Notes: Bonjour, bonsoir! Voici un nouveau chapitre, durement écrit, mais il est là et je vous souhaite une bonne lecture.


Vingt-troisième histoire: Démon de feu

Environ un an plus tôt. En plein Océan Pacifique, sur une petite ile perdue, pratiquement inconnue de tous, un rocher incandescent que l'on avait nommé Death Queen Island.

Débarquant sur une berge presque calcinée, alors que le sable était régulièrement baignée des vagues, il constatait qu'il venait d'arriver dans ce que l'on pouvait qualifier l'enfer sur terre. Un endroit idéal, en effet, comme repaire des Chevaliers Noirs. Un de plus dans le monde. Quand bien même isolé de tout et aux conditions climatiques extrêmes. Mais il n'allait pas s'en plaindre. Ce groupe avait été rejeté par tous les dieux, par toutes les sociétés.

Normalement, l'ile avait du être dégagée de ses habitants précédents, et ses alliés – si le terme pouvait être approprié – avaient fait le ménage en tuant tout être vivant qui se trouvait sur leur route. Vu la cruauté d'Andromède Noir et la fougue impatiente du Pégase Noir, et sous les directives du Dragon, cela aurait du être vite expédié. Son intervention à lui, le Phénix Noir, n'avait pas lieu d'être. Et il avait tout à fait raison: il ne ressentait aucun cosmos dans les environs.

Les autres avaient bien bossé, on dirait. Pourtant, ils ne semblaient plus être sur l'ile. Tout était littéralement vide de vie. Ils n'auraient pas oublié de faire disparaître l'armure de Bronze du Phénix, par hasard? S'enfuir d'ici avant en laissant cette chance à ces incapables protecteurs d'Athéna d'avoir un nouveau pantin à ses côtés était une erreur des plus impardonnables!

Il accéléra ses pas, suivant ce qui ressemblait à un sentier qui montait vers le cratère du volcan qui dominait le site.

Quelque chose n'allait pas, d'instinct il s'en doutait, sans pouvoir le détecter pour autant.

Au croisement de deux routes, dont l'une menait vers le volcan, il buta sur ce qu'il pensait être un morceau de roche calcinée, probablement projeté dans une éruption. Pourtant, malgré la chaleur insupportable de l'atmosphère, en se baissant pour le saisir, il était froid. En l'observant de plus près, il comprit ce qu'il venait de ramasser: un fragment d'une armure noire, celle du Cygne. Dans son incompréhension, un peu de chance venait à lui. Le Cygne Noir n'était pas le plus féroce de l'organisation, mais le plus observateur. Et l'effigie d'oiseau sur le casque avait l'avantage d'enregistrer les événements qui s'étaient produits pendant quelques minutes. Un peu comme une petite caméra, mais à défaut de composants électroniques, elle marchait avec du cosmos ténébreux.

Oui, les Chevaliers Noirs étaient des escrocs, des criminels, mais ils savaient se débrouiller à leur manière.

Ainsi, le Phénix Noir se concentra sur ce petit objet pour deviner ce qui s'était passé. La stupéfaction le prit au cœur en découvrant la scène d'horreur que les petits yeux rouges de la tête de cygne lui projetaient. Trois de ses alliés, donc l'ancien porteur de ce casque en forme d'oiseau balayés, soufflés par un feu ardent avec une rapidité inconcevable. Quelle force effroyable! Au milieu des hurlements d'agonie, un cri retentissait: la voix de l'homme qui avait lancé l'attaque, qui avait scandé la technique dévastatrice du Hoo Yoku Ten Shoo, celle du chevalier de Bronze, et similaire à la sienne, Chevalier Noir.

Malgré la canicule, des frissons parcoururent son dos. Il craignait que la mission fut un échec, mais il devait s'en rendre compte de ses propres yeux.

Il en avait assez vu de ce que rapportait la tête de cygne, et l'écrasa violemment de son pied. Même dans une telle situation, il était nécessaire de détruire les preuves des derniers événements et même des existences de Pégase, Andromède et Cygnus Noirs.

À présent, parcourir ce rocher infernal. Il reprit sa route vers le cratère et découvrit un sculpture qui tombait en ruines, sur laquelle devait reposer jadis l'urne de l'armure de Bronze du Phénix. Qui n'y était plus. Par contre, une ombre gisait au sol. En s'en approchant, il découvrit le Dragon Noir sans vie, le corps tuméfié de coups à priori d'une intensité inouïe. Tous les chevaliers des ténèbres avaient été massacrés sans la moindre pitié par un apprenti d'Athéna. Qui avait réussi à quitter cet enfer par ses propres moyens, en plus.

Si même les nouveaux chevaliers de cette déesse devenaient toujours plus forts au fil du temps, jamais leur organisation prendrait le contrôle du monde à force...

Le sol se mit à trembler. Le volcan allait entrer dans une éruption importante, on aurait dit. Un cri retentit.

Il n'était vraiment pas seul sur l'ile, alors? Il ne ressentait aucun cosmos, mais rien ne disait qu'un humain des plus communs pouvait arriver à survivre sur ce caillou incandescent... Si les grondements du volcan pouvaient arrêter d'être assourdissants, il pourrait savoir d'où provenait cette voix. Mais la nature n'écoutait pas le Phénix Noir et du cratère jaillit une colonne de lave qui retombait aussi rapidement sur chaque flanc de la montagne, proche de lui, et du sentier qu'il avait emprunté pour arriver jusqu'ici.

Il dut se réfugier dans une de ces cavités formées par l'activité sismique de l'ile, à l'abri, et il allait devoir attendre. Pendant combien de temps, il l'ignorait, mais de là, il pouvait respirer relativement bien, et il était assez protégé des fumées toxiques. C'était bien le moment pour se retrouver prisonnier et enseveli par une éruption volcanique, en effet. Cependant, la chaleur ambiante de l'ile envahissait petit à petit son refuge et il se sentait tourner de l'œil. Il semblait que sa vie allait se terminer comme ça, bêtement, après une stupide mission qui s'était soldée en un échec cuisant. Son prétendu avenir prometteur dans l'organisation en tant que Phénix Noir... tu parles... Et l'ironie voulait qu'il meure à l'endroit même où son équivalent de Bronze avait obtenu son armure...

Au loin, il entendait des oiseaux voler dans le ciel. Des corbeaux, à l'écoute de leurs cris.

Comment de tels animaux pouvaient arriver jusqu'à Death Queen Island? Même des rapaces charognards n'oseraient s'aventurer ici, aussi affamés fussent-ils. Il devait halluciner à cause des gaz toxiques qui émanaient encore de l'éruption. Et maintenant, il entendait des voix d'hommes. Et ressentait deux cosmos dont un assez impressionnant.

Se faisant le plus discret possible, il sortit de sa cachette, ignorant que la roche brulait anormalement les parties de ses mains mises à nu. Il aperçut à la lumière de la lune une aura dorée et des oiseaux volant à basse altitude, aussi sombres que des Chevaliers Noirs. Ce devait être des corbeaux, en effet. À nouveau les voix s'élevèrent et il retint quelques bribes de la conversation:

« Jamian, bouge tes fesses et tes piafs! On a encore le jeune Phénix à rapporter au Sanctuaire... T'as les deux rescapés?

