Bonsoir !

Ça faisait un moment que cette fiction n'avait pas été mise à jour, mais l'aventure continue toujours. Voici le troisième chapitre de cette petite histoire. Je vise environ un chapitre par mois à présent, voire deux, mais je table davantage sur un. Une publication régulière reprend donc !

Pour un bref récapitulatif des chapitres précédents ; Allen cache un lourd secret suite à sa confrontation avec le Comte Millénaire, au point qu'il est à la limite d'abandonner. Kanda et Johnny veulent rester à ses côtés, ainsi que découvrir ce qu'il cache. Poursuivis par Apocryphos, Link et des Exorcistes de l'Ordre, ils s'enfuient à l'aide de Tiedoll.

Dans ce chapitre, un peu moins de flou sur le fameux secret d'Allen. L'intrigue avance !

RAR :

Guest : La suite est là ;) ! En espérant que ça te plaise x3 !

Bonne lecture !


Chapitre 3 — Le Quatrième Acte

À la grande surprise de Johnny, ça faisait bientôt une heure que Kanda tenait Allen entre ses bras, fermement, en jetant un regard meurtrier à la bâche protectrice du chariot, comme si c'était de sa faute s'ils se trouvaient dans cette situation. Link, à côté de Johnny, somnolait d'un œil. Personne n'osait déranger le kendoka d'une quelque façon que ce soit, en lui adressant la parole ou par un regard trop appuyé – il avait l'air prêt à mordre au moindre pet de travers. Johnny se faisait donc tout petit.

Enfin, sa colère était surtout dirigée envers Link. Il ne supportait pas de le voir ici. S'il retenait Allen, c'était surtout pour que Link ne l'approche pas. Quelque part, on aurait dit qu'ils se chamaillaient pour le même morceau de viande. Dans cette conjecture, l'Allemand avait compris que l'épéiste était le mâle alpha, et qu'il n'avait pas intérêt à s'approcher de son butin.

Le dit butin, c'est-à-dire Allen, aurait hurlé au scandale s'il en avait été capable. Johnny souriait tendrement en visualisant la scène.

Mais malgré tout, le scientifique était content pour Allen. Il savait que ce dernier tenait beaucoup à Kanda. En dépit de leurs engueulades. Alors que Kanda s'occupe de lui avec autant de ferveur, il ne pouvait pas s'empêcher d'en être ému. Allen avait besoin de ça. Quelqu'un qui s'inquiétait pour lui, qui lui montrait un peu d'affection… Bon, pour la partie tendresse, il ne fallait pas trop compter sur le Japonais, cependant, Johnny espérait naïvement qu'il lui en apporterait peut-être un peu. Allen n'oserait pas montrer sa vulnérabilité, de toute façon.

Toutefois, en soit témoin ce qu'ils vivaient en ce moment, il en avait. Comme tout à chacun, quand bien même il aurait souhaité les faire disparaître, les enfouir tout au fond de lui. Et Johnny ne voulait pas le voir tout prendre sur lui. Il ne voulait pas qu'Allen traverse ça seul. De ce fait, si Kanda, si lui, pouvaient lui porter assistance… ça lui faisait plaisir. Parce que ça le soulagerait peut-être, au moins un peu. Johnny l'espérait sincèrement, du plus profond de son cœur.

Le blandin remua contre Kanda, gémissant faiblement. Tout en bougeant, il s'enfouit davantage contre son torse, agrippant ses hanches dans un geste inconscient. La tête du kendoka se transforma entre un mélange étonnant de surprise pure, rage intense, et crispation-extrême. Même Johnny faillit rire, il se força à détourner le regard, gloussant dans son poing, pour que Kanda ne remarque pas.

Erreur, la chaleur meurtrière qu'il ressentait derrière son dos lui indiquait que sa réaction n'était pas passée inaperçue.

Il se retourna sur un Kanda, effectivement, meurtrier, à qui il offrit un sourire contrit — à moitié désolé, à moitié coupable. Un tch fit office de réponse.

