choses il désespère ses parents…
Ignacius lui renvoya un regard sincèrement intrigué avant de comprendre qu'une plaisanterie était en cours et de se mettre à rire de bon cœur.
- En tout cas, dit-il. Vous me connaissez et vous savez que je ne pouvais manquer une telle démonstration.
Ils se connaissaient oui, et de longue date puisque Wladimir était un ami proche d'Abraxas Malefoy, un ami qu'Ignacius appréciait depuis sa prime jeunesse.
Cependant, ils devaient faire preuve de discrétion lorsqu'ils se côtoyaient, car Lucius n'aurait sans doute pas du tout apprécié de les voir côte à côte. Le vieil avocat avait en effet refusé de le défendre treize ans plus tôt, lorsqu'il avait décidé de plaider l'action sous l'emprise de l'Imperium.
...Ou plutôt, Lucius avait jugé qu'il serait mieux défendu par cette crapule d'Ernan Cirventès.
Il fallait bien reconnaître que celui-ci l'avait fait innocenter, comme toute sa bande d'ailleurs. Cependant Ignacius n'ignorait pas que les services de Cirventès avaient un coût terrible et il se tenait aussi loin que possible de l'avocat, réputé le plus crapuleux de toute l'Europe quoiqu'il s'en défende avec force.
À l'arrivée du Ministre de la Magie Cornelius Fudge, le fils Weasley s'inclina si bas que ses lunettes de détachèrent de son visage, tombèrent au sol et se cassèrent tandis qu'Ignacius et Wladimir étouffaient chacun un rire. Horriblement gêné, le garçon les répara d'un coup de baguette magique et resta ensuite assis plus sagement sur sa chaise, jetant des regards jaloux à Harry Potter que Cornelius Fudge avait salué comme un vieil ami.
- C'est d'un ridicule consommé, souffla Ignacius à Wladimir Krum qui avait suivi son regard vers le jeune adulte.
- Qui est son père ? Demanda en retour l'avocat que ce point semblait intriguer. Je vois qu'il ne s'est toujours pas assis tellement il connaît de monde.
- Arthur Weasley, un employé du Ministère.
- J'en ai entendu parler je crois… Très porté sur les moldus si je ne m'abuse ?
- Oui, répondit Ignacius. Il est le responsable de la plupart des lois récentes visant leur protection.
- C'est un sorcier beaucoup plus puissant qu'il n'y paraît, à ce qu'on m'a dit… Fit remarquer le vieil homme. Et un expert dans la détection d'objets envoûtés si je ne m'abuse.
- Cela résume bien la situation, en effet.
- Un adversaire de taille pour votre frère je crois ?
- Lucius refuse de l'admettre, répondit Ignacius sans parvenir à retenir un sourire.
Tout en parlant à voix basse, Ignacius observait Cornelius Fudge qui serrait la main de Harry Potter d'un air paternel, lui demandant comment il allait et le présentant aux sorciers assis à ses côtés sans se soucier de la gêne visible du jeune homme.
C'était vraiment tout lui !
Mais si beaucoup de sorciers anglais ne voyaient en Cornelius Fudge qu'un idiot mollasson tout droit sorti de Poufsouffle, Ignacius, de son côté, avait déjà eu l'occasion d'éprouver son côté humain. Et il ne pouvait nier que par certains côtés, il était plutôt bon pour le poste.
Une meilleure capacité à prendre des décisions sans se laisser influencer par n'importe qui aurait certes été souhaitable, mais bon on ne pouvait pas tout avoir.
- Harry Potter, vous savez…, disait Cornelius Fudge d'une voix forte au ministre bulgare qui portait une magnifique robe de sorcier en velours noir ourlé d'or, sûrement destinée à épater la galerie, transpirait tout de même un peu dessous, et ne paraissait pas comprendre un traître mot de ce qu'on lui racontait.
- Il parle anglais, chuchota pourtant Wladimir Krum à Ignacius. Mais je pense qu'il a décidé de jouer les idiots aujourd'hui. Et il a vraiment dû le faire très bien car, de ce que j'avais cru comprendre, Fudge le savait anglophone...
Ignacius hocha la tête avec un autre sourire et reporta son attention sur les deux ministres de la magie. La scène était drôle, il ne pouvait le nier, mais si ce que Wladimir Krum disait était vrai, on n'était pas loin du tout de l'incident diplomatique :
- Harry Potter, voyons, insistait désespérément Cornelius Fudge. Je suis sûr que vous savez qui c'est… Le garçon qui a survécu à Vous-Savez-Qui… Vous savez forcément qui c'est…
Le ministre bulgare vit soudain la cicatrice de Harry Potter et se mit à parler très fort d'un ton surexcité, tout en la montrant du doigt. Ignacius étouffa un rire cette fois-ci :
- C'est toujours très drôle, commenta Wladimir Krum à voix basse. Vous savez, ce n'est pas la première fois qu'il fait cela… Mr le Ministre parle huit langues pourtant. Je ne sais vraiment pas pourquoi il se prête parfois à ce petit jeu… Sûrement pour se moquer de certains de ses homologues.
- Je savais que ça finirait comme ça, disait de son côté Cornelius Fudge à Harry Potter sur un ton accablé. Je ne suis pas très doué pour les langues étrangères, j'ai besoin de Barty Croupton dans ces cas-là. Ah, je vois que son elfe de maison lui a gardé une chaise… C'est une bonne chose, ces zigotos de Bulgares ont essayé de quémander toutes les meilleures places… Ah, voici Lucius !
Wladimir Krum se renfrogna en entendant la manière dont Fudge qualifiait les siens et Ignacius sursauta car, pris par le spectacle de la loge qui se remplissait, il n'avait pas vu arriver son frère aîné. Lucius en revanche avait immédiatement compris à côté de qui il était assis et son regard glacial parla pour lui. Il allait en prendre de belles après le match !
Harry Potter et ses deux acolytes tournèrent aussi vivement la tête. Se glissant le long du deuxième rang en direction de trois chaises vides juste derrière Mr Weasley, Lucius, Drago et Narcissa venaient en effet s'asseoir et fixaient les alentours de leur habituel air pincé.
Ignacius songea en lui-même que sa propre famille faisait très stéréotypée. Le teint pâle, le nez pointu, les cheveux d'un blond presque blanc, Drago ressemblait presque comme une goutte d'eau à son père. La mère était blonde elle aussi et tirée au quatre épingles. Grande et mince, altière et très bien faîte, elle aurait pu paraître séduisante si elle n'avait pas eu l'air d'être sans cesse incommodée par une odeur nauséabonde et si elle n'avait pas tiré une tête de trois pans de long.
Mais quand Narcissa cesserait-elle donc d'avoir en public cette attitude aussi désagréable que ridicule ? D'un peu, il l'aurait crue malade !
- Ah, Fudge, dit Lucius en tendant la main au ministre de la Magie, avec le même air que s'il avait daigné s'adresser à un subalterne. Comment allez-vous ? Je crois que vous ne connaissez pas mon épouse, Narcissa ? Ni notre fils, Drago ?
Ignacius eut un hoquet surpris avant de se rappeler que, effectivement, Narcissa n'était pas sensée connaître Fudge, puisque officiellement elle n'avait eu de contact qu'avec son épouse Filia. Quant-à Drago, il ne l'avait en effet jamais rencontré.
