Cette histoire a été écrite dans le cadre du secret santa Hunter x Hunter pour La Pomme Verte. J'avais très envie de m'essayer à ce ship ! J'espère vraiment que le résultat te plaira !

Il y aura trois chapitres en tout. Ils sont tous déjà écrits, donc, normalement, je devrais poster les deux autres chapitres rapidement.

Merci beaucoup, Moira-chan, d'avoir bêta ce chapitre et, globalement, de m'avoir bien soutenue tout au long de ce secret santa ! :)

Merci aussi à Turand, La Pomme Verte, Miss Pupitre, Takkaori et Moira-chan (encore :p) de m'avoir suivie dans mon envie de faire ce petit échange ! Vous êtes les meilleures !

Là-dessus, je vous souhaite une bonne lecture ! ~


Chapitre 1

Kurapika se réveilla de bonne heure. N'ayant jamais aimé traîner au lit, il s'étira en douceur, avant de rejeter sa couverture. Il se dirigea ensuite vers la salle de bain pour se préparer. Aujourd'hui, c'était la rentrée. Dans quelques heures, il allait commencer sa dernière année dans l'un des meilleurs lycées de toute la Californie. Kurapika se regarda un moment dans le miroir, fixant ses yeux bleus déterminés. Dans moins d'un an, il pourrait enfin postuler pour les plus grandes universités du pays. Intégrer Stanford, c'était son rêve. Et il allait tout donner pour y parvenir ! Il comptait bien avoir les meilleures notes possibles. Il aurait un dossier excellent. Oui, il y arriverait ! Sur cette conviction, il s'apprêta de façon méthodique. Heureusement, il avait déjà préparé la plupart de ses affaires la veille. Il n'avait donc plus grand-chose à faire ce matin. Lorsqu'il fut prêt, il descendit à la cuisine où il retrouva Mito en train de préparer le petit-déjeuner.

« Je vais t'aider, dit aussitôt Kurapika.

—Oh non, ça va, sourit Mito. Assieds-toi. Je t'ai fait des pancakes.

—Merci. »

Kurapika s'installa alors sur l'une des chaises et se servit un verre de jus d'orange. Mito était vraiment gentille avec lui. Et parfois, Kurapika se disait qu'il ne le méritait pas. Ces dernières années avaient été si compliquées... Kurapika savait qu'il n'avait pas été facile à vivre. Lorsqu'il avait perdu ses parents trois ans auparavant, il l'avait très mal vécu. Et il n'avait rien trouvé de mieux que de le faire payer à Mito qui l'avait recueilli. Malgré son jeune âge, Mito avait joué son rôle de marraine jusqu'au bout. Elle l'avait accepté, elle lui avait donné un toit sur la tête. Elle l'avait traité de la même façon que Gon qu'elle considérait comme son propre fils. Mais Kurapika, lui, n'en avait fait qu'à sa tête au début. Il s'était vraiment montré méchant, parfois même cruel envers elle. Il avait fini par se calmer, mais il s'en voulait toujours d'avoir agi de la sorte envers la personne qui le méritait le moins. Maintenant, il faisait tout pour la rendre fière. Même si, pour lui, ça n'effacerait jamais le mal qu'il lui avait fait...

Lorsqu'elle posa les pancakes sur son assiette, il lui sourit et la remercia, à nouveau. Chassant ses pensées désagréables, il se mit à manger d'un bon appétit. Il repensa à cette rentrée. Il avait hâte de retourner au lycée. Et il n'était pas le seul, d'ailleurs, à avoir attendu ce jour avec impatience.

Descendant les escaliers bruyamment, Gon débarqua à son tour dans la cuisine quelques minutes plus tard. Un large sourire ravageait la moitié de son visage.

« Bonjour tante Mito ! Bonjour Kurapika ! »

Il s'assit à table. Mito lui donna des pancakes, avant d'enfin s'installer avec eux. Elle les regarda attentivement. Ils n'auraient pas pu être plus différents l'un de l'autre. Kurapika mangeait avec soin, tandis que Gon s'empiffrait.

« Alors, tout est prêt pour votre premier jour ? demanda-t-elle avec douceur.

—Oui, sourit Gon entre deux bouchées. Mais faut qu'on se dépêche pour pas être en retard ! »

Il semblait plus surexcité que jamais. Kurapika sourit, attendri. Il savait pourquoi Gon était dans cet état-là. Il fallait dire que les vacances d'été avaient été bien longues pour lui. Gon n'avait, en effet, pas pu voir son meilleur ami pendant ces deux mois. Les parents de ce dernier étaient très stricts et, après une énième bêtise de Kirua, ils avaient purement et simplement décidé de le punir toutes les vacances. Heureusement, puisqu'ils allaient dans la même école, Gon et lui allaient enfin pouvoir se revoir aujourd'hui.

« Doucement, rigola Mito. Prends le temps de bien manger. »

Gon acquiesça, mais ne diminua pas son rythme pour autant. Il termina son petit-déjeuner bien avant Kurapika. Il attendit alors que ce dernier ait fini tout en balançant ses jambes d'avant en arrière. Lorsque Kurapika avala son dernier morceau, Gon se leva d'un bond.

« Attends, le retint Mito. Je vous ai préparé votre repas de midi, tenez. »

Elle leur donna des sachets avec leurs sandwiches et en donna deux de plus à Gon. Ce dernier la regarda, sans comprendre.

« C'est pour Kirua et Aruka, sourit Mito. Allez, filez maintenant. »

Gon sauta vers elle et l'embrassa sur la joue.

« Merci tante Mito ! T'es la meilleure ! »

Sur ces mots, il sortit en trombe de la cuisine et monta les marches rapidement pour aller chercher ses dernières affaires. Un peu plus à l'aise, Kurapika prit le temps d'aider Mito à ranger toute la vaisselle.

« Rassure-moi et dis-moi que tu veilleras sur eux, soupira Mito au bout d'un moment.