-Oui, Seigneur Death Mask. Mes corbeaux vont les escorter.

-Allez, on se casse de cette fournaise, on dirait que tout le monde a crevé par ici. »

L'occasion avait été trop belle de tomber sur deux chevaliers d'Athéna, mais ils étaient repartis trop vite. Il fut pris d'une mauvaise quinte de toux qui s'amplifiait anormalement. Il cracha du sang.

Merde! La faute à cette éruption volcanique, à tous les coups!

Et aucun moyen de repartir d'ici. Il s'en rendit compte en revenant non sans difficulté sur la berge où la barque de fortune qu'il avait prise pour aborder l'ile depuis le cargo de l'organisation avait disparu.

Le Phénix Noir, un des éléments les plus redoutables, un des plus violents, réduit à l'état de déchet abandonné sur un caillou volcanique et en train de mourir à petits feux, intoxiqué par les rejets de gaz et de cendres qu'il avait inhalés. Magnifiquement ridicule, oui...

Un vent froid se leva d'un coup, tout près de là où il s'était assis pour réfléchir à comment en finir avec tout cela, peu importait la méthode. Et une ombre s'imposa sur sa droite, tandis qu'une voix au timbre inhumain s'adressa à lui:

« Peut-être n'es-tu pas fait pour servir des hommes, Phénix Noir.

-Qui... qui êtes-vous?

-Un être qui peut te rendre fort, bien plus qu'un criminel, et qui te permettrait de te venger de tous ceux qui ont pu t'abandonner.

-Vous ne savez rien de moi, rétorqua-t-il sur la défense.

-Non, mais je peux te créer un nouvel avenir, si tu me suis. Je sens ton potentiel en tant que chevalier noir, mais tu peux être encore plus puissant.

-... dites toujours... Il toussa violemment encore, recracha à nouveau du sang.

-Rejoins les Enfers et la cause du Seigneur Hadès en tant que Spectre. Ou bien mets toi au service de la Mort. Les crimes commis par les humains ne sont rien, face à la guerre qui les anéantira et qui mettra les ténèbres et la désolation sur cette planète condamnée.

Le discours de l'inconnu était à la fois étrange, irréel et quelque peu effrayant malgré tout.

-Qui êtes-vous?

La silhouette se matérialisa en un homme aux cheveux noirs, teint pâle tout comme ces curieux yeux gris et cette étoile sur le front.

-Thanatos, Dieu de la Mort, répondit-il avec un fin rictus sur ses lèvres. Connais-tu ton prénom, Phénix Noir, ou l'aurais-tu oublié?

Il était vrai que depuis qu'il avait rejoint l'organisation des Chevaliers Noirs, il ne répondait que par son titre de soldat, et beaucoup, de cette manière avaient oublié leur nom d'origine. Pas lui.

-Je m'appelle Kagaho. »

Merde, merde et merde!

Ces seuls jurons se répétaient encore et encore dans la tête d'Asterion, coincé, là, dans cette petite habitation à moitié détruite par un précédent combat entre un ou plusieurs Spectres et des chevaliers alliés. Les éclats de cosmos qui en subsistaient semblaient ceux de Moses et sa force brute, entre autres. Il priait leur déesse pour que ce colosse reste indestructible le plus longtemps possible et qu'il ne tombe pas comme d'autres de leurs amis argentés.

Le Chien de Chasse aussi espérait son propre salut, alors que tapi dans le noir le plus complet, sous la fenêtre brisée d'une maison, il attendait que l'ennemi s'en aille.

Il ne faisait pas preuve de lâcheté. Il avait juste été surpris par cette aura sombre et si imposante, qu'une analyse de l'intrus était nécessaire. Et surtout, il ne voulait pas revivre cette panique survenue à son retour d'Asgard, de ne pas être à la hauteur des autres et surtout de ne jurer que par sa lecture de l'esprit. Or, foncer comme un fou sur ce Kagaho était un pur suicide. S'il devait l'affronter, ce serait dans un combat entre deux hommes des deux camps, l'un en face de l'autre.

Cependant, il avait surpris les pensées du Spectre, mais ne savait que faire de ces informations. Ce grand brun hirsute aux cheveux et regard aussi noirs que son aura était un ancien Chevalier Noir, le Phénix, plus précisément. Et il a été recruté dans l'armée adversaire par le dieu de la Mort en personne.

Asterion réfléchit rapidement et se rappela de ses lointains cours théoriques sur le panthéon grec et notamment de l'entourage d'Hadès qui était accompagné de deux entités quasiment aussi puissantes que lui: la Mort et le Sommeil. Thanatos et Hypnos. Il se souvenait aussi de l'effroyable paralysie qu'il avait ressentie face à une de ces divinités en Asgard, cette impuissance, cette incapacité à attaquer alors que Hypnos restait là, sans bouger, sans même lever la main, juste par son aura. Pas même Kanon, ni même les Guerriers Divins n'avaient pu en venir à bout, et seule l'arrivée miraculeuse de Poséidon avait mis fin à cette bataille.

Cela voulait-il dire que le Kagaho était directement au service de Thanatos, avant même d'appartenir à l'armée d'Hadès, quand bien même – il prit le risque de jeter un œil par la fenêtre – portait-il un Surplis...?

Attends...

Il y aurait des Spectres qui obéiraient d'abord à l'un de ces dieux jumeaux et après au seigneur des Enfers?

Le chevalier d'Argent jurait encore pour lui même, impuissant face à ces questions sans réponse et face à son manque de réaction alors que l'ennemi semblait s'éloigner du hameau. Il se recula un peu pour appuyer son dos contre un pan de mur et respira, toujours perdu dans ces réflexions.

Avant de venir ici et constater les combats qui avaient eu lieu et détruit bon nombre d'habitations des civils, il avait trouvé Shaina dans une allée proche, dans laquelle flottait un parfum de rose.

Cette dernière, sans cacher son visage, lui avait raconté son affrontement contre un Spectre, son sauvetage par le chevalier des Poissons, et les dernières paroles des ennemis qu'ils avaient battus, comme quoi tout était condamné sur Terre. L'un d'eux, celui qu'Aphrodite avait vaincu lui aurait même avoué qu'il regrettait d'être venu au Sanctuaire, comme si les soldats de l'armée adverse craignaient aussi pour leur sort... Existerait-il quelque chose de plus cruel pour eux que la mort, car après tous, Hadès réveillerait leurs âmes pour déclencher le prochaine Guerre Sainte entre Athéna et lui, dans plusieurs siècles... A moins que...

Asterion se faisait probablement des idées sans fondement, pris dans ce tourbillon d'informations qu'il engrangeait depuis sa patrouille et sa surveillance de Kagaho. D'ailleurs...