- Mes hommages, Madame, dit Cornelius Fudge avec un sourire, en s'inclinant avec déférence devant Narcissa qui daigna esquisser un léger sourire par dessus sa mine boudeuse. Permettez-moi de vous présenter Mr Oblansk… Obalonsk… Mr… enfin bref, le ministre bulgare de la Magie. De toute façon, il est incapable de comprendre un traître mot de ce que je dis, alors peu importe. Et, voyons, qui y a-t-il encore ? Vous connaissez Arthur Weasley, j'imagine ?
C'était sans aucun doute la chose qu'il aurait fallu éviter de dire et il y eut un moment de tension. Arthur Weasley et Lucius échangèrent un regard polaire qui en disait très long sur l'état de leurs relations et Ignacius se rappela en détail le récit de son frère sur la dernière fois où ils s'étaient trouvés face à face en public.
C'était à la librairie Fleury et Bott et ils en étaient venus aux mains avant d'être séparés par le garde-chasse de Poudlard. Une scène au combien gênante à écouter pour Ignacius qui n'osait pas imaginer ce que les spectateurs avaient pu en penser.
Les yeux gris et froids de Lucius se posèrent sur Arthur Weasley puis balayèrent méticuleusement le premier rang, détaillant toute sa famille d'un air de surprise teinté de mépris.
- Seigneur ! dit-il à voix si basse que son frère dut lire sur ses lèvres. Qu'avez-vous donc vendu pour obtenir des places dans la tribune officielle ? Votre maison n'aurait certainement pas suffi à payer le prix des billets.
Ignacius frémit devant l'impolitesse de son frère, guère étonné à présent que les deux se détestent autant, mais Arthurs Weasley se contenta de soutenir son regard et Cornelius Fudge, qui n'écoutait pas car il venait d'essayer de répondre au ministre bulgare, reprit la parole :
- Lucius vient d'apporter une contribution très généreuse à l'hôpital Ste Mangouste pour les maladies et blessures magiques, Arthur. Il est mon invité.
- Ah, bien… très bien…, dit Arthur Weasley avec un sourire crispé.
Les yeux de Lucius s'étaient posés sur la jeune fille brune qui accompagnait Harry Potter et il la détaillaient avec mépris. Elle rougit légèrement mais soutint son regard sans ciller.
A n'en pas douter, il s'agissait de quelqu'un d'ascendance douteuse vu la manière dont son frère la dévisageait et Ignacius étouffa un soupir.
Lucius et sa famille tiraient une fierté excessive de leur sang pur. A leurs yeux quiconque descendait de parents moldus leur apparaissait comme un sorcier de seconde classe et ils ne tenaient aucun compte des changements sociaux récents dans le monde des sorciers.
Heureusement, cette jeune fille ne semblait pas décidée à se laisser faire, c'était très bien comme cela !
Sans aller jusqu'à se revendiquer progressiste, il craignait trop sa famille pour cela et tenait tout de même à quelques principes, Ignacius trouvait cette manière de diviser le monde parfaitement idiote. Malheureusement, l'idéologie du statut du sang était encore très répandue.
Lucius eut heureusement le bon sens de ne rien dire de fâcheux en présence du Ministre de la Magie. Il adressa un signe de tête dédaigneux à Mr Weasley et suivit la rangée de chaises jusqu'aux places qui lui étaient réservées. Drago lança aux autres adolescents un regard méprisant, puis s'assit juste entre son père et sa mère sans faire mine de le voir davantage.
- Votre neveu a l'air aussi charmant que son père, souffla Wladimir Krum. Et c'est vraiment tout son portrait.
- Les chiens ne font pas des chats, répondit sentencieusement Ignacius, bien qu'il se sente à présent un peu gêné.
Fort heureusement, le gros de l'attention se portait sur le terrain et l'attente était palpable. Un instant plus tard, Ludo Verpey entra en trombe dans la loge.
- Tout le monde est prêt ? demanda-t-il, fébrile et son visage rond luisant comme un gros fromage de Hollande. Monsieur le Ministre, on peut y aller ?
- Quand vous voudrez, Ludo, dit Fudge très à son aise en se calant un peu plus dans son fauteuil.
L'ancien sportif se rengorgea et, après avoir porté sa baguette à sa gorge, il déclama d'une voix forte :
- Mesdames et messieurs, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue ! Bienvenue à cette finale de la quatre cent deuxième Coupe du Monde de Quidditch !
Les spectateurs se mirent à hurler et à applaudir dans tout le stade. Des milliers de drapeaux s'agitèrent, mêlant les hymnes nationaux des deux équipes dans une cacophonie qui s'ajouta au vacarme.
Narcissa se boucha discrètement les oreilles, le front froncé. A n'en pas douter, elle se sentirait bientôt mal puisqu'elle avait du mal à supporter ces ambiances très échauffées.
Le dernier message publicitaire (Les Dragées surprises de Bertie Crochue - prenez le risque à chaque bouchée !) s'effaça, remplacé par les scores :
BULGARIE : ZÉRO, IRLANDE : ZÉRO.
- Et maintenant, cria Verpey. Sans plus tarder, permettez-moi de vous présenter… Les mascottes de l'équipe bulgare !
La partie droite des gradins, réservée aux supporters bulgares et entièrement colorée de rouge, explosa en acclamations hystériques.
- Je me demande ce qu'ils ont amené, dit Wladimir Krum d'une voix ironique qu'il laissait clairement entendre qu'il le savait déjà.
- Des Vélanes, j'imagine, lui répliqua Ignacius sur le même ton, tout en esquissant un sourire. Ce serait bien dans le style de la Bulgarie après tout...
Et il ne se trompait pas : une centaine d'entre elles firent soudain leur apparition sur le terrain, entrant par les portes du bas, monopolisant l'attention générale et forçant sans vergogne l'admiration de la gente masculine par leur grâce et leur beauté, Ignacius et Wladimir compris et même si le premier avait pris soin de consommer une potion immunisante avant de venir.
Il craignait en effet de déborder si de telles circonstances survenaient. Les Vélanes étaient des femmes qui, il le savait, ne manqueraient pas de le mettre en danger et ce d'autant plus qu'il était veuf depuis peu et venait de passer cinq mois sans presque sortir de son manoir.
C'était les plus belles créatures qu'il connaisse, et ce bien qu'elles ne soient pas humaines. Elles le rendaient fou, lui qui avait toujours profondément apprécié la beauté féminine.
Cette constatation l'avait plusieurs fois rendu perplexe, mais l'effet restait le même chaque fois.
Aujourd'hui, ayant pris ses précautions, il pourrait profiter du spectacle et l'observer la tête froide. Cela dit, il resterait tout de même vigilant.
Pour commencer, il essaya de déterminer ce qu'elles étaient exactement : créatures naturelles ou création humaine ? Il n'avait pas trouvé la réponse au cours des nombreuses recherches effectuées sur le sujet, ou plutôt celui-ci faisait tellement débat qu'il ne voyait pas d'autres solution que d'essayer de le déterminer par lui-même.
La peau blanche des créatures scintillait comme un clair de lune dans un ciel limpide, leurs cheveux d'or blanc volaient en ondulant derrière elles, alors qu'il n'y avait pas le moindre vent et une rangée de cils fournis ornaient leurs yeux de biches au regard d'une profondeur sans égale.
Cette beauté irréelle pouvait laisser penser à Ignacius qu'elles avaient été créées par l'homme pour il ne savait quel usage, mais il peinait à en être sûr :
En effet, il connaissait bien d'autres créatures séduisantes, créées par de puissants mages noirs à des fins de malfaisance, mais aucune n'était semblable aux vélanes et, d'ailleurs, beaucoup en descendaient en partie. Les Ondines par exemple étaient issues du croisement de divers êtres de l'eau, d'humains et de vélanes… Pour ces dernières, leur existence était attestée depuis l'Antiquité (dans le mythe de l'Odyssée où elles étaient confondues avec les sirènes) et il n'y avait pas trace de leur création. Elles existaient même avant Herpô l'infâme.
