Que je vous explique vite fait quelque chose: j'ai vu ce week-end un film qui m'a engagé à écrire un peu plus sur cette histoire (d'où ce oneshot) et à écrire d'autres "Harry-Draco" à l'avenir. Je vous disais que j'aimais assez ce couple, mais cette fic est la 1ère que j'écris sur le sujet. Le film en question s'appelle "Maurice" et si vous ne l'avez pas déjà vu, je vous y engage! Il est de James Ivory, avec notamment Hugh Grant (je l'adore, dsl mais c'est comme ça!): en bref, je l'ai trouvé d'une beauté fascinante, en particulier toute la première partie, où deux étudiants dans un collège anglais au XIXe (début XXe plutôt) se découvrent peu à peu une attirance mutuelle... Le film parle de la difficulté d'être homosexuel dans l'Angleterre victorienne. Les émotions et les sentiments des personnages sont admirablement bien joués et filmés... Bref, une vraie merveille! J'avais déjà lu un livre (Avec vue sur l'Arno qui a donné le film "Chambre avec vue" du même Ivory) de E.M. Forster, l'auteur qui a écrit le bouquin originel: à défaut de pouvoir voir le film, trouvez-vous donc le bouquin! Vous ne le regretterez pas!
Tout ce soliloque pour vous dire que ce film m'a donné envie de m'en inspirer. Je tâcherai donc pendant les vacances d'écrire de petits "Harry-Draco" (certainement des oneshots, car je ne sais pas si je pourrai écrire des histoires plus longues). En espérant que tout cela vous plaira!
Bon, en attendant, on n'y est pas encore...
Ici vous avez donc le point de vue de Draco. Alors: Bonne lecture !
L'attention
Il me demande si ça va, pourquoi je tremble. Mais lui-même est tendu à craquer. Il paraît si fragile que j'ai peur de le briser d'un mauvais geste. Or je sais très bien que ce que je m'apprête à faire le révulse… Il est blanc comme un linge et une veine palpite depuis cinq minutes à sa tempe. Ses lèvres sont devenues sèches, et j'ai l'impression qu'elles ont pris une légère coloration violette : comme si la peur le glaçait sur place, bloquant son souffle dans sa gorge.
Et pourtant, Merlin sait que je n'ai jamais été aussi aimant, aussi tendre, aussi… «Tendre» ?... Alors que je penche un peu plus vers lui, je remarque la plaie saillante et rougeâtre que semble être devenue sa cicatrice… «Tendre» ? Grands Dieux, Harry ! Pourquoi ne me dis-tu jamais rien ? Pourquoi souffres-tu toujours en silence ?...
Je sens que je glousse, c'est nerveux… Je comprends aisément pourquoi parfois les gens aimeraient pouvoir boxer ma tête de petite gouape prétentieuse et ricanante… Je me déteste… Je me déteste…
Nous sommes pareils en réalité : nous nous cachons des autres et de nous-mêmes. Ce n'est pas notre fierté qui nous pousse à dissimuler notre angoisse… C'est la honte… La honte d'être ce que nous sommes… des images d'étendard déformées et primaires…
Il me retient par les bras, mais il a sensiblement écarté ses jambes de lui-même. Je souris intérieurement : doit-il aimé au moins un peu cela pour être aussi réactif… J'effleure son aine et je le sens frissonner. Aucun son ne sort de ses lèvres mais ses yeux grands ouverts sont éloquents… Je me surprends à le contempler.
Mon père m'a dit un jour que Harry ne valait guère mieux que de la chaire à l'étalage dans une exposition agricole… et peu à peu, j'ai compris que ces paroles s'adressaient aussi à moi… J'ai haï mon père pour ça, pour son mépris… En quelques sortes, c'est lui qui m'a poussé dans les bras de Potter !