Ça se voyait qu'il n'était pas tout à fait à l'aise, et qu'il n'osait pas virer Allen de peur de le réveiller. Johnny compatissait néanmoins, ne voulant pas que Kanda se sente trop envahi. Il s'approcha, se raclant la gorge :

« Si tu veux, je le prends. »

Kanda lui offrit un visage blasé.

« Faudrait déjà que t'arrives à le décrocher.

—En procédant très doucement, je pourrai y arriver. » Il sourit avec empathie, admirant la retenue et la gentillesse dont faisait preuve Kanda en cet instant. « Tu veux ? »

À sa grande surprise, ce dernier secoua la tête.

« Il est trop fragile pour qu'on le bouge. Puis y'm'tient chaud. »

Parce qu'Allen était toujours couvert de son manteau. Quand même, Johnny écarquilla les yeux. Kanda ne voulait vraiment pas le laisser. Il en fut touché pour le maudit. Alors, souriant, pas trop non plus —il ne voulait pas que son ami se fâche, il s'adossa aux planches derrière lui. Il ne demanda pas son reste, ne dit pas un mot de plus.

Il était seulement content qu'Allen et Kanda puissent échanger ainsi un moment ensemble.


Dans sa tête, Allen nageait dans un océan de bien-être. Il y avait de la chaleur, une sensation douce, des bras qui l'entouraient. Il avait l'impression d'être bercé. Il ne voyait plus ses amis, ne voyait plus Kanda, ne voyait plus rien. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il était en sécurité. Et c'était une sensation qui lui avait cruellement manqué. Allen était vraiment désappointé par la situation. Il se sentait trahi au plus profond de lui-même. Il avait l'impression qu'on lui avait menti toute sa vie, sans se voiler la face, c'était le cas. Le jeune garçon se prenait un délicieux revers des certitudes auxquelles il avait cru. Il avait appris ce qu'il avait appris, déprimer ne servait à rien. Sauf qu'il ne parvenait pas à réagir autrement. Il avait mal au cœur. Et il était détruit.

Quelque chose en lui s'était brisé.

Allen rêvait de revenir en arrière, de n'avoir jamais appris ce qu'il savait, d'oublier tout ce qui lui pesait. Il ne pouvait pas. Il le savait bien. Se dire qu'il devrait faire avec, c'était simplement cruel. Il tentait de ne pas se morfondre, de chercher des solutions, mais à quoi bon ? Pourquoi lutter quand il avait déjà perdu ? La seule chose qui le réconfortait, c'était de revoir l'épéiste. Mais encore, ça s'était mal passé. En apprenant qu'il abandonnait, Kanda lui avait mis un soufflet. Ça ne l'avait pas beaucoup aidé. D'un côté, c'était bel et bien l'homme qu'il connaissait, dont il était tombé amoureux.

Sa brutalité l'aidait, parfois. Là, il aurait voulu que leur relation soient autre pour se blottir dans ses bras. Ces pensées ne lui ressemblait pas et il se détestait pour être aussi faible. Ce n'était pas quelque chose qu'il aimait. Lui, sa vulnérabilité, il la cachait derrière des sourires. Ça devenait beaucoup trop dur.

Il ne savait pas pourquoi les choses prenaient une tournure aussi dramatique. Encore, les mots ne rendaient pas service à sa peur. À sa colère. Allen n'était pas le genre à baisser les bras. Mais c'était trop d'énergie, trop de ressources, qu'il n'avait pas. Il ignorait comment garder Neah sous contrôle, comment ne pas perdre sa propre santé mentale ainsi que son âme. Il n'avait pas envie de lui laisser son corps pour qu'il puisse se réunir avec Mana, avec Adam. S'il le faisait, tout serait fini pour les siens. Il savait qu'il n'avait aucune chance de convaincre Neah d'adhérer à une alliance, toutefois, peut-être que ça valait le coup d'essayer.

S'il était proche de Cross, s'il détestait Mana… peut-être que ça jouerait en sa faveur. Mais peut-être pas. Peut-être que Neah avait décidé de passer l'éponge, de s'allier à ses frères d'âmes. Après tout, les bénéfices qu'il en tirerait seraient sans limite. Allen n'était pas idiot, il n'avait pas beaucoup d'armes pour espérer le convaincre. Il ne savait pas non plus s'il en avait envie. Il avait utilisé. Il avait voulu tuer Adam, tuer le responsable de la trahison qui lui déchirait l'âme. Et c'était lui qui avait failli mourir.