En un réflexe plutôt digne d'un félin que du chien de chasse de sa constellation, il se plaqua dos contre un mur encore debout d'une maison, comme pour fondre dans les fondations et ne faire qu'un avec l'édifice, comme pour se faire oublier. Le Spectre s'était arrêté d'un coup, ce serait d'une stupidité incroyable de se faire repérer comme ça.

Il respira profondément, prenant soin de masquer sa présence et son cosmos de son mieux.

Pourquoi cet arrêt en pleine rue – la plus importante du hameau par ailleurs?

Le chevalier d'Argent du se tenir à la paroi de pierre, crispant ses ongles dessus, tant l'aura noire s'intensifia d'un coup et sans prévenir. Il était fait. Le combat semblait alors inévitable.

Pourtant Kagaho ne bougeait pas. Une certaine tension dégageait de son cosmos, comme de la crainte.

La curiosité se faisait trop grande, mais s'il pouvait recueillir d'autres informations, autant prendre le risque. Il se concentra, prenant soin de se faire oublier de l'ennemi et, fermant les yeux, tenta de pénétrer à nouveau son esprit...

Juste avant le début de la Guerre, Enfers d'Hadès.

Une falaise se brisait en mille morceaux, et des gravats, sortaient de légères flammes noires.

À des centaines de mètres de là, Kagaho observait son poing protégé d'une armure ténébreuse qui semblait lui convenir.

Au final, il avait eu raison de suivre le dieu Thanatos dans ce monde de désolation, au ciel rougeâtre et aux sentiers bleu gris et poussiéreux. À la surface, que ce fut sur Death Queen Island ou ailleurs dans le monde, il n'aurait pas eu cette liberté, ni la révélation de ces capacités.

Il était devenu le Benou, Spectre représentant l'étoile céleste de la Violence, sous les ordres du Juge Rhadamanthe du Wyvern.

Cet homme l'avait formé rapidement, intensément à ce rôle de soldat d'Hadès dans un entrainement rude, sans pitié et au cours duquel il avait tant de fois cru mourir pour de bon, quand bien même il n'avait pas peur d'y laisser la vie. Cependant, pour une fois, on l'avait considéré comme un humain, comme un combattant à part entière, pas un pion dont on se débarrasserait sans vergogne, peu importait sa force véritable.

Il pouvait dorénavant prendre sa revanche sur ceux qui l'avaient abandonné sur le caillou volcanique en plein océan, mais également il allait démontrer sa vraie force: pas celle du Phénix Noir, celle de Kagaho, désormais Spectre du Benou...

Les pensées flottèrent alors vers une autre scène. Un dialogue avec un homme d'une carrure imposante, le regard perçant sous des sourcils épais: Rhadamanthe en personne se trouvait en face Kagaho.

« … tu me déçois, déclara le Juge. Sache qu'aux Enfers, on ne choisit pas les missions à la carte. Et je t'offre cette chance de déployer ta force dans cette région nordique. Là où nous allons, nous pourrions trouver des alliés puissants auprès des Guerriers d'Asgard.

-Je le sais, Seigneur Rhadamanthe, fit Kagaho.

-Alors? La voix du Wyvern semblait tonner d'une colère contenue. Me désobéir revient à trahir notre Seigneur Hadès. Or, ce serait un gâchis de perdre un élément aussi puissant que toi. Je croyais t'avoir enseigné nos valeurs en tant que combattants!

-Seigneur Rhadamanthe, je vous remercie de tout ce que vous m'avez appris jusqu'à présent, et grâce à vous, grâce à Dame Pandore et à tous les Spectres, je suis honoré de servir cette cause. Cependant, j'ai une dette envers celui qui m'a donné cette chance. Je vais rejoindre l'unité dirigée par le dieu Thanatos qui prévoit l'invasion du Sanctuaire d'Athéna, peu importe l'issue de votre mission en Asgard.

-Pauvre imbécile. Tu cours droit à ta défaite, et sache que Thanatos ne te pardonnera jamais si tu en viens à perdre face à un chevalier. Il n'est pas aussi clément que notre dieu Hadès.

-Peu importe. La surface de la terre ne m'a rien apporté de bon. Je n'aurai aucun regret quoiqu'il arrive.

-Sylphide, Queen et maintenant toi. Vous n'êtes que des idiots qui gâchez votre honneur de Spectres. Fais comme bon te semble, si tu tiens à me désobéir et à mourir bêtement. Et je ne parle pas de tomber sous les poings des chevaliers. »

Kagaho avait déçu son supérieur dans les Enfers, mais il était déterminé à suivre Thanatos. Il était assez fort pour tenir le coup cette fois ci, peu importait son issue ou même les desseins cruels de la Mort... Contrairement à d'autres Spectres qui paraissaient partir au Sanctuaire sous la contrainte, il avait choisi lui même son chemin.

Asterion retint un souffle, ou plutôt un cri qui s'étouffait dans sa gorge.

Que ne venait-il pas d'apprendre à l'instant? Tous les Spectres qui s'étaient infiltrés dans le Sanctuaire étaient sous les ordres non pas d'Hadès, mais de Thanatos! De ce fait, la Mort en personne serait aussi sur les terres sacrées, là, maintenant, prête à frapper. Et par conséquent, Athéna et les autres chevaliers partis aux Enfers n'avaient que trop peu d'ennemis à affronter.

Le Chien de chasse avait besoin de plus de détails. Malgré son cœur qui battait, malgré toutes les révélations qu'il venait de lire dans l'esprit du Benou, sa filature de Kagaho n'était pas terminée. Il allait devoir rester discret encore et surtout ne jamais entamer de combat face à lui. Un bon nombre de ses alliés devait connaître ce qu'il savait. Autant des chevaliers de Bronze, d'Or que de ses amis argentés. C'était beaucoup trop important! Il ne devait surtout pas mourir.

Après avoir mis quelques secondes pour retrouver une respiration relativement normale, il jeta un œil à l'endroit où le Benou se tenait, juste avant de s'immiscer dans sa tête.

Il n'y était plus! Et son cosmos ne se faisait plus ressentir aux alentours.

Merde! Et re merde!

Le Spectre avait disparu, probablement en quête d'un adversaire. Son aura agressive aurait pu être encore présente dans les parages s'il tentait de se camoufler lui aussi. À coup sur, il avait disparu.

Dans sa frustration, le chevalier d'Argent trouva une aubaine: celle de partir de son côté à lui pour prévenir quelqu'un.

Un dernier regard avant de courir dans la direction opposée, en quête d'un chevalier...

Hôpital du Sanctuaire.

Marin gémit de douleur, tant la peau de son dos la brulait. Cependant, ce n'était pas aussi intense qu'au moment où elle croyait sa vie s'en aller, alors qu'elle rampait presque pour rejoindre ce bâtiment. Certes, c'était risqué de faire un détour dans sa patrouille pour essayer de soigner sa blessure, mais elle avait cette volonté de combattre encore, de prévenir ses alliés des dangers, et pour cela, elle avait besoin de se soigner un peu. Mais elle avait perdu conscience en sentant le cosmos d'un chevalier d'Or au même endroit. Comme soulagée de ne plus être seule dans l'obscurité.