Cela dit, si la potion aidait bien Ignacius à ne pas perdre pieds, elle n'était pas non plus une solution absolue. Il s'en rendait compte à présent.
Tandis que les Vélanes se trémoussaient au rythme d'une musique de plus en plus vive, des pensées folles, insaisissables, tournoyaient dans son esprit et il sentait tout de même le charme des créatures menacer de l'étourdir. Tous ses sens étaient en éveil, et il se sentait plus vivant qu'il ne l'avait été depuis ce terrible hiver, prêt à repartir à l'aventure et à conquérir des cœurs...
Pas autant que les autres spectateurs cependant, fort heureusement. Il s'en rendit très vite compte.
- HARRY, QU'EST-CE QUE TU FAIS ? S'écria soudain la voix lointaine mais nettement horrifiée d'une adolescente.
La musique cessa aussitôt et Ignacius se rendit compte du drame qui avait bien manqué de se produire dans leur loge.
Le jeune Harry Potter clignait des yeux d'un air bête. En effet, il s'était levé et avait commencé à enjamber la balustrade, comme pour sauter dans le vide. À côté de lui, le plus jeune des fils Weasley était figé dans l'attitude de quelqu'un qui s'apprête plonger du haut d'un rocher.
Par Merlin, songea Ignacius lui aussi horrifié, on avait évité la chute de peu !
Mais les deux garçons n'étaient pas les seuls à avoir été totalement envoûtés et des cris de fureur s'élevaient dans tout le stade, côté irlandais compris. Les spectateurs protestaient, refusant de laisser partir les Vélanes. D'ailleurs Ignacius lui-même ressentait un gros pincement de cœur à présent qu'elles s'écartaient.
Un regard à Lucius lui apprit que lui-même avait succombé au charme et il ressentit un certain réconfort en le voyant raide et immobile sur sa chaise, encore totalement hypnotisé par les créatures tandis que Narcissa avait empoigné Drago à pleines mains pour l'empêcher de se lever.
Beaucoup plus virulent que ses parents, l'adolescent vociférait en effet avec force, les larmes aux yeux et se livrant à l'un des caprices les plus impressionnants et les plus grossiers qu'Ignacius l'ait jamais vu faire.
Aussi il s'empressa de se lever, craignant que sa belle-sœur n'arrive pas à contenir son fils et qu'un drame ne survienne. Il empoigna rudement Drago et dut peser de tout son poids pour le forcer à se rasseoir :
- Du calme le dragon, lui dit-il fermement. Elles reviendront plus tard. Ne t'en fais pas...
C'était probablement un mensonge mais il s'en fichait éperdument à cet instant tant que son neveu avait la bonté de s'asseoir. Narcissa, elle, parut soulagée de voir la situation se stabiliser mais cela ne l'empêcha pas de lui demander d'une voix assez insistante :
- Tu te joins à nous ? Il reste une place.
Ce n'était pas une question, mais une injonction et Ignacius accepta à contrecœur, adressant à Wladimir Krum un discret regard d'excuse, chargé de regrets. Le vieil homme comprit et lui renvoya un sourire tout aussi discret mais plein de bienveillance.
Juste devant lui à présent, le plus jeune des fils Weasley semblait toujours sous le charme des vélanes. Il déchirait en lambeaux les trèfles qui ornaient son chapeau.
Arthur Weasley, un vague sourire aux lèvres, se pencha vers son fils et lui prit le chapeau des mains.
- Tu en auras besoin, dit-il, quand l'Irlande aura dit son mot.
- Hein ? marmonna le gamin bouche bée, le regard fixé sur les Vélanes qui s'étaient alignées d'un côté du terrain.
D'un air réprobateur, l'adolescente à côté de lui tendit la main et ramena fermement Harry Potter sur sa chaise.
- Non mais vraiment ! Dit-elle d'une voix exaspérée.
Si seulement elle savait… Pensa Ignacius. Sûrement les aurait-elle jugés un peu moins durement.
Les femmes étaient, en général, totalement insensibles au charme des vélanes et elles avaient beaucoup de mal à comprendre le trouble des hommes confrontés à ces créatures. Cela avait toujours été ainsi, et c'était même la source de nombreuses et tristes ruptures, souvent pour un simple dérapage car les vélanes s'attachaient rarement aux hommes, préférant passer de l'un à l'autre et prenant un malin plaisir à être courtisées…
Ignacius savait d'ailleurs qu'entre elles la compétition était souvent rude et qu'elles ne s'épargnaient pas les unes les autres.
- Et maintenant, rugit la voix amplifiée de Ludo Verpey, veuillez s'il vous plaît lever vos baguettes… pour accueillir les mascottes de l'équipe nationale d'Irlande !
Ignacius sourit largement cette fois-ci, soudain très impatient car il adorait les farfadets et devinait sans peine qu'ils seraient le clou du spectacle.
Un instant plus tard en effet, un énorme objet volant qui ressemblait à une grande comète vert et or surgit dans le stade. Elle fit un tour complet du terrain, puis se sépara en deux comètes plus petites, chacune se précipitant trente mètres au dessus de chaque but et un arc-en-ciel se déploya brusquement d'un bout à l'autre du stade, reliant entre elles les deux comètes lumineuses.
- C'est beau… Souffla Ignacius émerveillé.
- Oui… Approuva Lucius que le charme avoir à présent libéré.
Des exclamations surexcitées retentissaient dans la foule comme à un spectacle de feu d'artifice, preuve qu'il n'y avait pas que les vélanes pour éblouir tout ce monde !
Bientôt, l'arc-en-ciel s'effaça et les deux comètes se réunirent à nouveau en une seule, formant très vite un grand trèfle scintillant qui s'éleva encore plus haut dans le ciel et vola au-dessus des tribunes.
Une sorte de pluie d'or semblait en tomber et si Ignacius savait parfaitement ce que c'était, il ne pouvait s'empêcher de fondre devant ce spectacle qu'il n'avait vu qu'une fois dans sa vie, bien des années plus tôt alors qu'il assistait à ce même genre d'événement avec ses amis de Serpentard…
- Magnifique ! S'écria naïvement le plus jeune des fils Weasley lorsque le trèfle passa au-dessus d'eux, répandant une averse de pièces d'or farfadet.
Ignacius n'osa pas lui dire ce qu'il en était réellement, craignant une dispute avec Lucius si celui-ci (qui se remettait petit à petit du passage des vélanes) s'apercevait qu'il parlait à la famille d'Arthur Weasley. Il avait déjà poussé l'affront assez loin en osant prendre place aux côtés de Wladimir Krum.
Il s'employa donc à observer attentivement le trèfle et s'aperçut qu'il était composé de milliers de tout petits bonshommes barbus, vêtus de gilets rouges et portant chacun une minuscule lanterne verte ou dorée, qui évoluaient dans une chorégraphie extrêmement bien synchronisée.
- Des farfadets ! s'exclama Mr Weasley, au milieu des applaudissements déchaînés des spectateurs dont beaucoup s'affairaient autour de leurs sièges pour ramasser les pièces d'or tombées à leurs pieds, quitte à manquer le plus beau du spectacle.
- C'est encore plus sophistiqué que la dernière fois ! Cria de son côté Ignacius à Narcissa afin de la distraire de toute l'agitation qui la dérangeait de plus en plus. C'est véritablement magnifique !