—Bien sûr, sourit Kurapika. Ne t'en fais pas, tout ira bien. »

Enfin, ça, Kurapika savait que c'était vite dit. Gon et Kirua avaient déjà l'étrange faculté de s'attirer très facilement des ennuis lorsqu'ils étaient seuls. Alors quand ils étaient réunis... Chaque année, ils arrivaient à faire plus de dégâts que l'année précédente. Ce n'était donc pas étonnant que Mito s'en fasse. Mais Kurapika allait les garder à l'oeil. Elle pouvait compter sur lui pour ça.

Après avoir rassuré sa marraine, Kurapika alla chercher son sac, puis il mit sa veste et ses chaussures, aux côtés d'un Gon qui trépignait d'impatience.

« À ce soir ! dit alors Mito. Passez une bonne première journée ! »

Ils la saluèrent à leur tour avant d'enfin quitter la maison. Le temps était ensoleillé. Les feuilles des arbres étaient encore bien vertes. Le vent soufflait dans leurs cheveux, doux et agréable. Ils avancèrent d'un bon pas. Gon se mit directement à lui parler, toujours très souriant. Il lui racontait tout ce qu'il voulait faire avec Kirua dès qu'il le retrouverait. Kurapika l'écouta, un léger sourire sur ses lèvres.

Mais alors qu'ils se rapprochaient de l'école, Gon devint plus silencieux. Il ne cessait de regarder partout autour de lui. Jusqu'à ce qu'un grand cri retentisse derrière eux.

« Gon ! »

Celui-ci se retourna aussitôt. Il aperçut sans peine Kirua qui lui faisait de larges signes de la main, Aruka à ses côtés. Sans attendre, les deux amis coururent l'un vers l'autre. Arrivés à même hauteur, ils se serrèrent dans les bras, sans aucune pudeur. Kurapika sourit avec douceur face à cette vision. Ils étaient tellement dans leur monde que Kurapika n'eut pas envie de les déranger. Il salua alors rapidement Kirua et Aruka, leur souhaita une bonne rentrée, avant de s'éloigner de son côté.

Il alla jusqu'à l'entrée du lycée et marcha d'un pas tranquille vers l'accueil. Il chercha les informations pour savoir dans quelle classe il se trouvait. Il prenait les documents dont il avait besoin lorsqu'une voix se fit entendre derrière lui.

« Ah Kurapika, tu tombes bien ! »

Kurapika se retourna et vit l'un des éducateurs s'avancer vers lui.

« Bonjour monsieur, je peux faire quelque chose pour vous ?

—Oui, acquiesça ce dernier. Le proviseur veut te voir. Tu peux aller dans son bureau directement. »

Kurapika le regarda, très surpris. Le proviseur voulait le voir ? Mais... pourquoi ? Kurapika n'avait jamais été convoqué par le proviseur. Malgré son étonnement, il hocha la tête. Ça ne pouvait rien être de grave, après tout. Il se dirigea donc vers son bureau. Il frappa à la porte et, dès qu'il eut l'autorisation, il entra.

La pièce était bien trop grande. Derrière un large bureau, le proviseur était assis sur un siège qui avait l'air particulièrement confortable. Bien loin des chaises que les étudiants devaient se coltiner à longueur de journée.

« Bonjour, monsieur, le salua poliment Kurapika. Vous m'avez demandé ?

—Ah oui, entre donc ! Assieds-toi ! »

Kurapika s'installa en face de lui, curieux de savoir ce qu'il lui voulait. Au moins, le proviseur semblait détendu. C'était toujours ça...

« Kurapika, reprit ce dernier d'une voix un peu plus forte, tu es notre meilleur élève. Tes notes sont excellentes. Les professeurs ne se sont jamais plaints de toi. Ton dossier est vraiment très bon.

—Merci monsieur, répondit Kurapika qui ne voyait pas où il voulait en venir.

—Cette année est plus importante que jamais. Tu comptes postuler dans les grandes universités, n'est-ce pas ?

—Oui... »

Tout ça lui semblait logique. Il n'était sûrement pas le seul étudiant dans ce cas-là. Ça lui paraissait léger pour une convocation... Il avait l'impression que le proviseur tournait un peu en rond au lieu d'aller droit au but, ce qui était assez agaçant.

« Tu sais que faire du tutorat est également bien vu sur les dossiers d'inscription ?

—J'imagine... Mais on ne fait pas de tutorat ici.

—Eh bien, cela va changer, déclara le proviseur. Après tout, c'est une méthode qui a fait ses preuves. Et je voudrais que tu t'occupes d'un élève en particulier. »

D'accord. Donc c'était là où il voulait en venir depuis le début. Kurapika retint un soupir d'exaspération. Il prit sur lui pour garder son ton poli.

« Je ne sais pas, monsieur, je vais déjà avoir beaucoup de travail.

—Oh oui, sans aucun doute. Mais revoir la matière avec lui t'aidera déjà à l'assimiler.

—Attendez... Vous voulez que je m'occupe d'un élève de terminale ? »

Kurapika n'aurait pas cru devoir s'occuper de quelqu'un de son âge. Pourquoi devrait-il faire ça ? La personne pouvait bien se payer des cours particuliers, non ?

« Exactement, sourit le proviseur. Il s'agit d'un nouvel élève qui est arrivé dans la région il n'y a pas longtemps. Il ne parle pas encore parfaitement notre langue. Il aurait donc besoin d'une aide constante jusqu'à ce qu'il rattrape le niveau. Tu es la meilleure personne pour ça. Et, bien entendu, je serais ravi de glisser une lettre de recommandation dans ton dossier. »

Kurapika fronça les sourcils. Pour qui est-ce que le proviseur le prenait ? Il ne le ferait certainement pas pour la lettre de recommandation. À vrai dire, il se sentait un peu honteux maintenant. Il avait réagi à chaud, sans imaginer une seule seconde la possibilité qu'il s'agisse d'un élève étranger. Entrer dans un lycée en dernière année sans bien connaître la langue, ça ne devait pas être simple. Bon. Ça allait lui prendre du temps, mais le proviseur n'avait pas tort. Au moins, ça lui permettrait de retravailler directement la matière.

« D'accord, finit-il par dire. Je veux bien essayer de l'aider.