Néanmoins, elle se réveilla à cause des picotements de la peau qui chauffait son corps, rendant les bandages qu'on lui avait posés inutiles. Elle était allongée sur le ventre dans un des lits et une vague à la fois apaisante et puissante soufflait sur son corps.

Instinctivement, elle porta sa main droite au visage et constata qu'il était à nu. Elle voulut se lever d'un coup mais cria sous la douleur.

« Calme-toi, Marin, je n'ai pas vu ton visage, déclara une voix grave et posée dans son dos.

-Aiolia..., murmura-t-elle. C'est toi?

-Oui. Évite de bouger, tu es gravement blessée.

-Pourquoi tu...?

-J'attends Syd qui ne devrait plus tarder. Il prendra le relais pour veiller sur Alice et toi. Je dois retrouver Orphée. Sauf si tu l'as croisé...

-Non. Je... Aiolia, tu dois être prudent. J'ai peut-être été suivie par celui qui m'a fait ça...

-Tu sais qui c'est?

-Un Spectre, très puissant. Kagaho je crois qu'il s'appelle... Mais bien plus que cela, il... Asterion... Il a lu son esprit et nous sommes tous en danger.

-Tu saurais me dire tout ce que tu as appris? »

Marin respirait de manière saccadée, à force de lutter contre cette brulure qui parcourait son dos, du milieu des omoplates jusqu'au creux de ses reins. Pourtant, elle essayait de se calmer, de se laisser porter par le cosmos apaisant que le Lion doré faisant briller sur sa peau. Aiolia, un grand chevalier, mais en qui elle avait confiance et qui était devenu un ami précieux, grâce à Seiya, son disciple, qui s'était attaché à cet ainé.

Le visage à demi enfoui dans l'oreiller, elle fermait les yeux et se remémora ces derniers instants, lorsqu'elle bondissait de falaises en cimes d'arbres pour constater les scènes de combats entre chevaliers et spectres, les victimes, mais aussi les alliés qui se remettaient sur pied, comme Shaina qui partait rejoindre une unité de Bronze ou Milo qui veillait sur ces chevaliers d'Argent obligés de bruler le cimetière après des affrontements terribles.

Tout proche du hameau, elle avait croisé Asterion, qui, d'habitude savait rester stoïque, surtout lorsqu'il détenait des informations importantes. Cependant, cette fois ci, il semblait réellement affolé. La première fois qu'elle le voyait ainsi, le chien de chasse qui était toujours sur de lui, un brin malicieux dans les moments de répit avec ses camarades argentés, quand il devinait des pensées secrètes. Avant le début de la Guerre, il s'était entrainé au combat de manière si acharnée, il avait demandé elle, le chevalier de l'Aigle, de le renforcer physiquement, pour être fin prêt, et elle l'avait aidé pendant des jours entiers. Ils se connaissaient bien et lui, il avait avoué qu'il n'avait ni l'envie ni l'audace de tenter de lire ses pensées à elle. Il croyait en elle, quoiqu'elle fit.

Ainsi, tous deux dissimulés sous un buisson aux abords du hameau, Asterion lui confia ce qu'il apprit de sa filature de Kagaho, de ce passé de Chevalier Noir, le Phénix plus précisément, de ce recrutement par le dieu Thanatos pour devenir Spectre et de ce choix de suivre la Mort ici même au Sanctuaire. Marin écouta et partagea alors les craintes de son ami, en ce qui concernait le danger que tous courraient actuellement. Elle fut également d'accord sur le fait que tous deux devaient prévenir le plus grand nombre de chevaliers possible, de répéter tout ce qui venait d'être dit à l'instant, et surtout d'en parler aux chevaliers d'Or et au Grand Pope.

Sur une promesse de tout faire pour rester en vie, elle le quitta pour partir de son côté, tandis qu'Asterion disparut dans une autre direction. Elle reprit sa course en rebroussant chemin, vers les sentiers qui menaient au cimetière, là où elle pourrait retrouver Milo et lui faire part de cette terrible nouvelle.

Son esprit était embrouillé par toutes les informations que le chien de chasse lui avait révélées. Comment pourrait-elle réagir, elle, Marin, jeune Japonaise, une humaine, un simple chevalier d'Argent, si elle se trouvait seule, nez à nez, en face d'une divinité telle que Thanatos? En Asgard, elle n'avait pu rencontrer Hypnos, alors qu'elle était cachée dans le Palais d'Odin avec des Guerriers Divins blessés. Même dans cette précédente mission, elle n'avait pas pu s'imaginer une telle expérience. Puisse Athéna, même depuis les Enfers, lui apporter assez de courage pour qu'elle rencontre un chevalier, peu importait le rang, afin de le prévenir... au moins un...

Pendant quelques minutes, elle avait repris sa course à travers les terres sacrées comme elle le faisait depuis toujours, tel un oiseau de proie rapide et discret qui restait à l'affut d'un éventuel prédateur. Probablement qu'elle avait du atteindre la zone des arènes d'entrainement, à ce moment là, elle eut un mauvais pressentiment, sans pour autant détecter un danger ou un cosmos hostile. Juste une intuition en elle qui lui disait de rester sur ses gardes. Le paysage de cette partie du Sanctuaire lui empêchait de se cacher dans les arbres, à l'abri du ciel étoilé et de se confondre avec les feuilles pour observer. Pratiquement que des édifices en pierre et des ruines des temps anciens que la Lune éclairait çà et là. Son ombre pouvait être repérée, mais elle était consciente de ce risque.

À quelques centaines de mètres de là, elle ressentit un cosmos qu'elle connaissait bien: celui d'un chevalier d'Argent, bien puissant, bien vivant. Marin était rassurée de savoir qu'il était là et qu'il surveillait cette partie du domaine. Malgré tout, il fallait qu'elle le prévienne des paroles d'Asterion.

Elle s'avança en sa direction, mais fut arrêtée par une silhouette noire, plus noire que les ombres des arbres dans les bois du Sanctuaire. Et cette aura qui ne lui inspirait rien de bon... Derrière son masque impassible, la jeune femme faisait tout pour que son visage le soit également. Le moindre geste du reste de son corps pourrait trahir une certaine nervosité, un signe que l'ennemi pourrait voir comme une faiblesse et une occasion de la battre.

L'être s'avança, sombre et silencieux. Sans le connaître, elle se doutait qu'il était le Spectre qu'avait croisé le chien de chasse, ce Kagaho.

Le risque était grand, relevant de l'inconscience, mais la femme chevalier n'avait pas le choix. Elle envoya un signal à son allié le plus proche. Seule, elle savait qu'elle ne serait pas de taille à l'anéantir pour de bon. En tant que chevalier de l'Aigle, elle était rapide, agile et douée en combat au corps à corps, mais son cosmos n'était pas aussi intense en comparaison à d'autres de ses camarades. Et même Shaina avait des techniques plus agressives. Chacun sa spécialité, et elle n'enviait personne. Elle aimait agir en solitaire pour le salut des autres. Tel un oiseau libre de s'envoler dans le ciel qui trouvait toujours une branche où se poser et un nid où se réfugier.