Drago qui avait vu tout le monde ramasser des pièces voulut faire de même mais, cette fois-ci, Ignacius l'arrêta discrètement :
- C'est de l'or farfadet, lui dit-il fermement bien qu'à voix basse. Une simple imitation sans aucune valeur et tout aura disparu demain matin au lever du jour.
Le jeune homme lui renvoyait un regard décontenancé quand, soudain, le décors changea de nouveau.
Tout autour de lui, la scène s'assombrit totalement. Ignacius gémit dans son sommeil lorsque des cris paniqués retentirent autour de lui.
Il était à présent de retour avec Drago dans la forêt, suivant malgré tout mais d'assez loin le trio composé de Harry Potter, du fils Weasley et de Hermione Granger.
A présent Ignacius avait allumé sa propre baguette, décidé à trouver un abri sûr dans les bois en attendant que les choses se calment.
Tant pis pour Lucius si celui-ci jouait les têtes brûlées et se faisait prendre. Il n'allait pas se mettre en danger pour son frère.
Lui au moins ne ternirait pas l'honneur des Malefoy en se faisant prendre en plein rassemblement criminel, et son neveu n'y serait pas mêlé non plus…
- Allez Drago, dit-il. Soit on sort de là à pieds et on transplanne, soit on attend dans ce bois.
Étrangement, le jeune homme se contentait de bouder et le suivait plutôt docilement. Mais est-ce que cela durerait ? Ignacius en tout cas était impatient d'en avoir fini et de sortir de la zone de crise.
S'il n'avait pas craint de faire fuir Drago d'ailleurs, il aurait appelé les trois adolescents qui cheminaient devant lui car eux-même semblaient bel et bien désorientés et les avoir à ses côtés en évacuant la zone suffirait à les placer au dessus de tout soupçon.
Cependant, vu la situation, mieux valait sans doute se contenter de les suivre… Et à présent le bois se faisait extrêmement animé, on entendait des conversations chuchotées comme si les gens commençaient à se détendre et à se regrouper.
Plus loin sur le chemin, le trio devant eux traversa soudain une tache de lumière argentée visible de loin dans la lueur de la nuit, et qui semblait avoir attiré pas mal de monde.
Espérant trouver un secours quelconque ou au moins d'autres adultes responsables, Ignacius accéléra le pas pour les rejoindre également et, en regardant à travers les arbres, lui et Drago virent trois magnifiques Vélanes qui se tenaient majestueusement debout dans une clairière, et entourées d'une horde de jeunes sorciers parlant tous très fort, avec un timbre totalement surexcité.
- Mince, souffla Ignacius avec consternation.
Il attrapa Drago juste avant que celui-ci ne se joigne au groupe des admirateurs fervents de ces dames et le tira en arrière, arrachant à l'adolescent un cri de protestation qui fut couvert par les jérémiades des autres :
- Je gagne à peu près cent sacs de Gallions par an, criait l'un des jeunes hommes présents, tout en cherchant visiblement à accaparer l'attention des créatures. Je travaille comme tueur de dragons auprès de la Commission d'examen des créatures dangereuses !
- Non, ce n'est pas vrai ! s'exclama son ami sur un ton tout aussi vindicatif. Tu laves la vaisselle au Chaudron Baveur… Moi, je suis chasseur de vampires, j'en ai tué environ quatre-vingt-dix jusqu'à maintenant !
- Ils disent n'importe quoi, lança Ignacius en guise d'avertissement à son neveu qui tentait de se libérer de son étreinte, visiblement impatient de raconter lui aussi des idioties. Ne te fais pas avoir.
Un troisième sorcier, le visage couvert de boutons nettement visibles, même dans la faible lueur argentée que répandaient les Vélanes, intervint à son tour :
- Moi, je vais bientôt devenir le plus jeune ministre de la Magie qu'on ait jamais connu, vous allez voir !
- Est-ce que je vous ai dit que j'ai inventé un balai qui peut voler jusqu'à Jupiter ? S'écria soudain le fils Weasley.
- Non mais vraiment ! Répéta Hermione Granger, exactement sur le même ton agacé que lorsqu'elle se trouvait dans la loge.
Harry Potter et elle saisirent fermement leur ami, chacun par un bras, et l'éloignèrent de force. Ignacius les imita. Il s'était tourné par réflexe vers Drago qu'il tenait toujours et il constata avec accablement que celui-ci était totalement hypnotisé, se tenant exactement comme son père quelques heures plus tôt.
Désirant plus que tout quitter cet endroit mais confronté à la résistance du jeune homme, il fouilla dans sa poche et sentit avec soulagement le flacon de potion atténuante qu'il avait pris soin d'emporter au cas où. Il l'ouvrit et força Drago à en boire un peu :
- Reprends tes esprits mon garçon ! Gronda t-il tandis que le jeune homme déglutissait avec peine.
Au bout de quelques secondes Drago le regarda enfin mais d'un air vaguement perdu qui n'avait rien de rassurant. Il semblait avoir conscience que son oncle lui parlait mais tout en lui disait bien qu'il n'était pas décidé à obtempérer (remarque, cela ne changeait pas vraiment de ses habitudes si on y réfléchissait un instant).
Soupirant, Ignacius l'entraîna derrière lui, malgré sa résistance et ses gémissements de contrariété :
- Non, dit-il tandis que l'adolescent tirait dans l'autre sens. On ne reste pas avec les vélanes !
- Lâche-moi Ignacius ! S'écria le garçon, mais lui ne céda pas.
D'une poigne solide, il l'emmena à l'écart, cherchant un endroit où ils pourraient attendre tranquillement la fin de la tempête. C'est presque instinctivement qu'il s'enfonça ainsi dans une zone encore plus touffue et obscure de la forêt, sa baguette l'éclairant faiblement.
Enfin, il trouva ce qu'il désirait : une clairière loin de tout où lui et Drago pourraient attendre à l'abri.
- On s'arrête là, dit-il fermement.
A présent, les voix des Vélanes et de leurs admirateurs s'étaient totalement dissipées dans la nuit, ils étaient seuls… Ou presque car Ignacius percevait des chuchotement autour d'eux, derrière les arbres.
C'était très étrange car ils semblaient isolés à présent, tout était beaucoup plus feutré et presque silencieux, comme si de la ouate avait été répandue autour d'eux.
Pourtant, Drago amorça un mouvement pour partir :
- On reste là, dit fermement Ignacius à son neveu.
En l'observant un peu, il constata avec soulagement qu'il semblait avoir un peu repris ses esprits, retrouvant au moins une partie de sa lucidité. Cela dit, le résultat était extrêmement mitigé et Drago ressemblait à une bête aux abois :
- Respire un bon coup, recommanda Ignacius à son neveu sur un ton qu'il s'efforçait de rendre bienveillant.
Durant plusieurs secondes terribles, ils se regardèrent en chien de faïence avant que la crainte ne reprenne le dessus chez chacun.
Au loin, une mélodie faible mais très familière s'élevait des bois, c'était vraiment étrange… Troublant et inquiétant même car les sorciers ne la fredonnaient qu'en de rares occasions et jamais sans une bonne raison.
- On devrait aller retrouver mon père plutôt que de rester là, dit soudain Drago. Si je suis au milieu du camping et qu'il est pris, il pourra toujours prétendre s'être lancé à ma recherche afin d'expliquer sa présence…
- Je ne pense pas que ça marche, répondit Ignacius.
- Avec tous les idiots qui se trouvent au Ministère, répliqua le jeune sorcier. Il trouvera bien quelqu'un pour croire à son histoire !