—Parfait ! Merci Kurapika ! Et si tu as le moindre problème, n'hésite pas à en parler à tes professeurs. Vous aurez le droit d'utiliser les salles de classe entre les heures de cours. Bien et maintenant... Ah, il était censé venir ici à huit heures ! »

Le proviseur jeta un regard agacé à sa montre. Kurapika tiqua. Alors l'élève qu'il devait aider était déjà en retard ? Eh bien, ça promettait. Il espérait qu'il ne devrait pas l'attendre trop longtemps. Les cours commençaient bientôt. Enfin, au bout de quelques minutes, la porte du bureau s'ouvrit. Kurapika se tourna et observa le nouveau venu. Il n'était pas très grand. Entièrement vêtu de noir, il ressemblait à un gothique qui se serait trompé de chemin. Kurapika n'avait encore jamais vu quelqu'un qui portait ce genre de vêtements dans la vie de tous les jours. Il avait même une tête de mort sur sa veste. Kurapika haussa un sourcil à cette vue. D'accord, il n'y avait pas de code vestimentaire strict dans cette école, mais quand même... Il croisa ensuite son regard encadré par ses mèches noires. Froid et ennuyé.

« Ah te voilà ! s'exclama le proviseur. Ça passera pour aujourd'hui, mais la prochaine fois, tâche d'être à l'heure ! Bon, je te présente Kurapika. Il est dans la même classe que toi. Il t'aidera pour les cours et les différents aspects de la vie scolaire. Bon, vu l'heure... Kurapika, tu lui expliqueras tout ça plus tard. Rejoignez votre classe ! »

Kurapika était clairement agacé. Il allait tout devoir faire dans la précipitation parce que monsieur n'avait pas daigné arriver à l'heure. Ils sortirent tous les deux du bureau et Kurapika se dirigea d'un pas rapide vers la classe qu'on lui avait assignée. Mais, se rappelant que l'autre garçon ne connaissait pas le lycée, il se força à ralentir l'allure. Il inspira profondément. Allez, il pouvait bien faire un effort.

« Désolé pour le côté expéditif, dit-il alors. Mais la cloche va bientôt sonner. »

Les mains dans les poches, le nouvel élève ne lui répondit même pas. Il se contenta de hausser les épaules. Kurapika fronça les sourcils, sentant déjà qu'il allait avoir du mal à garder son calme.

« Comment est-ce que tu t'appelles, au fait ? »

Il se rendait compte que le proviseur n'avait pas prononcé son nom une seule fois. Le garçon ne lui répondit pas tout de suite. Kurapika se demandait même s'il allait le faire lorsqu'il ouvrit enfin la bouche.

« Feitan. »

Sa voix douce surprit Kurapika. Il ne s'était pas du tout attendu à ce qu'il ait un tel timbre de voix.

« ... Bienvenu en Californie, Feitan, finit-il par dire. J'espère que tu te plairas ici. »

Il lui sourit, voulant quand même le mettre à l'aise, mais Feitan n'afficha aucune émotion. Il reste même complètement silencieux. D'accord, il n'était clairement pas causant. Kurapika abandonna ses tentatives. Il reprit son chemin jusqu'à leur salle de classe. Les cours allaient commencer dans quelques minutes, à présent. Lorsqu'il entra dans la pièce, il aperçut Senritsu, sa meilleure amie. Il lui sourit et s'avança vers elle, avant d'hésiter. Il jeta un regard en arrière, mais Feitan avait déjà balancé son sac sur la dernière table, sans un regard vers lui. Avec un haussement d'épaule, Kurapika alla alors rejoindre son amie. Il s'installa à ses côtés. Senritsu lança un coup d'oeil discret à Feitan.

« Qui c'est ? Tu le connais ?

—C'est Feitan, répondit Kurapika à voix basse alors que les autres élèves entraient à leur tour. Il vient d'arriver dans notre pays. Le proviseur veut que je l'aide pour les cours. »

Il afficha une grimace à ses mots, mais le regard sévère de Senritsu le fit se sentir honteux, à nouveau. Ce Feitan n'y pouvait rien après tout. Il reprit un visage plus neutre.

« Je suis agacé contre le proviseur, tint-il alors à préciser. Il m'a demandé ça en dernière minute. Il m'a même soudoyé en promettant de m'écrire une lettre de recommandation pour l'université. Je ne supporte pas ça.

—Là-dessus, je te comprends. Mais venant de lui, il ne faut pas s'en étonner. »

Kurapika retint un rire. C'était vrai. Depuis qu'il occupait son poste, le proviseur n'avait jamais beaucoup brillé par sa gentillesse ou ses bons choix. Mais avant que Kurapika n'ait pu rajouter quoi que ce soit, leur professeur principal entra dans la classe. Aussitôt, le silence se fit. Le professeur se présenta et fit l'appel. Puis, il enchaîna sur les informations importantes. Kurapika l'écouta attentivement. Il ne voulait rien rater. Ensuite, les cours commencèrent enfin.

La matinée défila à toute allure. Lorsque la pause de midi arriva, Kurapika attendit que Senritsu soit prête pour quitter la classe. Mais quand il passa devant la table de Feitan qui rangeait ses affaires, il s'arrêta. Senritsu l'encouragea du regard.

« Eh Feitan, commença-t-il alors. Ça te dirait de manger avec nous ? Je pourrais te montrer la cantine comme ça. »

Feitan les observa un instant de ses yeux froids qui troublaient un peu Kurapika. Puis, il hocha la tête. Il balança son sac sur l'une de ses épaules et les suivit. Kurapika marchait à la tête de leur étrange petit groupe. La cantine n'était pas très loin. Kurapika balaya des yeux la grande salle quand il y entra. Il repéra vite une table vide près d'une grande fenêtre qui donnait sur le terrain de foot. Il s'y dirigea et s'assit sur l'une des chaises. Ses yeux se perdirent à travers la vitre. Une classe du cycle inférieur avait son cours de sport. Kurapika sourit de tendresse en reconnaissant Gon et Kirua. Ils couraient dans tous les sens. C'est bien l'un des seuls cours où ils avaient toujours été très appliqués.