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Je viens en lui et je me retiens de crier, car il n'aime pas ça : son visage est fermé, mais il a du mal à dissimuler son soulagement alors que ses traits se détendent et que sa respiration redevient plus facile. Je le serre contre moi alors que je le garde assis sur mes cuisses : je veux encore rester en lui quelques instants, sentir sa chaleur… Ce que je fais est terriblement égoïste, j'en suis plus que conscient…
Je culpabilise un peu plus en le sentant si chaud et vulnérable dans mes bras. Il tremble à nouveau, même s'il ne doit pas s'en rendre compte… Je serre un peu plus mes bras dans son dos, tâchant ainsi de lui transmettre un peu de cette force qui lui manque terriblement : qui eut cru le survivant si… si faible… ?
Très vite, j'ai compris que la façade héroïque, qu'il avait assez habilement, et légitiment, endossée, cachait une âme en émoi, presque plus délicate que celle d'une fillette ! Quelle délectation cela avait été pour moi au début de notre «relation» si particulière ! Imaginez : soumettre Harry Potter n'appartenait jusqu'à présent qu'aux rêves du Seigneur des Ténèbres ! Et c'est moi qui y étais parvenu !
La première fois avait eu lieu la nuit, en haut de la Tour d'Astronomie. Je l'avais eu, plus nu qu'un nouveau-né, offert et obéissant. J'avoue m'en être donné à cœur joie… Mais alors que je me retirais sans plus délicatesse, puis me rhabillais sans m'émouvoir, j'avais perçu ses frissons. Et posant ma main sur son épaule, j'avais senti sa fièvre maladive… Le soulevant alors, je l'avais longtemps réconforté, comme on berce un enfant réveillé par un cauchemar…
Suite à cette première nuit, nous ne nous sommes pas revus pendant quelques temps, puis je suis retourné le voir, poussé par un sentiment qui, selon le code génétique des Malefoy, aurait dû m'être inconnu : l'attention… Nous avons convenu d'un autre rendez-vous pour discuter… Depuis, le scénario se répétait pratiquement tous les jours…
J'ai appris à lui donner du plaisir et en contrepartie il m'autorisait à assouvir le mien… Je me suis fait plus… Je suppose que «tendre» reste le mot qui convient… Mais mes goûts de possession n'en demeurent pas moins gênants et je n'ai toujours pas réussi à le détendre… Un jour, je le sens, il va s'évanouir pour de bon dans mes bras, s'il ne me fait pas tout bonnement une syncope…
Je le sens soudain bouger, provoquant accidentellement sur mon membre une légère remonté d'excitation que je réussis à brimer. Affolé, il regarde désespérément autour de lui, lançant souvent des coups d'œil horrifiés à la porte. Qu'est-ce qui lui arrive d'un seul coup ? J'entends enfin la voix qui résonne au dehors… On est fichu…
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Je touille, je touille, je touille… Par tous les diables, c'est à mourir d'ennui… Cette huile de récurage est la recette de potion la plus chiante que j'ai jamais effectuée : il faut mélanger et mélanger encore, en rajoutant au fur et à mesure les ingrédients… Mon bras va s'engourdir avant peu… Une demi-heure à peine que j'ai commencé pourtant…
Au début, Rogue me tournait autour comme un charognard, mais maintenant il est assis à son bureau. Je l'observe du coin de l'œil : il semble lire en boucle une missive étalée devant lui. Il a la tête lourdement appuyée sur une main et il semble avoir pâli.
J'ai séché le cours de potion de cet après-midi… J'ignore si Harry y est allé, mais cela m'étonnerait. Il s'est enfui si vite ce matin… J'ai à peine eu le temps de voir les larmes qui brillaient dans ses yeux, mais elles étaient là… Il a dû avoir une journée éprouvante… J'ai pensé à aller le voir, mais je me serai fait refouler à la porte de sa salle commune : il m'avait dit son mot de passe dernièrement, mais la Grosse Dame du tableau m'aurait sûrement chercher des noises à causes de mon uniforme vert et argent… De plus, je n'avais aucune envie de tomber sur un Gryffondor prompt à défendre sa Tour avec «vaillance»… je suis de plus en plus fatigué par ces passes d'arme…
Sachant qu'on n'échappe pas à Rogue, même quand on est le fils d'un «ami», je suis finalement allé à ma retenue. Il n'a eu aucun commentaire sur ce matin ou sur mon absence à son cours. Il a haussé un sourcil vaguement sévère et m'a désigné mon plan de travail. Sans un mot. Et il n'a toujours pas ouvert la bouche depuis.