- Sauf que dans la tenue où il est actuellement, je doute que ce prétexte fasse longtemps illusion, répliqua Ignacius. D'autant qu'à présent, la Confédération magique internationale doit être en train de prendre la main…
Devant l'air peu convaincu de Drago, il ajouta :
- Et puis, ce qui se passe là-bas est peut-être en train de virer au carnage alors nous restons ici. Tu es sous ma responsabilité et je dois veiller sur toi. Il est hors de question que je te laisse retourner au milieu d'un véritable champs de bataille.
Ayant parlé, Ignacius força Drago à s'asseoir sur le sol, mais le garçon ne semblait pas décidé à se laisser faire. Il se mit à se débattre furieusement et, s'étant dégagé, parvint à se relever et détala comme un lapin.
Jurant, Ignacius se lança à sa poursuite à travers le bois. Drago n'avançait pas vite sans baguette certes, mais devoir lui courir après n'avait rien de plaisant et Ignacius eut bien du mal à le rattraper.
Enfin, après avoir couru sur une bonne centaine de mètres, il lui mit le grappin dessus :
- Mais tu vas me lâcher oui ?! S'écria le jeune homme furieux.
Ignacius ne se démonta pas et il le réprimanda vivement (assortissant sa diatribe d'une bonne paire de gifles du meilleur effet… Non mais!) :
- Cela suffit, tu arrêtes ton caprice ici et maintenant Drago ! Je ne le répéterai pas. Assieds-toi !
- Je dirai à mon père que tu m'as frappé !
- Pour cela, tu attendras qu'il ait cuvé son alcool, et en espérant qu'il le fasse à l'air libre !
Drago resta un instant un peu sonné par sa réplique et Ignacius en profita pour retenter un transplanage, mais celui-ci échoua une nouvelle fois.
Il soupira avec lassitude et, sortant sa baguette, il commença à jeter un charme protecteur tout autour d'eux :
- On va attendre ici, assis au milieu de la clairière.
A présent qu'il se calmait, il se rendait compte que la mélodie, ou plutôt la chanson, se faisait de plus en plus nette et forte dans les bois et qu'il la reconnaissait même avec certitude.
Quelqu'un, un homme à première vue, devait la chanter en boucle dans l'espoir d'éloigner les Forces du Mal…
Il se surprit à faire de même :
Carry my soul into the night
May the stars light my way
I glory in the sight
As darkness takes the day
Ferte in noctem animam meam
Illustrent stellae viam meam
Aspectu illo glorior
Dum capit nox diem
Cantate vitae canticum
Sine dolore actae
Dicite eis quos amabam
Me nunquam obliturum
Sing a song, a song of life
Lived without regret
Tell the ones, the ones I loved
I never will forget.
Never will forget.
Ignacius croyait moyennement au pouvoir de ses charmes car il ne brillait pas par sa puissance magique, et d'ailleurs, il avait à peine fini qu'un crac sonore retentit et tous les deux sursautèrent avec un cri :
- Verpey ?! S'écria Ignacius extrêmement surpris.
Oui, c'était incontestablement lui. Ce connard de Ludo Verpey venait juste de surgir de derrière un arbre, à leur droite et en leur causant un vif effroi.
Même à la faible lueur de sa baguette magique qu'il pointait en direction de l'intrus, Ignacius remarqua immédiatement que l'ancien sportif avait littéralement changé de tête. Il semblait avoir totalement perdu sa joyeuse humeur et son teint rosé, marchant à présent d'un pas lourd, le visage livide et tendu.
- Qui est là ? demanda-t-il en clignant des yeux pour essayer de les reconnaître.
- C'est Ignacius et Drago Malefoy, répondit Ignacius. Comment avez-vous fait pour transplanner ?
- Pass Ministériel bien-sûr, répondit Ludo Verpey. Que faîtes-vous ici ?
- Nous avons fui le camping à cause des événements, répondit Ignacius. Comme tout le monde.
- Oui, bien-sûr... Les imbéciles ! dit-il l'air toujours aussi affolé. J'ai vu ça, le fils Weasley m'a dit alors je suis allé voir…
- Vous êtes juste allé… Voir Ludo ? Lui demanda froidement Ignacius qui se sentait de plus en plus scandalisé par l'attitude de l'ancien batteur. N'aurait-il pas été judicieux que vous restiez ?
- En fait, répliqua Verpey. Croupton m'a envoyé chercher Mrs Daler afin qu'elle l'épaule pour calmer le jeu… Mais quand j'ai enfin croisé son mari, elle était déjà partie prêter main-forte.
- Mrs Daler ? Lui demanda Ignacius surpris.
- Oui ! S'impatienta Ludo Verpey en le dévisageant comme s'il avait été parfaitement ignorant. Vous savez, la vélane orientale qui est mariée à Samuel Daler, le fabricant de pansements de Sainte-Mangouste !
- Celle qui a le restaurant sur le Chemin de Traverse ? S'étonna de plus belle Ignacius.
- Exactement, répondit Ludo Verpey. Elle et sa famille sont à la Coupe du Monde.
- Mais pourquoi Croupton veut-il l'avoir auprès de lui ? Par Merlin cela me semble curieux et je ne vois pas en quoi elle pourrait bien l'aider !
- Hé bien à cause de ses pouvoirs de vélane, tout simplement ! Répondit Ludo Verpey. Il a besoin d'elle pour venir à bout de cette foule en délire. C'est la seule de son espèce qui soit susceptible d'accepter… Enfin j'espère qu'elle va y arriver quoi… Et que d'autres vélanes ne sont pas mêlées à la chose.
Ignacius dut bien s'avouer que Croupton avait raison et il déglutit. Oui, c'était une très bonne idée que Croupton avait là, après tout.
Mais avant qu'il n'ait pu ajouter quoi que ce soit, sans le moindre avertissement, une voix très différente de celles qu'ils avaient entendues s'élever dans les bois déchira soudain le silence, juste à quelques dizaines de mètres d'eux.
Cette fois, ce ne fut pas un cri de panique qui retentit, mais quelque chose qui ressemblait à un sortilège, crié d'une voix rageuse et agressive :
- MORSMORDRE !
Drago se recroquevilla au sol, Ignacius sentit lui-même qu'il pâlissait et il essaya de se rattraper à un tronc d'arbre, choqué de ce qu'il voyait. Quant-à Verpey, il hurla puis transplanna en entendant le maléfice.
Une forme immense, verte et brillante, jaillissait de l'obscurité, s'envolant au-dessus des arbres et montant lentement mais sûrement vers le ciel.
- Qu'est-ce que c'est que… ? balbutia Drago en se relevant d'un bond, le regard fixé sur la chose qui venait d'apparaître.
Ignacius ne put répondre tant il était effrayé. La gigantesque tête de mort d'un vert malsain se formait lentement dans les airs, composée de petites lumières semblables à des étoiles d'émeraude, avec un serpent qui sortait de la bouche, comme une langue.
- Wahou ! Souffla Drago en réalisant ce qui se passait.
Sous leur regard stupéfait, la tête de mort s'éleva de plus en plus haut, étincelant dans un halo de fumée faîte de volutes verdâtres et se découpant sur le ciel noir comme une nouvelle constellation.
Soudain, une explosion de hurlements de terreurs retentit dans le bois alentour.
C'était bon, tout le monde l'avait vue… Alors seulement Drago frissonna, à présent conscient que quelque-chose de grave se produisait.
- Par Merlin… Gémit Ignacius que les hurlements autour de lui bouleversaient.
Sous l'effet de la terreur, son estomac se retournait et il restait tétanisé au milieu de la clairière, incapable de fuir ou d'effectuer le moindre mouvement. Autour d'eux dans les bois, la panique était totale.