Senritsu s'installa en face de lui, tandis que Feitan se laissa tomber à ses côtés. C'était tellement étrange d'avoir une nouvelle personne avec eux. Détachant ses yeux de la fenêtre, Kurapika se força à les poser sur Feitan. Ce dernier faisait à peine attention à eux. Il avait sorti son repas et commençait à manger. Kurapika et Senritsu s'échangèrent un regard. Kurapika se disait que ce ne serait quand même pas très sympa de ne pas lui parler. En plus... Même si le garçon l'énervait déjà, il devait bien reconnaître qu'il l'intriguait aussi un peu. Il était si différent des gens qu'il côtoyait d'habitude.

« Hmm, dis Feitan... Du coup, tu viens d'où ?

—De Chine, marmonna Feitan.

—Oh, c'est vrai ? s'émerveilla Senritsu. Et d'où exactement ? »

Feitan lui lança un long regard, comme s'il la jugeait.

« ... Jinan », finit-il par répondre.

Le silence s'installa, à nouveau. La conversation n'était clairement pas facile à lancer.

« Et pourquoi tu es venu ici ? relança Kurapika. À cause du travail de tes parents ?

—Non. »

Il ne développa pas plus et continua à manger. Kurapika préféra ne pas insister. Après tout, si Feitan ne voulait pas en parler, ce n'était pas son problème. Ça ne le regardait pas vraiment. Le repas se déroula alors dans une ambiance particulière. Senritsu et Kurapika, voyant que Feitan restait silencieux, finirent par discuter rien qu'à deux. Le repas terminé, ils sortirent ensuite dans la cour. À ce moment-là et sans un mot, Feitan s'éloigna d'eux pour aller se poser dans un coin. Assis à même le sol, il sortit de son sac un livre – qui n'avait rien d'un manuel scolaire – et se plongea dedans.

« Il est... étrange, non ? demanda Kurapika, au bout d'un moment.

—Ça ne doit pas être facile de débarquer de l'étranger, répondit avec sagesse Senritsu. Laissons lui un peu de temps pour s'adapter.

—J'espère que les cours particuliers ne seront pas trop compliqués. Ah je ne lui ai même pas demandé ce qu'il voulait comme horaire. Il faudra que j'en discute avec lui tout à l'heure. »

Kurapika ne pouvait s'empêcher d'être agacé par l'attitude de Feitan. Pourtant, il savait que Senritsu avait raison. Ça ne devait pas être facile pour lui. Kurapika lui lança de temps en temps des coups d'oeil, tout au long de leur pause. Feitan semblait complètement dans sa bulle, toujours plongé dans son livre. Kurapika se demandait ce qui pouvait bien se passer dans sa tête. Jusqu'ici, il n'avait jamais eu beaucoup de mal à comprendre les personnes qui l'entouraient, mais là... Là, il devait bien avouer que ce garçon détonnait. Enfin, dans tous les cas, il y avait intérêt à ce que Feitan y mette du sien parce que Kurapika n'allait certainement pas lui courir après.

Lorsque les cours de l'après-midi reprirent, Kurapika tâcha de rester concentré uniquement sur les nouvelles informations qu'il recevait. Tout comme la matinée, le temps fila à toute allure. Lorsque la dernière sonnerie de la journée retentit, Kurapika rangea ses affaires avant de se diriger vers la table de Feitan. Ce dernier remettait sa veste noire sur ses épaules, sans lui accorder une quelconque attention.

« Alors pour les cours particuliers, si tu veux, on peut discuter d'un horaire. »

Feitan le regarda enfin de ses yeux si froids. Kurapika se sentit, à nouveau, un peu troublé. Avant lui, jamais on ne l'avait regardé de cette façon-là.

« Pas maintenant, marmonna Feitan. Je rentre. »

Kurapika haussa les sourcils. Il ne s'était pas attendu à une telle réponse. Feitan passa son sac en bandoulière et quitta la salle sans un regard derrière lui. Alors là... Il était gonflé quand même ! Kurapika faisait ça pour lui ! Il sentait la colère monter dans son corps. Mais lorsque Senritsu posa une main apaisante sur son bras, il se calma un peu.

« Laisse lui du temps », lui conseilla Senritsu.

Kurapika inspira, avant d'acquiescer. Elle avait raison, comme toujours. Et puis, de toute façon, ce n'était pas son problème si Feitan n'était pas motivé. Sur cette pensée, il sortit de la pièce à son tour. Accompagné de Senritsu, il se dirigea vers la sortie du lycée. Ils se saluèrent alors, avant de partir chacun de leur côté. Kurapika marcha ensuite jusqu'à la sortie du collège et attendit. Quelques minutes plus tard, il aperçut Gon qui rigolait avec Kirua. Les deux jeunes garçons arrivèrent à sa hauteur.

« Alors ? sourit Kurapika. Votre première journée s'est bien passée ?

—C'était super ! s'écria Gon.

—Ce serait encore mieux s'il y avait pas les autres imbéciles dans notre classe, répliqua Kirua avec dédain. Pff, c'est nul, je dois déjà rentrer si je veux pas que ma mère fasse une énième crise. Elle est pénible. Allez, je fonce retrouver Aruka. À demain Gon ! À plus Kurapika ! »

Gon lui fit de larges signes de la main et attendit qu'il soit hors de vue pour s'éloigner avec Kurapika. Tous les deux se mirent alors en marche. Ils discutèrent tranquillement de cette première journée. Kurapika voulait s'assurer que Gon n'avait pas déjà fait de bêtise. Et lorsqu'ils rentrèrent, ce fut au tour de Mito de leur faire subir un véritable interrogatoire.

« Le proviseur m'a demandé de faire du tutorat, leur raconta Kurapika. Il veut que je donne des cours particuliers à un élève de ma classe qui vient d'arriver dans le pays.

—C'est super ça, s'enthousiasma Mito. Il vivait où avant ?

—En Chine.

—Tu devrais en profiter, Kurapika ! C'est toujours très enrichissant de comprendre une autre culture. Je suis sûre que ce garçon peut t'apporter beaucoup de choses, lui aussi. »

Elle semblait tellement emballée que Kurapika n'eut pas le cœur à se plaindre de l'attitude de Feitan. Il se contenta alors d'acquiescer. Elle n'avait pas tort. Si Feitan avait une autre attitude, il y aurait pu avoir un bel échange entre eux deux. Mais bon, c'était comme ça...