Ce qui le peinait le plus, c'était qu'il avait embarqué Kanda et Johnny dans ses histoires. Qu'il n'avait pas le temps de se remettre, de réfléchir seul, de monter une stratégie. S'il prenait la mauvaise décision, la moindre mauvaise décision, Kanda et Johnny mourait. L'homme qu'il aimait et l'un de ses plus proches amis. Ça attisait la colère d'Allen. Il les avait rejeté en espérant qu'ils partiraient. Que la colère de Kanda le pousserait à l'abandonner, que Johnny serait déçu. Ça aurait fait mal, mais pas autant que savoir qu'il les mettait en danger. Il hésitait à les repousser, maintenant. Parce que paradoxalement, ça le réconfortait. Leurs présences.

Celle de Kanda, particulièrement. Malgré la gifle, qu'il espérait bientôt lui rendre. Ça l'aurait fait sourire s'il avait eu assez d'énergie. Peut-être qu'il devrait se confier à lui. Peut-être pas. Il devrait fuir le plus loin possible.

C'était beaucoup trop d'efforts, ça aussi. Il ne savait toujours pas comment tout gérer à la fois.

Savoir que le Comte était Mana, que Neah était son frère, que Adam était une moitié d'âme… Qu'il avait été élevé par l'un d'entre eux. Il ne savait plus pourquoi il se battait.

Tu te bats pour moi.

La voix dans son esprit le fit se crisper. Neah… Neah lui parlait. Il sentait que le Quatorzième risquait de prendre l'ascendant. Allen fit un effort surhumain pour tenir le coup.

Non, je me bats pour moi. Je me bats pour les autres. Je me suis toujours battu pour eux.

Un ricanement dans son esprit.

Tu ne sais même pas encore qui tu es.

Allen s'agita. Oui, il l'ignorait. Il ne le savait plus.

Je m'en fiche. Je refuse de me soumettre à toi, Neah. Je m'en fais le serment.

Neah apparut alors. Clair, comme une vision de l'au-delà, il flottait dans un océan de nuages. Allen se sentait perdu.

Écoute simplement mon souhait, et tu me diras si tu refuses toujours de t'associer à moi.

Alors il voulait négocier. Allen se tendait, dans l'expectative, inquiet. Il ne refusait pas d'entendre parler de sa proposition. Toutefois, il le savait, il savait que Neah le savait, il ne succomberait pas à n'importe quelle condition. Il lui faudrait la garantie que ses amis survivent. Que l'humanité survive. Il refusait de faire n'importe quoi, de laisser tomber si facilement.

En faisant ça, il se battait contre lui-même. Car une part de lui ne désirait que ça.

Allen eut la sensation de battre des cils, de revenir à la réalité, de voir quelque chose, comme la charrette où il s'était endormi, et l'instant d'après, il se trouvait dans une maison immense, remplie de meubles, de photographies, de tableaux. Une maison de famille, il en eut l'intime conviction. Assis sur un sofa, dans le salon, il aperçut une cheminée à l'âtre brûlante. Une bouilloire à thé était posée sur une table basse en chêne massif. Face à lui, deux fauteuils vide. Neah apparut dans l'embrasure d'une porte pour s'installer sur l'un d'eux.

Un débat houleux commençait.


Kanda eut l'impression qu'Allen n'allait pas bien. Irrité par son comportement, mais secoué d'inquiétude, il se résolut à le couvrir davantage et à le tenir plus fermement contre lui. Ce gosse n'avait pas fini de lui casser les burnes. S'il y avait un diplôme de chiant, Moyashi se serait bousculé aux portillons de l'examen pour le passer. Et il l'aurait obtenu haut la main. Le kendoka soupira d'agacement. Voilà qu'il devait en plus le porter comme une mariée, et que ce type s'agrippait à ses flancs sans même y réfléchir. Quelques gémissements et plissement se peignirent sur le visage du plus jeune. Kanda chassa une mèche de ses cheveux qui lui tombait sur le nez.