Reprenant ses esprits après quelques secondes, Ignacius força son neveu à aller s'abriter derrière une grosse souche d'arbres et l'attente commença, terrible et angoissante…
Ignacius se réveilla un instant, le souffle court et les yeux écarquillés. Mais il eut à peine le temps de réaliser ce qui se passait que le sommeil s'emparait une nouvelle fois de lui.
« Crac ! » Le rêve changeait encore et le jaillissement de lumière et de couleus l'aveugla une seconde fois.
À présent, Ignacius était de retour dans la tribune d'où il avait assisté au match de Quidditch. Et l'effervescence était à son comble tandis que le commentateur annonçait à pleine voix :
- KRUM A ATTRAPÉ LE VIF D'OR, MAIS C'EST L'IRLANDE QUI GAGNE ! Seigneur, qui donc pouvait s'attendre à ça ?
- Pourquoi est-ce qu'il a attrapé le Vif d'or ? Criait le plus jeune des fils Weasley, juste devant lui, tout en sautant sur place et en applaudissant avec les mains au-dessus de la tête. Il a mis fin au match alors que l'Irlande avait cent soixante points d'avance, l'imbécile !
- Il savait qu'ils ne pouvaient plus remonter, lui répondit Harry Potter, en criant lui aussi pour couvrir le vacarme, mais sans cesser d'applaudir bruyamment. Les poursuiveurs irlandais étaient trop forts… Il voulait que le match finisse à son avantage, voilà tout…
Ignacius approuva de la tête, il était parfaitement d'accord avec cette analyse et il se retourna vers le vieux Wladimir Krum qui, radieux, applaudissait aussi à tout rompre.
- Il a été très courageux, non ? Dit l'adolescente de naissance douteuse qui se trouvait également devant lui, en se penchant en avant pour regarder Krum atterrir, tandis qu'une nuée de Médicomages se frayait un chemin vers lui, au milieu des Vélanes et des farfadets qui se livraient toujours bataille. Il n'a pas l'air en bon état…
Difficile à dire, songea Ignacius. Voir ce qui se passait relevait de l'exploit, à cause des farfadets fous de joie qui volaient en tous sens au-dessus du terrain.
Il parvenait à peine à distinguer Viktor Krum car celui-ci était en plus entouré de Médicomages. Cela dit, il était clair qu'il avait le visage en sang. Quant-à ses coéquipiers, ils s'étaient rassemblés autour de lui, hochant la tête, l'air abattu par leur défaite.
A bien y regarder, de nombreux supporters bulgares pleuraient rageusement dans les tribunes.
Un peu plus loin, à terre, les joueurs irlandais dansaient joyeusement sous la pluie d'or que déversaient leurs mascottes.
Des drapeaux verts s'agitaient d'un bout à l'autre du stade, l'hymne national irlandais retentissait de toutes parts et quelques bulgares irréductibles agitaient encore mollement leurs propres fanions.
Quant-à Lucius, il pinçait les lèvres d'un air furieux et Ignacius se leva pour le rejoindre, avant de lui glisser à l'oreille d'un air taquin :
- Combien avais-tu parié ?
Pour toute réponse, Lucius sembla encore plus contrarié, lui renvoya une bourrade sans même le regarder et Ignacius regagna sa place en se recomposant une mine de circonstance pour éviter d'éclater de rire.
En bas, sur le terrain, les Vélanes avaient retrouvé leur beauté mais paraissaient tristes et accablées.
Ignacius se surprit à les trouver d'autant plus charmantes, donnant juste envie d'aller les consoler. La potion ne ferait plus effet longtemps, songea t-il non sans appréhension.
- Nous nous sommes battus avec grrrrand courrrage, soupira d'un ton mélancolique une voix un peu plus loin devant, juste derrière Harry Potter.
Celui-ci se retourna tandis qu'Ignacius regardait aussi dans la même direction en étouffant cette fois-ci un rire : c'était le ministre bulgare de la Magie.
- Mais !… Vous parlez notre langue ! s'exclama Cornelius Fudge d'un air totalement indigné. Et vous m'avez laissé parler par gestes toute la journée !
- C'était vrrrraiment trrrrès drrrrôle, répondit le ministre bulgare avec un haussement d'épaules.
Et au-delà de cela, songea Ignacius, sans doute assez instructif mais plutôt risqué sur le plan diplomatique. Qu'avait donc cherché ce personnage en se jouant ainsi de Fudge ? Humilier un ennemi politique ?
C'était peu probable cependant, car ils étaient tous les deux modérés et en rien concurrents. Peut-être cherchait-il à tester son homologue… La piste de la simple plaisanterie restant très peu probable lorsqu'on connaissait un peu le ministre Bulgare.
- Et pendant que l'équipe d'Irlande accomplit un tour d'honneur, flanquée de ses mascottes, la Coupe du Monde de Quidditch est apportée dans la tribune officielle ! rugit soudain Verpey.
Ignacius fut soudain ébloui par une lumière blanche éclatante et il vit que Narcissa, le visage blanc comme un linge et proche du malaise, s'était caché les yeux. La loge venait en fait de s'illuminer par magie pour que tout le monde, sur les gradins, puisse voir ce qui s'y passait. Deux sorciers essoufflés apportèrent alors une immense coupe d'or qu'ils tendirent à Cornelius Fudge.
Celui-ci paraissait toujours furieux d'avoir dû passer la journée à parler inutilement par signes, clair que lui n'avait pas goûté à la « plaisanterie ». Aussi il ne fit sur le moment aucun commentaire.
- Et maintenant, applaudissons bien fort les courageux perdants : l'équipe de Bulgarie ! s'écria Verpey.
Pour la deuxième fois, le capitaine Lynch rata son atterrissage et heurta le sol de plein fouet. Il fut aussitôt piétiné par une horde de Vélanes déchaînées, arrachant à Ignacius un hoquet d'effroi qui lui valut un regard moqueur de son frère.
Le flottement ne dura pas toutefois. Montant l'escalier qui menait à la loge, les sept joueurs bulgares firent leur entrée d'un pas presque militaire, le visage sérieux mais levant tout de même les bras en direction du public.
Des applaudissements s'élevèrent de la foule pour saluer les vaincus et Ignacius vit des milliers de Multiplettes scintiller dans leur direction, ce qui était nettement désagréable pour ses yeux.
Un par un, les Bulgares s'avancèrent dans les travées et Verpey donna le nom de chacun d'entre eux tandis qu'ils serraient la main de leur propre ministre, puis celle de Fudge. Viktor Krum qui passait en dernier tenait toujours le Vif d'or, bien visible dans son poing. Il paraissait dans un état épouvantable, épuisé et des coquards particulièrement spectaculaires étaient apparus sur son visage ensanglanté.
De toute évidence, pensa Ignacius, il avait besoin de soins.
Était-ce l'effet de ses blessures, ou ses mouvements semblaient moins harmonieux lorsqu'il était au sol ? Il avait le dos rond comme un rapace et des pieds légèrement écartés qui l'obligeaient à marcher en canard. Sans doute sa démarche habituelle était-elle un peu aggravée par son état, sans parler des déformations physiques que la pratique intensive du Quidditch avait pu lui causer… Ignacius frémit, un peu mal-à-l'aise en le voyant.
Mais, lorsque le nom du jeune joueur fut prononcé par Verpey, le stade tout entier explosa en acclamations assourdissantes, y compris chez les Irlandais ce qui prouvait tout de même sa valeur.