Quelques minutes plus tard, Mito partit travailler au restaurant. Gon fonça alors sur l'ordinateur pour pouvoir parler avec Kirua. Kurapika, quant à lui, décida de monter dans sa chambre. Il s'installa à son bureau, profitant du calme de la pièce. Il prépara ensuite ses classeurs avec ses différents cours et personnalisa son journal de classe. Puis, il étudia avec plus d'attention son emploi du temps. Il avait une heure de libre tous les mardis et jeudis après le déjeuner. Ce serait parfait pour ses cours avec Feitan, ça. À supposer, bien sûr, que l'autre garçon le veuille. Ce type était bizarre. Kurapika espérait qu'il allait collaborer un minimum quand même. Sinon, tant pis. Il n'allait clairement pas perdre son temps avec lui.

Quand il n'eut plus rien à faire pour l'école, il alla s'installer sur son lit. Il prit son pc portable sur ses genoux et regarda une série Netflix. La soirée passa tranquillement. À l'heure du repas, il fit réchauffer la nourriture que Mito leur avait gentiment préparée et la mangea avec Gon. Ce dernier n'arrêtait pas de lui parler de Kirua, mais ce n'était pas dérangeant. Kurapika était soulagé de le revoir sourire comme ça. Cet été, Gon avait vraiment été touché par leur éloignement. Ce fut donc sans surprise qu'il retourna rapidement lui parler après le dîner. Kurapika, lui, rangea la cuisine avant d'aller, à nouveau, dans sa chambre. Il reprit sa série Netflix jusqu'au moment où il fut l'heure d'aller dormir. Il se brossa les dents puis, il fit un détour jusqu'à la chambre de Gon. Il dut alors le menacer de couper le wifi pour qu'il aille enfin se coucher. Kurapika lui souhaita ensuite une bonne nuit, avant d'aller se glisser dans son propre lit.

Il s'endormit assez vite et le lendemain, il était déjà rodé. Comme la veille, il se rendit à l'école avec Gon. Ils se séparèrent un peu avant l'entrée du collège. Kurapika se dirigea vers sa propre cour où repéra Senritsu au bout de quelques minutes. Il marcha vers elle et lui sourit.

« Tu as l'air fatiguée, fit-il alors remarquer.

—Je recommence mes cours de violon ce soir, je me suis entraînée toute la soirée et j'ai revu mon solfège. Je me sentais rouillée. »

Kurapika rigola doucement. Senritsu pouvait dire ce qu'elle voulait, il connaissait son niveau. Il était persuadé qu'elle était tout sauf rouillée. Ils discutèrent alors un peu de musique, jusqu'à ce que la sonnerie retentisse, signifiant le début des cours. Ils se dirigèrent en classe. Une fois assis sur sa chaise, Kurapika regarda les autres élèves s'installer. Feitan entra dans les derniers. Leurs regards s'accrochèrent un instant, avant que le plus petit ne s'asseye à la même place que la veille. Kurapika se força alors à se concentrer sur le tableau.

Lorsque la pause déjeuner arriva, il vit que Feitan s'éloignait sans les attendre. Visiblement, il préférait manger seul de son côté. Quand même... Kurapika se sentait un peu perdu. Il ne savait pas comment réagir face à ce genre d'attitude. Surtout qu'il avait besoin de lui parler de leurs cours particuliers. Après avoir terminé son repas, il prit alors son courage à deux mains et se dirigea vers la table où Feitan mangeait seul. Ce dernier leva un regard ennuyé vers lui.

« On a une heure de pause après le repas, commença Kurapika. Je propose qu'on se retrouve dans notre salle de classe. On pourrait mettre en place un programme de travail. Et si t'as déjà des questions, tu pourras me les poser aussi. Ça te va ? »

Comme à son habitude, Feitan ne lui répondit pas tout de suite. Mais, au bout d'un moment, il finit par hausser les épaules.

« Très bien, dit Kurapika qui sentait qu'il n'en tirerait rien de plus. Je t'attends donc dans notre classe après la pause. »

Sur ces mots, il s'éloigna et partit rejoindre Senritsu. Lorsque le temps de midi fut passé, son amie s'en alla en salle d'étude tandis que Kurapika prit la direction de la salle de classe. Il espérait que Feitan viendrait. S'il ne se montrait pas, Kurapika n'hésiterait pas à aller parler au proviseur pour mettre fin à toute cette histoire. Mais Kurapika fut agréablement surpris quand il vit que Feitan était déjà là, en ouvrant la porte. Il s'était réinstallé à sa place habituelle. Kurapika afficha alors un léger sourire et s'approcha. Il déplaça une chaise et s'assit en face de lui.

« Bien, dit-il tout en sortant ses affaires de son sac, vu notre horaire, je propose qu'on se voie tous les mardis et jeudis après le déjeuner. On peut aussi faire une heure le lundi matin, vu qu'on commence plus tard et le vendredi après-midi vu qu'on finit tôt. Tu devrais peut-être le noter, non ? »

Feitan lui lança son regard habituel, sans bouger le moins du monde. Kurapika soupira.

« Très bien, comme tu veux, souffla-t-il. Bon. Parlons des cours qu'on a eus hier et ce matin. Tu as des questions. »

Feitan secoua la tête.

« Tu veux qu'on commence notre devoir d'anglais ? »

Feitan haussa vaguement les épaules, comme s'il ne se sentait pas concerné. Cette attitude exaspérait de plus en plus Kurapika.

« Tu peux parler, tu sais ! siffla-t-il de mauvaise humeur. Ça ne va pas te tuer. »

Feitan marmonna quelque chose que Kurapika ne comprit pas.

« Quoi ? »

Feitan souffla quelques mots à voix basse. Kurapika crut entendre « pas bon accent » au milieu de tous ces mots avalés. Kurapika se figea alors. Oh... Il n'avait pas du tout pensé à ça. Il croyait que Feitan ne voulait pas coopérer, mais en fait... Kurapika avait complètement sous-estimé la barrière de la langue. Il culpabilisa pour son attitude.