En attendant, il allait falloir se défendre face à cet adversaire. Mais Marin n'eut le temps de se mettre en garde qu'il avait disparu de son champ de vision. Si rapide! Elle ne put esquiver un coup de pied qui atteignit son épaule, l'envoyant au sol.

Aussi courageuse était-elle, il fallait se rendre à l'évidence et éviter de mourir bêtement. Kagaho n'avait pas ouvert la bouche pour se présenter. Il était là pour tuer et elle était sa cible. Hors de question de se soumettre à cette idée, elle irait l'entrainer dans sa course. Il devait probablement courir aussi vite qu'elle, autant l'emmener vers des chevaliers bien plus forts.

Marin se releva, ignorant cet hématome qui était apparu sur son bras et, fixant le Spectre de son visage métallique sans expression, se précipita vers lui, sans l'attaquer, passant à côté en courant du plus vite qu'elle le pouvait. Pourvu que son plan marche! Pourvu que...

Dans son dos, elle sentait ce cosmos ténébreux la rattraper, la suivre et... lui bruler tout le corps. L'Aigle avait trouvé un prédateur plus puissant qui l'avait pris comme cible. Elle tomba sur la terre battue, le souffle coupé, le dos brulant de flammes sombres.

La jeune femme ne se rappelait plus comment elle s'était réveillée, mais remercia Athéna où qu'elle fut, encore aux Enfers ou ailleurs, pour ce miracle d'avoir survécu. Elle souffrait, avait un mal fou à respirer normalement, et ses yeux ne retenaient plus ces larmes qui exprimaient sa douleur. Aussi insupportable qu'était sa condition actuelle, elle devait trouver un endroit où se réfugier, au moins pour se soigner. Une maison du hameau ou... l'hôpital devait être tout proche. S'il le fallait, elle tuerait de ses propres mains les Spectres sur sa route, sans utiliser son cosmos, mais elle avait encore une infime rage de vivre, d'aider à son niveau les autres chevaliers...

La lueur dorée sur le dos nu de la femme chevalier continuait de flotter, tandis qu'Aiolia écoutait le récit de Marin. Il ne le montrait pas, mais il était bouleversé par tout ce qu'il venait d'apprendre, sentant qu'au fil des mots, elle souffrait de devoir revivre cette courte rencontre avec le Spectre. Rien qu'en constatant la peau brulée, il ne pouvait que la croire. Mais bien plus que cela, cette histoire de Thanatos qui aurait mis les pieds dans leur Sanctuaire, sur les terres même d'Athéna l'inquiétait d'autant plus.

Pourtant, il ne pouvait pas laisser ni Marin, ni Alice seules, à la merci d'un ennemi cruel qui pourrait profiter de leur repos.

« Aiolia... tu devrais partir, murmurait l'Aigle. Il y a plus urgent que de rester ici...

-J'attends que Syd arrive. Il est sensé me retrouver ici.

-Non, pars et dis lui de venir avec toi. Je te remercie d'avoir apaisé mes douleurs, mais les griffes et les crocs du Lion doré seront plus efficaces au combat qu'à rester là, à faire les garde malades...

-Tu es sure?

-Je te le demande, Aiolia.

Le chevalier fit estomper son cosmos petit à petit et retira sa main au dessus du dos de Marin. Il la sentait frissonner, alors il rabattit le drap du lit sur elle.

-Prends le temps qu'il te faut pour te remettre, et surtout je t'interdis de revenir sur le champ de bataille par fierté ou quelqu'autre inconscience. Ce n'est pas une honte de se blesser au combat. Ce qu'il l'est, c'est de mourir bêtement.

-... toi non plus, ne meurs pas, Aiolia.

-J'allais oublier de te demander: qui est celui que tu avais tenté de prévenir, qui se trouve du côté des arènes?

-Algol, de Persée. »

Le Lion fit le tour du lit et, sans regarder le visage de la femme chevalier, il lui pressa le bras doucement, comme pour lui donner du courage, avant de quitter l'hôpital.

Une fois à l'extérieur, il observa le ciel dans lequel les constellations dansaient, avec d'autres étoiles plus sombres qui se mêlaient et qui s'éteignaient.

Les étoiles de la Lyre brillaient encore, tout comme celles du Sagittaire, de Pégase et de l'Aigle.

Orphée avait disparu mais il était bien vivant. Seiya et Aiolos, aux Enfers, semblaient se battre ardemment là bas et très certainement qu'ils ne tomberaient pas si facilement. Quant à Marin, même grièvement blessée, elle ne perdait pas courage.

À lui, désormais de sortir ses griffes et de bondir sur l'ennemi pour protéger ces êtres qui lui sont cher, pour défendre aussi ces terres où il était né et où il était devenu ce majestueux Lion au service d'Athéna, la déesse qu'il admirait depuis tout petit, cette grande dame qui le faisait rêver dans les contes que son grand frère lui lisait il y a quelques années auparavant.

Un cosmos vint à sa rencontre. Ce nouveau et précieux ami auquel il tenait également: Syd de Mizar, lui aussi en pleine forme.

« Aiolia, tout le monde est à l'abri, c'est bon. Quand bien même Zack et celui qui s'appelle Cassios soient blessés à cause d'un combat qu'on a du mener face à un Spectre...

-Merci à toi. Tu n'étais pas obligé d'en faire autant, malgré tout.

-Qu'ils soient d'Asgard, de ce Sanctuaire ou d'ailleurs, les civils sont des victimes innocentes qui n'ont pas à subir ces guerres entre divinités. Ils sont égaux sur ce point.

-Tu as raison. Puis-je te demander à nouveau une faveur?

-Bien sur. Je suis avec toi, dans cette guerre, sans distinction aucune.

Aiolia ne put s'empêcher un léger rictus, se rappelant, au cours de la convalescence de Syd, que ce dernier lui avait confié qu'il était issu d'une riche et noble famille du royaume d'Odin, et que par moments sa manière de parler était un peu solennelle. Rien de méchant, le Lion n'y était simplement pas habitué, lui qui jurait même devant Kanon ou – rarement mais cela s'était produit – devant Pépé Shion... Il s'était attaché également au Guerrier Divin et, lui non plus, en aucun cas, il le laisserait mourir.

-J'aimerais que tu surveilles cette zone autour de l'hôpital. À l'intérieur, il y a Alice, la fiancée d'un de mes amis, mais aussi Marin, chevalier d'Argent de l'Aigle qui est blessée.

-Et toi, où comptes-tu aller?

-Aux arènes, dans un premier temps, pour voir si un chevalier dont Marin m'a parlé est en vie, mais surtout retourner aux marches des Douze Maisons. Je dois à tout prix prévenir le Grand Pope et le plus grand nombre de chevaliers d'un danger bien plus grand que les nombreux Spectres contre qui on se bat.