La charrette arrivait bientôt au village suivant. Ils allaient avoir besoin d'une auberge. Les chevaux seraient fatigués, Tiedoll aussi, Johnny — qui s'était endormi tout comme Link —et lui méritaient une bonne douche… Puis Moyashi avait besoin d'un lit. Kanda n'était pas habilité pour tenir ce rôle. Il donna un coup de poing dans le bois de la charrette, interpelant son maître :

« Hé, le vioc ! On en a pour longtemps ? »

Johnny sursauta au son de sa voix. Allen, lui, ne bougea pas d'un pouce.

« On arrive à la ville dans une heure. »

Kanda grogna. Une heure de plus à endurer le froid pour Moyashi. Lui, il supporterait. Mais si le gosse ne chopait pas la grippe, ils étaient vernis. Johnny bailla, retira ses lunettes pour les essuyer avec la manche de sa veste, et lui adressa un sourire bienveillant.

« Ne t'en fais pas, Kanda. Il est bien endormi. Tout ira bien pour lui. »

Kanda émit un 'hm'. Il n'avait pas envie de montrer qu'il était concerné. Mais d'un côté, Johnny l'avait perçu à jour. Il jugea inutile de nier. Il ignora simplement son commentaire. Vu qu'ils en avaient pour une heure, il plaça délicatement sa main derrière la tête du maudit, l'autre dans son dos, pour l'allonger au sol, se couchant lui aussi. Il ferma les yeux.

Il ignora pourquoi il avait ce besoin de le garder dans ses bras. Peut-être à cause de sa chaleur, à cause du manteau. Peut-être à cause d'autre chose. Il tenait à lui, certes. Il tenait à ce qu'il reste en vie. Le voir mettre de côté toutes ses bonnes résolutions, sa naïveté, ça le mettait en colère. Pas Allen. Pas Moyashi. Pas lui. Moyashi devait rester optimiste. Il devait leur sauver la mise, comme il voulait toujours le faire.

Mais pas tout seul. Ce petit salaud, il ne le laisserait pas fuir comme ça. Kanda le protégerait, qu'il le veuille ou non.


Allen ouvrit les yeux en sursautant. Il était dans des draps, dans un lit. Comme au début, Johnny était affalé sur une chaise, à moitié effondré sur lui-même. Kanda, en revanche, ne dormait pas. Il fixait l'extérieur, par la fenêtre. Allen se redressa, le lit craquant. Le kendoka tourna le regard dans sa direction. Immédiatement, le maudit baissa les yeux. Il se souvenait du débat qu'il avait eu avec Neah… des arguments qu'il avait présenté. De comment il s'était pratiquement humilié. Des arguments de Neah, en réponse aux siens. Allen ne savait pas comment ils allaient s'en sortir. Il y avait du bon dans chacune de leur solution.

La discussion avait dû être longue il ne se sentait pas du tout reposé. Il tourna la tête. Sur la table de chevet, une unique fleur dans un vase transparent. Il se doutait que ça devait plus venir de Johnny que de Kanda. Johnny aurait dû prendre le lit, au lieu de le veiller… il se sentit coupable de le voir aussi épuisé. Et Kanda, Kanda… il ne savait pas sonder son expression. De l'énervement ? De la rage ? De l'inquiétude ?

Il ignorait comment interpréter les choses. Il repoussa les couvertures, décidé à se lever.

« Ne bouge pas, Moyashi.

—Quoi, je n'ai pas le droit d'aller aux toilettes ? Ou tu veux me la tenir ? »

Allen s'en voulut instantanément d'avoir été si défensif. Kanda croisa les bras, la mâchoire serrée.

« J'ai pas dit ça. Mais t'es épuisé. Repose-toi, au lieu d'ouvrir ta grande gueule. »

Le maudit soupira.

« En tout respect, c'est toi et Johnny qui devriez dormir. Regarde-le. Et toi, tu…

—Quoi, moi ? »

Allen rougit un peu devant le regard pénétrant de l'Asiatique. Il haussa les épaules.