« Ce n'est pas grave, le rassura-t-il aussitôt. Je veux dire... Si j'essayais de parler chinois, ce serait catastrophique, c'est clair ! »

Pour la première fois, Feitan lui lança un regard amusé. Kurapika se détendit. Il l'aimait bien, ce regard-là. Il était bien plus agréable que sa froideur habituelle.

« Et tu comprends ce que je dis ? Désolé, je n'y avais pas du tout réfléchi. »

Feitan l'observa un instant, avant de lui répondre.

« Tu parles vite.

—Ah... euh... pardon... »

D'accord, donc c'était pour ça que Feitan mettait parfois du temps avant de répondre. Kurapika se sentait complètement stupide pour le coup. Il se mit mentalement une bonne gifle.

« Si je vais trop vite, reprit-il d'un ton plus lent, interromps-moi, d'accord ?

—Ok.

—Et pareil s'il y a un mot que tu ne comprends pas. »

Feitan hocha la tête.

« Et pour ton accent, reprit Kurapika, tu n'as pas à t'en faire. Au plus tu parleras, au mieux ce sera ! On a qu'à commencer par ça. »

Kurapika referma son cahier. D'un coup, il se sentait beaucoup plus motivé.

« Faisons une simple conversation », lui proposa-t-il avec un sourire.

Feitan ne semblait pas convaincu. Kurapika tenta de se montrer rassurant.

« Reprenons les bases. Et essaye de me répondre par des phrases complètes, ok ? »

Feitan ne lui répondit pas, mais il finit par hocher la tête. Kurapika commença alors.

« Bonjour, je m'appelle Kurapika et toi ?

—Je m'appelle Feitan, répondit ce dernier de sa voix douce.

—Enchanté, Feitan. Quel âge as-tu ?

—J'ai... dix-sept ans. »

Kurapika acquiesça et continua à lui poser les questions de base, essayant de le mettre à l'aise. Feitan avait, certes, un accent, mais Kurapika comprenait ce qu'il disait. Même si ses phrases étaient simples, c'était l'essentiel. En plus, ça lui permettait d'entendre plus longtemps sa voix apaisante. C'était vraiment dommage que Feitan reste aussi souvent silencieux.

« Tu te débrouilles bien, l'encouragea-t-il alors.

—C'est facile, souffla Feitan. C'est après que... que j'aime moins.

—Ne t'en fais pas, on ira en douceur. De toute façon, les professeurs sont au courant de ta situation, ils ne vont pas t'ennuyer directement avec l'oral. »

Feitan acquiesça. Kurapika jeta un coup d'oeil à sa montre. L'heure filait.

« Bon, reprit-il. Si tu veux, je peux t'aider à faire tes devoirs. Demain, on finit tôt, on pourra travailler dessus. Je ne sais pas où tu habites, mais on peut aussi se voir les week-ends si tu as besoin. »

Feitan ne répondit pas et cette fois-ci, Kurapika sentait que ce n'est pas un problème de compréhension. Il semblait s'être renfermé. Kurapika préféra ne pas insister et commença à lui expliquer le devoir qu'ils devaient faire pour le cours d'anglais. Maintenant que Kurapika avait compris l'attitude de Feitan, il se sentait bien plus investi pour l'aider. L'ambiance avait changé, elle aussi. Feitan paraissait moins froid. Il l'écoutait même avec plus d'attention. Finalement, Kurapika se dit que ces cours de rattrapage se passèrent peut-être bien...


Les jours s'écoulèrent alors tranquillement. Kurapika réussit à mettre en place une routine qui lui plaisait. Les cours avec Feitan se déroulaient bien. Ce dernier n'était toujours pas très bavard, mais il essayait de faire des efforts. Seulement, en dehors de ces leçons, Feitan ne passait jamais de temps avec lui. Il préférait rester à l'écart. Il lisait son livre, sans se mêler à qui que ce soit. Personne n'osait, d'ailleurs, réellement l'approcher. Il fallait dire que Feitan émettait des ondes étranges. Plus vraiment glaciales, mais un peu inquiétantes malgré tout.

Kurapika avait toujours un peu de mal à le comprendre. Il essayait, mais Feitan lui semblait appartenir à un tout autre monde que lui. Pourtant, lorsqu'ils se retrouvaient en classe pour leurs leçons communes, Kurapika avait l'impression d'être un peu plus proche de lui. Feitan lui semblait alors plus accessible. Et Kurapika devait bien reconnaître qu'il ne détestait pas ces moments-là.

Mais rapidement, le rythme scolaire s'intensifia. Kurapika sentit que les cours en semaine ne suffiraient bientôt plus. Le mois de septembre touchait maintenant à sa fin. Le vent se mettait à souffler plus fort contre les vitres de la salle de classe. Feitan semblait absorbé par le mouvement des arbres. On était vendredi et même Kurapika avait du mal à rester concentré.

« On peut s'arrêter là, finit-il par soupirer. C'était pas mal. Tu t'améliores. »

Il lui sourit. Feitan tourna son regard vers lui et lui rendit son sourire. Kurapika trouvait ça tellement dommage qu'il ne puisse pas être comme ça plus souvent.

« Malheureusement, reprit-il, les profs commencent à nous demander de plus en plus de devoirs. Je vais travailler toute la journée de demain. Si tu veux, tu peux venir. On étudiera ensemble.

—... Chez toi ? Demain ?

—Oui. Ça pourrait être bien. Tiens... »

Kurapika lui écrivit son adresse sur un bout de papier et le lui tendit. Feitan l'observa un moment. Puis, il afficha une légère moue, visiblement peu emballé par l'idée. Sans lui répondre, il commença à ranger ses affaires.

« Je verrai, finit-il par murmurer une fois qu'il eut fini. À plus tard, Kurapika. »

Il mit son sac sur ses épaules et quitta la salle. Kurapika retint un soupir. Oui, clairement, ça allait mieux entre eux, mais la communication restait bien compliquée. Kurapika secoua la tête, avant de rassembler ses affaires à son tour. Il n'allait pas se prendre la tête. Il avait bien trop à faire pour ça. Il rentra alors chez lui, sans ne plus y penser...