Il va pourtant bien falloir que je me force à lui parler. Après tout, il est mon parrain ! Il m'a vu grandir et m'a même plusieurs fois gardé pendant les vacances lorsque j'étais plus jeune… Un peu comme un oncle… Or, même si je sais qu'il ne dit pas tout à mon père, je dois m'assurer qu'il ne dira rien sur ça… Une scène de plus à la maison ne me fait ni chaud ni froid, même si la perspective de tester la nouvelle canne de mon père me refroidit… Mais je ne veux pas qu'il aille raconter quoi que ce soit aux Dursley, ces moldus abjectes chez qui loge Harry… Ce dernier m'a dit de ces choses à leur sujet… Je redoute particulièrement l'oncle Vernon, dont la perversité semble dépasser celle de mon père… Il faudra que je dise à Harry de se méfier de ce gros porc, car il me semble louche…
Je lève les yeux franchement vers mon professeur, arrêtant volontairement de touiller. Aussitôt des glougloutements se font entendre et il réagit enfin : «Ne cessez pas votre travail, Mr Malefoy, sinon vous aurez tout à refaire…» Sa voix est lasse et sa tête n'a pas décollé de sa main…
«Professeur, pour ce matin, il faut que vous…
«- Par tous les mages ! s'exclame-t-il en se renversant contre son fauteuil. Bien sûr que je n'en parlerai ni à votre père ni aux Dursley ! Que croyiez-vous donc ?»
J'ai la bouche grande ouverte et je dois avoir l'air profondément stupide : «Je suis légimence, Mr Malefoy… Curieux que vous ne sachiez pas ce que ça signifie… En compagnie de Mr Potter, vous auriez peut-être pu l'apprendre…» Mon incrédulité silencieuse le fait pousser un soupir et il m'engage à nouveau à mélanger. Je m'exécute, mais je continue à l'observer. Je ne suis pas convaincu et j'insiste : «Alors, vous n'êtes pas…
«- Quoi ? Choqué ?... Vous n'avez jamais eu des relations très fréquentables, Mr Malefoy. Alors que ce soit Potter ou un autre, cela ne me choque plus…»
Je me sens rougir affreusement. De quoi il se mêle ? Que sait-il de mes «relations», ce vieux pervers ? Un sourire effleure ses lèvres dures. Aussitôt je tente de camoufler mes pensées, ce qui a pour effet d'agrandir un peu plus son rictus. Il ne serait pas mon professeur et ne m'aurait pas tenu sur les «fonds baptismaux» que je lui enverrai mon poing en pleine figure !
«Vous avez tord de le prendre ainsi, Mr Malefoy… Car je ne vous juge ni l'un ni l'autre…
«- Pourquoi ces retenues alors ? Vous savez combien Potter a peur de vous !
«- De un : je vous ai surpris dans ma réserve et j'aurai pu vous exclure pour tentative de vol… Et de deux : je doute que Potter ait peur de moi…
«- Vous le savez parfaitement ! Et puis vous savez très bien aussi que nous n'étions pas en train de voler, on…»
Je me mords les lèvres, rougissant plus encore et je me replonge dans ma potion… C'était mon idée la réserve. Je voulais un peu plus de piment et de danger… Mais en quoi ai-je pu trouver la réserve de Rogue attirante érotiquement parlant ? Mystère…
«…Ainsi c'était votre idée…»
Je sursaute en constatant qu'on a parlé dans ma tête. Je me tourne vers Rogue mais il fait semblant de m'ignorer. Au bout d'un instant, il replie lentement sa lettre et se lève : «La prochaine fois, trouvez-vous un endroit plus approprié, tous les deux…
«- Ainsi vous…
«- Je vous l'ai déjà dit : je ne vous juge pas… Et je ne peux que sincèrement vous souhaiter du bonheur… Si Potter m'interroge tout à l'heure, je lui dirai la même chose…
«- Il n'osera jamais.