Ce fut ensuite le tour de l'équipe irlandaise. Aidan Lynch était soutenu par Morane et Connolly. Sa seconde chute l'avait étourdi et ses yeux au regard étrangement perdu semblaient avoir du mal à se focaliser sur quoi que ce soit. Il eut cependant un large sourire lorsque Troy et Quigley levèrent la coupe à bout de bras et que la foule manifesta son enthousiasme dans une longue ovation qui fit trembler le stade comme un tonnerre.
- Il faut qu'il aille se faire soigner lui aussi… Marmonna Ignacius.
Mais personne ne lui répondit. Narcissa se bouchait les oreilles en fermant les yeux, insensible au paraître à présent et Ignacius était sûr qu'elle aurait tout donné pour pouvoir quitter les lieux. Quant-à Lucius, il s'était rendu compte de son malaise et la fixait à présent d'un air inquiet, toujours accablé par les résultats du match. Enfin, lorsque les joueurs irlandais eurent quitté la loge pour accomplir un autre tour d'honneur sur leurs balais (Aidan Lynch, monté sur celui de Connolly, se cramponnait à sa taille en continuant de sourire d'un air absent), Verpey pointa sa baguette vers sa gorge et murmura :
- Sourdinam.
La tension descendit d'un cran jusque dans la loge tandis qu'il ajoutait :
- On parlera de ce match pendant des années, dit-il d'une voix enrouée. Quel coup de théâtre, ce… dommage que ça n'ait pas duré plus longtemps… Ah, oui, c'est vrai… je vous dois… combien ?
Deux des fils Weasley venaient en effet d'enjamber le dossier de leurs chaises et se tenaient à présent devant Ludo Verpey avec un grand sourire et la main tendue.
« Voilà qui ne va pas arranger ses affaires... » Songea Ignacius sans grande compassion, car il ne portait pas Verpey dans son cœur. « Enfin, espérons qu'il ne les arnaque pas. »
La scène coupa brusquement tandis qu'Ignacius se retournait dans son sommeil, cette fois-ci sans se réveiller :
- Samuel ! Samuel ! Irene ! Où êtes-vous ?
Il était de retour dans la forêt sombre avec Drago, toujours assis au même endroit à attendre caché derrière une souche d'arbre. Mais depuis quelques minutes, ils n'étaient plus seuls puisqu'une autre petite famille se blottissait avec eux derrière l'arbre, après avoir pénétré dans la clairière alors qu'ils tentaient de fuir loin de la Marque des Ténèbres.
Après s'être caché, l'homme avait voulu chantonner le Carry my soul, mais Ignacius l'avait immédiatement fait taire. Inutile de se signaler ainsi si un fou rôdait dans la forêt !
Et à présent, les cris bouleversés d'une femme retentissaient à quelques pas d'eux.
Instinctivement, l'homme qui les avait rejoint avec sa toute petite fille quelques minutes plus tôt et lui-même répondirent d'une même voix :
- Là ! On est là !
- Oh par Merlin !
Il y eut un cri et une forme humaine perça la noirceur des bois et pénétra en courant dans la clairière. Drago eut un hoquet de stupeur.
Sous l'effet du soulagement, la jeune femme qui venait d'émerger des broussailles se jeta sur son mari et sa petite fille qu'elle étreignit avec émotion :
- J'ai eu si peur… Souffla t-elle d'une voix encore totalement émue, quelques larmes coulant dans ses yeux. Par Merlin ! Je vous ai crus morts…
Mais était-elle vraiment une vélane comme l'avait dit Verpey ? Songea Ignacius.
A présent que sa terreur s'était calmée, l'accent slave de Diana Daler était nettement perceptible en effet, ce qui indiquait sans équivoque une origine orientale. Ignacius qui s'était mis à la détailler, tout comme Drago d'ailleurs, remarqua qu'elle était d'une très grande beauté, cela ne pouvait se nier, mais il était tout de même très étonné par son apparence.
En effet, plutôt que les cheveux d'un blond presque blanc et le teint digne d'un clair de lune, comme ses semblables, elle avait la peau simplement claire, rougissant même sous l'effet de sa course au niveau des joues. Quant-à ses cheveux, ils étaient presque roux et ondulaient beaucoup plus modestement que ceux des vélanes qu'ils avaient vues dans le stade ou au cœur de la Forêt.
En fait, songea Ignacius, on aurait cru une véritable humaine et cela ne la rendait que plus séduisante encore :
- Excusez mon indiscrétion, ne put-il s'empêcher de dire une fois qu'elle eut relâché l'étreinte autour de son mari et de sa fille. Mais… Êtes-vous réellement une vélane ?
La question était délicate car elle aurait pu être métisse, Ignacius le savait. Mais sa curiosité avait toujours été plus forte que les impératifs de la politesse et cette nuit ne ferait pas exception.
A la fois surprise et un peu pincée, la jeune femme se retourna vers lui et le jaugea du regard avec une certaine froideur. Ignacius se sentit aussitôt tellement idiot qu'il baissa la tête.
Oui, à n'en pas douter c'était bien une vélane. Et à côté de lui, Drago semblait à nouveau totalement hypnotisé :
- Ce jeune homme a un peu trop croisé mes semblables, remarqua alors Diana Daler qui s'approcha du jeune homme l'air soucieux, toujours sans répondre à la question d'Ignacius.
A vrai dire, c'était maintenant devenu inutile, ils n'avaient plus l'ombre d'un doute sur sa véritable nature.
La vélane examina Drago qui l'observait totalement hébété, fronça les sourcils avec contrariété et essaya de secouer un peu le jeune homme :
- Allez, ça suffit maintenant ! Dit-elle sans dissimuler son agacement.
Et elle claqua sèchement des doigts devant le visage de Drago.
Aussitôt le regard du jeune homme se ranima et il respira à gros goulots, comme soudain pris d'un début d'asphyxie.
- Hé bien, ça va ? Lui demanda la vélane sur un ton bourru qui surprit fortement Ignacius.
- Qu'avez-vous fait ? Lui demanda t-il.
Diana Daler se tourna vers lui et expliqua, toujours de cette même voix un peu brute de décoffrage :
- Il a reçu une décharge, pendant le match je dirais, et je pense que c'était clairement volontaire… Probablement une de mes semblables qui avait envie de lui mettre le grappin dessus. J'y ai mis fin.
Cela dit, elle détaillait toujours Drago, non sans une certaine perplexité :
- Vous êtes de haute famille ? Finit-elle par demander à Ignacius.
- Nous sommes des Malefoy, répondit ce dernier, conscient que sa réponse ne pouvait être plus claire.
- Voilà qui explique sûrement la chose, alors, répondit-elle… Est-ce que vous vous sentez mieux jeune homme ?
Drago acquiesça mais lui renvoya un regard fortement interrogateur, le même que son oncle pour tout dire :
- J'ai essayé de le soigner avec une potion atténuante, expliqua Ignacius. Mais elle n'a quasiment pas eu d'effet sur lui.
- Il est inutile de prendre une potion atténuante lorsqu'on est déjà charmé, lui expliqua Diana Daler, cette fois-ci d'une voix un peu plus douce. C'est un outils de prévention, qui marche plus ou moins bien suivant le sorcier qui l'ingère d'ailleurs… Et sur les très jeunes hommes elle est de toute manière presque inefficace la plupart du temps.
Devant le visage toujours aussi étonné du sorcier, elle ajouta avec douceur :
- Oui, je suis bien une vélane, une vélane orientale pour être précise, d'où ma couleur de cheveux et mon type un peu particulier. Je viens d'Europe de l'Est. Voilà qui devrait répondre à votre question.