Le lendemain, Kurapika se mit donc au travail, tout en se demandant si Feitan viendrait. Il attendait sa venue, malgré lui. Mais les heures défilaient et il ne se montra pas. Kurapika ne savait vraiment plus quoi penser de lui. Mais ce n'était pas son problème, en soi. Il faisait de son mieux pour l'aider, mais Feitan devait faire sa propre part. Au bout d'un moment, il parvint à ne plus penser du tout au jeune homme et se concentra uniquement sur ses études.

Lorsque l'après-midi toucha à sa fin, Gon débarqua en trombe dans sa chambre.

« Kurapika, je ne te dérange pas ? »

Il le regardait avec un tel air innocent qu'il était difficile de dire oui. Kurapika secoua alors la tête.

« Non, dis-moi.

—Kirua et moi, on veut aller à la salle d'arcade. Mais tante Mito ne veut pas qu'on y aille tout seuls. Tu veux bien nous accompagner ? »

Kurapika sourit, amusé. Ah, ça, c'était un grand classique. Il ne comptait plus le nombre de fois où il s'y était rendu pour veiller sur eux. Il jeta un regard à l'horloge. Il était plus de seize heures. Il avait travaillé toute la journée, il pouvait bien faire une pause. Il acquiesça alors, pour le plus grand plaisir de Gon.

« Merci, merci, merci, Kurapika ! Je vais prévenir Kirua ! »

Kurapika referma ses livres et quitta la chambre. Ça ne le dérangeait pas de devoir les surveiller. Il savait bien que ces deux-là étaient capables de mettre le boxon en moins d'un quart d'heure. Et puis, s'il pouvait soulager Mito, il le ferait avec plaisir. Ça lui changerait les idées, en plus. Il en avait bien besoin. Il sentait déjà que la tension s'accumulait dans son dos, ce n'était pas bon.

Quelques instants plus tard, Gon et lui se mirent en route. Heureusement, la salle d'arcade n'était pas très loin, ils pouvaient s'y rendre à pied. Après une petite vingtaine de minutes, ils aperçurent le bâtiment. Gon avait hâte de pouvoir s'amuser avec Kirua et Kurapika. Mais alors qu'ils s'approchaient de l'entrée, Kurapika remarqua des mouvements suspects dans l'allée en contre bas. Un garçon en particulier attira son attention.

« Je te laisse entrer en premier, Gon, marmonna-t-il alors. Je dois vérifier quelque chose.

—Ok ! »

Désireux de retrouver Kirua et de ne pas s'imposer, Gon pénétra dans la salle de jeux. Kurapika, lui, s'éloigna un peu. Ses yeux observaient fixement l'échange qui se déroulait devant lui et surtout ce fameux garçon. Il ne s'était pas trompé. C'était bien Feitan. Et il traînait avec des types vraiment louches. Ceux-là, Kurapika les connaissait bien, malheureusement. Ils avaient une petite renommée dans le coin. C'étaient des hommes dangereux. Ils adoraient mettre le bordel partout où ils passaient. Ils faisaient même régner la terreur dans certains quartiers. Ce n'était clairement pas de bonnes personnes. Alors pourquoi Feitan trainait-il avec eux ? Kurapika sentit son estomac se tordre. Ils n'embêtaient pas Feitan. Clairement, ils parlaient entre eux sans aucune tension. Donc, Feitan s'était intégré sans problème à ce groupe. Mais pourquoi ? Alors qu'il y avait tant de gens bien à l'école qui serait tout à fait disposer à lui parler, lui préférait traîner avec ce genre de types ? Kurapika était mal à l'aise. Le groupe dégageait de mauvaises ondes. Et Feitan... Feitan semblait bien s'entendre avec eux...

Au bout d'un moment, Kurapika préféra détourner le regard. Ça ne valait pas la peine de continuer à les observer. Il alla alors rejoindre Gon à l'intérieur. Et, sans surprise, il retrouva Kirua également. Il regarda les deux garçons jouer aux différentes arcades, tout en tentant de rester calme. Mais c'était compliqué. S'il y avait bien une chose qu'il ne pouvait pas supporter, c'était celle-là... Les sales types qui faisaient du mal autour deux. Il commençait à se sentir de plus en plus en colère. Kirua et Gon durent le sentir parce que tous les deux préférèrent lui donner de l'espace plutôt que de lui proposer de se joindre à eux. Kurapika leur en était reconnaissant.

Il ne profita absolument pas de sa soirée. Trop de mauvais souvenirs lui revenaient en tête. Il pensait à ses parents, à la façon dont ils étaient morts. Il ruminait tout ce qu'il savait sur ces sales types avec qui Feitan était. C'étaient des voleurs qui pouvaient se montrer violents. Kurapika avait juste envie d'aller leur mettre son poing dans la figure ! Pourtant, il resta dans la salle de jeux. Il se força à regarder Gon et Kirua. Et, lentement, il réussit un peu à se calmer. Sur la fin, il parvint même à les rejoindre pour faire une partie de courses de voiture. Il n'était pas très doué, mais, au moins, ça le détendait.

Seulement, lorsqu'il finit par ressortir de la salle d'arcade, son regard se tourna aussitôt vers l'allée. Le groupe n'était plus là. Tant mieux. Malgré tout, la vue de cette ruelle déserte fut suffisante pour raviver sa colère. Elle s'emparait de tout son corps. Il serra les poings. Non. Il ne pouvait plus permettre à cette émotion de prendre autant le contrôle sur lui. Il s'éloigna alors en compagnie de Kirua et Gon. Et dès qu'il fut rentré, il s'affala sur son lit. Il ne se sentait vraiment pas bien. Lorsqu'il ferma les yeux, il revit le corps de ses parents. C'était ridicule. Il ne devait pas se mettre dans un tel état. Ces types n'avaient rien à voir avec ce qui leur était arrivé. Pourtant... pourtant, ça lui rappelait quand même toutes ces horreurs... Kurapika secoua la tête. Il fit de son mieux pour refouler tous ses souvenirs. Il voulait profiter du reste de son week-end sans y penser. Et il ferait tout pour y arriver.