-Que veux-tu dire...?

-Je me dois de te l'expliquer à toi aussi. Il se pourrait que Thanatos, le dieu de la Mort soit présent ici même, au Sanctuaire. Où? Sous quelle forme? Comment va-t-il agir? On n'en sait rien. Mais il faut rester prudent.

-Thanatos... Le frère de celui qui avait envahi le palais d'Odin et enfermé Dame Hilda dans un sommeil profond, d'après le récit du chevalier des Gémeaux...?

-Oui, sans aucun doute. Mais je ne veux pas que tu prennes de risques inutiles et...

Syd posa une main sur l'épaule de l'armure dorée d'Aiolia et le fixa de ses yeux chaleureux.

-Mon ami, je me charge de protéger ce lieu. Mais si tu as besoin de moi, je viendrai aussitôt... Après m'être assuré que les deux personnes qui se reposent soient hors de danger, bien sur. »

Le chevalier du Lion offrit un sourire franc et rassuré à Mizar avant de partir en courant. Bien sur qu'il était inquiet de cette situation de plus en plus incertaine, mais il avait confiance au Guerrier Divin.

Au cœur de la grande arène de combat du Sanctuaire, celle qui servait principalement pour les affrontements officiels et les adoubements des nouveaux chevaliers, de curieuses statues s'étaient érigées au beau milieu de la terre battue. Des sortes de sculptures de pierre d'êtres humains en armure et aux visages figés par la peur.

Un décor qui jurait avec l'esthétique antique et épurée du domaine d'Athéna qui n'avait que peu changé depuis la nuit des temps. Mais qui ne durerait pas, c'était certain. Si les protecteurs de la déesse en venaient à bout de l'armée d'Hadès, l'aire de combat retrouverait son aspect normal.

D'ailleurs pourquoi s'attarder? L'on comprendrait très bien qu'il manquerait des soldats dans le camp opposé d'une manière ou d'une autre.

En un coup de pied rapide, le jeune homme réduisit les cinq effigies en miettes. Telle était sa technique provenant de la légendaire gorgone Méduse, qui changeait en pierre tout être qui la regardait dans ses yeux. La tête de ce monstre mythologique était gravée sur le bouclier de l'armure de Persée et constituait la plus terrible attaque d'Algol.

Il faisait partie des chevaliers d'Argent, et depuis le début de cette nuit d'invasion de l'armée d'Hadès, il avait combattu un bon nombre de Spectres. Peu résistants, mais ils n'hésitaient pas à l'attaquer, probablement en pensant qu'un homme seul, éloigné de ses alliés était une proie facile. C'était vraiment mal connaître Algol.

Sans être prétentieux, il était conscient de sa force physique, de l'intensité de son cosmos et de cet avantage qu'était le bouclier à son bras gauche. Il était simplement fier de servir Athéna et d'avoir pu rencontrer des alliés... non des camarades, des amis même dans la caste argentée. Au cours de sa formation dans les montagnes du milieu de l'Europe, il s'était lié avec Asterion du fait que leurs régions d'entrainement étaient toutes proches. Ils étaient comme des frères d'infortune qui, arrivés ici, en Grèce, avaient trouvés d'autres qui partageaient leur situation et c'était de cette manière que les chevaliers d'Argent s'étaient soudés.

Cependant, même devant les débris des statues de Spectres, il ne montrerait pas son inquiétude à la disparition des cosmos de Misty, Dante ou d'autres qui avaient du tomber au combat. Il devait paraître fort et prêt à en découdre avec l'ennemi.

Et par la présente, ses sens se mirent en alerte, intrigués par des signaux venant jusqu'à lui. Un premier rappelant le cosmos de Marin, quand bien même elle n'était pas tout prêt. Un deuxième plus offensif, plus sombre dont il ne connaissait l'origine. Surement un ennemi qui approchait. Et puis un troisième qui annonçait sa venue imminente dans l'arène, lui faisant baisser sa garde et esquisser un sourire franc sur les lèvres.

« Content que tu sois vivant, Asterion.

-Je ne me faisais pas de souci pour toi, répliqua le Chien de Chasse. Cependant, reste vigilant. Un Spectre est en approche.

-Je l'ai ressenti. Et je... Qu'est-ce que c'était?

Algol avait aussi remarqué quelque chose d'anormal tout près d'ici, comme un camarade en grand danger.

-On devrait aller voir, suggéra-t-il.

-Si on s'en sort...

Asterion accompagna ses paroles d'un signe de tête pour désigner le nouvel arrivant: un Spectre à la silhouette d'un oiseau des ténèbres, comme un messager de la mort, qui s'approchait d'eux.

-Ce serait lui qui dégagerait ce cosmos aussi sombre...

-Oui, Algol. La voix du Chien de Chasse devint un chuchotement. Fais gaffe... Je l'ai traqué un bon moment avant de perdre sa trace jusqu'ici. Mais j'ai pu récolter quelques trucs en lisant son esprit. Kagaho du Benou, ancien chevalier noir du Phénix et directement à la solde de Thanatos le dieu de la Mort, même pas d'Hadès. Au combat, concrètement, je sais pas ce qu'il vaut, mais il n'a pas l'air faible du tout...

Le chevalier de Persée hocha la tête après avoir écouté son ami. Ils ne seraient pas trop de deux pour vaincre ce Spectre, d'autant que Asterion s'était grandement amélioré depuis l'état d'urgence avant le début de la guerre. L'idéal, le rêve serait de le changer en pierre, mais pas sur qu'il se laisserait gentiment prendre par surprise...

-Je retrouve celui qui me suivait depuis un moment, fit Kagaho, brisant les réflexions des chevaliers d'Argent.

-Comment tu..., réagit Asterion stupéfait.

-Tu avais beau dissimuler ton cosmos au maximum, j'ignorais ce que tu tramais, mais tu ne passais pas entièrement inaperçu. J'ai cru un moment que c'était la femme que j'ai laissé pour morte, avec qui tu parlais, qui était celle qui me traquait mais c'était toi, bel et bien vivant.

-Marin? Tu l'as...?

Algol se figea également en apprenant la nouvelle. Le Benou avait terrassé Marin. Peu importait les circonstances, une grande guerrière était tombée. Non... il n'y croyait pas. Les étoiles de l'Aigle brillaient toujours dans le ciel. Probablement était elle blessée, mais encore vivante quelque part à l'abri. Il devait reprendre courage et laissa ses pensées flotter jusque dans l'esprit d'Asterion pour le rassurer aussi. Leur priorité, à présent, était d'éliminer ce Spectre.

Ce dernier ne resta pas immobile et fondit sur les deux amis à une vitesse folle. En un réflexe, Algol se protégea derrière son bouclier, mais trop tard. Kagaho avait du éviter le maléfice de la Méduse et lui porta un coup sur le flanc droit. Une douleur s'insinua dans l'abdomen qui l'empêcha de crier sous la surprise.

Il était rapide...