« Tu n'as pas l'air au top de ta forme non plus.

—Tu peux parler. On a tous des gueules de chiottes. »

Ça, il ne pouvait pas dire le contraire. Sur un haussement d'épaules, il se dirigea vers la salle de bain. Kanda ne l'arrêta pas. Allen ne mentait pas, il avait besoin d'une douche. Il ne se sauverait pas maintenant. De toute façon, Kanda l'aurait tué. Il n'avait aucune ouverture, que ce soit dans la posture de l'autre garçon, ou dans la sienne. Puis, Johnny aurait été déçu. Ça l'aurait blessé, d'encore le décevoir. De décevoir Kanda, aussi.

Tant de pensées contradictoires qui s'emmêlaient en lui seraient bientôt balayées par l'eau chaude. Il s'abandonna dans la baignoire, ravi, et ferma les yeux de nouveau. Lorsqu'il les rouvrit, le bain était froid. Quelqu'un cognait à sa porte. Allen s'habilla. Il crut que c'était Kanda, mais Johnny se jeta dans ses bras. Il pleurait. Allen dût faire un effort surhumain pour ne pas ployer à son tour. C'était bien trop pour lui…

Kanda se jeta sur le lit, s'allongeant, l'épée posée juste à côté de lui. Il fermait les yeux. Allen fut rassuré de le voir se reposer. Il repoussa gentiment Johnny.

« Peut-être que tu devrais te coucher aussi, non ?

—Oh, ça va aller. Kanda a ramené du café pendant que tu te douchais ! Tu peux te remettre au lit, tu es alité. »

Allen secoua la tête.

« Johnny, je l'ai dit à Kanda tout à l'heure, mais tu es épuisé, bien plus que moi…

—Mais il faut quelqu'un pour te surveiller.

—Je n'ai pas besoin qu'on me… ! » Allen s'insurgeait. Johnny venait de poser un doigt sur sa bouche, lui faisant mine de baisser d'un ton.

Le scientifique s'assura qu'Allen avait compris, puis eut un mouvement de recul, servant une tasse chaude à Allen.

« Il était mort d'inquiétude à ton sujet. » Allen eut du mal à l'avaler, mais il n'avait pas tort. Et il ne voulait pas le blesser. « Alors s'il te plaît, laisse-nous t'aider au moins un peu. »

S'il n'était toujours pas sûr de lui, surtout pas après la discussion que Neah et lui avaient eu, Allen soupira en s'emparant de la tasse. L'anse était froid, mais le liquide à l'intérieur brûlant. Il toussota, sa langue entrée en contact avec le café le lançant furieusement.

« Ah, c'est super chaud ! »

Johnny lui intima un nouveau 'sshhh', et sourit gentiment, désolé.

« Je l'ai réchauffé. Tu devrais attendre un peu. »

Puis, le blond tira une chaise. Allen s'y assit, Johnny se postant face à lui. C'était au tour de Kanda d'être surveillé pendant son sommeil. Le maudit tenta de ne pas remarquer à quel point il était beau. Puis, quelque chose lui revint.

« Où est Tiedoll ? Et Link ? »

En effet, le vieillard et le Crow étaient avec eux. Il avait du mal à croire qu'ils les avaient abandonné à leur sort, surtout pas son cher disciple pour Tiedoll, et surtout pas le réceptacle du Quatorzième pour Link.

« Ils sont partis régler quelques affaires, et vérifier qu'on était en sécurité. Ils vont revenir.

—Très bien. »

Le blandin opina du chef. La chambre spacieuse comportait deux lits. Hors, ils étaient trois. Il s'inquiéta, jetant un œil vers le kendoka, revenant ensuite vers son ami :

« L'un d'entre vous s'est au moins assoupi, cette nuit… ?

—Tu refusais de lâcher Kanda dans la charrette. » Allen se sentit immédiatement devenir cramoisi. « Mais ici, tu t'es laissé mettre au lit. Kanda t'a veillé, puis j'ai pris le relai. Cela dit, je suppose qu'il ne s'est pas vraiment reposé… Il était vraiment très inquiet, je ne plaisantais pas. Il refuse de t'abandonner.