«- Vraiment ? Vous le sous-estimez, Mr Malefoy…» Je le fixe, surpris : «Je ne porte pas Potter dans mon cœur, continue-t-il, n'importe qui peut s'en rendre compte… mais je ne le méprise pas autant qu'on pourrait le croire. L'un et l'autre, vous avez beaucoup mûri depuis quelques temps, je m'en étais rendu compte… Puissez-vous accepter ce changement et cesser de jouer les rivaux devant vos camarades ! Ce n'est pas très sain, Draco… Ne faites pas les mêmes erreurs que moi…
«- Que voulez-vous… ?»
Prestement, il me prend la longue spatule des mains et me remplace à la potion : «Je vais terminer pour vous, Mr Malefoy… Allez dans la Grande Salle, c'est bientôt l'heure du repas du soir…»
Je regarde son dos légèrement voûté, plus que dubitatif, mais je quitte finalement le laboratoire. Je remonte le couloir des cachots, perdus dans mes pensées… Je n'ai pas faim, je vais me rendre dans ma salle commune, puis je tâcherai de trouver Harry à la fin du repas, avant qu'il n'aille à sa retenue… En chemin, je croise le loup-garou de service, qui me lance un regard courroucé alors qu'il me dépasse rapidement… Je me retourne et je vois Lupin entrer sans cérémonie dans le labo. Je repense à la lettre, au dernier conseil de Rogue… et je ne sais plus quoi en penser !
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Je marche tête basse. Je suis finalement allé dans la Grande Salle, mais Harry n'y était pas. Je me suis senti incapable de manger, et Pansy m'a tenu la jambe pendant tout le repas pour savoir ce qui me tracassait. Quelle idiote ! Plus que n'importe qui, elle a le don de m'irriter : ses minauderies sont insupportables !
Quelqu'un me bouscule, puis je reçois deux autres coups dans les côtes. J'aperçois vaguement ce bon à rien de Dean Thomas et les jumeaux Weasley : ils rigolent avec beaucoup de délicatesse et je suis sûr qu'en plus ils se croient «spirituels» ! Mais je ne réplique pas… Je suis las… Harry n'était pas là, il a définitivement fui… Je suis persuadé qu'il va se contenter de la situation : tout est fini, il peut être heureux ! Je ne le toucherai plus, je ne chercherai plus à l'aimer… Rogue a tord : Harry n'osera jamais rien de lui-même ; il laisse les choses aller et venir… Notre relation va ainsi disparaître et il s'y habituera… Mais pas moi, pas moi…
J'essuie rapidement mes yeux : j'ai eu du mal toute la journée à ne pas pleurer… Tout est fini…
Qu'est-ce… ? Un poids se pend soudain à mon cou et des lèvres se posent avec avidité sur ma bouche ! Douloureusement, je sens la branche d'une lunette s'enfoncer dans ma joue… Harry ! Surpris, je passe ma main dans ses cheveux comme pour m'assurer de sa réalité… et je m'abandonne, comme je ne me suis jamais abandonné… Je le laisse approfondir le baiser et je le serre dans mes bras… L'idée que tout le monde nous regarde me galvanise : j'aimerai que cet instant ne finisse jamais…
Enfin, nous nous regardons et je discerne une lueur complice dans ses yeux… Je ne te sous-estimerai plus, Harry…
Fin
A la prochaine dans une nouvelle histoire ! Merci de m'avoir lue jusqu'ici ! Et n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé ! (évitez juste les tomates trop mûres, ça fait désordre et peu plaisir... ;-p)