Persée tomba sur la terre battue, essayant de retrouver son souffle, et découvrait Asterion au sol lui aussi. Pourtant, son frère de cœur s'était renforcé, pourtant il était devenu aussi vif que Marin depuis leurs entrainements entre chevaliers d'Argent avant le tout début de la guerre. C'était le Spectre qui les dépassait en rapidité, et de loin.

Cependant, il ne fallait pas se laisser impressionner. Ils étaient deux protecteurs d'Athéna reconnus pour leurs capacités, leur déesse partie aux Enfers leur avait confié son Sanctuaire et la Terre. Hors de question d'abandonner parce que l'adversaire les dépassait en vitesse.

Le Chien de Chasse lança un regard en direction d'Algol. Il avait saisi ses réflexions et les partageait. Ils s'étaient tous deux battus des années auparavant ensemble au cours de leur formation de chevalier, ils étaient devenus de grands amis et formaient un duo malicieux au sein de la caste argentée. Leur duo continuerait de fonctionner ici même, dans la grande arène, face à un soldat d'Hadès.

Aussi, ils se relevèrent en même temps, et leurs cosmos respectifs brillaient autour d'eux. Une attaque groupée sur Kagaho. L'affaiblir pour ensuite le changer en pierre. Asterion confirma d'un signe de tête l'idée que Persée laissait voguer dans son esprit.

Algol se déplaça très vite aux côtés de son ami, tandis que le Spectre les rejoignit, tombant sur eux et leur décochant un poing chargé d'une aura brulante et noire.

Tout cela ne dura qu'un seul instant.

Algol hurla le prénom de son ami. Les yeux de la Gorgone s'ouvrirent en deux lueurs rouges menaçantes et le chevalier tomba à nouveau au sol, cette fois ci blessé, la peau calcinée au travers de son armure.

Quant à Asterion...

Persée l'observait, incapable de mettre des mots sur ses pensées. Il avait changé son ami, son frère en pierre.

-C'est quelque chose qui se fait, normalement, entre chevaliers d'Athéna, ironisa Kagaho, de changer ses alliés en pierre?

La colère monta dans le cœur d'Algol.

-C'est toi qui as poussé Asterion pour que je le change en pierre malgré moi, s'écria-t-il.

-Et alors? Ça ne change rien, tu vas le rejoindre aussi dans la mort. »

Le chevalier d'Argent se sentait fébrile, prêt à décharger tout son cosmos, toute sa rage sur le Spectre, mais il était conscient qu'il ne se relèverait pas d'un tel acte qui serait en fin de compte stupide. Il était seul face au Benou, et se jurait de venger son ami. Mais surtout de ne pas endommager sa statue. Le moindre impact signerait la mort du Chien de Chasse assurément.

Il fit un bond en arrière, vers la tribune opposée, celle où d'habitude le Grand Pope s'installer pour assister aux combats qui faisaient naitre de nouveaux chevaliers au sein de l'armée d'Athéna. De là, ils étaient assez loin d'Asterion pour s'affronter enfin.

Kagaho bondit sans hésiter sur Algol, ses poings chargés de flammes noires. Le bouclier de la Méduse s'illumina mais rien ne se passa. Persée se doutait que cette technique n'était pas efficace sur le Spectre. Aussi, il sauta haut dans le ciel et retomba lourdement sur son adversaire.

Il était à terre, surpris de cet assaut. Mais se releva aussitôt.

Le chevalier se doutait que le combat ne serait pas aussi aisé, mais il avait touché le Benou.

Cependant il eut un mauvais pressentiment en croisant le regard noir et fou de Kagaho. Ce dernier était en train d'intensifier son cosmos et l'atmosphère de l'arène se fit plus oppressante comme remplie de ténèbres qui empêchaient l'air de circuler. Comme une impression de se retrouver à l'intérieur d'un four prêt à bruler de flammes noires.

CRUCIFY ANKH

La voix grave du Spectre avait scandé ces mots, et Algol, sans avoir le temps de comprendre la situation se retrouva immobilisé, prisonnier d'une croix de style égyptien qui s'était matérialisé sous ses pieds. Il ne pouvait plus faire le moindre mouvement, comme dépourvu de ses capacités. De sa gorge sortaient des hurlements de douleurs à chaque fois que son corps, pour des raisons que son esprit ne pouvait analyser, souffrait d'objets tranchants plantés en lui si lentement. Il ne comprenait plus rien mais ne voulait pas flancher. Il se l'interdisait. Il devait.. il voulait battre Kagaho, quand bien même il n'avait que ses poings pour le faire. Il devait rendre à Asterion son apparence normale... il devait...

Une douce mélodie s'insinua dans sa tête, comme une berceuse. Était-ce de cette manière que son corps avait décidé d'accueillir la mort? Non il ne voulait pas... Il s'écroula lourdement au sol.

Quand bien même avait-il reçu l'ordre de ne jamais quitter sa deuxième Maison dans l'escalier du zodiaque, il ne pouvait rester insensible aux explosions en bas dans le Sanctuaire, ni aux éclats de cosmos de ses camarades de Bronze ou d'Argent qui se battaient au péril de leurs vies contre l'armée d'Hadès. Il avait vu Aphrodite descendre sans hésiter depuis son temple des Poissons, il n'avait pu empêcher Milo ou même Aiolia et le Guerrier d'Asgard de traverser sa demeure du Taureau, pour protéger les civils et leurs amis.

Aldébaran avait été partagé entre l'envie de suivre ses amis et respecter malgré tout les directives du Grand Pope et du chevalier de la Balance, ses ainés. Il bouillonnait intérieurement à l'idée de rejoindre le champ de bataille et de protéger ces terres qui l'avaient accueilli, ces terres qu'il chérissait bien plus que son Brésil natal. Là bas, il avait été formé pour devenir le guerrier colossal qu'il était désormais, au prix d'un entrainement extrêmement dur, qui avait couté la vie de son maitre et qui ne lui avait finalement donné aucun espoir de se recueillir sur les terres où ses parents avaient été enterrés. Les caprices du climat amazonien, les glissements de terrain, toute la nature de cette région était si imprévisible que même les traces de ses origines avaient disparu en un rien de temps. Sa famille, la seule qu'il avait, était ici, en Grèce, dans le Sanctuaire d'Athéna.

Son voisin du dessous, Mu du Bélier, était son ami le plus proche. Et il veillait aussi sur son disciple, Kiki. D'un accord tacite, les deux chevaliers d'Or comptaient l'un sur l'autre, même pour des petits services insignifiants comme faire les courses au hameau, jusqu'à poursuivre la formation du futur Bélier. Ou bien comme par la présente, dans cette nuit de guerre et de terreur, partir à la recherche d'un chevalier qui avait volé une armure dans l'atelier de Mu et qui encourrait une mort certaine à cause de la faiblesse de son cosmos.

Tandis que son ami restait dans les escaliers du zodiaque pour les défendre en tant que premier rempart, Aldébaran se dirigeait vers la grande arène d'où il avait ressenti un cosmos anormalement puissant et un affrontement qui s'était engagé.