- Oui, répondit Ignacius. Enfin, en partie...
Elle était si différente des autres, songea t-il, que cela était troublant.
- Mes semblables que vous avez vues dans le stade ne sont pas du tout bulgares, du moins pour la plupart, ajouta alors Diana Daler comme si elle avait deviné le fond de ses pensées. C'est une troupe très connue et extrêmement sélective sur le choix de ses membres. Elle circule dans toute l'Europe en offrant ses prestations. Les vélanes qui la composent viennent de tous les horizons… Et la plupart visent une seule chose : épouser un sorcier puissant et fortuné. Mais en ce qui me concerne, je n'ai ni l'envie ni les capacités physiques pour faire de même.
- Vous êtes magnifique, répondit honnêtement Ignacius qui était à présent pleinement conquis malgré les efforts évident que la vélane fournissait pour ne pas entrer dans un jeu de séduction. Pourtant c'est vrai que vous semblez aussi terriblement humaine.
- Diana vit parmi les sorciers depuis quelques années, intervint alors Samuel Daler, son mari.
Il tenait toujours l'épaule de son épouse d'une main et portait sa petite fille sous l'autre bras.
- J'ai appris à me fondre parmi vous, ajouta Diana. Je ne fréquente plus guère mes semblables car je préfère rester avec ma famille sans être dérangée. Ceci explique sans doute cela.
- Je suis déjà venu manger dans votre restaurant, sur le chemin de Traverses, se souvint alors Ignacius. Pourtant, jamais je n'avais remarqué que…
Il se sentait terriblement troublé, peut-être même plus que par la marque des Ténèbres et il ne pouvait s'empêcher de détailler Diana Daler :
- Et vous avez donc combattu avec le Ministère cette nuit ? Demanda t-il encore.
- Combattu, non, répondit la jeune femme. Je ne suis pas auror, loin s'en faut. J'ai seulement donné un coup de main en utilisant mes pouvoirs… Pour calmer le jeu et écarter tout ce beau monde du cœur du groupe afin que le Ministère puisse agir… C'était le seul moyen de dégager les Robert et cela a réussi, heureusement, mais nous avons tout de même eu très peur…
Oui, il était clair que tout ceci avait été très effrayant, pourtant cette femme en face de lui l'impressionnait par son courage et sa solidité. Par certains côtés, elle lui rappelait même Hortense.
La même douceur et la même émotion se dégageaient d'elle tandis qu'elle se tenait avec son mari et sa fille à regarder le ciel à présent. La Marque des Ténèbres y flottait toujours, pour leur plus grande peur.
Son regard reflétait également la même peur et le même dégoût.
Lorsque les choses finirent par se calmer et que le couple les eut quittés en transplanant avec leur petite fille, Drago était encore troublé et demanda à Ignacius :
- Est-ce que ce qu'elle a dit est vrai ?
- Oui, répondit-il. Je crois bien… Les vélanes sont des créatures envoûtantes et divisées en plusieurs peuples. Certaines comme celles que tu as vues sont blondes et c'est le cas de la plupart des vélanes d'Europe occidentale qui sont les plus connues de toutes. Celles-ci se mêlent volontiers aux sorciers qu'elles acceptent même de servir, par facilité le plus souvent. Mais d'autres peuples existent également, ou ont existé par le passé, et s'ils sont moins connus c'est parce qu'ils fuient les humains ou se comportent face à eux comme des antagonistes. Les vélanes des Cyclades, par exemple, ont probablement inspiré le mythe d'Ulysse et des Sirènes… Vu le faciès de notre amie, je dirais qu'elle leur est proche… Seulement son accent annonce plutôt une femme de l'Europe de l'Est.
A présent, Drago l'écoutait, au point d'avoir perdu sa mine arrogante, et Ignacius poursuivit son explication :
- Pour tout te dire, on ne sait pas vraiment ce que sont les vélanes. Certains pensent à une espèce à part, d'autres à une création humaine. Mais ce qui est sûr, c'est qu'elles fraient avec les humains depuis des millénaires et qu'elles ont également eu d'autres descendants, avec de nombreuses créatures humanoïdes.
- « D'autres » descendants ? Demanda Drago à la fois étonné et réprobateur. Il y a des sorciers qui descendent des vélanes ?
- Bien-sûr, répondit Ignacius sans hésiter. Y compris parmi les Sang-Purs et c'est même plutôt bien vu dans certaines régions du Monde. Le cas le plus connu est le Proche-Orient où, si la communauté vélane a totalement disparu, et où ses traces génétiques sont visibles chez la quasi-totalité des sorciers, et plus particulièrement des sorcières de cette région du monde.
- Comment cela ?
- Dans leur manière de pratiquer la magie, leur ascendance est extrêmement visible : elles pratiquent l'envoûtement sans baguette, par de la danse et des chants, sont capables d'attirer les regards ou de foudroyer sur place un importun… Et d'ailleurs cette capacité sans baguette s'étend à de nombreuses branches de la magie des sorcier du Moyen Orient, notamment dans la lutte contre les détraqueurs, la legilimencie ou même la pratique de formes atténuées ou dérivées du sortilège de l'Imperium. Autrement dit, des sortilèges et maléfices qui, chez nous, ne peuvent se pratiquer sans une puissance magique considérable.
Ignacius expliquait tout ceci avec plaisir, car il avait toujours été fasciné par cette région du monde, son art et sa culture, ainsi que ses pratiques magiques. Ce n'était un secret pour personne que dans ce domaine, il était un fin connaisseur.
- Mais du coup, demanda Drago à présent presque effrayé. Les sorcier du Moyen Orient sont plus puissants que les sorciers européens ?
- Pas vraiment au fond, répondit Ignacius. Ils ont une très grande capacité à pratiquer la magie sans baguette, ce qui est réservé chez nous à une élite très puissante… Cependant, la plupart ne possèdent pas de baguette justement, souvent par manque de moyens… Alors ils se contentent de ce qu'ils savent faire par eux-même, ils deviennent ainsi souvent très spécialisés et peuvent donc souffrir de lacunes importantes dans les domaines qu'ils maîtrisent mal.
- Comment en sont-ils arrivés là ? Demanda Drago.
- Cela tient surtout à l'histoire très particulière des sorciers de cette région du monde, expliqua Ignacius. Il n'y a pas d'école équivalente à Poudlard là-bas, ce qui finalement les prive pas mal d'une possibilité d'exploiter leur puissance au maximum.
Il se tut un instant puis ajouta :
- Cela dit, je n'aimerais pas me retrouver en face d'un sorcier de là-bas correctement formé et au maximum de ses capacités… Je pense qu'il surpasserait la plupart des sorciers puissants d'Angleterre… D'ailleurs, en Europe continentale il y a aussi pas mal de profils similaires, en Allemagne par exemple mais aussi en France et en Espagne, avec notamment des animagus presque innés…
Comme pour interrompre son monologue qui commençait peut-être à être ennuyeux, un hurlement de bête sauvage retentit non loin et Ignacius sentit son sang se glacer…
Il se réveilla en hurlant, le souffle court, désordonné, et trempé de sueur, si effrayé qu'il lui fallut plusieurs minutes pour prendre conscience qu'il se trouvait dans sa chambre au manoir de Battle.
Tandis qu'il tentait de calmer les battements incontrôlables de son coeur, Ignacius se laissa aller sur les coussins et, sans y prendre garde, ses doigts cherchèrent instinctivement Hortense.
Il éclata en sanglots dès l'instant où il prit conscience de son geste. Il était seul, totalement seul et à présent complètement pris au piège des mangemorts.