Grâce à son mental d'acier, Kurapika réussit à passer un bon dimanche. Mais le lundi matin, alors qu'il partait plus tôt au lycée pour son cours particulier, il devint vite énervé. Rien que le fait de savoir qu'il allait bientôt revoir Feitan était suffisant pour que la colère bouillonne à nouveau en lui. Feitan eut, en plus, le malheur d'arriver en retard. C'était tout ce dont Kurapika avait besoin pour exploser.

« C'est maintenant que tu arrives ?! Ça fait dix minutes que je t'attends !

—Le bus avait du retard, répondit Feitan de sa voix douce.

—Ben tiens, elle est facile, celle-là ! Tu crois que ça m'amuse de poireauter comme ça ? Je n'ai pas que ça à faire ! »

Les yeux de Feitan le fixèrent de manière glaciale. Mais Kurapika refusa de se laisser intimider. Il était vraiment en colère.

« Assieds-toi, maintenant, qu'on puisse enfin commencer ! »

Feitan se laissa tomber sur la chaise qui lui faisait face. L'ambiance était clairement glaciale. Kurapika jeta son manuel d'anglais sur la table et Feitan tiqua.

« Si tu veux pas, je pars, siffla-t-il.

—Non, mais si tu n'es pas motivé pour apprendre, ne me fais pas perdre mon temps ! répliqua Kurapika. C'est comme ce week-end ! Tu sais au moins que je t'ai attendu ?

—J'ai pas dit que je venais. J'étais occupé.

—Ah oui, à quoi ? À trainer avec de sales types ?! »

Feitan l'observa sans qu'aucune émotion ne traverse ses yeux.

« Mes affaires, murmura-t-il au bout d'un moment. Pas les tiennes.

—Si, ça me regarde. Parce que je ne tiens pas à fréquenter un criminel. Tu sais ce qu'ils font au moins ? Ce n'est pas pour rire ! Ils blessent des gens ! »

Feitan haussa les épaules, visiblement peu concerné. Kurapika n'en croyait pas ses yeux.

« Comment peux-tu être aussi indifférent ?! Le malheur, la souffrance des autres ne te touche pas ?! »

Kurapika se sentait hors de lui. Comment pouvait-on agir comme ça ? Comment pouvait-on... cambrioler une maison et... et tuer tous ses occupants juste... juste comme ça ?! C'était grave... Ce n'était pas un jeu... C'était...

« ... C'est normal, répondit Feitan. Une habitude.

—Une habitude ? Comment ça peut devenir une habitude ? »

Feitan haussa à nouveau les épaules. Il paraissait très détendu, comme si ça ne l'atteignait pas.

« Mon quartier en Chine. C'était comme ça. Mon père a été tué par un gang. »

Sa voix n'avait aucune émotion. Mais ses mots suffirent pour couper Kurapika dans son élan. Il cligna des yeux, surpris. Jamais il n'aurait pu imaginer ça. C'était juste... atroce...

« Je suis désolé », souffla-t-il.

Il hésita quelques secondes, avant de reprendre.

« C'est pour ça que vous avez quitté la Chine ? Enfin, tu n'es pas obligé de me le dire si c'est indiscret, bien sûr ! »

Feitan ne répondit pas tout de suite. Kurapika se rendit compte qu'il avait, de nouveau, parlé trop vite.

« Oui, finit-il par dire. Ma mère voulait. Pour la sécurité. Et elle a de la famille ici. »

Feitan semblait complètement détaché de tout ça, mais Kurapika se demandait si c'était vraiment vrai. Il se sentait mal. Il s'était emballé sans rien connaître du passé de Feitan. En y pensant, il se disait que ça devait déjà être dur d'être obligé de quitter son pays, mais si en plus c'était dans de telles circonstances...

« Mais pourquoi tu traînes avec eux alors ? Je ne comprends pas.

—Certains parlent chinois, répondit Feitan comme si ça expliquait tout. Et ils connaissent bien la ville. »

Kurapika l'observa un moment. Il se rendait bien compte qu'il ne savait rien sur Feitan. Mais quelque chose lui donnait envie de lui tendre la main. Même si Feitan dégageait lui aussi de mauvaises ondes, Kurapika voulait croire qu'il n'était pas comme ces types. Qu'il pouvait encore rester sur le bon chemin. Et, sans trop savoir pourquoi, Kurapika voulait l'y aider.

« Moi aussi, je connais bien la ville, dit-il alors. Je pourrais te la montrer si tu veux. »

D'accord, Kurapika se doutait bien que ce n'était pas ce que cherchait Feitan. Sans doute que ce dernier voulait surtout connaître les bons plans pour des délits. Mais Kurapika se disait qu'il pourrait peut-être lui montrer autre chose. Voyant que Feitan ne lui répondait pas, il reprit.

« Qu'est-ce que tu aimes faire ? »

Feitan réfléchit un instant.

« Jouer.

—D'accord, sourit Kurapika. Alors je te propose quelque chose. Si tu as au minimum un B à l'interrogation d'anglais de mercredi, je t'emmène à la salle d'arcade samedi prochain et on fera tous les jeux que tu voudras. »

Les yeux de Feitan se mirent à pétiller de malice. Kurapika sentit son cœur chavirer un instant face à cette vision. Mais il reprit bien vite le contrôle sur ses émotions.

« Ok. »

Ils avaient un deal. Pour la première fois depuis qu'il l'avait rencontré, Kurapika sentait qu'ils étaient sur la même longueur d'ondes. Il ne supportait toujours pas l'idée que Feitan fréquente de telles personnes. Mais il se disait que s'il lui donnait une bonne alternative, alors peut-être que... peut-être que Feitan ferait les bons choix.

Sur cette pensée, Kurapika commença le cours. Feitan l'écouta. Il semblait même bien plus attentif que les dernières fois, posant enfin plusieurs questions. Kurapika sourit intérieurement. Visiblement, il avait trouvé le moyen d'avoir pleinement l'attention de Feitan. Et il ne comptait pas la perdre de sitôt...


Et voilà, merci de m'avoir lue ! À bientôt pour le chapitre 2 !