De son apparence imposante grâce à sa grande taille, ses muscles comme taillés dans de la pierre sous son armure de Taureau doré, il entra calmement dans l'aire de combat. Son visage dur et fermé, barré par ses sourcils épais et son casque à cornes dissimulait une forte inquiétude en découvrant un chevalier changé en pierre, un autre à terre, et un Spectre – aucun doute avec cette protection aussi sombre que le cosmos qui s'en dégageait – interdit de mouvement par celui qu'il cherchait. Ce dernier semblait retenir leur adversaire avec les cordes de son instrument rallongées et scintillantes d'une lueur argentée.

« Tu étais là, Orphée de la Lyre, déclara Aldébaran d'une voix résonnante. Malgré ta force, ton état ne t'autorisait à reprendre le combat et ton armure pas encore réparée.

-Al...débaran... articula l'homme à terre.

-Algol, emmène Orphée loin d'ici. Je m'occupe de lui.

-Parce qu'un gros lourdeau arrive, je vais plus m'occuper de ces deux là. Me fais pas rire, tu...

Des rayons de lumière dorée jaillirent de l'armure du Taureau faisant reculer de quelques pas le Spectre.

-Le gros lourdeau sera ton adversaire, Spectre!

-Comme tu voudras. Moi, Kagaho du Benou, je vais te tuer et après, je finirai les deux autres!

Sur ces mots, il se jeta sur Aldébaran, qui, les pieds ancrés au sol, ne bougeait pas. Il se concentrait, laissant son cosmos encaisser les flammes noires qui jaillissaient des poings, s'en prenant une ou deux au passage qui formèrent de légères marques sur son visage. Rien d'important. Les bras croisés, le regard droit, il observait Kagaho. Cet homme avait l'air dangereux, comme pris d'une colère pour une raison qu'il ne connaissait, et quelle importance? Avant d'attaquer, il devait trouver son point faible et surtout protéger les chevaliers d'Argent qui n'étaient pas encore partis. Telles étaient ses priorités.

Le Benou avait l'air toujours plus irrité, enchainant ses assauts sur le Taureau qui ne bougeait pas. Ou peu. L'air soulevé par les attaques faisait déplacer le chevalier d'Or subtilement sur le sol, mais son corps lui, ne flanchait pas. Toujours droit, impassible, infranchissable et solide.

Aldébaran avait compris le fonctionnement de son adversaire et sentait que la patience de Kagaho n'était plus. Une attaque d'une puissance supérieure allait arriver à tout moment.

Alors, calmement, sans rien laisser paraître, il laissa son cosmos augmenter, petit à petit, et au bon moment, il la libèrerait à volonté.

Un sourire se dessinait sur le visage du chevalier d'Or. Il était sur de son coup, et avait raison sur le fait que le Benou aussi, avait cru voir un gros tas de muscles qui taperait dans le tas sans réfléchir. Tout le contraire de ce qu'était Aldébaran qui était un fin observateur.

Ce dernier découvrit une boule d'énergie qui s'était formée au dessus de la tête du Spectre, aussi noire que le cosmos et tout ce qui caractérisait cet homme. Tant de force concentrée risquait de s'abattre et sur le colosse mais également sur l'arène entière. Il devait protéger également les chevaliers d'Argent.

Plus le choix. Il devait courir jusqu'à eux pour les couvrir.

CORONA BLAST

La boule noire entreprit sa chute sur l'arène.

GREAT HORN

De ses bras puissants, une lumière dorée repoussa tant bien que mal la déflagration ténébreuse. Ce Kagaho était fort, très fort, mais le Taureau ne flanchait pas. Il utilisait tout son corps pour retenir cette boule, pour la relancer vers le Spectre. Cependant lui même reculait sur la terre battue et se dirigeait vers Algol qui s'était effondré à nouveau au sol, que Orphée avait du mal à relever... sans compter Asterion qui était figé dans sa prison de pierre.

Aldébaran craignait de n'avoir d'autre choix que de toucher ses cadets. Il ne le voulait pas...

-N'aie pas peur, Aldébaran, scanda une voix qu'il connaissait que trop bien. Je protège les chevaliers d'Argent.

Mu... Que faisait-il ici?

CRYSTAL WALL

Une brise d'étoiles vola dans l'arène et se changea en un subtil voile dans le dos du Taureau. Il n'était pas seul dans ce combat, son cher ami était là et veillait sur les autres chevaliers grâce à une barrière invisible. Le colosse pouvait libérer sa force sans retenue.

Il poussa un cri qui résonna dans les airs et renvoya la boule d'énergie noire sur Kagaho qui se la prit de plein fouet et fut projeté dans les gradins opposés en un fracas de pierres qui se détruisirent.

Le combat n'était pas terminé, Aldébaran s'en doutait. Néanmoins, il profita d'un instant de répit pour voir Mu.

-Si tu es venu jusqu'ici pour retrouver Orphée, j'aurais pu le ramener, fit-il.

-Non. Il fallait que je te prévienne. Le ton du Bélier était anormalement teinté d'une note affolée. On est tous en danger, là. J'ai l'autorisation du Grand Pope d'avertir tous les chevaliers d'Or, il faut que...

Kagaho se dégagea des débris et redescendit des tribunes lentement. Il tourna la tête vers le ciel, ou plus précisément vers le haut des remparts de l'arène sur lesquels une silhouette apparut.

-... trop tard », murmura Mu.

Un frisson parcourut le corps entier du Taureau. De l'ombre qui venait d'arriver, de légers points argentés brillaient dans la nuit, comme les yeux d'un animal nocturne et une croix à cinq branches se dessinait sur ce qui semblait être le front. De là où il était, Aldébaran pouvait ressentir un cosmos anormal, inhumain, effrayant. Divin, même comme confirmaient les paroles de Kagaho dont le regard était aussi fixé dans le ciel que celui des chevaliers. Thanatos, le dieu de la Mort se montrait dans le Sanctuaire d'Athéna...


notes de fin: Merci d'avoir lu ce chapitre assez dur à écrire. J'ai fait quelques tentatives au niveau de la narration, de la logique et de la trame en général. J'ai mis beaucoup de temps pour tout rassembler et former un récit qui tienne la route, tout en écrivant sur des personnages que, pour certains, je ne maitrise absolument pas. Kagaho et Marin principalement. Même si je ne cache pas mon plaisir d'écrire Asterion et le passage de sa filature que j'ai adoré mettre en place.
Pour le Benou, je suis encore en réflexion sur son cas, tout comme sur le déroulement de la suite avec Thanatos qui s'annonce particulièrement corsé à travailler.
Une chose sure et certaine, il n'y aura aucun remake du combat Kagaho vs Rasgardo de TLC. Tout ce qui se passe dans ma fic va relever de l'original dans le traitement des personnages, donc les comparaisons n'ont aucun lieu d'être.
Le kanji d'interlude 炎, c'est honoo, flamme en japonais.
La suite viendra je sais pas quand, tant j'ai de choses à travailler, mais elle viendra pour sur.
Je vous fais des bisous et à la prochaine.