—Ma joue s'en souvient. »

Un peu amère, Allen se protégeait derrière cette affirmation. Johnny eut un air contrit.

« Je ne cautionne et n'excuse pas son acte, mais c'était sa manière de montrer qu'il comptait être présent. Il est très maladroit.

—C'est un Bakanda après tout. »

Ce disant, Allen but une gorgée de café. Enfin, le liquide était moins chaud. Johnny tendit sa main dans sa direction. Le geste tendre désarçonna Allen, toutefois, il l'accepta. Ça faisait du bien. D'avoir un ami. Même deux, parce qu'il fallait avouer qu'à sa façon particulière, Kanda en était un. Même s'ils se comprenaient pas. Même s'ils s'irritaient l'un et l'autre. Allen tenait à lui.

Par les déclarations de Johnny, les actes du Japonais, Allen voyait que son affection était au moins en partie réciproque.

Encore avec tout ça, l'hésitation.

Ce serait dur de les laisser.


Kanda remua dans son sommeil. Tourmenté par ce qui arrivait à Moyashi, mais irrité par les blancs dans son histoire. Il ne comprenait pas pourquoi il ne disait pas ce qu'il savait. Il n'aimait pas ne pas avoir toutes les informations importantes lorsque c'était nécessaire. Il avait déjà décidé d'avoir une conversation avec lui. Une vraie, cette fois. Pas un simulacre de jeu du chat et de la souris, remplie de défense, d'attaques, de coups bas — dans tous les sens du terme. Tiedoll, Lenalee et Marie lui répétaient souvent qu'il devait s'acheter une patience. Que le produit ait été en rupture de stock un long moment où qu'il n'y ait pas réellement songé jusqu'à maintenant, ceci expliquait cela. Mais maintenant, il se ferait violence.

Allen mériterait qu'il parle sans détour, qu'il préserve son sang-froid, qu'il se montre à l'écoute. Il ne dirait rien si Kanda lui parlait comme à un prisonnier, ou un ennemi. Ce n'était même pas ce qu'il ressentait. Il ne voulait pas perdurer dans ce chemin de brume auquel les condamnait le maudit. Ça le rendait fumasse, plus qu'autre chose. Et il perdait son sang-froid.

Parce que trop de choses étaient en jeux. La survie de cet imbécile, la leur... Kanda se tenait prêt à mourir pour lui. À le tuer. Il n'avait pas envie de le perdre avant que ce soit nécessaire de le supprimer. Il aurait même espéré qu'il y ait un moyen de ne pas en arriver là.

C'était toutefois trop utopique. Il n'avait jamais été un idéaliste, ce n'était pas pour se faire des illusions pareilles. Il avait dû se battre avec Alma. Son ami, qui conservait en lui l'âme de sa défunte femme. Il ne pouvait pas se permettre l'optimisme. Plus maintenant.

Alors, lorsqu'il émergea, qu'il mit un temps à se situer dans l'obscurité naissante, entendant le léger refrain d'un rire, il se sentit apaisé. Le son venait de Moyashi, Johnny lui parlant gentiment, ils plaisantaient. Kanda se redressa, une main sur le front. Il avait dormi longtemps. Comme souvent depuis quelques temps, Allen baissa les yeux lorsque leurs regards se croisèrent. Et Kanda n'aimait pas, qu'il n'ose plus le regarder. Ça n'avait jamais été lui. Allen savait toutefois ce qu'il attendait de lui, ce qui créait le malaise.

Le kendoka soupira, il avait la bouche pâteuse.

« Il est quelle heure ? » demanda-t-il en se massant la gorge.

Comme s'il avait compris, Johnny lui apporta immédiatement un verre d'eau fraîche.

« Presque l'heure du dîner. On nous a proposé de l'apporter dans une heure. »

Il ne répondit pas, se contentant de boire. Allen ne disait rien. Yû étouffa un sentiment d'agacement. Il fallait la jouer fine.

« Va donc dormir, Johnny. Je vais tenir compagnie à Moyashi. »

Le dit Johnny eut un mouvement de recul, mais le maudit haussa les épaules, l'air de dire qu'il pouvait y aller.

Kanda fit signe à Allen de le suivre dehors, attrapant sa veste au passage. Le scientifique se coucha sur un des lits vide, lançant à Kanda un regard inquiet. Ce dernier eut un signe de tête. Il gérerait bien, cette fois. Il ne merderait pas. Il ne sut si Johnny fut rassuré, juste qu'Allen le suivait d'un pas traînant.

Lorsqu'il referma la porte, le maudit le fixait. Dans les yeux, cette fois. Mais il hésitait. Il n'était pas à l'aise, certainement pas. Moins que les autres fois, sans doute parce qu'il avait compris que se dérober ne servait à rien. Il s'appuya contre la porte, le bois abimé grinçant quelque peu. Kanda resta à côté de lui. Le regard sur ses pieds.

Il était temps de mettre les cartes sur table.

« Moyashi..., » commença-t-il. « J'suis pas ton ennemi. J'veux juste savoir.

—Je sais, Kanda. »

Ça agaça l'Asiatique. Il savait ? Alors ces jeux de fuites, c'était quoi ? Le plus jeune dut voir son regard ahuri parce qu'il soupira, levant les bras et les baissants dans un geste de frustration.

« Je sais que tu veux des réponses. Mais je ne peux pas te les donner.

—Tu pourrais commencer par arrêter de te barrer.

—J'ai toujours pas fui, je te ferai dire. »

Kanda hocha la tête. Ouais, il s'était pas sauvé.

« Ok. Mais si tu sais des trucs qui peuvent nous aider, ou sur lesquels on peut t'aider, dis-le. Nous, on est largués.

—Pourquoi vous vous mettez dans la merde pour moi ?

—Je te l'ai déjà dit, s'énerva Kanda, parce qu'il n'est pas question que toi ! »

Allen se pinça l'arête du nez.

« D'accord. Mais me surveiller, l'éveil du Quatorzième, me veiller comme un mourant… vous vous inquiétez. Je suis dangereux pour vous. Tu le réalises, ça ?

—Toi, tu réalises pas à quel point je suis sérieux quand je dis que je veux t'aider. »

Kanda ponctua ses mots d'un grognement sourd. Il n'avait pas envie d'encore perdre les pédales. C'était pas si difficile, merde.

« Tu ne me dois rien, Kanda.

—Si. Et c'est pas seulement la question.

—Elle est où, la question ? »

Le kendoka secoua les épaules. Il n'abandonnerait pas un camarade. Tout simplement. Il ne se laisserait pas distraire.

« T'es pas prêt à parler. Je comprends. Je sais pas pourquoi, mais c'est comme ça pour le moment. T'étais mal. » Allen évita son regard. « Je sais pas ce qui t'a mis dans cet état. Ça a l'air grave, donc j'te laisse du temps. Pas question de jouer éternellement cette carte. Ni d'abandonner. On t'aidera, quoiqu'il se passe. »

Le maudit leva brièvement les yeux au ciel, comme agacé de le voir montrer tant d'assurance dans ses paroles. Une part de Kanda eut l'impression, cependant, qu'il était rassuré. De ne pas être seul avec on ne savait quelle connerie qui se tramait dans l'ombre.

Il rouvrit la porte. Et avant d'intimer à Allen de rentrer, il dit :

« Désolé, pour le coup de poing. J'aurais pas dû.

—Attends… » Le blandin marqua un temps d'arrêt, les sourcils froncés. « Je rêve, ou t'excuse ? »

Effectivement.

« Je dois te le dire deux fois ? Et c'est moi qui suis retardé ? »

Kanda eut du mal à y croire, Allen se mit à sourire en le suivant à l'intérieur, sans lui répondre. D'une manière sincère. Un sourire qui le réconforta plus qu'il n'aurait aimer l'avouer.

À suivre...


Le Yullen avance un peu, avouez, ça fait plaisir. Kanda qui s'excuse, il fait un pas en avant.

Reviews ?

N'hésitez surtout pas, ça fait toujours plaisir ! D'autant que cette petite histoire m'amuse beaucoup, j'aimerais savoir ce que vous en pensez ;).

Merci d'avoir lu !